Forbidden stories

 

Un consortium de journalistes occidentaux, Forbidden Stories, auquel appartient le service investigation de France Info, lève le voile sur un système de surveillance mis au point par une entreprise israélienne, et vendu à des dizaines d’Etats dans le monde.

Le nom sonne comme celui d’un bon vieux film de science-fiction. Et ce qu’il recouvre aurait, il y a quelques années encore, eu tous les airs d’un bon vieux film de science-fiction. Forbidden Stories, un consortium de journalistes occidentaux auquel participe le service investigation de France Info, lève le voile sur un très vaste réseau de surveillance créé par une entreprise israélienne et vendu à des dizaines d’Etats dans le monde. Le Pegasus Projet, c’est son nom, permet à son utilisateur de pénétrer dans les smartphones de ses cibles et d’avoir accès à tous leurs contenus : photos, messages, mails, contacts, mots de passe, conversations y compris sur les messageries cryptées, géolocalisation, etc. Pegasus est même capable d’activer, à distance, caméra et micro, transformant n’importe quel téléphone en mouchard de poche.

Le créateur ? Une entreprise appelée NSO, qui emploie 750 salariés dans la banlieue de Tel Aviv, et qui vend son outil aux Etats et aux organisations gouvernementales – sous réserve de l’autorisation du gouvernement israélien. Les clients ? Le Mexique, plus gros utilisateur, l’Inde, le Maroc, l’Indonésie, l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis, le Kazakhstan, l’Azerbaïdjan, le Togo, le Rwanda, etc. La Hongrie est le seul utilisateur européen connu à ce jour. Les cibles ? Des responsables politiques, parfois chefs d’Etat. France Info évoque trois chefs européens – dont les identités seront révélées plus tard – des avocats, des militants des droits de l’Homme, des diplomates et des journalistes. En France, 1 000 personnes seraient la cible de Pegasus, avance France Info, surtout à la demande du Maroc. Parmi eux, le fondateur de Médiapart, Edwy Plenel, des journalistes du Monde ou de France 2… ainsi qu’Eric Zemmour.

Pegasus lié à des meurtres de journalistes ?

C’est toute la spécificité du projet Pegasus, explique Laurent Richard, directeur de Forbidden Stories, à France Info : « On a à faire à une société privée qui vend un logiciel extrêmement intrusif à des États connus pour leur politique répressive en matière de droits de l’Homme et contre des journalistes ». L’utilisation de l’outil de surveillance créée par NSO semble, en effet, liée à différentes affaires très sensibles. Au Mexique, plus gros client de NSO, 15 000 personnes ont été placées sous surveillance. Parmi eux, un journaliste, Cecilio Pineda, assassiné en mars 2017… quelques semaines après son entrée dans la base de surveillance de Pegasus. Même topo en Arabie Saoudite, où l’on découvre qu’une large partie de l’entourage du journaliste Jamal Khashoggi, assassiné dans le consulat saoudien d’Istanbul en 2018, figurait dans la liste des numéros surveillés par Pegasus. La Hongrie de Viktor Orban ferait également surveiller plusieurs avocats, ainsi qu’un patron de presse indépendant et quelques journalistes.

En ce qui concerne le Maroc, avancent Forbidden Stories et France Info, les personnalités françaises ciblées seraient principalement choisies « compte tenu de leurs prises de positions considérées comme hostiles au régime ou de leur proximité avec des Marocains perçus comme des opposants ». Ce serait par exemple le cas d’Edwy Plenel, proche de certains milieux réclamant la libération de plusieurs prisonniers politiques marocains. Le Maroc fait d’ailleurs partie des plus gros utilisateurs du service vendu par NSO, les fichiers exhumés par les journalistes de Forbidden Stories évoquant près de 10 000 cibles – dont 10% françaises, donc. La présence d’Eric Zemmour parmi elles n’a pas d’explication claire pour l’heure, sinon peut-être son opposition de principe à l’immigration, y compris maghrébine et a fortiori marocaine, ou ses potentielles ambitions politiques.

Source: Valeurs actuelles

FaLang translation system by Faboba
 e
 
 
3 fonctions