Catégorie : Jean Mabire
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Hommage à Jean Mabire
par Pierre Vial


Le ciel est gris. Jean Mabire (les siens et ses vieux amis l’appelaient Maît’Jean, selon la tradition normande) a rejoint la Grande Armée, à la fin de ce mois de mars qui est dédié au dieu des armées. Il est parti en viking, affrontant avec un serein courage son destin, comme les héros de son compatriote Pierre Corneille.



HOMMAGE à JEAN MABIRE
envoyé par Resistance_Identitaire

J’ai de la difficulté à écrire ces lignes. Comme si elles me confirmaient qu’il n’est plus là. Mais ce qui m’aide, c’est de savoir qu’il est toujours là. Il marche en esprit dans nos rangs, pour utiliser ces mots que nous réservons aux nôtres. A ceux dont l’honneur s’appelle fidélité. Si cette devise s’applique à quelqu’un c’est bien à lui. Lui que j’ai toujours trouvé à mes côtés quand la houle se faisait dure et que le navire peinait à tenir le cap.

Il avait dix-huit ans en 1945. Il avait connu les derniers feux d’un Francisme qui a suscité tant d’enthousiasme, de dévouement, d’engagement. Au sortir d’une guerre qui avait confirmé, après celle de 14-18, le grand suicide de l’Europe, il s’était retrouvé, très naturellement, au coude à coude avec des garçons de son âge, dont certains – parce qu’ils avaient quelques mois de plus que lui – avaient pu vivre de près le crépuscule des dieux. Communauté, jeunesse, solstice, chant : j’ai toujours à portée de main un carnet, daté du 19 juin 1948, sur lequel ces mots figurent et dont la couverture beige porte un dessin représentant un bûcher décoré d’une roue solaire marquée de runes. Pas de signature. Mais les initiés reconnaissent au premier coup d’œil la patte de ce remarquable dessinateur qu’est  Maît’Jean (je préfère décidément utiliser le présent pour parler de lui). Un talent, allié à celui de l’écriture, qu’on retrouve dans Viking, qu’il dirige dès le premier numéro (mars 1949). Ces "Cahiers de la jeunesse des pays normands" annoncent la couleur : "Nous avons découvert dans le vent du Nord la certitude et la réalité. Venus de Paris, venus d’ailleurs, nous retournons vers notre peuple et vers notre sol". L’aventure, exaltante, de Viking, a duré jusqu’en 1958. A cette date il a troqué le stylo contre le PM. Rappelé en Algérie comme lieutenant de réserve, au sein du 12e bataillon de chasseurs alpins qui opère dans les coins les plus pourris de la frontière tunisienne, il commande un commando de chasse. Une expérience marquante, qu’on retrouve dans son livre Les Hors la loi (1968, réédité en 1976 sous le titre Commando de chasse).

Revenu, dans la vie civile, à son métier de journaliste (il était entré en 1956 à La presse de la Manche), il est l’adjoint de Philippe Héduy à L’Esprit Public. C’est dans les colonnes de cette revue composite que je le découvre et la lecture de chacun de ses articles est pour moi fulgurante (au sens étymologique du mot : ses textes portent la foudre, en particulier ceux qui insistent sur la nécessité d’une synthèse entre nationalisme et socialisme). Lorsqu’il rejoint la communauté de camaraderie à laquelle j’appartiens, en devenant rédacteur en chef d’Europe Action, j’exulte. Puis nous vivrons ensemble l’aventure du GRECE.  Et celle d’un mouvement de jeunesse cher à notre cœur. Depuis nous ne nous sommes jamais quittés, vérifiant à chaque occasion, année après année, à quel point, sans même nous consulter, nous réagissions de la même façon. Vis à vis des événements, des grands débats, des hommes que nous avons côtoyés ou croisés. Dès la création de Terre et Peuple, j’ai eu son approbation et son appui. A la Table Ronde de l’automne dernier il était là. Stoïque. Très fatigué (cela se lisait dans ses yeux). Mais il était là. Heureux de dédicacer ses livres à de jeunes lecteurs inconnus, de parler avec les vieux amis. D’être au sein de son clan.

Articles de revues, livres : ils se sont accumulés, au fil du temps, grâce à une vitalité créatrice dont peu d’écrivains sont capables. En écrivant ces lignes j’ai devant moi, sur les rayons de ma bibliothèque, la cohorte impressionnante des livres de Jean. Lui-même disait qu’il ne savait pas très bien combien il en avait fait… Il n’est pas de legs plus précieux que celui-ci. J’aurai l’occasion, dans un article de la revue Terre et Peuple, d’évoquer certains souvenirs personnels concernant la rédaction de certains d’entre eux. Mais tous, à des titres divers, ont eu vocation à faire vibrer des échos chez les âmes ardentes. Combien de jeunes garçons et de jeunes filles ont entendu l’appel de la voix des ancêtres en lisant un livre de Jean ? En cela, mais aussi en bien d’autres façons, il aura été un éveilleur. "Eveilleurs de peuples". C’est lui qui a trouvé cette magnifique formule pour désigner ceux qui, un jour, dans un pays, ont appelé leur peuple à la vie : "Lève-toi et marche !". Par l’écriture, par la parole, par l’action.

Bien sûr nous avons un immense chagrin. Le coup a été rude. Mais nous n’avons pas le droit de nous murer dans notre tristesse. Car là où il est les seuls mots qu’il veut entendre sont : LE COMBAT CONTINUE. Son combat. Notre combat. J’avais un camarade ? Non. J’ai un camarade. Jean Mabire PRESENT.

Pierre VIAL

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