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De Marc Augier à Saint-Loup : Honneur et Fidélité
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- Catégorie : Saint Loup - Marc Augier
L’évolution du comportement politique qui fera du pacifiste Marc Augier un hérétique passé du côté de la bête immonde, et un paria de la société nommé Saint-Loup, révèle les traits d’un homme entier, animé d’un grand sens de l’honneur et de la fidélité. Voici un homme capable de rompre sans un regard derrière lui, avec ses vieilles amitiés trahies ; mais voilà également un soldat appartenant à une armée détruite, et qui pourtant refuse de s’avouer vaincu ; un être qui, dans la défaite, continue de porter à bout de bras les idéaux auxquels il croit.
Marc Augier est né le 19 mars 1908 à Bordeaux dans un milieu social aisé. Ce qui ne l’empêche pas, dès son plus jeune âge, de se passionner pour la nature et l’effort physique : c’est Philippe Conrad qui raconte que « Le fils Augier participe à la vendange au côté des paysans du cru » (1)
Le sport comme mode de vie.
Toute son enfance se déroule dans le port de Bordeaux, ville chargée d’histoire et d’aventures maritimes. Entré au lycée pour ses études secondaires, il en sort le plus souvent possible pour découvrir dans la nature girondine un enseignement plus riche, plus vif et plus exaltant que les mathématiques ou les sciences naturelles! Son baccalauréat en poche en 1926, sa vie s’ouvre alors sur deux perspectives : les études de droit et la moto.
« Tu feras du droit, mon fils! »
« Mais je ferais surtout de la moto, mon père…. »
Et le malheureux paternel doit bien admettre que le jeune homme se passionne plus pour les grosses cylindrées que pour les études…
Marc Augier se lance également dans le journalisme. D’abord à La dépêche du Midi, puis à L’Illustration et à Sciences et Voyages. Après un service militaire morne et ennuyeux pour cet individualiste épris de grands espaces et de liberté, il réalise avec enthousiasme des reportages à l’étranger, dans des conditions particulièrement rudes. En 1931, au Maroc, lors d’un reportage pour L’illustration concernant la pacification du Tafilalet, « il vit sous la tente avec les légionnaires, (...) et pousse à moto à travers le Sahara occidental jusqu’à Colomb-Béchar. Au retour, il visite l’Atlas dont il sillonne les crêtes, juché sur son engin à plus de 4000 mètres d’altitude ». (2)
Après les raids en moto, Marc Augier, fou de nature, d’aventures et de grands espaces découvre la montagne, le ski et l’alpinisme. Les plus belles pages de son œuvre s’esquissent déjà sur les grands sommets des Alpes, car au delà du sport, apparaît un mode de vie. « Au cours des migrations des peuples indo-européens vers les terres arctiques, le ski fut avant tout un instrument de voyage ». « En chaussant les skis de fond au nom d’un idéal nettement réactionnaire, j’ai cherché à laisser derrière moi, dans la neige, des traces nettes menant vers les hauts lieux où toute joie est solidement gagnée par ceux qui s’y aventurent » (3)
L’aventure « Ajiste » : illusions, désillusions…
Marc Augier rejette la sclérose et le conformisme bourgeois, mais ne partage pas les bruyantes activités et l’insolence des Camelots du Roi : la doctrine franco-centrée et germanophobe d’un Maurras lui déplaît souverainement. Dans son reportage intitulé « J’ai vu l’Allemagne », (4) cette vision est limpide comme l’eau d’un torrent. Par ailleurs profondément pacifiste, il ne peut rejoindre la doctrine fasciste très en vogue à cette époque. Marc Augier se retrouve plus naturellement dans la politique du Front Populaire. Proche de Léo Lagrange, membre du gouvernement Blum, une jolie carrière s’offrait à lui, dans les rangs de la SFIO. Les portes des loges s’ouvraient grandes, et il y a fort à parier qu’aucun courageux anonyme ne serait venu lui faire retirer son Goncourt pour La nuit commence au Cap Horn !!! Avec Lagrange, c’est le début de l’aventure « ajiste ». Il dirige alors Le Cri des auberges de jeunesse.
Exalté et pénétré du sens de sa mission, il n’hésite pas à prévenir une rêveuse bourgeoisie amorphe et décadente : « Vous qui avez souri avec bienveillance au spectacle de ces jeunes cohortes s’éloignant de la ville, sac au dos, solidement chaussées, sommairement vêtues et qui donnaient (…) un visage absolument inédit aux routes françaises, pensiez-vous que ce spectacle était non pas le produit d’une fantaisie passagère, mais bel et bien un de ces faits en apparence tout à fait secondaires qui vont modifier toute une civilisation? (…) Ce départ spontané vers les grands espaces, plaines, mers, montagnes, ce recours au moyen de transport élémentaire comme la marche à pied, cet exode de la Cité, c’est la grande réaction du XXe siècle contre les formes d’habitat et de vie perfectionnées devenues à la longue intolérables parce que privées de joie, d’émotions, de richesses naturelles. J’en puise la certitude en moi-même. (…) Il faut que ça change… Cette vie ne peut pas durer » (5)
Le rêve ajiste se terminera pourtant sur une note désenchantée, comme le montre Nouveaux Cathares pour Montségur, (6) où celui qui est devenu Saint-Loup règle ses comptes avec ses anciens camarades des Auberges de Jeunesse.
Voyageant partout en Europe - et même en Allemagne - il noue des contacts avec les responsables des Jeunesses hitlériennes, et avec grand plaisir, découvre ce pays national socialiste, régime pour lequel il n’éprouve cependant aucune sympathie.
Une nouvelle vision de l’Allemagne
C’est lors d’un voyage à New York, pour le Congrès mondial de la jeunesse de 1938, que s’amorce la transformation politique de Marc Augier. Stupéfait par l’hostilité déclarée à l’égard de l’Allemagne et des accusations mensongères portées contre elle et ses alliés, il décide de prendre ses distances avec la SFIO. Si l’espoir d’un Goncourt s’éloigne, l’assurance d’une vie libre et détachée des contingences matérielles, des compromissions et des servitudes s’annonce à grands pas!
L’élément déclencheur pour le futur Saint Loup reste sa rencontre avec Alphonse de Chateaubriand. (7) L’influence de l’auteur de La gerbe des forces, modifie son point de vue sur l’Allemagne de façon radicale. Voyageant en Grèce lorsque la guerre éclate, ce pacifiste pourrait se tenir à l’écart du conflit. Il choisit pourtant de rentrer en France. Après la défaite, Marc Augier se lance dans le journalisme politique. Avec son vieux maître à penser, il crée La Gerbe, journal évidemment germanophile, national-socialiste et favorable au collaborationnisme. Il participe au Groupe Collaboration, dont il dirige la branche jeunesse : Les Jeunes de l’Europe Nouvelle.
A nouveau déçu par la politique et ses intrigues, il quitte Paris pour répondre à l’appel de la montagne, et rencontre les membres des Chantiers de jeunesse, dont il s’inspirera pour Face Nord. « Une minute de paix, c’est toujours bon à prendre… » Ce répit ne pouvait cependant pas durer, et les événements ont tôt fait de tirer les hommes de leurs retraites, pour les lancer avec violence dans le chaos du conflit civilisationnel qui commence entre les deux géants européens : en 1941, l’Allemagne attaque l’URSS.
Marc Augier, en homme d’action qui se respecte, s’engage immédiatement dans la LVF. Il veut tenir sa place dans la grande geste de la chevalerie motorisée qui déferle sur l’Union Soviétique. « Le combat est là-bas… Et non pas aux terrasses des cafés parisiens »
La croisade anti-bolchevique de la chevalerie motorisée
S’il participe à cette épopée dont il sera bientôt le chantre, ce n’est pas par amour immodéré de l’Allemagne! Il est conscient qu’elle n’en aurait que faire et que « notre amour la choquerait comme une manifestation impudique de notre absence de patriotisme »(8) Il suffit de relire ses deux « causeries » données en mai et octobre 1941 sous l’égide du groupe Collaboration. Paradoxalement, sa motivation première, reste encore et toujours la paix. La paix pour « un peuple exsangue comme le nôtre, mutilé dans sa chair en 1914, mutilé dans son équilibre racial par les apports d’étrangers ». (9) La seconde raison de son engagement est en relation directe avec son anti-communisme devenu virulent. Comme pour une majorité de personnes à l’époque, l’heure du choix est venue entre le National-socialisme et le Communisme. Or, le culte matérialiste du marxisme ne peut séduire un homme tel que lui ; non plus que le collectivisme ou le déterminisme historique ne peuvent convaincre cet individualiste nietzschéen.
Son engagement s’explique aussi par la foi en un vrai socialisme, que seule peut encore apporter l’Allemagne : « Pendant que nous nous complaisions dans un verbalisme égalitaire, l’Allemagne prenait la route du socialisme de l’action » (10) Enfin, « Hitler a promis une paix révolutionnaire » pour la grande Europe socialiste dont rêve Marc Augier. « Nous devons donc être présents à cette paix, associés dans cette paix. » Et le seul moyen est bien entendu, « de participer au combat qui seul nous donnera des droits ». (11) Dans la croisade européenne contre le bolchevisme, c’est à la chevalerie de tailler la part des futurs dirigeants de l’Europe Nouvelle. On notera que le général à titre provisoire De Gaulle, réfugié en Angleterre, est animé de la même idée, mais dans le camp opposé! A la différence près que Marc Augier mettra sa peau au bout de ses idées, comme le dît un jour, un autre adversaire de De Gaulle…
Dans son ouvrage Les Partisans, le sergent Augier raconte en effet ses propres faits d’armes. Correspondant de guerre pour La Gerbe, il combat le bolchevisme en participant à des « commandos de chasse » contre les partisans russes. Après plusieurs opérations, c’est la blessure et le rapatriement ; pour lui, la guerre sur le front russe est terminée. Qu’à cela ne tienne, il servira autrement! Rapidement, il prend en charge la conception du Combattant européen, organe de la LVF. Il dirige ensuite Devenir, lorsque la LVF est versée dans la SS pour devenir la Division Charlemagne.
Le crépuscule des Dieux d’Augier « der wolff »
A nouveau, un livre sert de support à ces événements : Götterdammerung, ou rencontre avec la bête. Cet ouvrage, c’est l’Allemagne de la fin de la guerre, ses villes atrocement bombardées, les milliers de cadavres, les ruines, l’horreur des bombes au phosphore qui dévorent bâtiments comme êtres humains, transformant le tout en un horrible magma… Mais c’est surtout le parcours initiatique de Marc Augier, qui rejoint le sanctuaire de l’Ordre Noir à Hildesheim. C’est aussi le nouvel initié qui assiste au Crépuscule des Dieux, fuyant à travers l’Europe à feu et à sang, assistant à la chute de l’Italie mussolinienne, avant de rentrer clandestinement à Paris. Condamné à mort par contumace, sans argent, sans papiers, sans logement, et sans épouse puisqu’il a divorcé, caché par des moines rue de la Source, Marc Augier achève son roman Face Nord, et devient Saint-Loup (12). Edité chez Arthaud, il obtient une avance sur ses droits d’auteur et achète un aller simple pour Rio de Janeiro, où il trouvera refuge et protection contre la Bête Immonde.
La littérature comme nouveau champs de bataille
La guerre terminée, l’exilé finit par rentrer en France en 1950, où il recommence à écrire. Pour lui, le combat continue. Après la découverte de son identité réelle, Saint Loup fait scandale dans les milieux mondains du parti communiste et chez les conformistes de tous bords : en 1963, sort un ouvrage intitulé Les Volontaires. Pour la première fois, un auteur raconte la geste des Waffen SS français sans y aller de son commentaire réprobateur écrit du bout d’une plume effarouchée… Le succès est immense auprès des vrais lecteurs, c’est à dire du public. Suivent rapidement deux autres tomes, achevant la trilogie de cette épopée moderne : Les Hérétiques et Les Nostalgiques.
Outre la valeur historique qu’offrent ces documents, ainsi que l’assurance de passer d’excellents moments en dévorant cette littérature guerrière absolument palpitante, cette trilogie se charge d’un sens politique, philosophique et peut-être même religieux! C’est le message d’un témoin, d’un porteur de lumière qui transmet le flambeau de la fidélité aux générations nouvelles. C’est la perpétuation des idéaux politiques de cet homme à travers ses livres ; c’est aussi le souvenir d’une lutte qui doit exalter les esprits et inciter aux combats futurs, ainsi que les concevaient les Celtes lorsqu’ils racontaient les exploits de Cuchulainn à leurs enfants. Ces livres portent l’espoir d’un renouveau, d’un retour de la Lumière. Il est donc véritablement possible d’intégrer cette histoire aux légendes indo-européennes à raconter dans les temps futurs. La trilogie épique se charge alors d’un sens véritablement pédagogique, qu’on approuve ou non son contenu. L’auteur estime que rien n’est perdu, et se réfère à la théorie nietzschéenne de « la plus longue mémoire » et au « soleil invaincu » de nos ancêtres païens.
Si cet attachement à l’honneur de la parole donnée et à la fidélité dans l’adversité constitue à lui seul un grand exemple, là ne réside pas seulement le legs de Saint-Loup aux jeunes générations.
Le goût de la peau de l’aurochs et le retour à la vie
Un adolescent citadin ne peut que s’émerveiller, lorsque découvrant la nature, il finit par oser se mesurer à elle, et sent monter à sa bouche, puis dans toutes les fibres de son corps, le goût de la peau de l’aurochs! La montagne délivre le plaisir absolument indescriptible de l’effort physique complet. Quelle joie devons-nous à Saint Loup d’avoir découvert ou redécouvert quelques secrets des hautes altitudes. Quel plaisir de partir au devant des cimes, de les chevaucher en se découvrant de nouvelles peurs, de nouvelles audaces!
Cet amour de l’effort et de la nature se retrouve dans des ouvrages comme La montagne, (la mer, le ciel) n’a pas voulu, Les voiliers fantômes d’Hitler, Nouveaux Cathares pour Montségur, La peau de l’aurochs et d’autres encore, tant ces thèmes sont récurrents dans l’œuvre de cet aède nietzschéen. Dans La montagne n’a pas voulu, Saint-Loup exprime avec force et sensibilité son amour de la montagne. « Dans le petit matin d’octobre, dansait une allégresse irrésistible. (…) La montagne s’abandonnait à tous les rêves. Elle sortait du cycle des orages et des grandes fêtes du soleil ; elle n’était pas encore entrée dans sa renaissance hivernale. Elle était accomplie et savoureuse comme une femme de trente ans. (…)Pas un être vivant sur les glaciers. J’étais seul pour cueillir le fruit d’automne. Les foules ne savent pas… Seuls peuvent se donner rendez-vous au point sublime qui précède les équinoxes ceux qui ont su s’affranchir des servitudes de la civilisation.
J’avais pleine conscience de l’égoïsme monstrueux qui me poussait à prendre possession des immensités solitaires, et j’en jouissais tout en me hâtant sur la rive du glacier. L’air était âpre comme l’odeur d’un coup de fusil. La lumière tombait sur les épaules du Chardonet et de la Verte en longues chevelures blondes presque décolorées. Le dessin des arêtes sur le ciel avait des cruautés d’eau-forte… Ah, l’homme n’est qu’un tas de boue! S’il avait une âme, il choisirait une de ces journées d’automne bouleversante pour s’en aller mourir d’amour dans la montagne, le plus haut possible ».
Dans Face Nord, le goût du dépassement de soi est totalement magnifié : « Soudain, se produisit une chose étonnante. Guido la Meslée poussa un cri tout à fait inhumain. Il escalada le socle de neige, engagea la pioche du piolet dans la fissure, s’enleva à la force du poignet… Ses jambes battaient dans le vide. Il ne se maintenait plus que d’une main au manche de l’outil. De l’autre, il fouillait la neige, à la recherche d’une prise plus élevée. Il sentait ses forces décuplées. Une volonté supérieure commandait à ses gestes. Son âme éclatait, sous la pression d’une joie dont la tension suivait le flux et le reflux de son sang. Tantôt recueillie, pleine comme un chant d’orgue sous des voûtes, tantôt dissipatrice et furieuse, comme celle du soudard qui s’apprête à piller et à violer dans la cité conquise… Tout en multipliant les efforts pour se rétablir, Guido sentait que cette joie, découverte à l’extrême pointe du risque, ouvrait des perspectives nouvelles dans sa vie. Sans elle, il ne pouvait plus, désormais, vivre sa vie… »
Saint Loup guide le lecteur sur le chemin de cette « grande santé qui a pour nom paganisme », comme le dit Pierre Vial, car il donne du sens à l’action physique. Au delà du goût de l’effort retrouvé, celui, délicieux et puissant de la peau de l’aurochs, il y a les retrouvailles avec les antiques racines de nos ancêtres.
Le combat pour l’Europe Blanche aux cent drapeaux
Voici d’ailleurs le domaine où Saint-Loup prend toute son importance : celui de l’identité! Cet auteur peut aider un jeune Européen à comprendre qui il est vraiment, et surtout, qui il n’est pas! La lecture des ouvrages du cycle des patries charnelles est édifiante pour tout européen en quête d’identité. A l’heure de la mondialisation et de la désuétude progressive de l’état-nation jacobin, il est bon de retrouver nos racines. Avec Saint-Loup, nous redécouvrons que nous sommes le peuple des bois et des forêts, le peuple des mers et de l’océan ; celui des pierres levées, des bâtisseurs de cathédrales et des découvreurs de terres. Nos ancêtres étaient des Celtes, des Germains, des Latins, des Slaves, des Scandinaves. Leurs vagues irrépressibles ont déferlé sur le monde et l’ont soumis à leur volonté prométhéenne. Jamais de musée chez eux, car leur fier regard clair et brillant était tourné vers l’avenir et l’action. Pas de folklore non plus, mais des traditions vivantes et en mouvement, car comme le dit Saint-Loup « le folklore est la honte d’une ethnie encore vivante et qui n’ose plus s’affirmer souveraine ».
A l’intérieur de ces peuples, des particularismes régionaux fondés sur l’ethnie, la langue et de solides traditions enracinées en profondeur. L’historien objectif doit bien noter que jusqu’en 1789, ces particularismes étaient préservés grâce à la monarchie, par une législation respectueuse des différences et sagement décentralisatrice. Aujourd’hui, une interprétation outrancière et tendancieuse du christianisme alliée au messianisme des Droits de l’Homme, véritable religion nouvelle, tente de détruire les derniers vestiges de l’identité.
Les patries charnelles
Contre le cosmopolitisme et le métissage généralisé, Saint-Loup propose cette forme d’ethno-différencialisme qu’est le concept de « patrie charnelle » : une communauté ethniquement homogène sur un territoire délimité par l’histoire, la langue et les coutumes. Cette notion politique permet, bien mieux que l’état-nation ou le concept universaliste de « citoyen du monde » de préserver les différences, ou pour mieux dire, les identités. La patrie charnelle est le rempart à l’impérialisme et à l’uniformisation, fille perverse du multiculturalisme ultra-libéral. Au delà de ces idéologies dépersonnalisantes, la patrie charnelle correspond à une réalité tangible, reposant sur un fondement biologique et territorial : la terre et les morts, pour reprendre Barrés. Selon Saint-Loup, seule cette base pourrait permettre de dépasser l’Etat-nation pour accéder au stade de l’Europe unifiée : il s’agit là de sa principale conviction, créer l’Europe des patries charnelles, l’Europe aux cent drapeaux dont parle également Yann Fouéré. Pour lui, seule une Fédération de régions peut réaliser l’Union Identitaire Européenne sans danger de perte irrémédiable d’un enracinement multiséculaire. Ce concept basé sur le fédéralisme biologique et écologique au sens véritable du terme (le refus d’une mixité contre-nature dans le monde animal, et l’existence naturelle de frontières pour chaque espèce), permet enfin d’accéder au véritable socialisme. Celui ci ne peut exister que dans une circonscription réduite à la communauté ethnique, car il se pare dans cette circonstance d’une solidarité fondée sur le réel, et non sur des abstractions : c’est le simplissime mais merveilleux truisme de Poujade : « j’aime mieux mes filles que mes cousines, mes cousines que mes voisines et mes voisines que des étrangers… »
Dépassant les idéaux universalistes, le socialisme identitaire fait appel à une volonté commune de se préserver et de se soutenir. C’est un facteur de renforcement de cette cellule de base de la future Fédération européenne. Mais par dessus tout, sans le retour aux patries charnelles, impossible de lutter contre les assauts du métissage et du cosmopolitisme. Voici, aujourd’hui, pour les jeunes générations, le défi lancé par Saint-Loup : « La jeunesse française qui, hier, vivait dans les ténèbres, à laquelle manquait un idéal, qui avait perdu la foi dans les destinées de la patrie, sera éblouie demain par la tâche qui l’attend : refaire l’Europe ». Une seule question se pose : saurons-nous, nous mêmes et nos descendants, reconquérir le Graal, et redevenir les « hommes-dieux » des légendes celtiques et païennes?
Serons-nous capables de préserver notre identité? Saurons-nous, par le soin rigoureux de nos unions et celles de nos descendants, méthodiquement recréer une génération « biologiquement supérieure » nous permettant enfin de retrouver l’authentique Graal selon Saint-Loup? C’est là tout l’enjeu d’un ouvrage comme « Plus de pardon pour les Bretons », où une fée vient redonner un sang neuf aux Elus.
Mais face aux dangers et aux catastrophes montantes, peut-être devrons-nous plutôt nous inspirer d’ouvrages tels que « La peau de l’aurochs » ou « La république du Mont-Blanc ». Ces livres durs et héroïques montrent d’une certaine façon, la route à suivre si la situation devait empirer. Face au règne du matérialisme athée et destructeur d’identité, puis face à l’invasion du sol par des masses allogènes et au danger de métissage généralisé, les populations doivent choisir entre la collaboration entraînant la perte de leurs particularités ethniques et culturelles, ou l’abandon total de leurs biens, pour tout reconstruire dans le cadre d’une nouvelle société basée sur l’effort, le dépassement de soi, le retour à une vie naturelle et à une spiritualité païenne. Saint-Loup définit ainsi pour ce dernier clan les éléments subjectifs d’auto-identification, permettant à cette civilisation naissante de trouver une nouvelle manière et une nouvelle raison d’exister. Celle-ci diffère totalement et même s’oppose à l’ancien mode de vie. Désormais, ainsi que pourrait l’exprimer Julien Freund dans sa vision « ami/ennemi », c’est « Nous » contre « Eux »!
Dans cette société ethniquement homogène et reposant sur le culte de la terre et des morts, le socialisme authentique, le « socialisme de l’action » peut enfin se développer. Voici donc réunies toutes les valeurs fondamentales permettant de répondre aux questions ontologiques posées à tous les membres d’une civilisation : d’où venons-nous? Qui sommes-nous? Où allons-nous et pourquoi? Dans cette société antimatérialiste, Saint-Loup présente des personnages débarrassés de toutes les idoles débilitantes et des servitudes matérielles, des hommes libres et attachés à leur territoire devant lesquels se profile le vrai sens de la vie : préserver et perpétuer sa lignée ; transmettre un héritage et un patrimoine ; se préparer au mieux à affronter la mort et à continuer la longue marche, les yeux tournés vers le soleil.
Résistance et Reconquête!
Aujourd’hui Saint-Loup s’est retiré au Walhalla, mais sa lumière reste invaincue. De sa personnalité et de son œuvre riche, dure et généreuse se tirent de grandes leçons et la persistance des espoirs pour l’avenir.
Honneur et Fidélité, Dépassement de soi et goût de l’aventure, enracinement et identité constituent les grands enseignements de Saint-Loup.
Quant aux espérances, elles résident dans la certitude d’une Histoire cyclique et de l’éternel retour de la puissance, pourvu qu’entrés dans l’hiver de leur civilisation, les Européens continuent de combattre et d’espérer, car rappelons-nous « qu’il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre ».
Saint-Loup nous enseigne aussi que le mythe de l’Impérialisme bienveillant de la social-démocratie rousseauiste (américaine aujourd’hui, on ne sait trop quoi demain) doit être brisé, comme n’importe quelle autre idole ; qu’ainsi que le dit Thomas Hobbes, « homo homine lupus » : l’homme est un loup pour l’homme ; et l’on pourra dire ou faire tout ce que l’on veut pour le nier, au delà de l’économie comme moteur de l’histoire, il y a le choc des civilisations, qui ne peuvent cohabiter pacifiquement bien longtemps… La base d’une civilisation repose sur un socle ethnique, qu’on le veuille ou non!
Saint-Loup écrivait pour la jeunesse européenne. Ses écrits peuvent bien faire s’étouffer de stupeur et de rage les sectateurs du mondialisme et du multiracialisme, outrer SOS racisme et la LICRA, peu importe! Après tout, la jeunesse européenne, c’est nous!
Jean-Jacques Matringhem
(14 janvier 2008)
notes:
1. Philippe Conrad, Rencontre avec Saint-Loup, « De Marc Augier à Saint-Loup, l’itinéraire d’un hérétique, Les Amis de Saint-Loup, Paris, 1991.
2. Ibid
3. Saint-Loup, Solstice en Laponie,
4. Saint-Loup, J’ai vu l’Allemagne, Editions du Flambeau, 1991.
5. Ibid.
6. Saint-Loup, Nouveaux Cathares pour Montségur, Editions Avalon, 1986.
7. J’ai vu l’Allemagne, op. Cit.
8. Ibid.
9. Ibid.
10. Ibid.
11. Ibid.
12. Ce refuge chez des moines, et ce pseudonyme chrétien, même si l’on sait pourquoi il a été choisi, peuvent laisser supposer que Marc Augier n’était pas aussi anti-chrétien que certains veulent bien le dire. On imagine sans peine le mépris qu’il devait nourrir pour les Gaillot et autres curés de gauche. Mais à voir sa respectueuse description de Monseigneur Mayol de Luppé, il peut sembler que Saint-Loup pouvait s’entendre avec des personnes cultivant ce que Drieu la Rochelle nommait « le christianisme viril du Moyen-Age ».
Suède. Poignardé par un clandestin soudanais en tentant de sauver une jeune fille d’un viol
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Le 11 mai 2020, Tommie Lindh, 19 ans, tombait sous les coups de couteau d’un soudanais de 22 ans en tentant d’empêcher que ce dernier ne viole une adolescente de 14 ans, à Härnösand.
Tommie Lindh était un militant nationaliste pour le parti “Alternative for Sweden” (Alternativ för Sverige). Il était donc parfaitement conscient du danger que pose l’immigration extra-européenne pour son pays, et pour l’Occident en général.
Il a été poignardé par un clandestin soudanais alors qu’il tentait de s’interposer pour défendre une jeune fille de 14 ans que l’individu de 22 ans, Abubaker Mohamed, essayait de violer.
Emmené à l’hôpital, il a finalement succombé à ses blessures. Lors d’une audience au tribunal, le criminel a nié les crimes dont il est accusé à savoir meurtre, viol, menaces illégales graves et sévices graves. Le procureur a par ailleurs fait savoir que le clandestin est également soupçonné d’avoir commis deux viols, l’un grave et l’autre dit de “degré normal” contre une victime le même dimanche où le meurtre a été commis.
Des nationalistes du monde entier ont rendu hommage à leur camarade Tommie Lindh : en Pologne, en Finlande, en Hongrie mais aussi en France à Paris et Toulouse notamment et même jusqu’aux Etats-Unis.
L’immigration en Suède, et le remplacement progressif de la population de souche européenne.
C’est à partir des années 70 80 que l’immigration extra-occidentale se développe en Suède. La part dans la population d’immigrés occidentaux se fixe en effet entre 5,5 et 6% dès 1970 pour ne quasiment plus en bouger.
La part d’immigrés extra-occidentaux passe en revanche d’à peine 1% en 1970 à 10, 5% en 2015. Notons que le statut d’ « immigré » ne s’obtient en Suède qu’à certaines conditions assez exigeantes et longues. Cette part ne reflète donc pas les demandeurs d’asile ou les réfugiés. Parmi ces immigrés extra-européens, le taux de retour au pays natal est de 4% à peine.
Selon l’office Suédois des statistiques, la population suédoise de 2017 était composée à 18, 5% de personnes nées à l’étranger. Si on ajoute la seconde génération d’immigrés nés en Suède de 2 parents étrangers, c’est 24,1% de la population suédoise soit 2,4 millions d’habitants qui sont totalisés.
Le journal l’Etudiant libre s’est d’ailleurs intéressé au profil de ces immigrés qui changent le visage de ce pays scandinave (certains balades en périphérie de Stockholm ressemblent plus au film Hôtel Rwanda qu’à la série Vikings…)
La population afghane n’était pas représentée en 1990. En 2017 on dénombre 43 991 ressortissants. Les somaliens passent de 100 en 1980 à 66 369 en 2017.
De 8.236 Afghans accueillis en 2018, on notera d’ailleurs que 6.120 sont des hommes et seulement 2.116 des femmes.
La population africaine dans son ensemble passe de 79 en 1970 à 207.886 en 2017, et la population asiatique de 87 à 697.117.
La conclusion ira à l’auteur du blog Jereinforme, auteur lui aussi d’un papier sur cette affaire :
Si la ville de Malmö est désormais surnommée “la capitale du viol”, ce n’est évidemment pas en raison d’une quelconque résurgence d’une “culture du viol” occidentale fantasmée, mais simplement parce que les dirigeants suédois ont importé chez eux des dizaines de milliers d’extra-européens.
La majorité des dirigeants européens depuis 50 ans a fait de même. Ils seront retenus comme des traîtres à leur pays et à leur peuple, tandis qu’on se souviendra de Tommie Lindh comme d’un martyr.
Sources : Breizh-info.com
NE JAMAIS OUBLIER !
L’identité européenne – D. Venner
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- Catégorie : Dominique Venner
L'européanité est attestée par l'histoire et le caractère transnational des grands faits de culture.
Au-delà d'un art rupestre spécifique à toute l'Europe voici déjà 30.000 ans, au-delà des pierres levées et des grands poèmes fondateurs, ceux des Hellènes, des Germains ou des Celtes, il n'y a pas une seule grande création collective qui, ayant été vécue par l'un des peuples de l'ancien espace carolingien, n'a pas été vécue également par tous les autres. Tout grand mouvement né dans un pays d'Europe a trouvé aussitôt son équivalent chez les peuples frères et nulle part ailleurs. (...)
Comme tous les peuples unis par une même culture, les Européens sont les dépositaires d'une très ancienne tradition, mais ils ne le savent pas. La perception leur en a toujours été refusée. En dehors des poèmes homériques, ils n'ont pas d'écriture sainte, bien que la matière en soit offerte par leurs légendes, leur littérature épique et la philosophie antique. (...)
Tout grand peuple a une histoire sacrée qui révèle ses valeurs propres, celles qui donnent un sens à la vie de chacun des siens. Mais la longue histoire des Européens ne leur a jamais été contée. Elle n'a jamais été montrée ni perçue pour ce qu'elle est, un flux continu, comme si un même être, porteur des mêmes significations, avait traversé le temps (...).
L'Europe n'est pas née des traités de la fin du XXe siècle. Elle est issue de peuples frères qui, entre la Baltique et l'Egée, sur quelques milliers d'année, donnèrent naissance à une communauté de culture sans égal. L'Europe peut donc se définir comme une tradition très ancienne, tirant sa richesse et son unicité de ses peuples constitutifs et de leur héritage spirituel. (...)
[On doit constater] la vigoureuse unité de culture des Européens de l'âge du bronze, de la Baltique à l'Egée, de la Cornouaille à la Volga, voici quatre ou cinq mille ans. [Il s'agit de] l'une de nos civilisations premières, [avec] ses dieux solaires, ses déesses-mères, ses héros invaincus, ses légers chars de guerre, les trésors somptueux de ses palais, ses longues barques audacieuses. (...) Découvertes sous un tumulus du Danemark ou dans une tombe de Mycènes, les épées semblaient toutes sortir d'un même moule, affichant l'unité esthétique d'un même monde.
Aussi antique soit-elle, cette culture du bronze n'est pas la première en Europe. Elle a été précédée sur notre espace géographique par une autre culture beaucoup plus ancienne encore, celle des gravures et peintures «préhistoriques», enfantées par des peuples qui sont nos ancêtres les plus éloignés dans le temps.
Illustrée par le bestiaire magique de la grotte Chauvet, au bord de la vallée de l'Ardèche, cette première grande culture européenne a plus de 30.000 ans. Ses représentations pariétales les plus nombreuses et les plus étourdissantes de beauté sont localisées du Rhône aux monts cantabriques, mais on en voit les manifestations partout, en Allemagne, en Bohême, jusque dans l'Oural avec les peintures de la grotte de Kapova. Par son ancienneté et son homogénéité dans la peinture ou les gravures de toute sorte, cet art animalier d'inspiration religieuse est spécifique à l'Europe et à elle seule. La production d'objets de même facture esthétique, armes en silex taillé, propulseurs de harpons en os ou en bois de cervidés gravés, s'étend, elle aussi, des Pyrénées à l'Oural, sur ce qui sera l'aire originelle des futurs Indo-Européens.
L'étonnant dans cette première culture européenne, ce n'est pas seulement son étendue spatiale, mais aussi sa durée, au moins deux cent siècles, une éternité. Elle s'est manifestée d'environ 32.000 à 12.000 ans avant notre siècle, et ne s'est éteinte que voici une douzaine de milliers d'années.
Nous qui sommes des hommes «historiques», imprégnés jusqu'à la moelle par la constance et la rapidité des changements au cours des quatre derniers millénaires, il nous est difficile d'admettre que nos très lointains ancêtres aient pu traverser des millénaires sans connaître apparemment de changements notables. Quinze mille ans au bas mot séparent les dessins de la grotte Chauvet et les fresques géantes de Lascaux. Or, ce que représentent ces figurations est, pour l'essentiel, analogue. Le réalisme puissant de leurs artistes est apparenté. Certes, on peut relever des différences de style ou de choix dans les représentations animales. Mais les analogies sont beaucoup plus évidentes que les différences. Cela signifie que les peuples frères se sont maintenus sur place pendant des millénaires, reproduisant la même culture artistique, elle-même reflet direct d'une certaine âme collective, d'une même vision du monde, d'une même relation à la nature, d'une même conscience religieuse. (...)
Si l'on en croit les paléontologues, ces peuples sont frères de l'homme de Cro-Magnon, lequel ne présente aucune différence morphologique notable avec l'Européen actuel. Même si les informations manquent pour rattacher précisément les chasseurs de cette époque à aucun groupe présent, une partie de leur descendance s'est vraisemblablement maintenue en Europe après la fin de la période glaciaire, formant le substrat de son peuplement. (...)
Les peuples de l'ancienne Europe étaient réfractaires à l'écriture, bien que celle-ci leur fut connue, comme en témoignent les signes logographiques de la préhistoire, ancêtres sans doute de l'écriture runique. Plusieurs siècles après Homère, en Gaule et dans les îles Britanniques, les druides refusaient encore de transcrire par écrit leur enseignement qui, de ce fait, est perdu. Les Grecs avaient, eux aussi, privilégié l'oralité et divinisé la Mémoire. (...) Jusqu'à Homère, la mémoire avait été mythique et nullement historique. Les Grecs avaient donc perdu le souvenir de leurs origines et de leur histoire ancienne, celle qui avait précédé l'arrivée de leurs ancêtres sur les rives de l'Egée. Ils en avaient cependant conservé le souvenir mythique, celui d'une origine septentrionale associée à la légende des Hyperboréens. (...)
Pourquoi appelle-t-on «indo-européenne», et pas simplement «européenne», la famille des langues parlées aujourd'hui presque partout en Europe ? Tout simplement parce que cette famille de langues s'étendait jadis de la Cornouaille au Penjab, sur d'immenses distances correspondant à l'aire d'expansion des différents locuteurs. (...) Le fait indo-européen est d'abord d'ordre linguistique (...)
Chez tous les peuples indo-européens, que l'on devrait plutôt appeler «boréens», la société aristocratique élargie, celle des hommes libres, à la fois guerriers et propriétaires du sol, anticipe sur ce que sera la cité grecque à partir du VIe siècle avant notre ère. On en voit l'expression dans l'assemblée des guerriers de l'Iliade, très semblable au Thing germanique et scandinave décrit par Snorri Sturluson. Les Celtes participent du même ordre politique, dont témoignera plus tard la Table Ronde. En revanche, nulle part dans le monde européen on ne verra des roi-prêtres à la tête de castes sacerdotales de type babylonien ou égyptien. A l'époque médiévale et classique les monarchies et les noblesses européennes continueront de résister aux prétentions théocratiques du Saint-Siège, tout en maintenant l'équilibre entre les trois ordres.
(...) Depuis la «révolution» du carbone 14, on a fortement reculé dans le temps, au-delà du Ve millénaire, l'époque du dernier habitat commun des Indo-Européens. (...) A une époque très ancienne, remontant vraisemblablement à plus de 10.000 ans, quelque part dans le vaste espace entre Rhin et Volga, au sein d'une population spécifique et nécessairement homogène, s'est cristallisée la langue que les linguistes appellent pré-indo-européenne (...) l'analyse linguistique permet de penser qu'une première dispersion s'est produite vers le Ve millénaire, par la migration de peuples indo-européens vers le sud-est, l'Asie Mineure et au-delà. (...) La plupart de ces peuples pensaient que leur berceau primordial se trouvait dans un «nord» mythique et imprécis. L'Inde védique, l'Iran ancien, la Grèce, le monde celtique et germanique ont conservé le souvenir légendaire d'un habitat nordique désigné comme les «Iles au nord du monde», le «Pays des dieux» ou le «pays des Hyperboréens». (...)
On ne saura jamais avec certitude où, quand et comment s'est produite l'ethnogenèse des Indo-Européens, que l'on devrait plutôt appeler Boréens afin d'éviter une confusion entre la langue et l'ethnie dont elle est bien entendu l'une des manifestations essentielles. Une langue voyage avec ses locuteurs, elle peut conquérir aussi des populations sans rapport précis avec le peuple originel ... C'est pourquoi la distinction entre langues indo-européennes et peuples boréens paraît souhaitable.
Dès la préhistoire ou la très haute Antiquité, les Boréens, porteurs initiaux des langues indo-européennes, se sont imposés sur de nouveaux territoires à des populations qui n'avaient pas exactement la même origine, ne sacrifiaient pas aux mêmes dieux ni n'avaient la même vision du monde. Les mythes grecs, latins, celtes et germaniques des guerres de fondation rappellent les conquêtes anciennes de nouveaux territoires, mais aussi, comme le pense Jean Haudry, la projection mythique d'une préoccupation de concorde civile.
Le souvenir des guerres de fondation se décrypte dans la légende historisée de Rome et l'enlèvement des Sabines. Elle s'exprime aussi dans l'Edda scandinave qui décrit deux races divines (...) Le même schéma peut se lire dans la théogonie grecque. (...) Voilà ce qui est en gestation dès le IIIe millénaire, époque du bronze européen, beaucoup mieux connue que les précédentes en raison d'une grande richesse archéologique et des réminiscences conservées par les poèmes homériques. Partout en Europe, de la Baltique à l'Egée, de l'Atlantique à la Caspienne, on voit s'affirmer la nouvelle religion solaire et de nouvelles valeurs, l'héroïsme tragique devant le Destin, la souffrance et la mort, l'individualité et la verticalité du héros opposées à l'horizontalité indistincte de la multitude. La vaillance, vertu masculine essentielle, est récompensée par l'éternisation des meilleurs, très présente dans l'Edda, et la féminité est reconnue, respectée et admirée. Simultanément, on voit s'établir des royautés féodales reposant sur des aristocraties guerrières et terriennes. C'est alors que se façonne la physionomie spirituelle qui restera celle de l'Europe.
Ce texte est extrait du livre de Dominique Venner, Histoire et tradition des Européens, éditions du Rocher 2002.
Le titre de cette sélection est éditorial.
Note : Le nom de «Boréens» (ou de «race boréenne») semble avoir été utilisé pour la première fois par l'ésotériste Fabre d'Olivet dans son Histoire philosophique du genre humain, publiée en 1822.
Montcornet : l’Histoire… et la légende
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Macron essaye de se rattraper aux branches et pour cela tout lui est bon.
Illustration : le numéro qu’il a fait à Montcornet, le 17 mai, pour célébrer la « victoire » exemplaire remportée par un certain colonel de Gaulle, commandant la 4e division cuirassée, la plus importante, en 1940, des grandes unités blindées de l’armée française (364 chars).
Il était censé bloquer l’offensive allemande. En fait, sur 88 chars français engagés, 23 ont été détruits par le feu antichar allemand et les blindés du général Ewald von Kleist ont continué leur progression vers Cambrai et Saint-Quentin avant de s’arrêter… sur ordre d’Hitler.
De Gaulle est toujours resté très discret sur l’épisode de Montcornet mais ses thuriféraires se chargèrent de bâtir sa légende. Les historiens (les vrais) savent ce qu’il en est mais ont choisi pour la plupart de rester prudemment discrets. On sait que le courage n’est pas la vertu principale de la plupart des universitaires…
Pierre VIAL
La Vierge occultée L'âge du bronze, Celtes et Gallo-Romains
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II est curieux de constater, du début de l'âge du bronze à la troisième époque celtique dite de La Tène, c'est-à-dire pendant mille six cents ou mille huit cents ans, une disparition quasi complète, du moins en Europe occidentale, de la figuration réaliste de la divinité féminine. Celle-ci, on l'a vu, semble pourtant avoir été honorée grandement depuis l'aube de l'humanité sapiens. Comment expliquer cette brusque absence dans les vestiges archéologiques qui, pourtant, sont riches et nombreux à cette époque de transition et de profonde mutation ?
Il y a une réponse, immédiate et qui va de soi : cette disparition de l'image féminine doit en principe correspondre au moment où la société masculine patriarcale submergea l'antique société gynécocratique et quelque peu matriarcale dont il subsiste un souvenir, s'il faut en croire Hérodote, dans la tradition des Amazones (1). Il y a dû y avoir, à ce moment-là, un grand renversement de tendances. Le culte masculin d'Apollon a remplacé celui, bien féminin, du serpent Python, et, dans la plupart des langues, le mot désignant le soleil, autrefois du genre féminin, est devenu masculin (2). La femme étant socialement ravalée à un rang inférieur, il n'y avait plus de place pour elle dans la galerie des divinités. Ainsi pourrait-on expliquer l'occultation de la Vierge. Cette réponse a toutes les chances d'être exacte, mais elle ne tient pas compte du phénomène général qui se produit à l'âge du bronze, vers -2 000 ou -1 800, dans l'expression artistique et religieuse (l'une n'allant pas sans l'autre), à savoir le triomphe de la symbolisation poussée à l'extrême, jusqu'à une géométrisation que ne renieraient pas les peintres cubistes du début de ce siècle ou des non-figuratifs comme Mondrian. Car on observe à cette période une absence à peu près totale de représentations anthropomorphiques et même zoomorphiques.
Il est évident que ce phénomène n'est pas dû au hasard. Deux explications complémentaires s'imposent : l'une ressortit à l'évolution intellectuelle de l'humanité, l'autre à un élargissement de ses conceptions métaphysiques ou religieuses. Mais « poser le problème », comme le dit excellemment André Varagnac, « c'est remettre en question toute l'explication des schématisations par une "dégénérescence" des figurations naturalistes. Cette dernière interprétation est vraiment singulière de la part d'esprits modernes accoutumés à affirmer la supériorité du civilisé sur le sauvage. Car les lentes maturations psychologiques qui nous séparent des populations dites primitives ont consisté précisément à substituer des concepts théoriques à des visions concrètes regorgeant de détails, de naturalisme [...]. D'ailleurs, c'est en gravant ou sculptant des signes abstraits que le chasseur solutréen ou magdalénien s'affirmait l'ancêtre lointain mais valable de nos civilisations dont toute la puissance repose sur notre aptitude à concevoir en termes abstraits, à calculer, pour prévoir et préciser nos actions. Que l'on cesse donc de nous parler d'un réalisme paléolithique qui aurait "dégénéré" en dessins géométriques. Non seulement réalisme stylisé et géométrisme sont simultanés, mais il n'y a aucune différence essentielle entre le géométrisme et la stylisation (3). » Le tout est de s'y retrouver, ce qui n'est pas facile lorsqu'on ignore à peu près tout des codes d'accès à ces symbolisations, à ces analogies non seulement de forme, mais d'essence. On pourra cependant comprendre que la stylisation du cheval au galop conduit nécessairement à la formation d'un « signe en S » désignant le soleil dans sa course, le fameux Sol Invictus qui, à l'époque du néoréalisme de la fin de l'âge celtique, reprend la forme de la déesse jument Épona, sous laquelle il n'est pas difficile de reconnaître l'image de la déesse mère primitive.
La seconde explication découle naturellement de la première : plus la faculté d'abstraction s'est développée au sein des sociétés de l'âge du bronze et de la période celtique, plus le champ d'exploration métaphysique s'est élargi et plus les penseurs de ce temps-là ont compris qu'il était difficile d'exprimer l'absolu à travers le relatif.
Nous possédons sur ce point un témoignage irrécusable, sous la plume du Grec Diodore de Sicile (fragment XXII), auteur qui savait puiser ses renseignements à bonne source, et qui concerne l'attitude du chef gaulois Brennus en 279 avant notre ère. Au cours de l'expédition des Gaulois en Grèce, « étant entré dans un temple, Brennus ne regarda même pas les offrandes d'or et d'argent qui s'y trouvaient. Il prit seulement les images de pierre et de bois et se mit à rire parce qu'on avait supposé aux dieux des formes humaines et qu'on les avait fabriqués en bois et en pierre ». Ce jugement en dit long sur la mentalité des Celtes qui se refusèrent pendant longtemps à représenter l’infini sous une forme finie. Ils ne s'y résolurent guère qu'au Ier siècle de notre ère, par suite de leurs contacts avec les Grecs et les Scythes de Russie méridionale, puis, plus tard encore, sous l'influence directe de leurs conquérants, les Romains, et des premiers missionnaires chrétiens. Mais cela ne les avait pas empêchés, comme le disent César et le poète latin Lucain, de représenter leurs divinités par des simulacra (et non pas des signa ou des statuae), sortes de piliers en pierre ou en bois informes, et par des motifs géométriques simples ou complexes sur leurs objets d'ornement ou même sur leurs monnaies. Et peut-être faut-il penser que de simples rochers naturels ont été les « simulacres » des dieux ou des déesses ?
Pendant tout l'âge du bronze, le culte solaire était intense dans le monde celte : des documents archéologiques comme le fameux temple de Stonehenge, en Angleterre, ou les nombreux chariots solaires cultuels (chars en bronze ou en or portant le disque solaire) et barques solaires (portant également le disque, souvent en or), en sont une preuve incontestable. Mais cette divinité solaire, vu l'époque archaïque, ne pouvait être que féminine, comme chez les Scythes. Et il ne faut jamais oublier que le nom d'Allah recouvre celui d'une antique déesse de l'Arabie préislamique, déesse solaire dont le « simulacre » était la célèbre Pierre noire de la Kaaba, à La Mecque, une météorite, donc un don du ciel tombé sur la terre, et qui symbolisait à merveille, de façon entièrement abstraite, la grandeur et la puissance de la divinité. Les musulmans l'ont si bien compris que, à l'exception de certains Iraniens, ils se refusent toujours à représenter la divinité sous une forme « naturaliste », ce qui n'est certes pas le cas chez les chrétiens depuis que sont définitivement closes les querelles des iconoclastes.
Il est donc impossible de retrouver, sur tout le territoire de l'Europe occidentale, le moindre vestige de figuration divine féminine, si l'on excepte bien entendu les plus récentes des statues-menhirs, tant à l'âge du bronze qu'à l'aube de l'âge du fer. C'est sur certaines monnaies gauloises, au début du Ier siècle avant notre ère, que l'image figurative de la Déesse des Commencements va lentement surgir de l'ombre dans laquelle on l'avait confinée. Encore faut-il être très prudent quant aux interprétations, même hypothétiques, qu'on peut donner des cavalières représentées sur le revers de ces monnaies d'or ou d'argent qui, chez les Gaulois, ne sont pas seulement des objets de transaction mais de véritables livres d'images véhiculant des notions mythologiques ou religieuses incontestables, mais qu'il est parfois difficile d'identifier avec précision (4).
C'est dans la partie de la Gaule qu'on nomme Armorique (5) que l'on trouve le plus d'exemples de cette sorte. Sur une des monnaies des Cenomani (Maine), une femme nue, l'épée à la main et les cheveux flottants, est en train de courir vers la droite dans une attitude on ne peut plus agressive (6). Il s'agit vraisemblablement de la Vierge guerrière, celle que César nomme Minerve, et que les Irlandais nommeront soit Morrigane (la « grande reine »), soit Brigit (la « haute » ou la « puissante »), mais qui est une déesse mère, représentée ici dans sa fonction guerrière de protection du groupe social. Une autre monnaie du peuple des Redones (Rennes) présente cette même Vierge guerrière à cheval, également nue, portant l'épée et le bouclier (7). Une troisième, due au peuple des Unelli (Cotentin), la représente habillée cette fois, sur son cheval, la tête surmontée de trois cornes, brandissant une roue à quatre rayons (soleil ou bouclier ?) dans la main gauche et un objet (une épée ?) d'où émanent des rayons de lumière (8). Il semble bien qu'on ait accentué ici l'aspect solaire de la divinité féminine, en liaison avec les cornes, qui sont un symbole de puissance. D'ailleurs, ce caractère solaire se reconnaît sur une autre monnaie, non anthropomorphique celle-là, du peuple des Ménapes (Flandre) : il s'agit d'une barque sur laquelle se trouve une forme rappelant à merveille l'idole néolithique représentée dans les cairns, avec un creux intérieur contenant deux globules, et à l'extérieur de laquelle se déploient d'incontestables rayons solaires (9). L'antique Déesse est toujours présente, même si ses formes ont évolué.
Les Celtes ont commencé à travailler figurativement le bois, la pierre et le métal lorsqu'ils furent en contact avec les Orientaux, d'abord les Scythes et les Grecs, ensuite les Romains et cela bien avant la conquête de la Gaule. Evidemment, les images en bois ont à peu près toutes disparu, sauf quand elles se trouvaient enfouies dans un endroit marécageux, comme aux sources de la Seine ou près de Chamalières, en Auvergne. Celles en pierre se trouvent essentiellement rassemblées à proximité de Marseille et du pourtour méditerranéen. Celles en bronze, beaucoup plus nombreuses, sont dispersées un peu partout, mais elles sont avant tout des figurations animales non dépourvues de rapport avec l'art des steppes. Quant aux céramiques diverses, il faudra attendre la conquête pour qu'elles présentent des formes humaines, le plus souvent à la mode romaine, telles les innombrables statuettes de Vénus enfouies dans les ateliers de potiers et dans les vestiges de villas gallo-romaines. Cependant, il est difficile de dater ces objets avec précision : tout dépend du lieu où on les a retrouvés, au début du Ier siècle avant notre ère pour les pays du sud, vers le milieu du Ier siècle de l'ère chrétienne pour les pays de l'ouest et du nord.
La plus émouvante, et probablement la plus ancienne, des statues en pierre figurant une divinité féminine est cette femme nue, au sexe bien apparent, au bras gauche à l'équerre, mais à demi revêtue d'un long manteau. Sa chevelure est très nette et retombe sur ses épaules. Ses yeux semblent clos et son visage exprime une infinie tristesse : on ne peut que penser à une Mater dolorosa. Mais nous ignorons quel nom, ou plutôt quel surnom, portait cette divinité chez les Bituriges (Berry) où elle a été retrouvée (10). Toute différente est la statuette en bronze de Neuvy-en-Sullias (Loiret), découverte avec bien d'autres objets rituels dans un sanctuaire druidique en plein milieu de cette forêt des Carnutes qui était tenue, par César, comme le centre religieux de toute la Gaule (11) : c'est une femme au corps très fin, long, élancé et souple, aux seins et au sexe bien apparents, à la chevelure abondante, et dans une attitude évidente de danseuse. Elle évoque nécessairement la joie de vivre : n'est-ce pas la préfiguration, toutes proportions gardées, de la Vierge triomphante du Moyen Âge, comme la statue de Bourges préfigurait la mère douloureuse au pied de la Croix ?
Car la fonction maternelle n'est jamais vraiment absente, quand bien même la représentation paraît tout entière consacrée à la féminité. Il semble d'ailleurs qu'avant d'en arriver à une conception anthropomorphique réaliste, on ait utilisé les vieilles images allégoriques des époques les plus lointaines. Ainsi en est-il d'une petite stèle sculptée, trouvée à Chorey-Haut (Côte-d'Or) et conservée au musée de Beaune. On y voit un jeune poulain tétant une jument et, à première vue, on pourrait citer cette stèle comme exemple d'art animalier. Il n'en est rien, pourtant, et comme l'avait déjà fait remarquer il y a longtemps Henri Hubert, il s'agit d'un précieux témoignage du culte gaulois de la déesse Épona sous sa forme la plus archaïque. Cette Épona, qui, après la conquête romaine, s'est répandue dans tout l'empire comme protectrice des chevaux - et des cavaliers -, est une divinité purement celtique. Son nom le prouve, puisqu'il contient le terme epo qui est l'équivalent brittonique du latin equus (12), et l'on peut retrouver toute son histoire mythologique dans la première branche du Mabinogi gallois, récit fort archaïque où la déesse Rhiannon (la « grande reine »), à qui l'on reproche la disparition de son jeune fils Pryderi, dérobé mystérieusement, et en fait échangé contre un poulain, est obligée de porter sur son dos les voyageurs qui se rendent à la forteresse de son époux, le roi Pwyll (13). En Irlande, cette même divinité apparaît sous les traits de la fée Mâcha, fondatrice légendaire d'Emain Mâcha (Emania), capitale et site sacré des anciens Ulates (14).
Les représentations d'Épona sont innombrables, surtout à la période gallo-romaine, soit en bronze, soit en céramique, soit en pierre, celles en bois ayant pour la plupart disparu. L'une des plus belles et qui conserve une facture nettement celtique est, un bronze de Franche-Comté conservé au cabinet des Médailles de la Bibliothèque nationale de Paris. La Déesse, portant un torques, collier rigide et torsadé typiquement celtique, et drapée dans un grand manteau, est assise sur le dos d'un cheval, non pas à califourchon, mais de biais, vers la droite, les deux mains sur les genoux. C'est une attitude caractéristique qu'on retrouvera sur presque toutes les figurations d'Épona et qui inspirera plus tard les représentations de la Vierge Marie au moment de la fuite en Egypte. Un autre bronze, également conservé au cabinet des Médailles, provient de Vienne : la facture est bien davantage romaine, et la Déesse porte des fruits et des fleurs sur ses genoux, tandis que sa monture ressemble à un bélier. La présence de fleurs et de fruits indique qu'Épona n'est pas seulement une déesse cavalière (voire une déesse jument, comme on l'a répété trop abusivement), mais qu'elle est avant tout la Pourvoyeuse, une sorte de Mère universelle, maîtresse des produits de la terre.
Une stèle découverte à Charrecey (Saône-et-Loire), et conservée au musée lapidaire d'Autun, présente une Épona très fruste, dans sa posture classique, mais dont les pieds reposent sur le dos d'un poulain qui se trouve sous le ventre de la jument. Un bas-relief de Meursault (Côte-d'Or), actuellement au musée de Beaune, est de même inspiration : un manteau flottant entoure la tête de la Déesse, mais le poulain est couché sur le sol, entre les pattes de la jument. Quant à la statuette de Loisia (Jura), conservée au cabinet des Médailles, elle présente une Epona nue jusqu'à la ceinture, portant un diadème, et le poulain, nettement séparé de la jument, va dans le même sens que celle-ci, c'est-à-dire vers la droite. Il semble bien que toutes ces représentations sont des illustrations du mythe de la déesse mère conductrice des âmes dans l'autre monde, ce qui est renforcé par la valeur symbolique du cheval, considéré comme un psychopompe. Et cela rejoint le rôle funéraire attribué à la Déesse néolithique, qui veille, dans l'obscurité, à la renaissance des défunts.
Mais Épona n'est qu'un des noms de la Déesse, une de ses multiples métamorphoses. Tandis qu'Épona est associée au cheval, la déesse Artio est associée à l’ours comme en témoigne le bronze de Muri (Suisse) conservé au musée de Berne : la Déesse est assise, près d'une colonne qui supporte un vase rempli de fruits, l'ours semble se diriger vers elle et, derrière l’ours on peut voir un arbre dont les branches s'élancent d’un seul côté, vers la gauche. Artio, dont le nom provient d'un des noms celtiques de l'ours (comme le nom du fameux roi Arthur), est une sorte de mère des animaux sauvages, une « mère nature », non seulement protectrice contre la violence représentée par l'ours, mais, par la valeur symbolique de cet animal, celle qui réveille les êtres engourdis dans le sommeil hivernal. On pourrait facilement interpréter cette étrange figuration d’Artio comme une parfaite illustration du thème du roi Arthur blessé mortellement à la bataille de Camlan et emmené par sa sœur Morgane dans l'île d'Avalon (où les fruits sont mûrs toute l'année), afin d'y être maintenu en dormition avant une future réapparition.
Une autre statuette en bronze, conservée au cabinet des Médailles, est également révélatrice des thèmes mythologiques qui sous-tendent la représentation plastique de la Déesse. Cette statuette, découverte à Margut (Ardennes), nous montre une femme vêtue d'une tunique courte, tenant une flèche dans la main droite et assise sur le dos d'un sanglier bondissant. Il ne peut s'agir que de la déesse Arduinna, signalée par plusieurs inscriptions votives, ce nom étant à l'origine de celui des Ardennes. Et si l'on en croit la légende locale de Wulfiliac, un Lombard converti au christianisme et connu à présent comme saint Walfroy, il existait à Margut un véritable sanctuaire dédié à cette déesse. Car, en arrivant dans ce lieu, Wulfiliac, ne pouvant extirper le culte païen, érigea une colonne à proximité du sanctuaire, sur le sommet de laquelle il s'installa, vivant de pain, d'eau et de prières, jurant qu'il n'en descendrait pas tant qu'Arduinna n'aurait pas perdu sa primauté. C'est dire l'importance que revêtait la Déesse aux yeux de la population de la forêt des Ardennes. Il faut d'ailleurs se souvenir que le sanglier, abondant dans toute la Gaule, constituait une nourriture quasi inépuisable, ce qui justifie amplement qu'il soit devenu l'emblème de la Mère divine, pourvoyeuse et nourricière. Ce culte se référait à des traditions fort archaïques qu'on retrouve dans le récit gallois de Kulhwch et Olwen, le plus ancien « roman » arthurien, où la mère du héros est une image de la déesse-truie, ou de la déesse-laie. Ce thème est reconnaissable, toujours dans le même récit, dans l'épisode de la chasse de Twrch Trwyth, la laie monstrueuse, et dans un récit irlandais concernant les Fiana, l'histoire du héros Diarmaid dont le destin est lié à celui d'un sanglier magique (15). Si les Gaulois n'ont laissé aucun texte écrit, leurs traditions, communes avec celles des autres Celtes, se sont maintenues fort longtemps et ont pu être recueillies par les moines chrétiens du Moyen Age, ce qui nous aide grandement à comprendre la façon dont ils honoraient cette mystérieuse Déesse des Commencements, maîtresse des animaux sauvages.
Car il semble bien qu'on ait voulu mettre en lumière sa toute-puissance sur la nature. Une étrange statue de pierre au Coutarel en Poulan-Pouzols (Tarn) est très explicite. La forme générale de la statue évoque celle des statues-menhirs si nombreuses dans la région. Elle est incontestablement féminine et, sur le dos, se trouvent gravés des animaux bondissants, cerf et sanglier notamment. Quant à la statuette en bronze de Kerguilly en Dinéault (Finistère), sur le site sacré de la montagne dite Ménez-Hom, elle ressemble certes à une Minerve, à cause de son casque aux traits de chouette, mais son cimier est en forme de cygne, ce qui nous renvoie non plus à la mythologie gréco-romaine, mais à la plus pure tradition celtique des « femmes-cygnes », êtres féeriques ou divins doués d'une double nature, terrienne et céleste (16). Les légendes irlandaises fourmillent d'anecdotes sur ces femmes du sidh, de l'autre monde, qui apparaissent dans le ciel sous l'aspect de cygnes blancs et qui, en touchant le sol, se révèlent les plus belles créatures humaines qui soient. Le récit gaélique sur la naissance du héros Cûchulainn témoigne de ce thème : la mère du héros, Dechtire, est en effet un de ces personnages ambigus qui rôdent sans cesse entre les deux mondes. Et si la statuette du Ménez-Hom, qui est de facture gallo-romaine, peut être classée comme une Minerve (la Minerve gauloise, bien entendu, dont parle César dans ses Commentaires), elle n'en évoque pas moins la Brigit irlandaise, fille du dieu Dagda, divinité de la connaissance, des arts et des techniques, maîtresse du feu divin, et dont les chrétiens se sont emparés pour en faire la célèbre « sainte » Brigitte de Kildare. Il faut également savoir que Brigit, par ailleurs fort honorée en Bretagne armoricaine, porte un nom caractéristique qui signifie « haute », ou « puissante », que, de plus, elle se présente souvent triplée, sous forme de triade, avec trois vocables différents, donc trois aspects complémentaires : elle est en fait le même personnage divin que la Morrigane (la «grande reine»), Bodbh (la «corneille»), Mâcha (la « cavalière », donc l'équivalent d'Épona), Eithné (mère du grand dieu multifonctionnel Lug), Étaine (fondatrice d'une lignée royale) et enfin que Boann ou Boyne (littéralement la «vache blanche»), nom du fleuve Boyne divinisé.
Car si la Grande Déesse est maîtresse des animaux sauvages et règne ainsi dans les forêts, elle est aussi la maîtresse des eaux douces qui donnent la vie, gardienne des fontaines sacrées ou résidant au fond de quelque lac dans un palais merveilleux de cristal. C'est alors qu'on retrouve le thème de Viviane, la Dame du Lac des romans arthuriens, dont le nom est le résultat d'une lente dérivation de Boann, autrement dit d'un ancien celtique Bo-Vinda, la « vache blanche », qui procure non seulement la nourriture matérielle mais également le lait divin de l'inspiration et de la connaissance. C'est alors que, dans la Gaule celtique, puis romaine, on peut parler de « pèlerinage aux sources », car les fontaines et les sources des rivières ont, depuis les temps les plus reculés, constitué des sanctuaires très fréquentés dont demeurent d'abondantes traces archéologiques, en particulier des ex-voto qui témoignent d'un culte fervent à cette femme divine, pourvoyeuse et guérisseuse. Car le culte des eaux mères et les cures dites thermales sont inséparables.
Il en est ainsi du plus célèbre de ces sanctuaires, les Sources de la Seine, sur le plateau de Langres, près de Saint-Seine-1'Abbaye (Côte-d'Or), dont le nom prouve sans qu'il soit besoin d'argumenter que le culte de la déesse Sequana s'est maintenu à travers la christianisation. On a découvert à l'emplacement de ces sources un nombre incroyable d'ex-voto de toute sorte qui indiquent qu'on venait là de partout afin d'implorer la divinité pour la guérison de multiples maladies. Mais on y a découvert également des objets de culte proprement dits, en particulier un magnifique ensemble en bronze représentant une barque dont la proue est une tête de canard et sur laquelle se tient debout une femme diadémée, vêtue d'un ample manteau, les mains écartées en un geste qu'on peut considérer comme magique ou propitiatoire (17). De toute évidence, il s'agit d'une représentation de la déesse Sequana, autrement dit de la fonction fécondatrice attribuée à la Mère universelle, symbolisée ici par les eaux du fleuve. Il ne faut pas oublier que le nom des divinités n'est jamais qu'une épithète révélatrice d'une fonction, et il en sera de même aux temps du christianisme pour les nombreux vocables sous lesquels sera honorée la Vierge Marie. Une remarque s'impose : les sanctuaires dédiés à la Déesse sont tous plus ou moins liés à un cours d'eau ou à une source : c'est une tradition qui ne s'est jamais perdue, puisque la plupart des églises et chapelles consacrées à la Vierge Marie comportent soit une fontaine ou un puits intérieur, comme à Chartres, soit une source sous le chevet, soit une fontaine ou un puits à proximité immédiate. Il suffit de parcourir les campagnes françaises pour s'en persuader, mais, ce faisant, on ne pourra que convenir qu'il est bien difficile d'établir une frontière entre le christianisme et les religions dites païennes qui l'ont précédé. La grotte de Lourdes n'est guère que la manifestation chrétienne d'une tradition ancrée dans le plus lointain passé, quand apparaissaient des « dames blanches » au seuil des grottes surplombant un torrent des Pyrénées.
Le nom de la Boyne, fleuve qui irrigue les plus célèbres sanctuaires de l'Irlande préchrétienne, a été conservé en certains lieux de France, ce qui n'a rien d'extraordinaire puisqu'il provient d'un ancien nom celtique commun. Ainsi, sur les limites de l'Auvergne et du Velay, dans la commune de Saint-Jean-d'Aubrigoux (Haute-Loire), se trouve un site fort peu connu, la Fontboine. Il s'agit d'un établissement druidique qui a perduré, à cause de son isolement, pendant la période romaine, auprès d'une source abondante. Or Fontboine ne peut en aucun cas être une altération de Fontem bonam. D'où viendrait le « i » ? Il est plus que probable qu'il s'agit ici de la « fontaine de Boann », la « vache blanche », divinité qui répand la vie et la fécondité. Et que dire de Divonne-les-Bains, célèbre station thermale de l'Ain ? N'y retrouve-t-on pas le nom de la « divine Boann » ? Quant au temple gallo-romain de Sanxay (Vienne), dans le Poitou, temple qui remplace certainement un établissement gaulois antérieur, il est situé sur les bords d'une rivière nommée la Vonne, ce qui nous renvoie une fois de plus à ce mystérieux personnage de femme divine qui se dissout dans l'eau de la rivière en voulant retrouver sa virginité perdue, d'après de curieux poèmes irlandais dont la compréhension est difficile à cause de l'archaïsme de la langue (18).
Chez les Grecs, le dieu guérisseur est bel et bien Apollon dont l'aspect solaire n'apparaît que tardivement. Or, en Gaule romanisée, cet antique Apollon préside de nombreux sanctuaires situés à proximité des sources, prenant à chaque fois des épithètes diverses. Ainsi en est-il à Grand (Vosges), où ce surnom de Granus renvoie au nom gaélique - et celtique ancien - du soleil, grian, ou encore à Aix-la-Chapelle (Aachen), en Allemagne, qui est un ancien Aquae Grani. Mais ailleurs, cet Apollon gaulois portait le plus souvent le surnom de Belenos, « brillant », comme à Beaune (Côte-d'Or) ou à Saint-Bonnet-près-Riom (Puy-de-Dôme) qui sont des anciens Belenate. Et, dans l'étrange forêt de Brocéliande (forêt de Paimpont), la célèbre fontaine de Barenton, autour de laquelle convergent tant de légendes, se nommait autrefois Bélenton, c'est-à-dire Bel-Nemeton, « sanctuaire de Bel ». Mais ce « Bel » est-il une abréviation de Belenos ou de la parèdre de celui-ci, la déesse Belisama, la « très brillante » ? Il est bien difficile de le dire, car le personnage d'Apollon paraît avoir bien souvent usurpé la place d'une divinité féminine. D'ailleurs, dans la tradition irlandaise, si le dieu Diancecht, qu'on considère généralement comme l'équivalent d'Apollon, met en place la fameuse « fontaine des Herbes », qui permet de guérir les blessés et de ressusciter les morts, c'est sa fille Airmed (ce qui signifie « mesure ») qui en assure l'efficacité en chantant des incantations. Si l'on se réfère à la tradition arthurienne, cette fontaine de Barenton - qui n'a jamais été christianisée, mais qui passe pour guérir la folie - appartient à une Dame de la Fontaine qui en confie la garde à son époux. C'est assez significatif. Barenton est sans aucun doute le nemeton, la « clairière sacrée » de la Déesse « très brillante ».
Au reste, le nom de Belisama est assez répandu à travers le territoire gaulois. À Saint-Lizier (Ariège), ancienne capitale des Couserans, une inscription votive en latin, actuellement encastrée dans un des piliers du pont, le donne comme surnom à Minerve. Ce qui est intéressant, à Saint-Lizier, c'est la légende selon laquelle, lors de fouilles effectuées à la chapelle Saint-Marsan, située à l'emplacement d'un temple de Mars, on aurait découvert une statue de la Vierge qui, amenée à l'église principale, retournait chaque nuit en son lieu d'origine. Il est fort possible que cette soi-disant Vierge Marie ait été simplement une Belisama « très brillante ». À Vaison-la-Romaine (Vaucluse), une autre inscription votive lui est consacrée, en caractères grecs cette fois, ce qui prouve son ancienneté. Et de nombreuses localités portent le nom de cette divinité lumineuse, à commencer par Bellême (Orne). Or, dans la forêt de Bellême, près de l'étang de la Herse, se trouve une source d'eau ferrugineuse dont les vertus curatives ont été exploitées depuis l'Antiquité, et qui est dédiée aux « dieux infernaux, Mars, Mercure et Vénus (19)». Encore une fois, la diversité des épithètes ne fait que recouvrir une multiplicité de fonctions attribuées à une unique Déesse. Ainsi, un étrange bas-relief conservé au musée de Toulouse présente Épona à cheval, dans sa posture traditionnelle, mais galopant au-dessus de poissons stylisés parmi lesquels nage un taureau à queue de poisson. L'élément aquatique est bel et bien présent quand il s'agit de représenter la divinité féminine des Commencements. Et cela n'est nullement contradictoire avec l'idée de lumière, et même de soleil, puisque le soleil, dans les langues celtiques et germaniques, est toujours féminin. À Bath, en Angleterre, sanctuaire des eaux guérisseuses, la divinité qu'on honorait était une déesse Sul, dont le nom n'a nul besoin d'être traduit.
La Déesse est donc également Vénus, c'est-à-dire la beauté, la blancheur, celle qui est née de l'écume de la mer (et du sperme d'Ouranos-Varuna châtré par son fils Kronos). C'est la Vierge des flots, la Mère universelle parce qu'elle inspire le désir qui conduit à la copulation, donc à la procréation. Sa naissance est surnaturelle, et constitue une sorte d'immaculée conception. C'est peut-être Cessair, la femme primordiale de la tradition celtique dont nous parle le Livre des Conquêtes irlandais, compilation des traditions millénaires des Gaëls. Or il existe une surprenante représentation de cette déesse, ô combien païenne, dans un sanctuaire chrétien, la chapelle de Sainte-Agathe à Langon (Ille-et-Vilaine). À vrai dire, c'est en procédant à des travaux de réfection de cette chapelle, en 1839, qu'on découvrit une fresque, fort bien conservée, sur l'un des murs, preuve qu'il s'agissait d'un temple gallo-romain réutilisé par les chrétiens. On y voit une Vénus nue, sortant des flots, entourée de poissons et d'un Éros chevauchant un dauphin. Le nom de la chapelle a été donné au XVIIe siècle, ce qui en a fait un lieu de pèlerinage pour les femmes allaitant un enfant : sainte Agathe, martyre aux seins coupés, est en effet la patronne des nourrices. Mais autrefois, l'édifice était dédié à un mystérieux « saint » Vénier ou Vénérand, en lequel il n'est pas difficile de reconnaître le nom de Vénus. Il faut signaler que le territoire de Langon contient d'importants vestiges mégalithiques, en particulier un alignement de menhirs connu sous l'appellation de « Demoiselles de Langon ». La légende locale prétend que ce sont des jeunes filles qui furent ainsi pétrifiées pour avoir préféré le bal aux vêpres, ce qui renforce l'idée que Langon se situe à l'emplacement d'un antique sanctuaire de la Déesse, desservi par de nombreuses prêtresses.
Pendant toute la période gallo-romaine, le culte de Vénus a été très important dans toute la Gaule, comme en témoignent de multiples statues et d'innombrables statuettes en céramique, produites en série dans les grands centres de poterie. Mais il faut à ce propos poser le problème de cette étrange statue connue sous le nom de « Vénus de Quinipily », qui se trouve actuellement en plein air, sur un socle élevé, au-dessus d'un bassin de pierre dans les jardins de l'ancien château de Quinipily, près de Baud (Morbihan). Ce n'est pas sa place d'origine. Au XVIIe siècle encore, elle se dressait sur le promontoire de Castennec en Bieuzy-les-Eaux (Morbihan), au-dessus du Blavet, et elle était l'objet d'un culte dont le moins qu'on puisse dire est qu'il était érotique, de nombreux couples allant accomplir sous son ombre des actes que la morale chrétienne réprouvait hautement. C'était l'époque de la Contre-Réforme en Bretagne, où d'ardents missionnaires fulminaient contre d'évidentes résurgences du paganisme. Sur l'ordre de l'évêque de Vannes, la statue fut jetée dans le Blavet. Mais les habitants la remirent en place. On la jeta de nouveau dans le fleuve : peine perdue, car à chaque fois il se trouvait des volontaires pour la remonter. Finalement, le comte de Lannion, aristocrate libertin, s'empara de la statue et la fit installer dans son château de Quinipily après l'avoir fait, paraît-il, retailler afin d'en éliminer certaines caractéristiques trop choquantes. Mais le « culte » rendu à cette Vénus ne cessa pas pour autant, se prolongeant même jusqu'à nos jours.
Il s'agit d'une grande statue de granit de 2,15 mètres de hauteur, qui ne ressemble en rien aux Vénus classiques. Elle est présentée nue, avec des seins qui ont été visiblement rabotés : sur sa tête est figurée une bandelette portant une mystérieuse inscription, les trois majuscules « ITT », vraisemblablement ajoutée au moment de son « arrangement ». On voit également une sorte d'étole qui lui entoure le cou et dont les deux branches se réunissent sur son ventre. On a beaucoup discuté sur l'origine de cette statue. Elle n'est certes pas de facture gallo-romaine. Peut-être vient-elle d'Orient (20). Quoi qu'il en soit, elle a dû être l'objet essentiel d'un sanctuaire consacré à une divinité féminine. Quand elle se trouvait à Castennec, on l'appelait la « couarde », francisation maladroite du breton gwrac'h houarn, mot à mot « vierge de fer», on se demande bien pourquoi. Mais gwrac'h signifie aussi « sorcière », ce qui implique une connotation plutôt sulfureuse. Quant au lieu même, Castennec, c'est l'emplacement d'une antique forteresse gauloise, puis gallo-romaine, sur un endroit stratégique de la vallée du Blavet, à l'intersection de voies romaines dont la plus importante venait de Lyon et d'Angers pour se diriger vers l'Aber-Wrac'h en passant par Rieux, sur la Vilaine, et par Carhaix. Or, ce qui est très révélateur, c'est le nom ancien de Castennec, d'après la célèbre table de Peutinger : Sulim, où il n'est guère difficile de reconnaître Sul, l'une des dénominations de la Déesse solaire des anciens Celtes. Après tout, cette « Vénus » est peut-être l'image réaliste et érotique de la Grande Déesse sous son aspect solaire.
Des sites sacrés tirent souvent leur nom de la divinité qui y était honorée. On l'a vu pour Bellême et pour Sulim, comme on le verra par la suite avec les nombreuses appellations dues à « Notre-Dame » et à tous les saints - homologués ou non - du christianisme. Et même si toute représentation de la divinité a disparu, l'appellation en maintient le souvenir. Ainsi en est-il de la tour de Vésone, à Périgueux (Dordogne), temple circulaire en ruine, à l'emplacement de la ville primitive fondée par le peuple gaulois des Pétrocores, et dans lequel on retrouve le souvenir de la Grande Déesse, ici surnommée Vesuna. Il en est de même à Glanum, la ville antique (gauloise, grecque et romaine) de Saint-Rémy-de-Provence (Bouches-du-Rhône) : ici, la source qui alimentait l'agglomération, et qui se trouve dans ce qu'on appelle le « sanctuaire indigène », porte le nom des Glanicae, une triade de déesses protectrices et fécondatrices, le triplement étant chose courante chez les Celtes.
À cet égard, la représentation la plus étrange est sans aucun doute un bloc de pierre trouvé en Bourgogne et conservé actuellement au musée des Antiquités nationales. À vrai dire, ce n'est pas une sculpture, mais une stèle gravée en creux où se distinguent nettement trois formes féminines parallèles, non séparées les unes des autres, avec des torses recouverts d'un grand X qui évoque à coup sûr des bras croisés. Les têtes sont bien marquées, avec nez et bouche, mais si deux d'entre elles ont deux yeux creusés verticalement, la troisième, à gauche, n'a qu'un œil. Ces personnages sont classés comme les « trois maires », mais rien dans leur attitude n'indique une fonction maternelle. Elles font davantage penser à ces « triples déesses » de la tradition gaélique d'Irlande, ces fameuses triades dites parfois « triple Brigit » ou « triple Mâcha » : les récits mythologiques font grand cas de ces « triades », comme celle de Bodbh-Morrigane-Macha, ou celle de Boann-Eithné-Étaine. Cette pierre des « trois maires » est incontestablement l'illustration la plus parfaite de ce thème du triplement. Et, pendant la période proprement gallo-romaine, le nombre de ces déesses mères groupées par trois sera considérable, ce qui prouve bien que même sous domination romaine, les anciennes divinités celtiques sont toujours présentes dans les esprits.
Cette constatation en amène une autre : l'absence, à l'époque gallo-romaine, de grands sanctuaires en l'honneur de Vénus, pourtant fort célébrée chez les Romains. « On a souvent souligné que Vénus, en dehors de certains ports du Midi comme Marseille ou Port-Vendres, n'était guère représentée que par les figurines de terre cuite, pacotille des foires et des marchés ; aucun document un tant soit peu honorifique - mises à part de belles statues comme celles d'Arles, de Fourrières ou de Vienne - n'atteste la présence de son culte (21). » Sans doute les Gaulois avaient-ils une autre vision de l'amour que les Romains, eux qui s'attachaient davantage à la beauté physique de la Déesse et en délaissait l'aspect métaphysique. Il en sera d'ailleurs de même pour Junon, protectrice des mères dans toute l'Italie, mais qui a trouvé de trop grandes rivales dans ces fameuses maires si caractéristiques de la dévotion celtique.
D'ailleurs, les populations celtes, même intégrées au système romain, semblent perpétuer une tendance observée au néolithique : l'excès savamment dosé de certains attributs ou emblèmes divins, et cela afin d'insister sur un aspect fonctionnel bien précis attribué à la divinité. On l'a vu avec la déesse Artio, avec la déesse Arduinna, toutes deux liées à l'ours, avec la déesse au cygne, avec la déesse Épona, cavalière ou jument. On retrouve cette familiarité avec l'animal dans une statuette de facture très romaine découverte à Broye-lès-Pesmes (Haute-Saône), actuellement au British Muséum de Londres : il s'agit ici d'un bronze représentant une déesse portant des bois de cerf sur la tête, tenant entre les mains une corne d'abondance et une patère. Le cervidé est emblème de l'abondance, la patère également. Le thème du Graal n'est guère éloigné de cette représentation.
La Déesse n'est donc pas seulement la mère des hommes (et des dieux), mais la Mère universelle, celle qui a porté dans son sein les animaux et même les végétaux. Le plus bel exemple de ce type de représentation fonctionnelle est certainement l'une des plaques du célèbre Chaudron de Gundestrup, dont l'original se trouve au musée d'Aarhus (Danemark) et dont une copie parfaite est visible au musée des Antiquités nationales. C'est un ouvrage en argent, difficilement datable (Ier ou IIe siècle de notre ère ?), qui semble influencé par l'art des steppes importé par les Scythes, et qui illustre de la façon la plus remarquable qui existe, la mythologie celtique.
La plaque qui concerne la Déesse représente une tête de femme assez bien dessinée, avec des cheveux longs que semble tresser un petit personnage féminin à gauche. Le torse est seulement esquissé, mais les seins sont nets. Le bras gauche, très petit, est replié sur la poitrine. Le bras droit est relevé parallèlement à la tête et sur un des doigts de la main, un oiseau est perché. Cette divinité porte un torque autour du cou et un autre petit personnage féminin est assis sur son épaule droite, surmonté d'un animal quadrupède. Sur sa poitrine, au-dessous des seins, se distinguent un autre quadrupède et un être humain, tous deux vraisemblablement morts. Mais de chaque côté de la tête de la divinité, il y a deux oiseaux aux ailes déployées, sortes d'aigles triomphants qui donnent la signification de la scène. Il s'agit en effet du même personnage, décrit dans les récits mythologiques gallois sous le nom de Rhiannon, l'équivalent de la Mâcha gaélique et de l'Épona gauloise, qui est non seulement la « cavalière », mais également la maîtresse d'oiseaux étranges qui « réveillent les morts et endorment les vivants (22) ». C'est un des aspects fondamentaux de la Déesse, maîtresse des animaux sauvages et surtout détentrice de la puissance céleste représentée par les oiseaux.
Cette vision peut paraître tourmentée. Elle l'est dans la mesure où elle traduit le mouvement créateur ou organisateur qui est la justification même d'une divinité des origines. Mais au fur et à mesure que s'instaure la «paix romaine» dans l'empire, cette vision va devenir plus rassurante, indice d'une certaine stabilité politique et économique qui fait reculer d'autant les angoisses métaphysiques. La Sequana des sources de la Seine vogue paisiblement sur le fleuve, au milieu d'une barque (qui n'est pas sans évoquer une certaine représentation mégalithique), à l'avant de laquelle on remarque la tête d'un canard, ce qui renforce l'aspect serein et équilibré de cette navigation en eau douce. Et cette déesse qu'on nomme Nantosuelta, sur une stèle votive de Sarrebourg (Moselle), paraît être une épouse modèle et tranquille aux côtés du dieu Sucellos, le dieu au marteau, l'équivalent gaulois de l'irlandais Dagda à la massue ambivalente : quand le dieu frappe par l'un de ses bouts, il tue, mais quand il frappe de l'autre, il ressuscite. Nantosuelta serait-elle la médiatrice, celle qui équilibre, celle qui peut arrêter - ou mettre en mouvement — l'arme redoutable de son époux supposé ? L'image de la Vierge Marie médiatrice auprès de Jésus se profile déjà dans un contexte préchrétien imprégné de mysticisme. Car la Déesse peut être aussi celle qui supporte la douleur de ses enfants, comme le sera la Vierge de compassion du Moyen Âge. La statue féminine conservée au musée de Bourges (Cher) exprime cette souffrance partagée et peut être considérée comme une Notre-Dame-des-Douleurs bien antérieure aux spéculations sur la mère du Christ. Car si Jésus, sur la Croix, a fait de Marie la mère de tous les hommes, il ne faisait que suivre la croyance de tout le Moyen-Orient en la déesse mère universelle qui prenait alors le nom de Cybèle avant de venir s'installer à Rome et de se répandre sur tout l'empire. À Vienne, et dans bien d'autres sanctuaires gallo-romains, le culte métroaque, résultat d'une fusion entre la religion de Mithra et celle de Cybèle, laissera de nombreuses traces, particulièrement des statues de la « mère des dieux ». La statuette en pierre, conservée au musée Borély de Marseille, et qui représente Cybèle assise tenant un lionceau sur ses genoux, témoigne de cet attachement à une divinité dont la fonction est l'amour maternel et la paix entre les êtres vivants. Quant à la petite stèle votive en pierre découverte à Grand (Vosges), et conservée au musée d'Épinal, même si elle est anonyme, elle traduit bien cette volonté de soulagement des souffrances : elle présente en effet une déesse assise dans ce qui paraît être une officine de pharmacie ou un laboratoire, et l'on voit, dans une sorte de baquet, un instrument dont le manche a la forme d'un caducée. Il ne faut pas oublier que Grand a été un important sanctuaire gaulois dédié au soleil guérisseur, et que le soleil est féminin.
Il y a dans l'art gaulois de l'époque romaine une évidente recherche de l'harmonie, tant intérieure qu'apparente. À Neuvy-en-Sullias (Loiret), non loin du sanctuaire gaulois de Fleury, on a retrouvé de magnifiques statuettes en bronze qui sont actuellement conservées au musée de l'Orléanais, à Orléans. L'une d'elles est tout à fait remarquable par la beauté, la finesse et l'élégance de la facture. Il s'agit d'une femme nue, à la longue chevelure, en train de danser. La représentation n'est plus statique, mais il ne s'agit pas non plus d'éclatement : il s'agit au contraire d'une mise en harmonie d'un monde déjà créé, comme si la divinité dansait à travers les étoiles pour dispenser à ses innombrables enfants la lumière vitale qui rend le monde « beau » au sens étymologique de ce terme. La plénitude du monde se confond avec la beauté de la divinité, puisque rien n'existerait sans elle.
Mais cette période romaine de l'art celtique où, sous l'influence des techniques lapidaires de la Méditerranée, l'abstraction et la géométrisation vont laisser place à une plus grande figuration concrète, est essentielle dans la recherche d'un modèle presque unique de la représentation de la Déesse. La coexistence de différents systèmes religieux, avec la multiplicité d'interprétations qui en découle, va conduire à une sorte de synthèse, non seulement des formes apparentes, mais du contenu idéologique. Il faudra alors redéfinir le rôle exact prêté à la divinité féminine (quelle que soit l'origine de celle-ci, celtique, latine, grecque ou orientale) en fonction d'une nouvelle formulation théologique que le christianisme naissant va récupérer dans la mesure où elle sera conforme aux décisions des conciles, surtout ceux qui concernent le concept de Theotokos, par lequel s'infiltre à l'intérieur d'un univers franchement masculin l'image impossible à oublier de la déesse mère primitive.
Car le christianisme s'introduit en force dans l'empire et modifie considérablement l'aspect extérieur de la divinité. Deux directions diamétralement opposées vont maintenant s'affronter, dans une querelle constamment réactualisée à propos des images. Peut-on en effet donner des traits anthropomorphiques à une divinité qui, par nature, par essence même, échappe à tout réalisme grossier? Le problème s'était déjà posé du temps des druides, ceux-ci refusant de définir l'infini. Mais, l'esprit humain ayant besoin d'éléments concrets pour sentir le divin, on en est venu à incarner les forces divines sous des aspects matériels. Les Évangiles eux-mêmes, avec l'exaltation de l'homme-dieu Jésus-Christ, se prêtaient à cette interprétation réaliste, parfaitement conforme aux affirmations de la Genèse à propos de l'homme créé à l'image de Dieu. La grande querelle des iconoclastes ne pouvait se terminer que par la victoire des partisans de l'image. Mais quelle image, surtout pour résorber le concept de déesse mère, totalement absent - par suite de censure intérieure - des premiers textes chrétiens ? Là réside le véritable problème.
Toute l'Antiquité, qu'elle soit méditerranéenne ou « barbare », a mis en lumière un personnage divin de nature féminine, sous différents noms et différents aspects. Le peuple juif n'a pas échappé à cette intrusion de la Déesse, et la Bible hébraïque est remplie de conflits opposant les partisans du Dieu père (le Yahveh du Sinaï, ancien dieu-lune des Sémites du Moyen-Orient) aux partisans de la déesse mère, l'Ishtar babylonienne devenue plus tard As tarte et Vénus-Aphrodite quand elle n'était pas Diane-Artémis : une divinité féminine dont la fonction maternelle se doublait nécessairement d'une fonction érotique. On pense bien que cette fonction érotique allait être complètement occultée dès le début d'un christianisme entièrement axé sur une masculinité triomphante et une chasteté exemplaire, résultant la plupart du temps d'une terreur instinctive à l'égard des mystères de la femme.
En toute objectivité, on ne peut que constater l'élimination presque totale d'une disciple femme de Jésus, celle qu'on a coutume d'appeler pudiquement la « Madeleine » et à laquelle il est préférable de restituer son nom et son origine : Marie de Magdala. Les commentateurs, prudents et méfiants, en ont fait une prostituée repentie saisie par l'amour de Jésus et convertie à ses vues. La réalité doit être tout autre. D'abord, pour les Hébreux, la prostitution n'a pas le sens qu'on lui attribue actuellement : se prostituer, c'est, dans les anciens temps bibliques, « sacrifier à la Déesse », chose impardonnable puisque les Hébreux n'avaient de dévotion que pour un dieu mâle unique et qu'ils ont lutté pendant des siècles pour asseoir son autorité malgré toutes les déviances, repérables dans la Bible, en faveur de la déesse du Moyen-Orient, cette Ishtar babylonienne dont les temples étaient des lieux de prostitution, autrement dit de culte érotique consistant en l'union d'un homme avec une prêtresse, incarnation transitoire de la Déesse. Il s'agit de prostitution sacrée, rituelle, religieuse, et non pas de commerce, il s'agit d'union avec la divinité et non pas de simple satisfaction charnelle.
Or, on sait que Magdala était un lieu consacré à la Grande Déesse. Il est probable que l'énigmatique Marie de Magdala, si soigneusement mise à l'écart, était la grande prêtresse du temple de cette Déesse. D'où le qualificatif de « prostituée » qu'elle porte, même si, en tant que premier témoin de la résurrection du Christ, on lui pardonne tout son passé sulfureux. Le célèbre épisode évangélique de Béthanie s'éclaire alors singulièrement. Jésus a été baptisé dans le Jourdain par Jean le Précurseur, au nom du Père. À Béthanie, chez Marthe et Lazare, qui sont sœur et frère de Marie (celle-ci, très riche, étant vraisemblablement la propriétaire des lieux), Marie verse du parfum sur les pieds de Jésus, lui conférant une onction authentiquement sacerdotale, ce qui n'est pas du goût de Judas, partisan acharné de la religion du Dieu père, et qui, par la suite, va trahir jésus sous prétexte que celui-ci a trahi la religion du Père. Si l'on comprend bien, Jésus se présente à la fois comme l'oint (c'est le sens de « Christ ») du Dieu père (Yahveh) et de la déesse mère (sous quelque nom qu'on l'invoque), réunissant ainsi les deux traditions qui partagent le monde. C'est une des preuves manifestes de l'universalité de l'enseignement de Jésus, et il est bien étonnant que les théologiens chrétiens n'en aient pas tiré parti. L'ombre de la Déesse des Commencements ferait-elle donc peur aux coupeurs de cheveux en quatre ?
C'est pourquoi ce temps de l'introduction du message chrétien dans le monde gallo-romain est une époque charnière. De cette dualité - Dieu père ou déesse mère -va naître une double vision de la Déesse des Commencements : Vierge sage ou Vierge folle ? La question paraît banale, mais elle engage tous les siècles qui vont suivre, non seulement sur un plan purement esthétique, mais sur celui, beaucoup plus lourd de conséquences, de la spéculation religieuse. En un mot, la Déesse primordiale est-elle une femme folle de son corps ou une mère qui ignore comment elle s'est retrouvée enceinte ? À la prostituée sacrée des temples de Babylone et autres lieux du territoire actuellement français, s'oppose désormais la chaste Vierge qui ne connaît plus que sa fonction maternelle.
Cela dénote une considérable évolution des mentalités : tout se passe comme si on avait voulu, consciemment ou non, éliminer l'image d'une femme divine forte au profit d'un homme divin tout-puissant dont la relation à la femme se bornerait à un rapport fils-mère. L'antique prostituée sacrée, incarnation de la Déesse, est une vierge, au sens fort du terme, c'est-à-dire libre de tout lien de subordination à un quelconque époux, mais elle n'en a pas moins une activité sexuelle permanente : en fait, c'est l'Esther de la Bible (et non pas l'héroïne édulcorée de Racine), qui se sert de son sexe pour mettre en œuvre les desseins de la divinité. Elle est donc active, et elle vient constamment rappeler que le rôle de la femme est nécessairement charnel. L'un des meilleurs exemples de ce type qui a perduré pendant tout le Moyen Âge chrétien est la fameuse Sheela-na-Gig qu'on trouve dans les églises de Grande-Bretagne et d'Irlande, cette femme nue exhibant son sexe en ouvrant outrageusement les lèvres vulvaires comme pour inviter les êtres à rentrer dans son ventre pour y renaître. Il est probable que des figurations de ce genre ont été réalisées en France, mais elles ont dû être détruites sous l'influence de l'Église romaine. Cette image de la femme a été alors « diabolisée » entièrement et est devenue la sorcière médiévale, soupçonnée de toutes les prostitutions, y compris au diable.
Sous l'empire romain, le pendant de cette tendance « féministe » était l'exaltation du dieu Priape, en accord parfait avec le caractère androcratique de la société. Mais, même si le culte phallique a survécu dans les étranges dévotions à des « saints » Foutin ou Phalle, son exagération a provoqué une réaction puritaine et une occultation de la sexualité dans un christianisme qui cherchait encore sa doctrine. Il était inutile de se poser des questions au sujet du sexe de Dieu, puisqu'il était tout-puissant et que le phénomène de la création n'avait pas besoin d'être expliqué autrement que par la volonté divine. Il ne restait donc plus de place pour la femme divine : la Mère des Commencements passait dans l'ombre où elle rejoignait tous les démons des diverses mythologies de l'Antiquité.
Il est cependant difficile, sinon impossible, de se débarrasser de concepts existant depuis l'aube des temps, et l'image de la femme ne pouvait que réapparaître à la surface, mais revêtue d'aspects conformes à la nouvelle mentalité. D'où la montée fulgurante de la Theotokos, la Mère de Dieu, cette Marie toujours vierge et mère de Jésus. Mais, tout en demeurant nécessaire, elle perdait toute sa connotation sexuelle au profit d'une unique fonction, la maternité. De plus, cette situation permettait de la réduire à un rôle uniquement passif : «Je suis la servante du Seigneur », fait-on répondre Marie à l'ange de l'Annonciation. Les multiples Vierges à l'enfant, comme les douloureuses piétas du Moyen Age, sont déjà en germe dans cette déesse mère encore païenne de Prunay-le-Gillon (Eure-et-Loir), dont un moulage est conservé au musée des Antiquités nationales. Il s'agit d'une déesse assise, les mains sur ses genoux écartés. Entre ses cuisses, se tient, également assis, un jeune enfant, les mains sur ses propres genoux. « Ce petit monument s'inscrit parmi les innombrables statuettes votives de déesses mères. Alors que la plupart d'entre elles ne représentent l'enfant qu'au sein, celle-ci la place [...] dans la posture qui sera, mille ans plus tard, celle des Vierges en majesté tenant l'enfant Jésus assis et vu également de face. L'attitude sévère et la lourdeur des vêtements détachent également cet objet des séries gallo-romaines classiques (23). » II est bien évident que cette représentation est tout à fait conforme à la statue en bois polychrome de Saint-Nectaire, cette célèbre statue de la Vierge à l'enfant qui date du XIIe siècle. Désormais, la Vierge folle va laisser la place à la Vierge sage avant de se réfugier dans les sombres forêts dans l'attente des grands sabbats qui ne vont pas manquer de provoquer l’indignation des bien-pensants paraît terminé. Celui de la Mère de tous les dieux également. Alors va commencer le règne étonnamment prospère de la Vierge mère du Dieu unique, quelles que soient les appellations, quels que soient les innombrables vocables qu'on lui attribuera au cours des siècles qui vont suivre.
Mais les apparences sont parfois trompeuses.
Notes :
1. Dans un ouvrage très étrange - et vraisemblablement crypté -sur une soi-disant recherche du pays des « fourmis qui trouvent de l'or » dans l'Himalaya occidental (aux confins du Pakistan et de l'Inde), intitulé L'Or des fourmis, Michel Peissel n'est pas loin de croire avoir retrouvé le mystérieux peuple des Dardicae, cité par Hérodote à propos des Amazones. Ce peuple est incontestablement blanc et indo-européen au milieu de populations asiatiques. Sont-ce les derniers survivants des Aryens primitifs ? Ce peuple des Minaros (leur nom actuel) a une langue indo-européenne, des coutumes matriarcales, notamment la polyandrie, et une religion très archaïque de type féminin : « Les deux principales divinités minaros [...] sont Gyantse-Lhamo et Shiringmen-Lhamo, respectivement la déesse-fée de la Fortune et la déesse-fée de la Fertilité. Deux femmes [...]. La divinité principale, appelée en tibétain Gyantse-Lhamo et en minaro Mun-Gyantse, ce qui signifie « fée embrassant tout », réside [...] sur le sommet d'une montagne » (M. Peissel, L'Or des fourmis, Paris, Laffont, 1984, p. 118).
2 Excepté, rappelons-le, dans les langues celtiques et germanique
3 André Varagnac, L'Art gaulois, La Pierre-qui-Vire (Yonne), éd. Zodiaque, 1956, p. 220-221.
4 Sur le sujet des monnaies gauloises et de leur portée, voir Lancelot Lengyel, L'Art gaulois dans les médailles, Paris, 1954, ouvrage fondamental bâti sur de nombreux agrandissements de monnaies gauloises qui se trouvent au cabinet des Médailles de la Bibliothèque nationale de Paris ; ainsi que, du même auteur, Le Secret des Celtes, Forcalquier, 1969, thèse fort ambitieuse mais dont certaines interprétations ne reposent que sur l'imagination de l'auteur. L'intérêt de ce livre réside dans la description minutieuse des détails relevées sur les monnaies gauloises et leur comparaison avec des éléments de mythologie irlandaise.
5 Il ne s'agit pas seulement de la péninsule bretonne, mais de la partie voisine de la Manche et de l'Atlantique, de la Seine à la Garonne (en gaulois, Aremorica signifie « tourné vers la mer »).
6 Cabinet des Médailles, Paris.
7 ibid.
8 ibid.
9 Voir L. Lengyel, L'Art gaulois dans les médailles, planche XL, fig. 436.
10 Musée archéologique de Bourges.
11 Musée historique de l'Orléanais, Orléans.
12 L'ancien son qw indo-européen, qui s'est maintenu en latin et en celtique gaélique, est devenu p en grec et dans les langues celtiques brittoniques (gaulois, breton et gallois).
13 Voir J. Markale, L'Épopée celtique en Bretagne, Paris, Payot, 1985, 3e éd.
14 Voir J. Markale, L'Épopée celtique d'Irlande, Paris, Payot, 1993, éd.
15 Voir J. Markale, La Femme celte, op. cit., 121-134 (sous-chapitre intitulé « Dans la porcherie »).
16 Statuette conservée au musée de Bretagne, à Rennes.
17 Conservée au musée archéologique de Dijon.
18 Voir J. Markale, L'Épopée celtique d'Irlande, op. cit
19 L'inscription latine, ainsi que les aménagements visibles de la source datent du XVIIe siècle.
20 Je ne crois pas à l'authenticité de cette statue. Elle ne ressemble à rien. Elle doit être l'œuvre d'un faussaire du début du XVIIIe siècle commanditée par le comte de Lannion. Mais elle remplace nécessairement une statue plus ancienne qui était la vraie « Couarde », objet de ce culte érotique dénoncé par le clergé de l'époque.
21 Paul-Marie Duval, Les Dieux de la Gaule, Paris, Payot, 1976, p106.
22 Voir J. Markale, L'Épopée celtique en Bretagne, 27-42, et La Femme celte, p. 143-157. Cette « maîtresse des oiseaux » réapparaît dans les romans de la Table ronde sous les traits de la célèbre fée Morgane. Voir J. Markale, Le Cycle du Graal, op. cit., tome IV, La Fée Morgane.
23 André Varagnac, L'Art gaulois, Zodiaque, 1956, p. 321.
Sources : La Grande Déesse, mythes et sanctuaires – Jean Markale – Ed. Albin Michel 1997.
Le ministère de l’Éducation a recommandé aux enseignants de signaler les enfants tenant des propos « inacceptables »
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- Catégorie : ACTUALITE
19/05/2020
Dans le cadre de la réouverture progressive des écoles, le ministère de l’Éducation nationale a mis en ligne lundi 4 mai une fiche Eduscol à destination des enseignants. Dans cette dernière, est notamment indiqué que si « des enfants tiennent des propos manifestement inacceptables, la situation [sera] rapportée aux autorités de l’école ».
« Des recommandations pédagogiques »
C’est une fiche qui a déclenché un véritable tollé, aussi bien auprès des enseignants que des politiques. Le 4 mai dernier, dans le cadre de la réouverture progressive des écoles, le ministère de l’Éducation nationale a publié sur son site une fiche Eduscol regroupant plusieurs « documents de référence et des recommandations pédagogiques qui ont pour objectif d’accompagner les professionnels dans le processus de reprise des cours ».
« Conduites à tenir », « gestion de l’émotion », « propositions d’activité »… la fiche Eduscol du ministère se veut un véritable petit guide pratique de l’enseignant. Mais au sein de cette fiche, quelques lignes, écrasées par deux paragraphes, ont fait particulièrement grincer des dents. En cause, un paragraphe incitant les enseignants à faire remonter aux autorités de l’école « des propos manifestement inacceptables ».
Éducation : les syndicats montent au front
« Des enfants peuvent tenir des propos manifestement inacceptables. La référence à l’autorité de l’État pour permettre la protection de chaque citoyen doit alors être évoquée, sans entrer en discussion polémique. Les parents seront alertés et reçus par l’enseignant, le cas échéant accompagné d’un collègue, et la situation rapportée aux autorités de l’école », peut-on ainsi lire dans cette fiche pédagogique.
Si cette fiche n’a pas de valeur réglementaire en tant que tel, n’en reste pas moins qu’elle a provoqué un véritable tollé, notamment auprès des syndicats d’enseignants. « On nous demande de ne pas remettre en cause la gestion de la crise », a ainsi estimé Francette Popineau, secrétaire générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, dans les colonnes de France Info.
Et Frédérique Rolet, secrétaire nationale et porte-parole du Snes-FSU, syndicat national des enseignements de second degré, de rajouter : « certaines [fiches] posent problème idéologiquement […] On a l’impression que toute forme de critique est interdite ».
« Une police de la pensée »
Du côté des politiques, Nicolas Dupont-Aignan a dénoncé une fiche « ahurissante », des mots « extrêmement graves » d’un ministère de l’Éducation nationale « qui demande aux enseignants de commencer une police de la Pensée ».
Étonnamment, depuis le samedi 16 mai, plus aucune trace de ces lignes n’apparaît dans la fiche Eduscol. Ces dernières ont disparu, purement et simplement, sans aucune explication ou mise à jour explicite. Preuve que le ministère de l’Éducation nationale a senti le vent tourner. Reste que consigne a bien été passée auprès des enseignants de surveiller la parole des enfants, comme cela avait déjà été le cas lors des attentats islamistes de 2015.
AK
Sources : Breiz-info.
J'accuse la bourgeoisie - R. Poulet
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- Catégorie : MONDIALISME
Le « mondialisme », invention de l’abstraite pensée bourgeoise, ouvrira tôt ou tard le chemin vers la guerre des races.
Robert Poulet
Sources : J’accuse la bourgeoisie – Ed. Copernic 1978.
La dénazification - D. Venner
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- Catégorie : HISTOIRE
Dans une étude qui fait quelque bruit, le politologue allemand Justus Fürstenau estime que la « dénazification » entreprise à partir de 1945 est la cause principale de la dépolitisation de l'Allemagne. La description qu'il en fait est assez convainquante.
Ce spécialiste n'hésite pas à dire que la dénazification était le plus souvent guidée par la haine, l'envie et des motifs personnels fort éloignés de ses buts idéologiques. Beaucoup d'Allemands, qu'ils aient ou non appartenu au national-socialisme, partagent ce sentiment. Le pasteur Martin Niemüller lui-même reconnaissait en 1948 que la confiance dans l'utilité et le bien-fondé de ce processus était entièrement détruite.
Lorsqu'ils découvrirent les camps de concentration, les généraux américains approuvèrent les propos du ministre des finances de Roosevelt, le Juif Henry Morgenthau, dans son livre « Croisade en Europe » (1944) : « Il faut faire comprendre aux Allemands qu'ils ne peuvent pas ne pas être tenus responsables pour ce qu'ils ont fait ».
« La procédure la plus gigantesque que le monde ait connue », suivant la formule du général américain Lucius D. Clay, était entamée afin d'amener les Allemands à se repentir de ce dont les Alliés les accusaient : agressions, conquêtes et génocides. Non seulement il fallait punir les crimes, mais également les opinions nationales-socialistes. On sait que, parmi d'autres, l'ancien dirigeant Julius Streicher qui, hostile à la guerre, se vit retirer toutes responsabilités à partir de 1940, fut néanmoins pendu à Nuremberg comme « criminel de guerre »...
Mais la fantastique épuration voulue par les vainqueurs allait frapper bien au-delà des hauts responsables du IIIe Reich.
Pour la seule zone américaine, 13 millions d'Allemands remplirent le « questionnaire » établi par les autorités d'occupation afin d'éliminer toute trace de national-socialisme, et qui décidait souvent de leur existence. Ils devaient répondre à 131 questions. Leur passé était passé au microscope. Ils devaient signaler aussi bien leur appartenance à une société de joueurs de boules que leurs changements de domicile, les dates et lieux de leurs résidences hors d'Allemagne, le détail de leurs campagnes au cours de la guerre, etc.
C'est à ce fameux « questionnaire » qu'Ernts von Salomon répondit sur 806 pages qui lui donnèrent l'idée de son livre à succès autobiographique tiré à 270.000 exemplaires.
Mais tout le monde n'en tira pas avantage. Pour des millions d'Allemands, le questionnaire les faisait entrer dans un monde kafkaïen de paperasse, de suspicion et d'angoisse interminables. Ils étaient classés en cinq catégories allant de « coupables majeurs » à « innocents ». Au sortir de ce confessionnal collectif de la nation allemande, on expiait le péché de nazisme par de l'argent, de la prison, l'interdiction d'exercer certaines professions ou la confiscation des biens.
En fait de châtier les « infâmes » (Winston Churchill), qui, soit dit en passant, n'avaient pas fait pire que leurs vainqueurs, mais avaient commis l'irréparable erreur d'être vaincus, ces mesures répressives frappaient les petits.
Mais surtout une belle incohérence régnait dans les chambres de dénazification installées par les occupants pour la détermination des sanctions. Un jeune chef de la Jeunesse Hitlérienne fut envoyé en camp de travail pour avoir fait faire des exercices à ses garçons pendant l'heure de la messe « pour énerver le curé ». Un homme qui avait omis de rappeler qu'il avait été planton dans un service administratif du S.D. en 1944 fut condamné à la prison. En revanche, le successeur d'Eichmann, Hermann Krumey, qui avait, dira-t-on par la suite, causé la mort de 300.000 Juifs hongrois, entrait en 1948 dans la catégorie des coupables mineurs (il devait être condamné à la prison perpétuelle en 1969).
Ceux qui en avaient les moyens fuyaient la zone américaine pour la zone française ou britannique où la démilitarisation avait le pas sur la croisade idéologique et le lavage de cerveaux. Quant à la zone soviétique, le passé brun était oublié pour peu que l’on rejoigne le parti communiste.
De simples membres sans importance du parti national-socialiste qui ne voyaient pas l'utilité de telles précautions furent férocement frappés. La répression ne reculait pas devant le ridicule ou l'odieux de mesures prises à l’encontre des personnalités les plus respectables s'il s'attachait à elles un soupçon de sympathie pour le IIIe Reich.
En décembre 1946, la commission de dénazification du milieu artistique fit comparaître le chef d'orchestre Wilhelm Furtwangler, vice-président de la chambre de musique du Reich et accusé par des concurrents bienveillants, d'avoir profité du régime. Furtwangler avait dirigé en 1945 un concert devant de hauts dignitaires du Reich, mais, en 1935 il avait joué ostensiblement du Mendelssohn... Un membre de la commission lui demanda s'il avait seulement à demi fait le salut allemand. Furtwangler ne l'avait fait ni à demi, ni complètement... Il fut disculpé.
A Lutwigsburg, le fils du Kayser, Prinz August-Wilhelm « Auwi », qui appartint dès le début au parti N.S., fut condamné à 30 mois de travaux forcés pour cette seule raison.
Dans cette atmosphère démente, tout devenait bon pour échapper à la machine ubuesque de la répression. On vit d'authentiques nazis menacer d'authentiques antinazis de les dénoncer comme leurs complices s'ils ne leur fabriquaient pas des certificats de « résistance ». Ce devint d'ailleurs pour certains antinazis une activité fort lucrative que cette fabrication de certificats, moyennant quelques redevances. Le médecin déposait une feuille de pétition dans sa salle d'attente et les attestations permettaient d'obtenir de la viande chez le boucher.
C'est un tel certificat qui permit à l'ancien rapporteur des lois raciales de Nuremberg, Hans Globke, de refaire carrière à Bonn. Certificat de poids puisque l'ancien conseiller du Reich était le protégé du procureur américain Kempner dont il avait été le témoin complaisant au Tribunal de Nuremberg.
En fait, la haine politique et la haine personnelle dictait le plus souvent le verdict des chambres de dénazification. Les communistes et socialistes de gauche étaient bien sûr les plus actifs et profitaient de la situation pour frapper les adversaires de leurs idées.
Karl Heinrich Knappstein, haut fonctionnaire du ministère de la dénazification de Hesse, a évoqué « l’incroyable usage fait de la dénazification » qui amenait « le marchand à dénoncer son concurrent, non pour libérer l’Allemagne du nazisme, mais pour éliminer un gêneur et la femme divorcée à dénoncer son mari pour aggraver les torts de ce dernier ».
Mais surtout, les Américains qui arrivaient avec l'idée que la guerre avait comme but la dénazification, voulaient, à toute force, imposer une révolution, mais pratiquement sans les Allemands, dont ils se méfiaient en bloc.
Cela ne devait pas faciliter la remise en marche de l'administration et de l'économie, d'autant que la presque totalité des cadres dirigeants de la société allemande avaient adhéré ou sympathisé avec le N.S.
Dans la première phase de l'épuration, 1 million de fonctionnaires furent licenciés. A Brème, en quelques semaines 2.000 employés de services publics furent suspendus. On marchait droit à l'abîme. Partout, caisses d'épargne et organismes bancaires devaient fermer leurs portes, faute de personnel. Mais, impavides, les Américains poursuivaient leur tâche. En janvier 1946 les nazis et « militaristes » étaient classés en 99 catégories auxquelles étaient promis arrestations, renvois et arrêts de
travail.
Avec bien des hésitations, des inquiétudes et des résistances, les autorités américaines déléguaient en mars 1946 les juridictions d'épuration aux Allemands eux-mêmes.
Le ressentiment de la population allait désormais se porter sur les « dénazificateurs » allemands. Les employés de chambres de dénazification recevaient des lettres de menace. A Nuremberg, en janvier 1947, la salle des délibérations fut entièrement détruite par une bombe. Aussi les volontaires se faisaient-ils rares. En 1947, sur 100 juristes sollicités par les autorités pour siéger dans ces chambres, 93 refusaient sous des prétextes divers. En Bavière, inquiets de voir se fermer devant eux toutes les portes lorsque la dénazification prendrait fin, 41 membres de la chambre démissionnaient. Même le S.P.D. prenait ses distances et l'association des victimes du nazisme (V.V.N.) recommandait à ses membres de se retirer des chambres. Bientôt une loi allait permettre à la République Fédérale de réhabiliter les épurés, hommes de science, politiciens, fonctionnaires, etc. Dans les municipalités on voyait, à partir de 1951, le conseil municipal détruire les dossiers de dénazification de la ville. L'Allemagne tout entière voulut bientôt mettre fin et oublier ce chapitre sombre de l'immédiat après-guerre, dont les conséquences n'allaient, pourtant, pas cesser de se faire sentir.
Dominique VENNER
Sources : Défense de l’occident – Numéro 85 : Novembre 1969
Dominique Venner : 16 avril 1935 - 21 mai 2013 : Présent !
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