lee tease vggyns

 

De la période passée paisiblement par la famille Lee à Baltimore, l’un des fils de Lee, Robert Jr., dira plus tard : « A 45 ans, mon père était actif, fort et beau comme jamais… Il était toujours pétillant et joyeux avec nous, ses enfants, chahutant, jouant, plaisantant avec nous. Dans le même temps qu’il était enjoué et affectueux à notre égard, il était ferme en toutes occasions, ne laissant jamais rien passer qui n’aurait été bon pour nous, exigeant la plus scrupuleuse obéissance. J’ai toujours su qu’il était impossible de désobéir à mon père ».

En mai 1853, Lee est nommé – c’est le neuvième à occuper ce poste – superintendant de l’académie militaire US. Cela ne sonne peut-être pas très martial, mais c’est un poste prestigieux et très convoité par les officiers. Dans ce rôle, Lee devrait naviguer entre la société militaire et la société civile, savoir être tout à la fois diplomate et rigoureux, capable de faire des ronds de jambe sans jamais déroger aux principes.

Ce n’est pas sa tasse de thé. Il le fait savoir au ministre de la Guerre, suggérant qu’on lui donne un poste plus proche de ses compétences. Mais le ministre de la Guerre maintient sa décision. En août, Lee et sa famille prennent leurs quartiers à West Point.

Ce n’est plus le West Point que Lee a connu. Très vite, il regimbe contre ce travail de bureaucrate qui lui est assigné. Tout passe par lui, certes, mais il s’ennuie. Pourtant, jamais oublieux des devoirs de sa charge, il s’en acquitte parfaitement.

Avec des cas de conscience. Si son fils Custis, est le premier de sa promotion, en 1854, son neveu, Fitzburg, le fils aîné de son frère Smith Lee, est un garçon à problèmes. Il a déjà failli être renvoyé deux fois de West Point. Et il n’a dû son salut qu’à la bonne volonté de son oncle qui accepte de lui laisser une dernière chance de s’amender. Il la saisira.

Il ne montrera pas la même mansuétude pour un autre Cadet, « Curly » Whistler qui, malgré des dons évidents en dessin, traite toutes les autres matières par-dessus la jambe. Il est renvoyé. Pour son bien somme toute : rendu à la vie civile, ce « Curly » ingérable deviendra l’un des plus grands peintres américains, James Mc Neil Whistler.

Ce n’est jamais de gaîté de cœur que Lee, ancien de West Point et prêt à toutes les indulgences, renvoie un Cadet. « Tout le monde mérite une seconde chance », dit-il à ceux qui s’étonnent de sa mansuétude. Reste qu’il ne plaisante pas avec les manquements à la discipline : « Quand c’est nécessaire, la vraie bienveillance commande que la discipline soit fermement appliquée ». Il écrit au père d’un Cadet qui présente des problèmes de comportement ; « C’est un jeune homme qui a des sentiments tellement raffinés et un caractère tellement agréable que je m’en voudrais de le soumettre à la mortification de l’échec ».

Au fil du temps, Lee va développer une religiosité plus prégnante. Il a certes toujours été un chrétien de stricte observance mais, en 1853, il est confirmé dans sa foi de membre de l’Eglise épiscopale. Lors de la cérémonie, l’évêque lui dira :

- Colonel Lee, si vous devenez un aussi vaillant soldat du Christ que vous vous êtes un solide soldat de votre pays, l’Eglise sera aussi fière de vous que votre pays peut l’être.

Quand le Congrès des Etats-Unis autorise la création de deux nouveaux régiments de cavalerie, Lee, qui a fait le tour du corps des Engineers, se verrait bien à la tête d’un des deux de ces régiments. Cela ne devrait pas poser de problème, le ministère de la Guerre se disant prêt à lui confier le commandement du 2e de cavalerie.

Mais il y a un obstacle. Le secrétaire d’Etat à la Guerre, Jefferson Davis, futur président des Etats confédérés, a son propre candidat à ce poste, son ami Albert Sidney Johnston. Et Lee, lui demande-t-on ? Il pourrait être l’adjoint de Johnston, suggère Jefferson Davis. Cet « arrangement » ne convient pas au général en chef, Winfield Scott, qui ne jure que par Lee :

- Si j’étais demain sur mon lit de mort et que le président des Etats-Unis m’annonçait qu’une grande bataille allait être engagée pour la liberté et contre l’asservissement du pays, et s’il me demandait de choisir un homme pour commander à cette bataille, je dirais, dans un dernier souffle : que ce soit Lee.

C’est néanmoins Johnston qui est choisi. Avec Lee pour adjoint. Toujours discipliné, Lee accepte cette nomination. Fin mars, après trois années passées à la tête de West Point, il quitte ses fonctions de superintendant. Direction, Louisville, Kentucky, où est caserné le 2e de cavalerie. Disons tout de suite – rappelons plutôt – que le colonel du régiment, Johnston, sera par la suite l’un des plus prestigieux officiers de la Confédération. Comme la plupart des autres officiers de ce régiment, Earl Van Dorn, E. Kirby Smith, notamment, avec une exception, le major George H. Thomas qui sera, lui, un remarquable général certes, mais de l’armée yankee.

Du Kentucky, le 2e de cavalerie est envoyé au Texas. Pour contrer les attaques d’Indiens dissidents et les raids, tout aussi meurtriers, de rascals qui jouent à saute-mouton sur le Rio Grande.

En octobre 1857, le beau-père de Lee, George Washington Parke Custis, décède dans son domaine d’Arlington. L’épouse de Lee, Mary, doit se débattre avec l’héritage compliqué de son père qui était tout sauf un bon gestionnaire. Un brin viveur de surcroît, il a laissé des dettes qu’il faut éplucher – et finalement régler – une par une.

Lee fait valoir cette situation difficile auprès du ministère de la Guerre et il obtient l’autorisation de rentrer en Virginie. Ce qu’il découvre n’est guère réjouissant : Arlington va à vau-l’eau et son épouse, frappée par une sévère arthrite, ne peut quasiment plus se déplacer.

Il faudra à Lee deux bonnes années pour remettre Arlington à flot. Il doit aussi accéder aux dernières volontés de son beau-père : l’affranchissement des soixante-trois esclaves du domaine dans les trois ans suivant sa disparition. Lee accomplit cette ultime et noble demande en laissant le choix aux esclaves : quitter le domaine aussitôt qu’ils le souhaiteront ou y rester en tant que travailleurs appointés. En cela, il est en accord avec sa propre conscience lui qui écrivait à sa femme en 1856 : « L’esclavage, en tant qu’institution, est un mal moral et politique ».

Abolir l’esclavage ? Il écrit encore : « Quant à savoir combien de temps cet asservissement sera encore nécessaire, c’est ce que sait et décidera la sage et pleine de pitié Providence. L’émancipation sera bientôt le résultat de la douce influence de la chrétienté plutôt que des tempêtes et des orages déclenchés par de sauvages controverses ».

En 1859, la montée des périls – les tempêtes et les orages – se précise. Dans le nord de la Virginie (ce nord qui, faisant sécession au cœur de la sécession, deviendra la Virginie occidentale), un raid meurtrier accélère les choses.

 

brown attaque

 

Ce raid est mené, presque sous une forme suicidaire, par un « illuminé », John Brown, âgé de 59 ans. Ce n’est pas inconnu. Soutenu, payé et armé par les factions abolitionnistes, il a déjà assassiné de nombreux « esclavagistes » ou supposés tels.

Avec une vingtaine d’hommes, parmi lesquels nombre de ses fils, il passe à l’attaque à Harper’s Ferry où se trouve un arsenal de l’armée US. Harper’s Ferry, c’est une grosse bourgade de montagne sur les rives du Potomac. Son but ? S’emparer des armes, les remettre aux esclaves de la région et, avec leur aide, initier une insurrection généralisée.

C’est loin de se passer comme prévu. La première victime de Brown et de ses « libérateurs » est un Noir libre qui a eu le malheur de se trouver sur leur route… Et pas un seul esclave de la ville n’accepte de se joindre aux assaillants. Trois habitants de Harper’s Ferry sont abattus. Mais l’alerte est donnée. La résistance s’organise. Débordés, Brown et sa troupe sont contraints de se retrancher, avec quelques otages, dans l’arsenal.

La réponse du ministère de la Guerre ne tarde guère. Lee est chargé de se porter à Harper’s Ferry et de réduire les insurgés. A la tête de 50 Marines, il s’acquitte de cette mission en quelques minutes. La plupart des raiders sont tués, les autres, dont John Brown blessé au cours de l’action, sont capturés.

Pour Lee, cela relevé de l’opération de simple police :

- Ce sont des émeutiers. Leur plan, élaboré par un fanatique ou un fou, était voué à l’échec.

 

John Brown ascending the scaffold preparatory to being hanged from LOC

 

Convaincu de meurtres, de sédition, de trahison, John Brown est condamné à mort. Le 2 mai 1859, il est pendu haut et court. Pour les abolitionnistes, c’est un martyr. Et les plus excités jureront de venger sa mort. On connaît la suite.

Alain Sanders

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