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Je suis récemment tombé sur un essai de 2013 de l'idéologue (et chef du secrétariat international) du mouvement Azovite, Olena Semenyaka, intitulé « Quand les dieux entendent l'appel : le potentiel conservateur-révolutionnaire de l'art Black Metal » publié par la maison d'édition Black Front Press basée à Londres et dirigée par le national-anarchiste Troy Southgate.

Le texte n'est pas dépourvu d'enseignements. Il part de l'idée que l'art du Black Metal est une sorte de « condamnation à mort du monde moderne ». Cependant, il est tout à fait évident qu'il s'agit d'un produit du monde moderne. Mais allons-y pas à pas. L'essai affirme qu'il « est le grand 'Anti' de tout ce que l'on croit avoir de la valeur pour le membre moyen de la société occidentale moderne : des notions conventionnelles de ce qui est bon est beau à l'être métaphysique lui-même ». Le black metal est donc une « phase nihiliste-active dans un processus de transvaluation métaphysique des valeurs ». Il ne s'agit pas d'une sous-culture mais d'une contre-culture visant à effacer toute l'époque contemporaine. En cela, elle serait assez similaire à la révolution conservatrice présentée précisément comme un « phénomène culturel complexe qui a beaucoup en commun avec le black metal » : en plus d'être tous deux des phénomènes contre-culturels, ils sont également « politiquement transversaux ».

Semenyaka met particulièrement l'accent sur le « National Socialist Black Metal » (NSBM), défini dans le document comme une « synthèse parfaite de la volonté de puissance luciférienne », dont l'Ukraine représente selon elle une avant-garde mondiale. C'est précisément ici qu'a lieu le principal festival de musique du genre (Asgardsrei), organisé par le citoyen russe en attente de recevoir la nationalité ukrainienne (il est aussi vétéran du régiment Azov et idéologue du groupe Wotanjugend), Alexei Levkin, après son expulsion de Russie. Semenyaka elle-même a longtemps été en très bons termes avec Levkin, jusqu'à ce que l'extrémisme excessif du Russe commence à se révéler rédhibitoire pour le redéveloppement/nettoyage international de l'image du mouvement azovite et ses tentatives de lobbying aux États-Unis.

 

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Le « luciférisme aryen » dont parle l'idéologue ukrainienne dans ce contexte se manifesterait comme un sentiment métaphysique de recherche de la liberté absolue. Ce passage est intéressant étant donné que dans l'essai, Semenyaka elle-même cite les travaux de René Guénon de manière plutôt désinvolte. Le métaphysicien français soutenait en effet l'idée que le luciférisme conscient et plutôt grotesque d'un petit groupe était bien moins dangereux que le luciférisme inconscient de la plupart: par exemple, celui des prédicateurs protestants nord-américains qui, en prétendant disposer d'un canal direct de communication avec Dieu, tentent en fait de le transporter dans les strates inférieures de l'être.

Cela montrerait en soi comment l'utilisation d'un luciférisme élitiste pour combattre une société déjà luciférienne est une sorte de contradiction dans les termes. Semenyaka fait également constamment référence à l'œuvre de Nietzsche, mais bien qu'elle ait écrit une dissertation sur la pensée de Martin Heidegger, elle semble ignorer la principale critique que le philosophe de Messkirch a formulée à l'égard de Nietzsche : à savoir que le platonisme ne peut être renversé en restant sur des positions essentiellement platoniciennes. Par conséquent, prétendre renverser le luciférisme par le luciférisme ressemble à un affrontement entre les deux faces d'une même pièce.

 

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Semenyaka parle également de la nature chthonique du Black Metal et de l'éveil en lui de la nature titanesque. Mais, là encore, il semble ignorer la nature déjà purement titanesque de la société que l'on chercherait à combattre. En outre, la comparaison avec la révolution conservatrice, du moins dans la manière dont Semenyaka comprend ce type « d'art », est totalement déplacée. Pour les théoriciens de cette « école de pensée », le révolutionnaire est celui qui sauve et préserve la valeur qui se trouve à l'origine. À l'ère du chaos informe du capitalisme financier et industriel, cette valeur réside dans l'essence même de la nature humaine écrasée par les produits de la technologie. Et cette essence, pour paraphraser Aristote, est avant tout politique. En redonnant au politique sa primauté sur l'économie et son contrôle sur la technologie, on redonne à l'histoire le rythme de l'homme qui tente de repenser et (à nouveau) d'interpréter le monde au lieu de se concentrer sur sa simple utilisation. En ce sens, la Révolution conservatrice a représenté une lueur olympienne dans une société déjà plongée dans un titanisme chthonique.

Dans l'interprétation du black metal par Semenyaka, cela devient donc une sorte de titanisme pseudo-oppositionnel à une société titanesque. Ainsi, le « règne de Prométhée » souhaité à venir (la phase active-nihiliste de la future domination titanesque) sera une fois de plus fondé sur le pouvoir élémentaire de la technologie. Ce n'est pas un hasard si Semenyaka parle encore d'un « ethnofuturisme » qui fera entrer la région située entre la mer Baltique et la mer Noire (le bloc « intermarium » déjà théorisé par le prométhéisme polonais de Josef Pilsudiski et actuel cheval de bataille de l'atlantisme) dans la « quatrième révolution industrielle ».

Daniele Perra

Source : Daniele Perra & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/sul-luciferismo-ariano-azovita

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