L'enfumage d'un affrontement extrême droite contre normies continue, pour le plus grand plaisir des rentiers du système. On apprend donc ce matin que le fils d'André Glucksmann, Raphaël, s'apprête à lancer un appel à la lutte contre l'extrême droite, aux côtés du batave Timmermans.
Il faut dire que l'actualité fournit des motifs à cette agitation : rassemblement organisé par Vox en Espagne, et formation d'un gouvernement en Hollande autour du fameux PVV de Geert Wilders, et, bien sûr, élections européennes où les « populistes » devraient réussir une poussée historique. Donc, haro sur le baudet (sans mauvais jeu de mot). On nous la rejoue : les fascistes sont à nos portes, grande peur traditionnelle agitée depuis Staline pour faire taire les dissensions dans les rangs, pour éteindre la liberté d'expression, et pour forcer tout le monde à accepter des mesures scélérates au nom de l'indispensable unité. On connaît depuis longtemps ces techniques de manipulation, dont le seul objectif est de contraindre à voter pour le représentant choisi par la caste, même si on ne l'aime pas, même s'il est nul, même s'il est dangereux. Et, en l'espèce, Glu-Glu adorerait être ce représentant désigné en lieu et place de Macron.
Simplement, Glu-Glu sait parfaitement qu'il ne s'agit que d'une manipulation totalement insincère, et même disons- le, mensongère de A à Z. Car Geert Wilders n'est certainement pas l'épouvantail fasciste qu'il essaie de camper. Rappelons-le : Geert Wilders a passé plusieurs années de sa jeunesse dans un kibboutz. Il défend farouchement les intérêts d'Israël face aux « islamistes » palestiniens, cette grande farce qui vise à nous faire croire qu'Israël, qui a développé consciencieusement le Hamas pour affaiblir l'OLP, qui a aidé les islamistes à lutter contre le laïque Hassad en Syrie, serait un porte-avion occidental qui affronterait les Musulmans. Geert Wilders et Raphaël Glucksmann ont un point et un intérêt politique commun, qui est essentiel à garder en tête : ils sont inféodés aux néo-conservateurs américains et à leur vision otanienne du monde. Tous deux sont des adeptes de la mythologie contemporaine selon laquelle il y aurait un conflit de civilisation menaçant l'Occident, conflit mené notamment par des islamistes. Dans le cas de la situation en Palestine, on a bien compris comment le lobby sioniste a fabriqué et nourri cette mythologie : Israël aurait le droit de violer les droits de l'Homme, le droit international et le droit de la guerre, parce qu'Israël serait l'avant-garde de l'Occident dans ce prétendu conflit de civilisations. Le même mythe est entretenu par Zemmour et par bien d'autres. Il permet de tenir les masses en nourrissant la peur du Musulman comme paravent à tous les problèmes de notre époque, et comme paratonnerre à toute velléité de renverser la caste.
L'appel à lutter contre l'extrême droite lancé par Glucksmann n'est donc qu'une farce, puisque ce qu'il appelle l'extrême droite est de toute façon contrôlée par la sphère néo-conservatrice américaine. Et dans cette farce, tous les acteurs sont d'ailleurs, peu ou prou, sous contrôle otanien. Wilders a par exemple fait alliance avec un député libéral hollandais, dont le parti est allié à Renaissance et au macronisme au parlement européen. En matière de péril fasciste, on a vu mieux. Timmermans, le socialiste néerlandais qui s'apprête à épauler Glu-Glu dans son appel, est connu pour avoir passé du temps sous l'uniforme de son pays dans les services de renseignement inféodés à l'OTAN. Il a ensuite servi l'OSCE, organe bien connu comme paravant des services américains. Dans cette mise en scène où l'on fait semblant de se haïr publiquement pour mieux faire gagner le groupe des normies contre les « extrémissses », le vrai scénario est que, comme me disait un ancien de Mc Kinsey en janvier 2022, à propos de nos présidentielles : « Je serais eux, je m'arrangerais pour contrôler le tiercé gagnant, même dans le désordre ». Et le tiercé gagnant, le Deep State américain le contrôle déjà. Il le contrôle tellement bien que ledit tiercé joue sans mollir le scénario de plus en plus ridicule qui leur est commandé devant une foule de moins en moins crédule : celui d'un affrontement pour faire croire qu'on se déteste, quand il s'agit seulement de faire oublier qu'on est d'accord sur l'essentiel, à savoir préserver le leadership américain sur une Europe vassalisée.
Eric Verhaeghe