Catégorie : Terre et Peuple Magazine n°14 – Hiver 2002

LE SEUL ET VRAI COMBAT

Dans son édition du dimanche 1er décembre, le quotidien Le Monde jubile : sa première page, triomphaliste, proclame sur quatre colonnes "Avec Alexandre Dumas, le métissage entre au Panthéon". Et l'éditorial, qui explicite toujours la ligne idéologique du journal, enfonce le clou - pour le lecteur, instituteur "antifasciste" de Romorantin, qui n'aurait pas bien enregistré sa page de catéchisme. L'édito est en effet titré "La France métisse". Le contenu, éloquent, entend donner la vraie signification de l'entrée d'Alexandre Dumas au Panthéon : "Ce ne sont pas seulement les mythes éternels des mousquetaires et de Monte-Cristo qui sont ainsi consacrés comme des chapitres essentiels de notre roman national (...) C'est surtout le mulâtre victime du racisme, le descendant d'esclave, le témoin de la traite, bref le symbole même du métissage de la France qui, avec Alexandre Dumas, est reconnu à la place qui devait être la sienne : au cœur de notre identité nationale (...) Dumas le métis (...) Dumas le symbole des identités plurielles et mêlées".

Le message a le mérite d'être clair. Les masques tombent. Derrière le prêchi-prêcha droitsdel'hommesque, le véritable objectif de nos ennemis est désormais présenté sans faux-semblant, sans précaution langagière (pourquoi se gêner, se disent les tueurs d'identité - puisque nous avons tous les pouvoirs...) : il faut à tout prix que la France cesse, définitivement, d'être le "cher et vieux pays" gaulois qui était encore l'horizon normal de la génération de nos grands-parents. Car un tel pays serait, s'il existait encore, l'insupportable rappel des origines et donc de l'identité européennes. Il doit par conséquent disparaître. L'assassinat est en cours et maintenant bien avancé.

Pour ce noble objectif, gauche et droite sont complices - comme toujours lorsque l'essentiel est en cause. Le Monde et Jean-Pierre Raffarin même combat ? Évidemment - et seuls les naïfs impénitents s'en étonneront. Rappelons une fois de plus (mais la pédagogie est une longue répétition...) que Raffarin avait eu pour premier souci, au lendemain de sa nomination comme premier ministre, de déclarer à France-Inter : "La France est métisse et elle le restera". Et précisait : "Je souhaite nommer des Français d'origine maghrébine ou africaine à des postes symboliques : recteurs d'académies, préfets, commissaires de police". Pour faire bonne mesure, Raffarin ajoutait : "Je souhaite ouvrir les élections municipales aux étrangers résidant en France depuis plusieurs années". Là, sa majorité parlementaire a préféré botter en touche, au cas où les électeurs auraient un sursaut de lucidité (ce qui est pourtant bien peu probable)...

Raffarin serait-il une taupe gauchiste au sein de la droite ? Évidemment non. Il n'est que la caisse de résonance, le petit télégraphiste de Chirac. Rappelez-vous (ce n'est pas si vieux...) : le soir de l'élection présidentielle, "au rendez-vous fixé par l'état-major chiraquien pour célébrer sa victoire avec orchestre et décibels, n'avaient répondu qu'une minuscule poignée de fidèles du président, vite absorbés dans une foule composée de Maghrébins et d'Africains (...) agitant de nombreux drapeaux algériens et marocains" (Le Monde, 7 mai 2002). Bernadette Chirac, tétanisée, regardait cette foule colorée en prenant conscience qu'elle serait prisonnière, désormais, de ces communautés allogènes grâce auxquelles elle pourrait continuer à loger à l’Élysée. . .

La France doit donc, aujourd'hui et plus encore demain, être obligatoirement pluriethnique. Avec, parfois, en illustration de ce message officiel, quelques incohérences. Ainsi, l'équipe "de France" de foot opposée récemment à la Slovénie comportait neuf joueurs d'origine africaine sur onze. On tend là vers un monoethnisme ambigu dans un pays qui se veut officiellement multiethnique...

Mais redevenons sérieux, car nous n'avons pas le coeur à rire devant le paysage humain qu'on nous inflige. Les décombres. C'est l'image qui s'impose. Alors, que faire au milieu des ruines ? D'abord, dire clairement que cette "France métisse" célébrée par Le Monde, Raffarin et bien d'autres n'est pas, n'est plus notre pays. Il nous faut faire sécession. Et puis tendre la main à tous ceux qui, avec nous, ont décidé de se battre pour garder le droit d'être eux-mêmes. Nous ne serons jamais les esclaves dociles de Babylone. Je le dis sans effet de manche, sans goût pour le mélodrame et en ayant bien pesé les mots : plutôt mourir. Avis aux amateurs.

P. VIAL

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