Duerer_-_Ritter_Tod_und_Teufel_Der_Reuther_Copier

 

Le Chevalier, la Mort et le Diable… Admirable estampe gravée par Dürer en 1513, voici donc exactement cinq cents ans. L’artiste génial, qui exécuta par ailleurs sur commande tant d’œuvres édifiantes, fait preuve ici d’une liberté confondante et audacieusement provocatrice…

En ce temps-là, il ne faisait pas bon ironiser sur la Mort et le Diable, terreur des braves gens et des autres, entretenue par ceux qui en tiraient profit. Mais lui, le solitaire Chevalier de Dürer, ironique sourire aux lèvres, il continue de chevaucher, indifférent et calme.

Au personnage du Diable, il n’accorde pas un regard. Pourtant, cet épouvantail est réputé redoutable. Terreur de l’époque, comme le rappellent tant de Danses macabres et de rachats d’Indulgences pour les siècles de purgatoire, le Diable est en embuscade. Il se saisit des trépassés pour les jeter dans les brasiers de l’Enfer. Le Chevalier s’en moque et dédaigne ce spectre que Dürer a voulu ridicule.

La Mort, elle, le Chevalier la connaît. Il sait bien qu’elle est au bout du chemin. Et alors ? Que peut-elle sur lui, malgré son sablier brandit pour rappeler l’écoulement inexorable de la vie ?

Éternisé par l’estampe, le Chevalier vivra à tout jamais dans notre imaginaire au-delà du temps. Solitaire, au pas ferme de son destrier, l’épée au côté, le plus célèbre insoumis de l’art occidental chevauche parmi les bois sauvages et nos pensées vers son destin, sans peur ni imploration. Incarnation d’une figure éternelle en cette partie du monde appelée Europe[1].

L’image du stoïque chevalier m’a souvent accompagné dans mes révoltes. Il est vrai que je suis un cœur rebelle et que je n’ai pas cessé de m’insurger contre la laideur envahissante, contre la bassesse promue en vertu et contre les mensonges élevés au rang de vérités. Je n’ai pas cessé de m’insurger contre ceux qui, sous nos yeux, ont voulu la mort de l’Europe, notre civilisation millénaire, sans laquelle je ne serais rien.

Dominique Venner

Notes

  1. Un insoumis du XXe siècle, l’écrivain Jean Cau, lui a consacré l’un de ses plus beaux essais, Le Chevalier, la Mort et le Diable, publié aux Éditions de la Table Ronde en 1977. Face à la Mort, il imagine ces mots dans la bouche du Chevalier : « J’ai été rêvé et tu ne peux rien contre le rêve des hommes ».
  2. Illustration : “Le Chevalier, la Mort et le Diable, 1513-2013”

 

FaLang translation system by Faboba
 e
 
 
3 fonctions