Les Suisses sont connus pour être des personnes prudentes . C'est donc avec étonnement, mais surtout beaucoup d'intérêt, que j'ai lu l'enquête réalisée par le journal suisse Le Temps consacrée à la disparition programmée du cash dans nos sociétés.
En effet, des pays comme le Danemark étudient la possibilité de supprimer le cash. D'autres, comme la France, la Belgique ou l'Espagne, interdisent déjà les transactions en cash au-delà d'un certain montant. Et des banques américaines comme JP Morgan ont interdit à leurs clients de déposer des espèces dans les coffres qu'ils louent. Mais cela ce n'est que la partie émergée de l'iceberg.
En réalité, comme le rappelle le journal suisse Le Temps, des économistes de renom plaident pour la disparition du cash. Officiellement, c'est pour lutter contre le blanchiment d'argent, le crime organisé, le terrorisme ou la fraude fiscale, sans oublier que le secteur bancaire est en faveur de cette suppression du cash uniquement dans le but de "nous simplifier la vie". Cependant, la suppression du cash serait une attaque contre nos libertés, selon d'autres commentateurs dont Simone Wapler, la très avisée rédactrice de la lettre d'information financière La Stratégie de Simone Wapler.
Sans le cash, il suffira d'un "clic" pour que votre argent soit bloqué !
En fait, comme nos gouvernements sont surendettés, aucune transaction, même la plus petite, ne doit leur échapper. Or, quoi de plus simple que de lever des impôts supplémentaires quand il n'y a plus de cash ? Le jour où tous vos avoirs seront bancarisés sous forme de livrets ou comptes d'épargne, que vos déclarations d'impôts, vos facturations, vos numéros de compte, vos allocations, vos salaires et bientôt vos dépenses de santé seront en ligne, et comme tout cela est connecté, il suffirait en gros d'un "clic" pour que votre argent, votre propriété soit... bloquée !
Quant aux banques, leur pire cauchemar, c'est qu'en cas de manque de confiance, les épargnants sortent leur argent de la banque - c'est ce qu'on appelle le "bank run". Mais là encore, s'il n'y a plus de cash, il n'est plus possible de quitter sa banque, comme l'indique Simone Wapler. Priver les déposants de la faculté de retirer des billets permet de les garder captifs !
Sans compter que s'il n'y a plus de cash, les autorités monétaires peuvent nous imposer un taux d'intérêt négatif sur nos comptes bancaires, car comme il n'y a plus de cash, nous ne pouvons pas retirer nos avoirs. Or, comme l'a fait remarquer un économiste de la banque américaine Citibank, si la Banque centrale américaine avait pu imposer un taux d'intérêt négatif de 6%, elle aurait pu limiter la crise de 2008 !
En résumé, je ne dis pas que ce scénario envisagé par des personnes sérieuses, et notamment par le journal suisse Le Temps, va se produire, mais c'est vrai qu'il faut bien reconnaître que l'existence du cash dans nos sociétés permet d'échapper aux taux négatifs, à l'impôt arbitraire et à la faillite d'une banque. Donc, ces commentateurs - que certains considéreront comme des visionnaires et d'autres comme des fous - considèrent qu'il faut en quelque sorte prendre le maquis, entrer en résistance et défendre coûte que coûte une société avec du cash. Comment ? En utilisant au maximum le cash, car il est plus facile de faire disparaître quelque chose qui n'est plus en usage que quelque chose qui sert beaucoup. Au moins, le débat peut commencer.
Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.