Chine : le Xinjiang, province sous vidéo-surveillance
Pékin a discrètement développé un système de reconnaissance faciale dans cette région peuplée par des séparatistes ouïghours, peuple musulman et turcophone.
En juin 2017, l'agence de presse du régime, Chine Nouvelle, présentait fièrement le système de reconnaissance faciale mis en place dans plusieurs grandes villespour traquer les piétons qui ne traversent pas dans les clous. Au Xinjiang, province de l'ouest du pays, de tels systèmes ont également été mis en place, mais pour des raisons moins avouables.
Il faut dire qu'au Xinjiang, la priorité des autorités chinoises n'est pas la prévention routière. Cette vaste région limitrophe du Pakistan et du Kazakhstan est le fief des ouïghours, un peuple musulman et turcophone dont une frange séparatiste lutte contre le pouvoir central pour obtenir son indépendance.
La police alertée en temps réel
Selon des révélations de l'agence de presse américaine Bloomberg, les autorités chinoises ont discrètement mis à profit l'important réseau de caméras dans les villes et villages peuplés par les ouïghours pour surveiller les faits et gestes de potentiels suspects.
Pour ce faire, les policiers ont simplement reliéle système de vidéo surveillance à leur base de données contenant des photographies de personnes surveillées par l'Etat. Si un suspect s'éloigne à plus de 300 mètres de son domicile, la police est immédiatement alertée.
« C'est un système très efficace pour contrôler les individus », a détaillé à Bloomberg Jim Harper, agent fédéral du département de la Sécurité intérieur des Etats-Unis. « Avant, la phrase 'Papiers, s'il vous plaît' était un rappel quotidien de la surveillance du régime. Maintenant, les fonctionnaires du gouvernement n'ont même plus besoin de le demander », explique-t-il.
Un laboratoire de l'industrie de la surveillance
Si le pouvoir central est resté discret sur ce système de reconnaissance faciale, il ne s'agit que d'un nouveau système de sécurité instauré dans le Xinjiang, devenu un véritable laboratoire de la sécurité intérieure chinoise depuis les attentats meurtriers perpétrés par des séparatistes ouïghours en 2013 et 2014.
Ces dernières années, les autorités ont imposé à cette province des procédures dignes de « Big Brother ». Les 22 millions d'habitants (dont 10 millions de ouïghours) du Xinjiang sont ainsi obligés d'installer un système de traçabilité par satellite dans leur véhicule et doivent scanner leur visage pour entrer dans les centres commerciaux, les gares ou les stations-service.
Mais au-delà des objectifs politiques et sécuritaires, une telle expérimentation à l'échelle d'une région permet à la Chine d'être à la pointe de l'industrie de la surveillance. Les analystes estiment ainsi que le pays représentera à lui seul 46 % du marché de la vidéosurveillance en 2018, soit une manne de 17,3 milliards de dollars.