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Activistes climat brandissant les portraits des PDG de grandes entreprises et celui de Macron lors de l’action « République des Pollueurs », 19 avril 2019.

 

La nouvelle Conférence sur les changements climatiques (COP 28), initiée par l’ONU, se déroule du 30 novembre au 12 décembre 2023 à Dubaï (Émirats Arabes Unis). Elle s’accompagne de polémiques et indignations liées au profil du président de cette COP, le sultan Al-Jaber, un acteur très important du monde industriel et financier. Cette situation était pourtant plus que prévisible. Dans son dernier rapport en novembre 2023, l’Observatoire des multinationales a étudié les comptes de quinze très grandes entreprises engagées dans la production d’énergies renouvelables et se présentant comme des championnes de la transition énergétique. Ces géants industriels justifient ainsi les énormes subventions publiques dont ils profitent par ailleurs. La réalité de leur action est pourtant toute autre. L’hypocrisie est flagrante et elle se fait, comme toujours, au détriment des pays et des populations les plus fragiles.

L’Observatoire des multinationales (« Enquêtes et veille citoyenne pour la démocratie économique ») est un site d’information en ligne créé en 2013 par un petit groupe de journalistes engagés politiquement à gauche et dans l’écologie, mais qui pratiquent l’enquête et l’investigation (et non simplement l’opinion ou le commentaire de « l’actualité »). Même toute petite, il s’agit d’une des très rares organisations de journalisme d’investigation, qui a par ailleurs une dimension internationale (indispensable vu le sujet), ce qui donne lieu à des investigations croisées et à la publication de rapports qui sont d’un grand intérêt. Le dernier (« Le vrai visage des multinationales vertes ») porte sur les grandes multinationales de l’énergie et leur prétendue conversion à l’écologie.

Les énormes entreprises énergétiques étudiées sont pour la plupart occidentales. Il s’agit de British Gas/Centrica, EDF Renouvelables, Enbridge, Endesa, E.On, Engie, Iberdrola, NextEra Energy, Ørsted, Southern Company, Vattenfall, Adani Green (Inde), JinkoSolar et Siemens Gamesa (technologies solaires et éoliennes) et Tesla (voitures et batteries électriques). Les comptes ont été étudiés sur la période 2016-2022. Et c’est un secteur très rentable financièrement. Il apparaît ainsi que les quinze entreprises ont consacré plus de 130 milliards de dollars en dividendes et près de 25 milliards de dollars en rachats d’actions, pour un bénéfice total de plus de 175 milliards de dollars. Et ces profits se sont encore accentués durant la crise du Covid, puis avec la guerre en Ukraine. Toutefois, à bien y regarder, il apparaît que ce nouveau développement industriel ne traduit pas du tout un renoncement progressif aux énergies fossiles. Il traduit bien plutôt une adaptation des pratiques industrielles et de la communication/propagande de ces entreprises aux nouvelles normes environnementales internationales, afin de continuer à engranger un maximum de bénéfices. Bénéfices qui ne profitent pas avant tout aux milliards d’être humains concernés, mais aux centaines de dirigeants et de principaux actionnaires de ces grands groupes industriels et financiers.

 

Une conversion écologiste largement hypocrite

L’entreprise américaine NextEra Energy « prétend posséder le plus important portefeuille d’actifs éoliens et solaires au monde et se présente comme une entreprise pionnière en matière d’énergie propre. Pourtant, l’entreprise exploite de nombreuses centrales à énergies fossiles et sept oléoducs et gazoducs. En 2020, 98,9 % des 2,92 milliards de dollars US de profit de NextEra provenaient de deux filiales : FPL et Gulf Power. Cette année-là, FPL a admis que 73 % de son énergie provenait du gaz, tandis que Gulf Power déclarait que 98,7 % de sa production d’énergie provenait du charbon et du gaz ». Et cette hypocrisie n’a pas de limite (nous ne reproduisons pas ici toutes les sources des affirmations du rapport, elles sont aisément vérifiables en ligne).

C’est ainsi que « certaines entreprises autoproclamées ‘vertes’, telles que Southern Company, finançaient la désinformation climatique pas plus tard qu’en 2022. Depuis les années 1990, l’entreprise a dépensé au moins 62 millions de dollars pour financer le déni du changement climatique, soit presque deux fois plus que les 33 millions de dollars dépensés par Exxon pour des organisations climato-sceptiques au cours de la même période ». Mieux encore : « le groupe indien Adani est allé jusqu’à utiliser sa filiale d’énergie renouvelable Adani Green pour financer ses activités dans le charbon. Des enquêtes menées suite à un rapport de la société de recherche en investissements Hindenburg ont révélé que le groupe Adani avait utilisé des actions d’Adani Green comme garantie pour obtenir une facilité de crédit de plusieurs millions destinée à financer son projet de charbon en Australie ». De telles pratiques feraient peut-être plus facilement scandale en Europe. Les multinationales concernées ont donc adopté d’autres tactiques et techniques. Ainsi, « certaines entreprises européennes sensibles à la pression de l’opinion publique ont vendu leurs actifs liés aux énergies fossiles à des entreprises moins exposées. Si cela contribue à ‘verdir’ le portefeuille des entreprises qui se défont de ces actifs, cela n’entraîne aucune réduction effective de la consommation d’énergies fossiles ni des émissions de gaz à effet de serre qui en résultent ». En France, par exemple, le groupe ENGIE, qui communique beaucoup sur les énergies renouvelables, « s’est contenté dans la majorité des cas de revendre ses actifs dans le secteur du charbon à des tiers au lieu de les fermer. En 2017, Engie a également vendu certains de ses actifs gaziers à Total. Les émissions de gaz à effet de serre sont restées les mêmes, mais Engie a soigné son image ».

 

L’écoblanchiment ou Greenwaching

« Le greenwashing ou écoblanchiment désigne la pratique consistant à promouvoir à tort les efforts environnementaux d’une organisation ou à consacrer plus de ressources à la promotion de l’organisation en tant qu’organisation verte qu’à la mise en œuvre effective de pratiques respectueuses de l’environnement. L’écoblanchiment est donc la diffusion d’informations fausses ou trompeuses concernant les stratégies, les objectifs, les motivations et les actions d’une organisation en matière d’environnement ». Et c’est une pratique courante.

Ainsi, à l’image de EDF et ENGIE en France, « de nombreuses compagnies d’électricité en Europe utilisent des certificats verts pour dissimuler le fait qu’elles restent dépendantes des énergies fossiles et d’actifs nucléaires. Des ‘certificats d’origine renouvelable’ sont attribués aux entreprises pour chaque unité d’électricité renouvelable qu’elles produisent, qui peuvent être revendus à d’autres entreprises indépendamment de l’électricité renouvelable à laquelle ces certificats étaient précédemment attachés. Les entreprises qui achètent ces certificats peuvent donc faire impunément du ‘greenwashing’ en se présentant comme des fournisseurs d’énergie renouvelable, même sans aucun investissement dans la production d’électricité solaire ou éolienne ou sans modification de leur mix énergétique ». L’Anglais British Gas va encore plus loin. L’entreprise est la plus grosse utilisatrice de « certificats verts » au Royaume-Uni : elle a acheté plus de 20 millions de certificats à un peu plus d’une livre sterling par client et par an depuis 2019, et elle propose à ses clients un tarif « électricité 100 % renouvelable » composé de 10 % de biométhane et de 90 % de compensation carbone. Or, « la compensation carbone repose sur des projets de développement, souvent dans des pays à faibles revenus, associés à des déplacements de populations, à l’accaparement de terres et à la création de monocultures ». Qu’à cela ne tienne, « grâce à la compensation et à la certification, British Gas se présente comme une entreprise écologique, bien que sa société mère, Centrica, ait revendu tous ses actifs éoliens en 2017, et que l’énergie solaire ne représente que 4 % de son mix énergétique ».

 

La manne de l’argent public… qui ne profite pas au public

Cette vaste opération de verdissement apparent des pratiques industrielles se fait en raison de la pression politique internationale et par le biais des aides financières publiques : subventions directes, prix d’achat garantis, contrats d’achat d’électricité avec les gouvernements ou les entreprises publiques, crédits d’impôt. Tout ceci se faisant avec l’argent du contribuable, on s’attendrait à ce que le bénéfice lui revienne. Or tel n’est pas le cas. La facture énergétique des particuliers ne cesse d’augmenter. Au fond, ils « paient pour le retour sur investissement des multinationales ». Et pendant ce temps-là, les multinationales concernées engrangent des profits gigantesques, dont elles redistribuent l’essentiel à leurs actionnaires plutôt que d’investir dans la production d’énergies réellement « vertes ». Au final, « alors que les entreprises affirment qu’elles ont besoin d’un soutien massif de l’État pour que les énergies vertes soient suffisamment rentables, dans un système privatisé, ce soutien public ne fait qu’augmenter les profits privés, favorisant les intérêts des actionnaires plutôt que l’investissement dans la transition énergétique. C’est un parfait exemple de socialisation des coûts et de privatisation des profits ».

Pire : ces entreprises manipulent les marchés pour jouer sur le prix de l’énergie et faire encore plus de bénéfices par la spéculation. Prenons cette fois-ci un exemple espagnol. En 2015, la Commission nationale des marchés et de la concurrence a estimé que la société Iberdrola avait manipulé le prix de l’électricité et lui a imposé une amende de 25 millions d’euros. En 2019, c’est la Commission nationale espagnole des marchés boursiers qui a infligé à l’entreprise Endesa une amende de 5,8 millions d’euros, constatant que cette entreprise « avait manipulé le marché de l’électricité pour augmenter les prix de gros entre octobre 2016 et janvier 2017, ce qui coïncidait avec le pic de la demande dû à la baisse des températures ». Et en 2021, Iberdrola « a été accusée d’avoir provoqué une ‘fausse sécheresse’ en vidant le réservoir de Valdecañas en Estrémadure, au détriment de l’approvisionnement en eau de la population. La multinationale affirme que cette opération était nécessaire pour produire de l’électricité dans le contexte d’une vague de chaleur. Cependant, elle l’a fait alors que le prix de l’électricité était très élevé, réalisant ainsi des bénéfices qui ont donné lieu à une enquête du ministère espagnol de l’Environnement ». Lequel a « conclu que l’opération était légale, mais que ce type de comportement irresponsable ne devrait pas être autorisé ».

La plupart des multinationales étudiées ont également bien profité de la guerre en Ukraine, beaucoup (comme BP, Shell, Endesa, Southern et British Gas) ont même engrangé des profits records. En France, « les bénéfices d’Engie ont également doublé au premier semestre 2022 par rapport au premier semestre 2021, l’entreprise ayant bénéficié de la hausse des prix de son activité gazière en Europe ainsi que de l’augmentation des prix facturés pour l’énergie renouvelable qu’elle produit ».

 

Des projets industriels « verts » qui se font au détriment des populations les plus fragiles et de l’environnement

Derrière la conversion apparente aux énergies vertes se cachent des réalités plus terribles encore. D’abord le fait que « les multinationales ont besoin de vastes surfaces de terres pour construire d’immenses parcs éoliens terrestres, des parcs solaires et des centrales hydroélectriques – des terres qu’elles obtiennent souvent en privant les communautés autochtones et rurales de leur accès traditionnel. De nombreux conflits fonciers ont été documentés au Mexique (Iberdrola), au Honduras (Siemens Gamesa), en Inde (Adani Green), au Sahara occidental (Siemens Gamesa) et même en Espagne (Iberdrola). Tout cela au nom de la ‘sauvegarde du climat’ ». En Inde, la construction du parc solaire de Kamuthi a occupé 2000 hectares de terres (y compris des zones humides reclassées). L’entreprise Adani Green a clôturé les sources d’eau et « pompé d’énormes quantités d’eau souterraine pour nettoyer ses panneaux solaires, ce qui a entraîné l’épuisement des nappes phréatiques locales. L’entreprise s’est ensuite tournée vers le dessalement de l’eau, et a été accusée de déverser ses résidus salins toxiques et de contaminer ainsi les sols ». Aux États-Unis, un oléoduc d’Enbridge traverse les territoires indiens du Minnesota et occasionne un nouveau conflit. Au Mexique, les projets de la société Gamesa se font au détriment des populations locales, Zapotèques et Huaves, lesquels « affirment que les parcs éoliens empêchent l’accès à leurs terres agricoles, à leurs sanctuaires sacrés, ainsi qu’à leurs herbes et plantes médicinales. Des militants de l’Assemblée populaire de Juchitán, qui s’opposent aux projets éoliens, auraient été harcelés et même assassinés ».

Un autre exemple majeur de cette hypocrisie industrielle est la production des voitures électriques, ce nouvel objet phare de l’industrie automobile à destination aussi bien des particuliers que des entreprises et des services publics. Or, la réalité est que les entreprises comme Tesla et Siemens Gamesa « achètent du cobalt à la mine de cuivre de Glencore dans la région du Katanga, en République démocratique du Congo, accusée de recourir au travail des enfants ». De même, « Siemens Gamesa utilise du néodyme pour l’aimant permanent de ses éoliennes. Environ 90 % de l’approvisionnement mondial provient de Chine, notamment de Baotou, la plus grande ville industrielle de Mongolie intérieure, où le néodyme est extrait via un procédé utilisant du thorium et de l’uranium. Les déchets sont ensuite déversés dans un bassin de boue et de déchets toxiques de 120 kilomètres carrés, qui s’écoule lentement dans le fleuve Jaune, l’une des principales sources d’eau de Chine ». De même encore, le rapport de l’Observatoire des multinationales montre que, régulièrement, ces dernières « violent les droits des travailleurs en matière de salaires, de travail forcé, de lutte contre les syndicats et de conditions de travail dangereuses ». Aux États-Unis, Tesla (la société d’Elon Musk) a été à plusieurs reprises accusée de violation des droits syndicaux et de licenciement abusif. Même en France, il apparaît que « le personnel d’EDF Renouvelables est plus jeune avec des contrats plus précaires, avec un taux de rotation plus élevé. Le modèle économique de l’entreprise repose davantage sur la sous-traitance opérationnelle des projets qu’elle construit et gère. Dans les pays hors de France, le personnel d’EDF Renouvelables n’est souvent peu ou pas syndiqué, par contraste avec le personnel du groupe EDF ».

Ensuite, la production d’énergies « vertes » se fait souvent au prix de la création de nouvelles pollutions dégradant l’environnement et l’état de santé général des populations habitant près des zones de production. La production des voitures électriques en constitue un exemple saisissant. Elle nécessite en effet la production de métaux dits « de transition », qui sont en réalité gravement toxiques : cobalt, nickel, lithium. On lira à ce propos la série d’articles issus de l’enquête de Célia Izoard dans Reporterre.

 

L’arnaque des contrats d’achat d’électricité (CAE)

Les CAE « sont des contrats à long terme entre des producteurs d’électricité et des clients, généralement un gouvernement, un service public ou une autre entreprise. L’établissement de contrats d’achat d’électricité avec d’autres multinationales est l’un des principaux objectifs des multinationales ‘vertes’. Ainsi, la transition se développe selon les intérêts des grandes entreprises, plutôt que selon les besoins des communautés ». Lorsque ces multinationales passent des CAE avec des Etats ou des entreprises publiques, cela se fait au prix fort. Et ce sont encore des fonds publics qui viennent aider ces entreprises, en particulier « dans la maintenance et l’extension des réseaux de transport nécessaires pour faciliter le flux d’électricité depuis les installations de production jusqu’aux sites de consommation ». Et ce, même lorsque les entreprises de l’énergie signent des CAE entre elles mais aussi avec des géants d’autres domaines tels que Google, Amazon, Procter & Gamble ou BASF, qui ont bien compris également l’aubaine. Il s’agit pourtant encore d’écoblanchiment, à l’exemple du récent CAE conclu par la société espagnole Iberdrola avec Amazon : « les parcs éoliens d’Iberdrola alimentent les centres de données d’Amazon, ce qui permet à cette entreprise de se présenter comme ‘verte’, alors qu’elle est impliquée dans de multiples formes d’activités nuisibles au climat, qu’il s’agisse de fournir un soutien technologique aux activités d’extraction pétrolière de BP et de Shell ou de promouvoir le consumérisme de masse ».

Et il y a plus encore : « les énergies renouvelables décentralisées et à plus petite échelle, détenues par les communautés ou des individus, constituent une menace pour leur modèle économique. En conséquence, certaines multinationales sont allées jusqu’à saper activement l’expansion des énergies renouvelables résidentielles ». Par exemple, aux États-Unis, il y a dix ans, Southern « a imposé une redevance mensuelle de 5 dollars par kilowattheure à tout client produisant de l’énergie solaire en Alabama. Cette mesure a eu pour effet de tuer le secteur dans l’État. L’entreprise a tenté d’imposer des frais similaires en Géorgie, mais les électeurs ont rejeté la mesure. Aujourd’hui, la Géorgie compte dix fois plus d’installations solaires résidentielles que l’Alabama ». Autre exemple encore plus édifiant : l’entreprise américaine NextEra, qui se présente comme l’un des plus grands producteurs d’énergie renouvelable au monde, « a utilisé toute une série de tactiques politiques douteuses pour saper les énergies renouvelables décentralisées ». NextEra a ainsi collaboré avec Consumers for Smart Solar, un groupe d’astroturfing (ensemble de techniques de propagande à des fins commerciales ou politiques), pour contrer les campagnes menées en Floride en faveur de l’énergie solaire résidentielle locale. Sa filiale Florida Power & Light a même « cherché à influencer une législation pour restreindre l’adoption de l’énergie solaire résidentielle en Floride ». NextEra a également collaboré avec des cabinets de lobbying pour s’opposer à cette augmentation de l’énergie solaire résidentielle en Floride. Or, « La société de lobbying Matrix Group, embauchée à cette fin par NextEra, est impliquée dans des allégations de corruption et de tentatives d’éviction de candidats politiques, le tout dans le but d’empêcher l’adoption d’une nouvelle législation en faveur de l’énergie solaire résidentielle ».

 

Une vaste supercherie qui renforce le pouvoir des multinationales privées au détriment des intérêts publics

Les multinationales capitalistes ont ainsi parfaitement intégré les nouvelles politiques publiques environnementales. Elles les intègrent dans leur modèle économique en subvertissant leurs objectifs et elles en profitent même pour renforcer encore leurs positions sur les marchés, en absorbant ou en évinçant peu à peu les initiatives locales et les petites entreprises publiques, privées ou coopératives. C’est ainsi que, « en France, Engie a développé son portefeuille d’énergies renouvelables par l’acquisition de petites entreprises, notamment Solairedirect pour le solaire et La Compagnie du Vent pour l’éolien. Engie, ainsi que les deux autres géants français de l’énergie, EDF et Total, ont utilisé leur puissance financière pour absorber ou évincer la plupart des concurrents potentiels qui, contrairement à ces multinationales, n’étaient actifs que dans le secteur des énergies renouvelables. Par ailleurs, la législation française ne permet pas le développement de producteurs ou de distributeurs locaux, à but non lucratif, publics ou coopératifs, comme c’est le cas en Allemagne. En conséquence, les trois géants ont pris le contrôle de la transition énergétique en France, en ont dicté le rythme et se sont assurés la plupart des bénéfices à en tirer ».

Enfin, tout ceci ne fait que renforcer le pouvoir et la richesse de ces multinationales qui, en retour, pèsent de plus en plus lourds sur les politiques publiques et dans les négociations internationales autour des règlementations. En Espagne, « il existe des ‘portes tournantes’ avérées entre le gouvernement et Endesa et Iberdrola : de nombreux ex élus et fonctionnaires viennent occuper des postes de haut niveau dans ces entreprises, tandis qu’en sens inverse des employés d’Endesa et d’Iberdrola se frayent un chemin au sein du gouvernement ». Même chose au Royaume-Uni avec des détachements de personnel entre le gouvernement et British Gas et d’autres entreprises du secteur de l’énergie. En France, « le trio dominant Engie, EDF et Total a pris le contrôle du Syndicat des énergies renouvelables (SER). Il en résulte une situation paradoxale où le lobby chargé de défendre la transition vers les énergies renouvelables est contrôlé par un trio de sociétés géantes dont les modèles économiques restent liés à la poursuite de la consommation d’énergies fossiles ou nucléaire ».

Comme toujours, trafic d’influence et corruption font partie des stratégies industrielles pour parvenir à leurs fins. En l’occurrence, « ces entreprises utilisent cette influence pour privilégier le type de projet à grande échelle qui leur est le plus favorable, pour obtenir davantage d’aides publiques et pour plaider en faveur de l’élimination des régulations environnementales et sociales en matière de projets d’énergies renouvelables ». Et si les choses ne peuvent se régler en douceur, elles n’hésitent pas à affronter les États. Par exemple, en Allemagne, la société Vattenfall a poursuivi en justice le gouvernement en 2009, réclamant une compensation de 1,4 milliard d’euros pour avoir imposé des normes environnementales strictes afin de protéger l’Elbe des retombées d’une énorme centrale au charbon à Hambourg. Et elle a gagné puisque le gouvernement allemand a finalement accepté de régler l’affaire à l’amiable en revenant sur ses mesures de protection de l’environnement.

 

Business as usual

Ainsi, les multinationales impliquées dans « la lutte pour la transition énergétique » n’ont que faire de ladite transition. Leur objectif est et reste la rentabilité maximale, la maximisation des rendements financiers. Et ceci n’est pas surprenant dans la mesure où « ce sont des fonds d’investissement comme BlackRock qui dictent leur stratégie ». Ces multinationales détournent à leur profit les énormes subventions publiques (l’agence internationale pour les énergies renouvelables a déclaré récemment que les investissements annuels dans le secteur devraient plus que quadrupler et dépasser les 5 000 milliards de dollars) décidées pour favoriser la transition énergétique. Depuis la crise du Covid et la guerre en Ukraine, tandis que les populations subissent l’inflation, la hausse des coûts de l’énergie et la réduction de leur pouvoir d’achat, l’enrichissement des multinationales de l’énergie est au contraire colossal. D’abord pour les patrons des treize grandes entreprises étudiées, qui ont gagné au total 137 millions de dollars en 2022 (le mieux payé étant le patron de NextEra, qui a gagné 17,4 millions de dollars en 2022). Viennent ensuite les actionnaires : « ces entreprises ont versé un total combiné de 130,77 milliards de dollars en dividendes et 24,8 milliards de dollars en rachats d’actions entre 2016 et 2022 ».

Et pendant ce temps-là, d’une part les émissions de CO2 liées à l’énergie continuent d’augmenter (elles ont même atteint un niveau record en 2022), d’autre part le nombre de personnes qui n’ont pas accès à l’électricité dans le monde devrait augmenter pour la première fois depuis des décennies.

 

COP28 : faux-semblants, jeu de dupes et indignations de circonstance

Les questions soulevées dans ce bref article sont à la fois d’un intérêt majeur, d’une relative complexité et d’une difficulté certaine à enquêter. C’est pourquoi, tandis que nous sommes tous noyés dans la marée médiatique quotidienne des faits divers en tous genres, des indignations faciles et des péroraisons sans fin qu’ils occasionnent, il est crucial de soutenir les personnes et les organisations qui tentent d’apporter objectivement de la lumière sur les véritables forces qui meuvent notre monde. En l’occurrence, la première chose à faire est de soutenir financièrement les rarissimes journalistes d’investigation qui tentent d’échapper au modèle économique archi-dominant des médias, à l’image donc de cet Observatoire des multinationales (voir son appel à l’aide) dont nous saluons ici le travail. De la même façon, il est important de connaître et de suivre le développement du sous-domaine scientifique que les anglo-saxons appellent la Green Criminology, c’est-à-dire l’ensemble des recherches visant à conceptualiser et à investiguer ce nouveau champ de la criminalité environnementale lié prioritairement à la criminalité des entreprises (Mucchielli, Salles, 2019 ; Mucchielli, 2023b).

Ensuite, il apparaît crucial d’utiliser ces savoirs pour sortir des faux-semblants et des jeux de dupes qu’occasionne quotidiennement le débat sur l’environnement et le climat. L’actualité en offre un bon exemple avec la COP28 (28ème Conférence des Parties sur les changements climatiques), organisée à Dubaï par les Émirats Arabes Unis du 30 novembre au 12 décembre 2023. Le fait qu’elle soit présidée par le sultan Al-Jaber de Dubaï, qui est également le patron de Masdar (géant émirati des énergies renouvelables) ainsi que de la grande compagnie pétrolière Adnoc, a donné lieu à de multiples indignations médiatiques occidentales. Après ce que nous venons d’écrire, il est pourtant permis de considérer que cette indignation constitue une terrible naïveté, ainsi parfois que l’expression d’une sorte de mentalité post-coloniale persistante. En effet, l’homme en question est tout sauf un inconnu et n’a rien du bédouin sur son chameau devenu soudainement un roi du pétrole, tel que certains commentateurs occidentaux semblent le fantasmer, méconnaissant tant le parcours de l’individu concerné que, plus globalement, l’histoire arabe du pétrole (Pétriat, 2021). Titulaire d’un doctorat en commerce et en économie de l’université de Coventry (Royaume-Uni) ainsi que d’un master en Business administration de l’université publique de Los Angeles (USA), le sultan de Dubaï a donc étudié le génie chimique et pétrolier et s’est formé au management et aux affaires financières au cœur du capitalisme financier anglo-saxon. Et il a lui aussi parfaitement compris les enjeux tant politiques qu’économiques et financiers des « énergies renouvelables ». En témoignent ses efforts, couronnés de succès, pour que le siège de l’Agence internationale pour les énergies renouvelables soit fixé aux Émirats Arabes Unis, comme c’est le cas depuis la création de cette organisation internationale en 2009. La même année, il était nommé membre du Groupe consultatif sur l’énergie et le changement climatique (AGECC) par le secrétaire général de l’ONU de l’époque, le coréen Ban Ki-Moon, dont on connaît par ailleurs les plaidoyers pour une « gouvernance mondiale du climat » et le rôle dans l’organisation de la conférence internationale ayant débouché sur l’Accord de Paris sur le climat en 2015 (Aykut, Dahan, 2015). En 2012, l’ONU (par le biais du Programme des Nations Unis pour l’Environnement) récompensera même le sultan en le nommant « Champion de la Terre», ce qui constitue « la plus haute distinction environnementale de l’ONU », qui « récompense des personnes et des organisations issues de divers domaines, notamment la société civile, le monde universitaire et le secteur privé, qui ouvrent la voie dans leurs efforts pour protéger notre monde naturel ». C’est donc en réalité sans surprise qu’en 2023, il se retrouve le premier président d’une COP à être, par ailleurs, patron d’un très grand groupe industriel pétrolier privé.

Loin d’être anachronique, ce profil illustre au contraire une modernité certaine. De même, Mike Davis (2007) a montré depuis longtemps que Dubaï n’est pas un caprice d’enfants gâtés mais une caricature du capitalisme contemporain, une sorte d’hyper-capitalisme construit et exploité « sous les applaudissements des milliardaires et des multinationales du monde entier » qui en profitent à titre privé et qui y expérimentent également de nombreux projets industriels et commerciaux. Il semble ainsi possible et même raisonnable de considérer 1) que l’organisation et le déroulement de cette COP28 n’ont rien de surprenant ou de saugrenue mais sont au contraire dans la logique des choses, 2) que les conflits d’intérêts et les contradictions de son président dont la « révélation » a récemment « fait scandale » étaient en réalité un secret de polichinelle et 3) que le sultan en question assume simplement au grand jour la vaste hypocrisie que les élites occidentales tentent de dissimuler à leurs populations.

On est alors tenté de résumer ainsi les termes de cette hypocrisie : face à la pression croissante qu’exercent les gouvernements des pays occidentaux et les organisations internationales sur des multinationales et des industriels qui sont de fait les premiers responsables de la destruction progressive de notre planète, ces derniers s’adaptent comme ils l’ont toujours fait, en suivant le but premier et permanent des entreprises capitalistes qui n’est pas d’accroître le bien-être de l’humanité mais de maximiser leurs profits financiers par tous les moyens possibles, en considérant la nature comme « une sorte de domaine livré à l’homme pour être exploité » comme disait Jacques Ellul (voir la discussion in Mucchielli, 2023a, 18sqq).

L’on est également tenté de souligner une deuxième hypocrisie majeure, que révèle notamment l’exemple des voitures électriques : pour tranquilliser la (bonne) conscience occidentale et remplir les objectifs statistiques internationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les industriels nous invitent à « rouler propre » et chacun en Occident se réjouit de cette « révolution » en prenant bien soin de passer sous silence le fait que la révolution en question se fait au détriment des pays pauvres où sont extraits les minéraux ultrapolluants nécessaires à la fabrication des dites voitures, dans des conditions qui dégradent encore plus les droits, la dignité, la sécurité et la santé de populations parmi les plus miséreuses et les plus dominées.

Enfin, si le lecteur nous a suivi jusqu’ici, nous serions tenté de souligner pour finir que tout ce débat est intimement lié à deux autres phénomènes qui traversent de façon globale l’histoire contemporaine du capitalisme.

 

Repenser la corruption dans les sociétés occidentales contemporaines

Le premier est la corruption des élites occidentales, dont l’étendue comme l’intensité sont gravement sous-estimées ce qui, là encore, semble directement lié à cette mentalité post-coloniale (Mucchielli, 2015). Certes, la corruption de dirigeants, d’entrepreneurs et de fonctionnaires est facile à observer (voire à expérimenter pour un voyageur de tourisme ou d’affaires) dans nombre de pays pauvres. Mais cela ne signifie ni que ces formes de corruption sont les seules possibles, ni que les pays riches y échappent comme par enchantement ; sauf donc à croire en une forme de supériorité morale des occidentaux (au cœur de leur « civilisation »), ce en quoi consiste précisément la mentalité postcoloniale déjà évoquée. La réalité est bien différente.

Si l’on ne rencontre plus guère en Occident ces formes de corruption relativement simples, directes et connues de tous, d’autres s’y pratiquent, de façon beaucoup plus discrète et à une échelle financière bien supérieure. Nous faisons même, avec d’autres (par exemple Garapon, 2014 ; Gayraud, 2014 ; Alt, Van Beneden, 2022), l’hypothèse que la corruption des élites au sein des pays riches, loin d’être en voie de disparition, s’est au contraire accrue et systématisée au cours des dernières décennies, en lien avec d’une part la concentration progressive des entreprises que l’on constate dans la plupart des secteurs économiques, d’autre part la financiarisation et la mondialisation des marchés. La conjugaison de ces deux phénomènes économiques conduit à la constitution d’énormes multinationales dont le chiffre d’affaires est supérieur à la plupart des États du monde (Baucher, 2007 ; Chavagneux, Louis, 2018). Face à des géants économiques et financiers, on comprend que les pouvoirs publics sont dans une position de plus en plus délicate dans les négociations que suppose toujours l’adoption de nouvelles normes environnementales et climatiques. Par exemple, ceci se constate systématiquement dans les débats récurrents sur les normes encadrant l’usage des pesticides dans l’agriculture industrialisée (une des principales causes de destruction du vivant par empoisonnement progressif des espèces, y compris l’espèce humaine), à l’échelle nationale comme à l’échelle européenne (Jouzel, 2019). On comprend également que, dans un tel système, il est beaucoup plus facile de culpabiliser et de taxer les particuliers plutôt que de harceler les multinationales. Le constat est classique (voir par exemple Boutaric, 2014). Il n’a fait que se renforcer ces dernières années. Comme le dit justement Mickaël Correia en ouverture de son livre (2022, p. 5-7) : « dès son arrivée au pouvoir, Emmanuel Macron a pu déployer sa politique de procrastination climatique en s’appuyant sur un récit dominant : la lutte contre la menace climatique serait une question de discipline individuelle. De Jacques Attali, à travers ses rapports prônant un capitalisme vert, à Pierre Rabbi via sa fable du colibri qui ‘fait sa part’ en jetant des gouttes d’eau sur un incendie, tous clament que l’on pourra mettre fin à la catastrophe en cours en adoptant au quotidien des gestes écoresponsables ». Cette « morale écologique » visant à discipliner les citoyens « permet avant tout d’invisibiliser la structure sociale de la crise climatique. De masquer les moteurs de l’embrasement de la planète. En somme, de détourner notre attention politique des véritables fossoyeurs du climat ».

Derrière cette grande diversion, se cache le fait que la puissance décuplée de ces multinationales accroît donc aussi leurs moyens de communication, de propagande, de trafic d’influence et de corruption. Il n’y a jamais eu autant de lobbyistes dans les couloirs des assemblées politiques et des congrès internationaux (quelque 2 500 lobbyistes sont présents à la COP28, soit quatre fois plus qu’à la précédente), jamais autant de publicité dans les médias, jamais autant de financements industriels dans le budget des médias (ici l’exemple du milliardaire tchèque Daniel Křetínský, propriétaire de Marianne, actionnaire du Monde et de TF1, soutien financier de Libération) et jamais autant de moyens de soudoyer les personnes comme les organisations. Et ceci se constate dans de nombreux autres secteurs économiques. La crise du Covid et sa prétendue « solution vaccinale » l’a également dramatiquement illustré, après bien d’autres scandales générés par les pratiques des industries pharmaceutiques (Mucchielli, 2022, Sismondo, 2023). Un peu partout se constatent désormais au grand jour cet envahissement massif des discours publics vantant la doctrine du partenariat public/privé, cet entremêlement des financements privés et publics, cette disparition des fonctions publiques de régulation, de contrôle et de protection des populations, ainsi que la banalisation des pratiques de ce que l’on appelait autrefois pudiquement le pantouflage et que l’on pouvait encore croire limitées à quelques secteurs économiques précis alors qu’elles sont devenues générales. Il est désormais considéré comme normal que les ministres, les parlementaires et les hauts fonctionnaires qui peuplent leurs cabinets quittent leur emploi (à l’issue de leurs mandats pour les élus, en se mettant en disponibilité pour les fonctionnaires) pour partir travailler dans les secteurs économiques en lien direct avec les fonctions publiques qu’ils occupaient (phénomène dont les journalistes de l’Observatoire des multinationales ont également bien pris conscience et qu’ils appellent « les portes tournantes »). Le moins que l’on puisse dire est qu’il en découle un « grand brouillage » de la frontière entre les intérêts publics et privés (France, Vauchez, 2017 ; Cassia, 2018), et que l’on peine de plus en plus à voir ce qui distingue les contrôleurs des contrôlés ou, pour le dire de façon un peu provocatrice, ce qui distingue les gendarmes des voleurs. Une telle doctrine et un tel entremêlement des personnes et des réseaux sont à n’en pas douter de redoutables accélérateurs de corruption. Il paraît crucial de l’investiguer encore davantage.

 Laurent Mucchielli - 11/12/2023

 

Références

Alt E., Van Beneden E. (2022), Résister à la corruption, Paris, Gallimard.

Aykut S., Dahan A. (2015), Gouverner le climat ? 20 ans de négociations internationales, Paris, Presses de Science-Po.

Baucher P. (2007), Concentration des multinationales et mutation des pouvoirs de l’État, Paris, CNRS éditions.

Boutaric F. (2014), Pollution atmosphérique et action publique, Paris, Éditions rue d’Ulm.

Cassia P. (2018), « La perméabilisation en marche des activités publiques et privées », Mediapart, 30 mars [en ligne].

Chavagneux C., Louis M. (2018), Le pouvoir des multinationales, Paris, Presses Universitaires de France.

Correia M. (2022), Criminels climatiques. Enquête sur les multinationales qui brûlent notre planète, Paris, La Découverte.

Davis M. (2007), Le stade Dubaï du capitalisme, Paris, Les Prairies ordinaires.

France P., Vauchez A. (2017), Sphère publique, intérêts privés. Enquête sur un grand brouillage, Paris, Presses de Sciences Po.

Garapon A. (2014), « La peur de l’impuissance démocratique », Esprit, 2, p. 19-30.

Gayraud J.-F. (2014), Le nouveau capitalisme criminel, Paris, Odile Jacob.

Izoard C. (2020), « Les fausses promesses de la voiture électrique », Reporterre, 30 décembre 2020 [en ligne].

Jouzel J.-N. (2019), Pesticides : comment ignorer ce que l’on sait, Paris, Presses de Sciences-Po.

Mucchielli L. (2015), « L’ampleur et l’étendue de la délinquance des élites », in Bonfils P., Mucchielli L., Roux A. (dir.), Comprendre et lutter contre la corruption, Aix-en-Provence, Presses de l’Université d’Aix-Marseille, p. 33-48.

Mucchielli L. (2022), La doxa du Covid. Peur, santé, corruption et démocratie, Bastia, éditions Éoliennes.

Mucchielli L. (20203a), Défendre la démocratie : une sociologie engagée, Bastia, éditions Éoliennes.

Mucchielli L. (20203b), « Les enjeux du développement de la criminologie environnementale », in Ajil A., Kuhn A., Schwarzenegger C., Vuille J. (eds.), Alternativen : Von deralternativen Sanktion zur alternativen Kriminologie. Alternatives : de la sanction alternative à la criminologie alternative, Basel, Helbing Lichtenhahn Verlag, 2023, p. 275-286 [en ligne].

Mucchielli L., Salle G. (2019), « La criminalité environnementale : état des lieux et perspectives », Déviance et société, 2019, n°4 [en ligne].

Pétriat P. (2021), Aux pays de l’or noir. Une histoire arabe du pétrole, Paris, Gallimard.

Sismondo S. (2023), Le management fantôme de la médecine. Les mains invisibles de Big Pharma, Paris, ENS éditions.

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