C'est une découverte archéologique majeure qui vient d'être dévoilée ce jeudi 24 octobre 2019 près de Saint-Brieuc : un buste et des objets ayant appartenu à un chef gaulois.
Un ensemble de sculptures gauloises et des objets extrêmement bien conservés datant du 1er siècle avant notre ère. C’est la découverte archéologique qui vient d’être faite à Trémuson (Côtes-d’Armor), près de Saint-Brieuc. Les experts parlent d’une trouvaille d’intérêt national, voie international.
Un buste qui figurera dans les manuels d’histoire
Un buste en granit, haut de 40 cm, représentant un aristocrate gaulois portant chevelure et barbe, ainsi qu’un torque autour du cou, symbole de bravoure et de prestige, est une des pièces maîtresse mise au jour par les archéologues de l’INRAP (institut national de recherches archéologiques préventives). Seuls les guerriers de haut rang ou les magistrats pouvaient disposer d’un tel attribut.
La sculpture aux traits ciselés a été extraite il y a quelques semaines lors de fouilles réalisées au lieu-dit La Morandais, à Trémuson, alors qu’une plateforme logistique (Ets Bourguignon) prévoit de s’agrandir. Claude Le Potier, directeur de l’INRAP, resitue le contexte :
Nous savions déjà, avec la découverte d’un tumulus en 2001, qu’une ferme gauloise a existé à cet endroit entre le 4e et le 1er siècles avant notre ère. Les fouilles n’avaient jusqu’alors pas permis de révéler la présence de tels objets et ont été mises en sommeil plusieurs années. Mais désormais la nature des découvertes renvoie à quelque chose de tout à fait inédit, rarissime, extraordinaire !
« Sûrement la plus grande découverte de ma vie »
Solenn Le Forestier est l’archéologue qui a extrait le buste de la fosse dans laquelle reposait la sculpture depuis plus de deux millénaires :
Elle était face contre terre, on ne voyait que la chevelure et les oreilles. Au moment de la retourner, nous ne nous attendions pas à ce que le visage soit intact. Ca a été un grand moment d’émotion et c’est sûrement la plus grande découverte de ma vie.
Un vase et des éléments métalliques corrodés, probablement des clous dont le plus grand mesure 18 cm, ont également été trouvés dans la fosse qui contenait le buste.
A seulement quelques mètres de ce qui devait être une chapelle familiale, un puits s’est lui aussi avéré contenir des trésors : plusieurs autres statues représentant vraisemblablement des ancêtres du défunt (signes d’une haute lignée), des pièces de bois tourné constituant des éléments de mobilier, un seau de puisage, une meule et un seau cerclé de bronze et décoré de motifs celtiques.
Des pièces de musée très rares
Cette dernière pièce, ainsi que le buste, constituent les deux découvertes majeures. Ce seau finement ouvragé est parfaitement conservé, du fait de l’humidité contenue au fond du puits. D’un diamètre de 20 cm, entouré d’une résille de bronze qui décore les côtés du seau, il devait figurer sur les tables de banquet et fournit un indice supplémentaire du haut rang social du maître des lieux à l’époque.
Des seaux similaires ont déjà été découvert du sud de l’Angleterre à la Garonne et jusqu’au Luxembourg. Et des statues telles que le fameux buste ont été trouvées dans une quinzaine de lieux en France : à Saint-Potan, Yvignac ou encore Mauron en Bretagne, mais aussi à Nîmes et Alésia.
Mais deux fois seulement (la première fois à Paule, à 70 km !) une telle découverte a été faite dans un environnement archéologique préservé, ce qui permet aux scientifique de pousser beaucoup plus loin leurs investigations.
Et ce qui fait dire à Yves Menez, conservateur régional d’archéologie :
Ce sont des pièces de musée très rares, magnifiques, qui présentent un remarquable état de conservation. Il s’agit d’une découverte d’intérêt national, voire international. Le nom de Trémuson figurera désormais dans les manuels d’histoire : le seau en particulier est en effet une oeuvre majeure de l’art celtique. Et on l’a dans l’état où il était il y a 2000 ans !
Un magistrat ou un guerrier de la cité des Osismes
La ferme gauloise de Trémuson faisait partie de l’ancienne cité des Osismes qui s’étendait sur l’ensemble du Finistère, une partie des Côtes-d’Armor et du Morbihan. La zone résidentielle était située au coeur d’un vaste enclos délimité par un fossé monumental, autrefois bordé d’un talus.
Les objets mis au jour témoignent tous de l’évidente richesse des propriétaires. La céramique trouvée près du buste, par exemple, indique que les habitants consommaient du vin d’Italie puis d’Espagne. Les prélèvements effectués dans le puits permettront d’en apprendre encore davantage : des résidus de pollen permettront notamment de déterminer les espèces sauvages et cultivées à cet endroit par nos ancêtres les Gaulois.