LA SCIENCE AUX MAINS DE LA FINANCE MONDIALISTE (par Jean Goychman)
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Manipulée par le pouvoir financier, la science officielle, discréditée, a perdu sa liberté et est désormais instrumentalisée par la finance mondialiste. Un article percutant de Jean Goychman sur la mécanique implacable des fléaux qui secouent la planète et qu’il faut comprendre pour parvenir à les neutraliser.
L’opinion publique sort de la léthargie profonde dans laquelle elle était immergée depuis des décennies.
L’Américain Mark Twain, grand observateur de la nature humaine, disait : « Il est plus facile de tromper les gens que de les convaincre qu’ils ont été trompés ».
Les récentes manifestations et surtout leur montée en puissance partout en France nous indiquent que cette prise de conscience se produit et qu’elle marquera un tournant de notre Histoire.
Pour autant, la victoire est loin d’être acquise et le chemin qui y conduit sera encore long.
Qui est au cœur de ce bouleversement mondial ?
Si on en croit les médias « main stream », tous les événements que nous subissons depuis près de 2 ans sont purement fortuits et quiconque y verrait un quelconque déterminisme, sans même parler d’un plan concerté, ne pourrait être qu’un affreux complotiste, ennemi de l’Humanité et fomenteur de troubles. Pourtant, la quasi-parfaite unanimité du propos devient d’autant plus suspecte que ce sont toujours les mêmes arguments qui nous sont présentés, un peu comme si « tous ces détaillants se fournissaient chez le même grossiste », pour paraphraser le regretté Philippe Seguin.
Considérés comme des moyens d’information au service de leurs lecteurs, les médias se sont progressivement mués en véritables instruments de propagande. Certes, cela n’est pas tout à fait nouveau, mais soulève néanmoins la question : « pour le compte de qui agissent-ils vraiment ? ».
Nous avons assisté à la dépersonnalisation progressive des éditorialistes et il n’en reste que très peu (et c’est tout à leur honneur) qui osent encore braver la doxa de la bien-pensance universalisée.
La première opération de prise de contrôle d’un média par la finance est probablement celle relatée par Carol Quigley. Dans son livre « Histoire secrète de l’oligarchie anglo-américaine » (Editions Le retour aux sources), celui-relatait, dans le chapitre 6, intitulé « The Times » que le groupe de Milner avait utilisé le Times pour propager ses idées depuis 1905. Après avoir pris la direction de la ligne éditoriale dès 1912, ce groupe en fit l’acquisition en 1922.
C’est en 1906 que les banquiers à l’origine de la création de la FED avaient commencé à prendre le contrôle d’un certain nombre de journaux américains. Ceux-ci, après la crise de 1907, réclamèrent la mise en place d’une banque centrale, dont le peuple américain ne voulait pas.
Depuis cette époque, nombreux furent les médias qui, au travers d’une prise de participation majoritaire de leur capital, durent ainsi aliéner leur liberté de parole ou d’écrit aux « amicales pressions » de leurs administrateurs.
UN POUVOIR SANS LIMITE
Après avoir convaincu (partiellement) le peuple américain de la nécessité de créer une banque centrale (sans encore utiliser le terme), la Réserve Fédérale – couramment désignée sous le nom de FED – fut créée le 23 décembre 1913 à 23 h 30, au terme d’une séance particulièrement animée, car certains sénateurs et représentants avaient perçu ce qui se cachait derrière l’apparence. En réalité, la FED était une banque privée dont le capital était détenu par d’autres banques privées qui formaient une sorte de « cartel ». Ayant obtenu le pouvoir d’imprimer les dollars, la FED avait de facto pris le contrôle de la monnaie américaine, alors même que la Constitution réservait ce droit exclusif au peuple américain (Article 1er, section 8 §5).
Il ne manquait plus que la dernière étape pour libérer complètement ce pouvoir et celle-ci fut franchie en 1971 lorsque le dollar perdit sa convertibilité en or. Le dollar, devenu monnaie « fiduciaire » pouvait alors être créé à partir de rien et financer sans limites les dettes publiques américaines, comme le faisaient les autres banques centrales bâties sur le même modèle.
Or, le dollar n’était pas une monnaie comme les autres, car il possédait un autre attribut : il était également, depuis les accords de Bretton Woods de 1944, la monnaie dite « de réserve internationale » avec laquelle s’effectuaient les transactions internationales, et en particulier le commerce du pétrole.
Il est évident que ce double statut « brouillait » les cartes et que cela permettait à la finance américaine (et aux banques internationales qui contrôlaient Wall Street) de s’enrichir également sans limites car il fallait créer de plus en plus de dollars pour satisfaire la demande mondiale. Et comme ces dollars ne pouvaient être créés que sur demande du Trésor américain, ils généraient également des intérêts en proportion…
C’est donc toute la planète, ou presque, qui s’est trouvé sous la coupe de la monnaie américaine. Ajoutez à cela les deux autres piliers de la finance mondiale que sont le FMI et la Banque Mondiale et vous obtenez le système financier qui dirige la planète.
Il est curieux de constater qu’en août 2019, les principales banques centrales décidèrent de « tuer le dollar » et que certains y voient l’acte initiateur du « Great Reset » pour lequel , aux dires mêmes de Klaus Schwab, celui-ci fut une sorte de bénédiction.
LES CONSEQUENCES DE CETTE MAIN-MISE SUR LA MONNAIE
On prête à Nathan Rothschild, dès 1815 la phrase : « Si j’imprime les billets, je me moque de qui fait les lois ! ».
Cette prophétie semble s’être réalisée car ce pouvoir exorbitant est aujourd’hui concentré dans les mains d’une infime minorité qui peuvent pratiquement tout se payer.
Ils ont compris tout de suite que la faiblesse des démocraties résidait dans la facilité à convaincre, voire à égarer, les opinions publiques et que, pour cela, il fallait contrôler les différents moyens d’informations.
Lorsqu’on dispose d’une telle « manne céleste », les choses deviennent faciles.
Et, parmi les moyens de contrôle de ces opinions, il y en avait un qui présentait d’énormes avantages, qui était de pouvoir inspirer des grandes peurs collectives. Ce climat de peur s’est progressivement installé depuis quelques décennies (voir l’article du même auteur « La Peur, nouveau moteur de l’Histoire »)
LES GRANDES PEURS DEPUIS LE XX° siècle
Ne citons que pour mémoire la « grande peur de l’An Mille » qui devait voir la fin du monde, et passons au XX° siècle.
En 1938, Orson Welles avait réalisé une émission de radio qui commentait l’attaque de New-York inspirée de « la guerre des mondes » écrite par HG Wells.
Une opération similaire a eu lieu en France en 1946 et avait pour thème la désintégration incontrôlée des atomes, qui généra également une certaine panique. En fait, ces expériences montraient très clairement le pouvoir de persuasion sur une foule que possédaient les « mass-médias ».
Mais c’est surtout à la fin des années 60 que les grandes peurs planétaires sont apparues. Elles trouvaient probablement leur origine dans le « rapport de la Montagne de Fer » (voir l’article du même auteur « La Montagne de Fer »).
Souvenez-vous encore du trou de la couche d’ozone, ou encore des « pluies acides ». D’une façon générale, il fallait accréditer l’idée que l’Homme détruit la planète sur laquelle il vit.
Cette base allait constituer le soubassement d’un dogme quasi-religieux qui s’est progressivement transformé en véritable religion.
LA CROYANCE NÉCESSITE L’APPUI DE LA SCIENCE
Alors que, depuis plusieurs siècles, les religions, de par leur coté dogmatique, avaient toujours observé une certaine méfiance au sujet de la science, et notamment de ce côté « prédictif » qui empiète sur le pouvoir divinatoire de Dieu, la grande force de ceux qui utilisent ces peurs est justement de leur donner un aspect scientifique destiné à établir la véracité des causes des phénomènes mis en jeu.
Et peu importe si les étapes nécessaires pour passer de l’observation à la formulation d’une hypothèse qui devra être suivie d’une expérience « cruciale » – pièce maîtresse qui, seule, permettra de valider une théorie – ne sont pas respectées, l’essentiel est que les gens croient, du moins dans leur immenses majorité, à cette théorie. Pour cela, l’apparence scientifique, voire la signature de sommités réputées, relayées par des médias unanimes sont les instruments essentiels de persuasion.
Dans les temps jadis, un événement relaté dans un journal ne pouvait-être que vrai. Et cela était très souvent le cas car les rédacteurs ne voulaient en aucun cas, par déontologie, divulguer de fausses nouvelles. Seuls étaient admis les écarts ne modifiant pas le sens général de l’information transmise. Nous n’en sommes plus là et aujourd’hui, ce n’est plus la réalité qui est le critère, mais ce que les gens pensent être la réalité.
Nous sommes rentrés insensiblement dans l’ère du « story telling »
LE MONDE DES TROIS PEURS
Trois menaces planent sur nous aujourd’hui, et alternent dans l’actualité. Le terrorisme international, le réchauffement climatique et la pandémie.
La première se caractérise par un énorme choc dans l’opinion dû à l’horreur des méthodes employées et la sidération de voir des gens perdre la vie sans d’autre justification que de provoquer la terreur. Il y a cependant eu un certain nombre de retombées financières, notamment dans le domaine de la surveillance et de la sécurité, notamment dans les transports, mais cela n’est guère évoqué.
Ensuite, il y a le prétendu réchauffement climatique d’origine anthropique. De quoi s’agit-il exactement ? On nous prédit un réchauffement catastrophique qui va tout bouleverser à la surface de la planète. La fonte des glaces va engloutir les terres émergées et faire disparaître, à terme, toute vie sur terre…
La cause ? La concentration en dioxyde de carbone est passée de 3 particules pour dix mille à 4 en quelques décennies. Même si les molécules de ce gaz peuvent réémettre une partie de l’énergie qu’elles captent (effet de serre), cela reste quand même très limité et il est impossible que ce seul phénomène, à l’exclusion de tous les autres, soit à l’origine de ce qui est appelé le « dérèglement climatique ».
D’autant plus que l’enfer prévu semble plus que modéré car, d’après les relevés satellites, la température moyenne de la planète ne s’est élevée que d’environ 1°C depuis un peu plus d’un siècle et semble même ne plus augmenter du tout depuis une quinzaine d’années.
Enfin, il y a la pandémie du virus SARS COV2. Qu’en retiendra l’Histoire ? Probablement le nombre de décès qui lui sont imputables, comme cela c’est toujours fait pour les grandes épidémies. Je vous laisse le soin d’aller chercher les chiffres, et vous conviendrez que, rapportée à la population actuelle de la Terre, cette épidémie est, du moins jusqu’à présent, une des moins tueuses qui soit.
Cependant, la dramatisation extrême de la communication planétaire fait que la crainte qu’elle inspire est telle que les peuples sont prêts à accepter toutes les privations de liberté au nom de leur survie, qui ne semble pourtant pas vraiment menacée.
QUEL BILAN TIRER DE TOUT CELA ?
Parti d’une simple idée qui consistait à créer de la fausse monnaie à laquelle on donnait l’apparence de la vraie – celle qui possède une réalité économique et dont la création ne peut se faire qu’en raison des richesses créées par l’Homme – l’oligarchie financière qui a entrepris de diriger le monde il y a environ 150 ans touche pratiquement au but.
Les étapes successives se sont déroulées sous nos yeux et quiconque s’interrogeait sur leur bien-fondé se voyait immédiatement ostracisé et interdit de parole, voire de pensée.
Il y eut pourtant de nombreux avertissements, y compris venant de personnalités pouvant influencer le cours mondial des événements. De Gaulle, Eisenhower, Kennedy, Philippe de Villiers, pour parler des politiques ; mais également des historiens, comme Carol Quigley, Pierre Hillard, Peter Dale Scott et tant d’autres ; sans parler des témoignages écrits de nombre de journalistes et d’éditorialistes. Mais rien n’y fit : les gens refusèrent de voir ce qui était pourtant devant leurs yeux.
Redonnons un court instant la parole à Nathan Rothschild, publiée par Stephen Mittford Goodson, dans son livre « l’histoire des banques centrales » page 64 (Editions Omnia Veritas) :
« La minorité qui comprend le système sera si intéressée par ses profits ou si dépendante de ses faveurs qu’il n’y aura jamais d’opposition de la part de cette classe sociale ».
Reste à savoir si le « Great Reset » qui semble déjà entrer dans une phase active, marquera la victoire définitive de cette élite mondialiste ou si les peuples, dans un sursaut salvateur, sauront retrouver le chemin de la liberté que cette minorité entend leur confisquer.
Jean Goychman
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« Les fondements historico-spirituels du parlementarisme dans sa situation actuelle » selon Carl Schmitt
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La critique schmittienne du parlementarisme libéral doit être replacée dans le contexte de la crise du libéralisme de l'entre-deux-guerres, en pleine crise de l'État libéral, de la remise en cause du système parlementaire, de l'autoritarisme, de la démocratie libérale, etc. L'ouvrage a été publié à l'origine en 1923, après les conséquences du traité de Versailles et la chute de la monarchie et du Deuxième Reich, et en pleine République de Weimar, avec toutes les conséquences désastreuses d'instabilité politique et de crise économique qu'elle a générées. À tout cela, il faut ajouter les racines ténues de la tradition libérale dans l'Allemagne de Carl Schmitt, où les courants autoritaires et antilibéraux étaient prédominants.
Au sein des critiques développées contre la démocratie parlementaire, on peut reconnaître deux voies différenciées dans la pensée de Schmitt :
- D'une part, la critique du parlementarisme en tant que forme de gouvernement. Schmitt critique donc le parlementarisme en tant que forme de gouvernement. En ce sens, il pointe du doigt la domination excessive des gouvernements par le parlement, qui conduirait à une instabilité rendant impossible toute gouvernance efficace. Dans ce contexte, le parlementarisme apparaît comme étant en contradiction avec la division des pouvoirs et inconciliable avec les besoins de l'État administratif. La République de Weimar sert d'exemple pour ces conclusions. De plus, il n'y a pas de solution de continuité possible s'il y a une relation inverse et que c'est le gouvernement qui domine à travers le parti politique sur le parlement, car dans ce cas on ne devrait pas parler de régime parlementaire, mais de régime gouvernemental. Dans le second cas, nous aurions un exemple très proche de notre époque, avec l'effondrement de l'ordre juridique et légal et l'inutilité des parlements dans la prise de décision. L'alternative proposée par Schmitt est une « dictature présidentielle ».
- D'autre part, nous avons la critique du parlementarisme en tant que forme de gouvernement. Il s'agit d'une critique du parlement en tant qu'institution, en tant que forme de gouvernement, ainsi que de la démocratie parlementaire dans son ensemble en tant que système, une critique de la démocratie représentative.
En ce sens, Schmitt met en garde contre la confusion entre démocratie et élection, car la représentation n'est pas la même chose que l'élection. La démocratie en tant que telle n'a de sens que lorsque son objet d'intérêt présente des caractéristiques homogènes et qu'il est possible de le réduire à un seul centre d'intérêt, comme ce fut le cas des nations bourgeoises au XIXe siècle, où les démocraties de suffrage censitaire représentaient les intérêts du groupe social dominant. Dans le cas de la démocratie de masse, où les intérêts à représenter sont caractérisés par leur hétérogénéité, toute forme de pluralisme est incompatible avec le libéralisme. En ce sens, Schmitt fait une distinction claire entre la représentation des intérêts (partisans, économiques, etc.) et la représentation par laquelle le peuple s'identifie à ses dirigeants par acclamation ou assentiment. Et c'est le second type de représentation qui est le seul valable pour notre auteur, car il n'existe pas de volonté du peuple, et le pouvoir ne peut être délégué. Le leader politique est celui qui a la qualité de manifester cette volonté et de l'identifier. Pour Schmitt, il n'y a pas d'antithèse irréconciliable entre dictature et démocratie, de sorte que libéralisme et démocratie ne sont pas non plus synonymes, et toute doctrine politique antilibérale, comme le fascisme ou le communisme, qui étaient à l'apogée de leur popularité à son époque, n'est pas nécessairement anti-démocratique.
L'idée qui a présidé à la naissance du parlementarisme était de parvenir à des accords généraux et de représenter des intérêts hétérogènes, mais la vérité est que les démocraties libérales ont montré qu'en fin de compte elles servent de simple scène et de moyen pour imposer certains intérêts sur d'autres, et qu'en aucun cas elles n'obéissent au produit d'une discussion rationnelle. Au contraire, ils ont fini par imposer des décisions imposées en dehors de tout débat rationnel, car il n'y a pas de parlement législatif ou de démocratie parlementaire, c'est une forme vide et sans signification.
Une autre critique de Carl Schmitt se situe dans le domaine de la démocratie procédurale, et il se demande si la loi est vraiment ce que veut le législateur ou ce que veut la majorité parlementaire. Ainsi, au final, la démocratie parlementaire masque la dictature de la majorité, qui le reste même si des élections sont organisées de temps en temps.
Le parlementarisme et la démocratie se sont développés depuis le milieu du 19ème siècle sans que la distinction entre les deux concepts soit très claire, au point que lorsque celle-ci a finalement triomphé, des antagonismes entre les deux concepts ont également commencé à apparaître. Les contradictions apparaissent dans la fonction même que le Parlement est censé remplir, en tant que lieu de discussion et d'accord, et dans ce cas, parce que, comme nous l'avons souligné précédemment, les arguments rationnels devraient primer sur l'égoïsme et les liens des partis politiques et les intérêts exprimés par les différents groupes de pouvoir afin de convaincre. C'est précisément ce fondement du parlementarisme qui est en crise et qui a été réduit à une formalité vide. Schmitt souligne que ce ne sont plus les représentants des partis politiques qui argumentent, mais des groupes de pouvoir sociaux et économiques, on pourrait parler de lobbies qui négocient sur la base de compromis et de coalitions. Les parlements ne servent plus à convaincre l'opposition, et leur fonction politique et technique a disparu pour laisser place à la manipulation des masses et à l'obtention d'une majorité afin d'imposer ses propres critères.
La démocratie est fondamentalement fondée sur la recherche de l'homogénéité, du « grand consensus », des majorités, de l'unification des volontés et de l'élimination de l'hétérogénéité, ce qui, dans la démocratie moderne d'inspiration libérale, repose sur le principe de rationalité. En ce qui concerne l'égalité tant vantée, la démocratie envisage l'inégalité et l'exclusion comme une stratégie de domination, et Schmitt nous renvoie à d'innombrables exemples de l'Empire britannique, comme paradigme du colonialisme moderne, dans lequel les habitants des colonies sont soumis à la loi de l'État démocratique de la métropole alors qu'ils sont en dehors de celle-ci et en contradiction ouverte avec ce qu'elle propose. Cela montre que la démocratie, comme c'était le cas pour la démocratie classique, n'est possible que lorsqu'elle est une affaire d'égaux. La démocratie libérale égalitaire, fondée sur des proclamations universalistes, sur des personnes d'origines et de milieux différents, en vertu d'un principe d'hétérogénéité, est ce qui, selon le juriste allemand, avait prévalu à son époque.
Ce modèle de démocratie, engendré par la Révolution française et mûri tout au long du XIXe siècle, a évolué vers des formes universelles, qui ont déplacé sa mise en œuvre sur un territoire spécifique, composé de personnes ayant une vision du monde unique et des origines particulières, vers un modèle universel, abstrait et hétérogène, donnant lieu à une égalisation absolue qui vide le concept de tout sens et perd ainsi toute sa signification. C'est pourquoi Schmitt affirme que la liberté de tous les hommes n'est pas la démocratie mais le libéralisme, tout comme elle n'est pas une forme d'État mais une conception individualiste et humanitaire du monde. C'est précisément la fusion de ces principes, le libéralisme et la démocratie, sur laquelle repose la société de masse moderne.
Les deux concepts sont en crise, et le libéralisme dénature la démocratie dans la mesure où la volonté du peuple n'est pas démocratique mais libérale, et entre l'action propre du gouvernant et la volonté des gouvernés il y a le parlement, qui apparaît comme un obstacle dépassé, inutile, incapable de remplir sa fonction. Et dans la mesure où la démocratie n'est pas l'héritage du libéralisme, elle peut se manifester au sein de la sphère antilibérale (fascisme ou bolchevisme) ou même sous des formes politiques étrangères à la tradition libérale, comme la dictature ou différentes formes de cessationnisme. De cette façon, Schmitt remet également en question les procédures considérées comme démocratiques, telles que le vote (le célèbre slogan « un homme, une voix ») auquel participent des millions de personnes isolées, et la représentation indirecte représentée par les partis et le système parlementaire, qui sont après tout des formes proprement libérales qui ont été confondues avec les formes démocratiques. Schmitt fait allusion à des formes de démocratie directe comme l'acclamatio.
La démocratie dite libérale a commencé à prendre forme après la révolution de 1789, car la démocratie en tant que telle n'a pas de contenu politique spécifique, mais est un système organisationnel. La démocratie peut être socialiste, conservatrice, autoritaire, etc. et, dans le cas du libéralisme, elle est fondée sur des principes économiques qui trouvent leur origine dans le droit privé. En même temps, nous avons un de ses fondements les plus caractéristiques, la volonté générale, qui a un sens abstrait et incarne un principe de vérité alors qu'elle n'est jamais unanime. Il existe un système de représentations et d'identifications entre gouvernants et gouvernés sur le plan juridique, politique ou psychologique, mais jamais sur le plan économique. Pour Carl Schmitt, la minorité peut être plus représentative de la volonté du peuple qu'une majorité qui peut être soumise à la tromperie et au mensonge par l'action de la propagande. Ainsi, la défense de la démocratie n'implique pas un critère quantitatif de chiffres, mais un critère qualitatif, dans lequel les effets de la propagande peuvent être combattus par l'éducation et la connaissance.
En ce qui concerne le parlementarisme, il est né à l'origine comme une forme de lutte entre les représentants du peuple et la monarchie. Comme nous l'avons dit au début, en formulant l'une des thèses du livre, le parlementarisme constitue un obstacle au fonctionnement du gouvernement, en intervenant continuellement dans les nominations ou les prises de décision. Le parlementarisme, comme le libéralisme, est également étranger à la démocratie dans la mesure où le peuple ne peut pas rappeler ceux qui sont censés représenter ses intérêts au parlement, alors que le gouvernement peut le faire sans problème. D'autre part, le parlement sert souvent de cadre à des discussions sur des intérêts étrangers à ceux qui sont représentés, des intérêts de nature économique qui concernent des groupes privés, par exemple. Il s'agit d'une conséquence générale de l'application des principes libéraux, dont émanent les libertés associées à la démocratie libérale. C'est pour cette raison que ces libertés sont de nature individuelle, propres à des sujets privés, comme c'est aussi le cas de l'idée publique de la politique et de la liberté de la presse.
En ce qui concerne la séparation classique des pouvoirs, la répartition et l'équilibre des différentes parties qui composent l'État sont assurés par le Parlement, qui monopolise le pouvoir législatif. Schmitt plaide pour l'abolition de la division libérale des pouvoirs, et en particulier de la division entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif dans ce qui est un produit du rationalisme absolu et de l'idée des Lumières de l'équilibre des pouvoirs. En fait, le grand problème souligné par l'auteur allemand est que les Lumières elles-mêmes ont privilégié le pouvoir législatif par rapport au pouvoir exécutif, réduisant le premier à un principe ou à un mécanisme de discussion en vertu d'un rationalisme relativiste sans pouvoir aborder les questions importantes à partir de positions absolues. C'est dans ces principes que réside le problème posé par Carl Schmitt, dans la fondation d'un système global dans lequel le droit s'impose à l'État par un équilibre ou un pluralisme des pouvoirs dans lequel la discussion et la publicité deviennent la base de la justice et de la vérité.
Le problème est qu'aujourd'hui les parlements ne sont même plus des lieux de discussion ; ce sont les représentants du capital qui décident du sort de millions de personnes à huis clos, de sorte que le débat public finit par devenir un simulacre vide et sans substance.
Au-delà des critiques du parlementarisme et du libéralisme dans sa formulation démocratique, Carl Schmitt analyse également la dictature au sein de la pensée marxiste. La révolution de 1848 apparaît dans son schéma comme une date clé dans la lutte entre les forces politiques rationalistes à caractère dictatorial, représentées par le libéralisme d'origine jacobine de la France de Napoléon III, et le socialisme marxiste radical représenté par les conceptions hégéliennes de l'histoire. Le marxisme impose également une vision rationaliste et scientifique de la réalité, sur laquelle il prétend agir par le biais du matérialisme historique. Il croit connaître parfaitement les mécanismes de la vie sociale, économique et politique et croit aussi savoir comment les maîtriser dans un but absolument déterministe et mathématiquement exact. Mais en réalité, souligne Schmitt, le marxisme ne peut se comprendre que dans le développement dialectique de l'humanité, qui laisse une certaine marge d'action aux événements historiques dans les créations concrètes qu'il produit, indépendamment de toutes ses prétentions scientifiques de devenir. Et c'est dans Hegel que se trouve la base du concept marxiste de dictature rationnelle.
La figure du dictateur parvient à interpénétrer et à intégrer la complexité des relations antithétiques, des contradictions et des antagonismes générés par la dialectique hégélienne. Et face à la discussion permanente et à l'inexistence d'un principe éthique permettant de distinguer le bien du mal, la dictature apparaît comme une solution dialectique appropriée à la conscience de chaque époque. Et bien qu'il y ait chez Hegel un refus de la domination par la force, dans un monde livré à lui-même, sans référents absolus, la maxime abstraite de ce qui doit être prédomine.
Dans le domaine de l'irrationalisme, nous avons les doctrines politiques de l'action directe, et en particulier Schmitt fait allusion à George Sorel, qui, ayant pris comme point de référence les théoriciens anarchistes et la lutte syndicale et ses instruments comme la grève révolutionnaire, comprend non seulement un rejet absolu du rationalisme, mais aussi des dérivations de la démocratie libérale basée sur la division des pouvoirs et le parlementarisme. La fonction du mythe avait un caractère mystique et presque métahistorique, sur la base duquel un peuple comprenait que le moment était venu de construire un nouveau cycle historique. Et évidemment, la bourgeoisie et ses conceptions rationalistes du pouvoir n'avaient rien à voir avec la participation à ce destin. Car comme le souligne Schmitt, la démocratie libérale est en réalité une ploutocratie démagogique, et face à cela, le prolétariat industriel serait le sujet historique qui incarnerait le mythe par la grève générale et l'usage de la violence. Les masses prolétariennes apparaissent comme les créatrices d'une nouvelle morale supérieure au pacifisme et à l'humanitarisme bourgeois.
Donoso Cortès
Cependant, la lutte contre le constitutionnalisme parlementaire et le rationalisme libéral a trouvé des références intellectuelles et politiques plus tôt, au XIXe siècle, à travers les figures de Pierre Joseph Proudhon et de Donoso Cortés, issues de positions apparemment antagonistes comme l'anarcho-syndicalisme radical et le traditionalisme catholique contre-révolutionnaire. Ces auteurs, comme dans le cas de Sorel, étaient également favorables à l'action directe et à la violence contre ce que Donoso Cortés appelait « la classe querelleuse/discutailleuse » et face à la droite, ils étaient favorables à la dictature. De même, nous retrouvons une dimension eschatologique essentielle, ainsi que le même esprit combatif et le même appel à l'héroïsme. C'est la revendication de l'action, de la violence par opposition à l'acte parlementaire, à la discussion ou au pari sur les compromis si typiques des régimes libéraux.
Et la critique du parlementarisme s'étendrait logiquement au rationalisme lui-même, qui est la matrice d'où émergent tous les mécanismes politiques et institutionnels qui nourrissent la démocratie libérale. Le rationalisme est l'ennemi de la vie, de la tension spirituelle, de l'action, et il falsifie la réalité de l'existence, en la masquant sous les discours des intellectuels. Et c'est dans ces courants, a priori si divergents, que Schmitt trouve les principes et les idées nécessaires pour structurer un discours antilibéral et antiparlementaire, en opposition à ce que le libéralisme entend par démocratie, et en opposition au marxisme, qui pour Carl Schmitt continue à vivre dans un cadre conceptuel et politico-philosophique de formes héritées des Lumières, et par conséquent du même modèle
Vu sur Euro-Synergies
Recension: Carl Schmitt, Los fundamentos históricos-espirituales del parlamentarismo en su situación actual, 2008, ISBN 978-8430948321,Tecnos, 264 p.
Ex: https://www.hiperbolajanus.com/2020/11/resena-de-los-fundamentos-historicos.html#more
« Pour Demain » Francis Cousin - Tyrannie sanitaire du Capital
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Avant de protester, nous nous devons de comprendre ce qui est en train de se jouer dans nos vies.
Pourquoi ce sont toujours les pires qui gouvernent dans une démocratie ?
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« Ad punctum terre medium... ponderosa cuncta tendere naturaliter ».
(Rolandino, Cronica, XII,8)
Il est un fait qui, dans tous les régimes démocratiques, se produit constamment, régulièrement et presque jamais sans exception. Tous les soi-disant représentants du peuple, ainsi que l'appareil gouvernemental, ministériel et tout ce que l'on pourrait appeler l'appareil du pouvoir, sont invariablement animés par une qualité humaine très basse, se distinguant au mieux par l'ignorance et l'incompétence ou, dans le pire des cas, par la nocivité intrinsèque, la méchanceté et la mauvaise foi systématique. Une sédimentation de spontanéité extravagante dans une sorte de grand réceptacle où convergent toutes les pires crapules antisociales, composées d'hommes d'affaires, d'escrocs, de fanfarons, de délinquants plus ou moins habituels, d'inadaptés, d'histrions, d'handicapés mentaux, d'intrigants de toutes sortes: un véritable « État dans l'État », une petite république, non pas « des Lettres » mais de la pathologie criminelle.
Cette « attraction gravitationnelle » de la racaille vers le sommet de l'État n'est pas du tout accidentelle et a en soi quelque chose d'inévitable, presque de mathématique, qui nous fait deviner l'existence de principes bien déterminés, encore à découvrir et à interpréter.
Selon un lieu commun abusif, la classe politique est le miroir de la nation : une banalité consolatrice et justificatrice qui doit être totalement rejetée, car elle est fausse et peu généreuse envers ceux qui mettent quotidiennement leurs qualités à profit, en construisant, en concevant et en agissant pour obtenir ensuite d'excellents résultats sur les plans personnel, professionnel et collectif. Toute personne ayant un minimum d'expérience peut facilement constater qu'en plus des nombreuses excellences individuelles, il y en a aussi beaucoup au niveau associatif dans les domaines de l'économie, de la science et de la culture, des hommes et des femmes réels qui, contre toute attente, s'honorent sur la scène nationale et internationale, malgré qu'ils soient souvent entravés par la politique.
Mais alors pourquoi ne pouvons-nous pas promouvoir une classe politique digne de respect ? La vieille critique selon laquelle la démocratie est un gouvernement de médiocres ne nous a jamais vraiment convaincus. La sélection inverse qui a lieu est trop précise, presque scientifique, pour être aléatoire, mais elle n'est même pas le produit d'un choix humain, car dans un tel cas, il devrait y avoir une marge d'erreur de toute façon. Il y a certainement quelque chose d'autre, une sorte de loi naturelle qui n'a pas encore été complètement clarifiée, qui agit dans ces contextes même à l'insu des protagonistes.
Pour l'expliquer, il faut remonter très loin, à l'époque de la démocratie antique d'Athènes (la seule, d'ailleurs, à pouvoir porter ce nom). Cette institution, héritière directe de la polis gentilice, a atteint son apogée et sa gloire éternelle tant qu'elle a pu maintenir son ossature aristocratique, en essayant de transfuser l'idéal héroïque dans l'idéal civique. La tentative était d'ennoblir le peuple plutôt que de démocratiser l'aristocratie. La citoyenneté était un privilège, elle n'était pas automatique et permanente, toutes les épreuves et les devoirs auxquels le citoyen était soumis avaient pour but de créer un type humain capable de commander et d'obéir avec le même esprit, avec la même capacité, jamais par individualisme et toujours pour les intérêts supérieurs de la communauté. Mais ce modèle idéal a rapidement décliné, se vulgarisant et se dégradant dans la cacophonie démagogique et la confusion des masses amorphes.
La dégénérescence démocratique est clairement exprimée par Aristophane dans sa comédie Les Chevaliers ou Les Cavaliers (424 av. J.-C.), une représentation pas trop métaphorique des dernières années de la vie politique athénienne. Dans le gouvernement (dans la fiction théâtrale comme dans la réalité) se succèdent des individus de plus en plus mauvais, dans une course à la bassesse et à la vulgarité. Le personnage du Paphlagonien, un des serviteurs du vieux Démos, est en fait le maître de maison, et impose sa volonté aux autres habitants de la maison (on reconnaît en lui la figure de Cléon, le premier dirigeant politique athénien à ne pas appartenir à une famille de la noblesse antique). Il dissimule des lectures oraculaires qui parlent de l'avenir de la ville : ceux qui gouvernent ne peuvent être remplacés que par des individus toujours plus mauvais. Ses adversaires, ayant découvert cette prédiction, se sont mis à la recherche d'un antagoniste pour vaincre le Paphlagonien, et l'ont trouvé dans un charcutier, un « homme misérable et sans vergogne qui a grandi sur la place », qui a tout ce qu'il faut pour devenir le chef du peuple: « une voix épouvantable, une naissance ignoble, et des manières dignes de la rue ». Métaphoriquement parlant, la prophétie d'Aristophane ne fait que prendre acte des événements qui se sont déjà déroulés au cours de ces années: après la mort de Périclès, des personnages de bien moindre envergure s'affirmeront, d'abord le marchand d'orge Eucrates, puis le marchand de bétail Lysikles, « qui détiendra le pouvoir jusqu'à ce que survienne un plus infâme que lui », à savoir Cléon lui-même.
En effet, on théorise ici une décadence qui est presque une nécessité naturelle, une loi physique, semblable à celle qui régit la chute des corps et qui, inéluctable dans son déroulement, ne peut que conduire à la fin des institutions et du modèle de vie qu'avait exprimé la polis.
Cette loi de la chute gravitationnelle est, à notre avis, la meilleure explication du très faible niveau humain de tous les représentants démocratiques, niveau qui ne cesse de se dégrader selon une accélération continue. René Guénon s'en rendait déjà compte et liait le démocratisme au poids, non seulement d'un point de vue strictement matériel mais aussi d'un point de vue « métaphysique ». Selon son analyse, la tendance à la baisse du poids - que la philosophie Samkhya appelle tamas et qui peut aussi être assimilée à l'ignorance et à l'obscurité – « crée dans l'être une limitation toujours plus grande, qui en même temps va dans le sens de la multiplicité, représentée ici par une densité toujours plus grande ». (1)
Une chute symbolique toujours plus basse, vers ce centre de la Terre, ce point vers lequel tend tout corps (selon l'expression de Dante « al qual si traggon d'ogne parte i pesi ») (2).
Mais actuellement, nous avons une anomalie, car la chute va « vers le haut » et non plus « vers le bas »: mais cela ne se produit que dans un sens relatif, en raison d'une erreur de perspective qui nous amène à voir les choses d'un point de vue inversé. Nous vivons actuellement dans un monde dit « à l'envers ». Si l'on regarde de cette façon, tout est logique, car si la pyramide sociale est inversée, la montée n'est rien d'autre qu'une chute, et celui qui est au sommet l'est « méritoirement », mais seulement en vertu de ce bouleversement, comme dans le carnaval et les fêtes de fin d'année (dans toutes les cultures traditionnelles, dans toutes les cultures traditionnelles, dès les Babyloniens) où tout ordre est inversé et où les membres les plus vils de la population peuvent accéder à des postes de commandement, exerçant la souveraineté, même si ce n'est que pour une courte durée (il existe de nombreuses illustrations du « monde à l'envers » à l'époque moderne, mettant en scène des épisodes tels que des serviteurs commandant au maître, des élèves réprimandant les maîtres, le ciel à la place de la terre, etc.).
On comprend maintenant pourquoi cette sélection en politique est si précise et infaillible, répondant à une loi non seulement physique, mais aussi hyper-physique, qui n'est pas affectée par l'erreur et n'admet guère d'exceptions (les meilleurs, ou les moins mauvais, spécimens qui ont accédé au pouvoir dans un régime démocratique l'ont toujours fait de manière contre nature, par un acte de force).
Pour s'en convaincre, on peut aussi ajouter le traditionnel parallélisme entre la tendance tamas (lourdeur, grisaille, obscurité) et les parias, les intouchables, les exclus, qui trouvent leur satisfaction dans ce que les autres rejettent. Le paria, selon Frithjof Schuon, est un sujet qui « constitue un type défini qui vit normalement en marge de la société » et qui a souvent « quelque chose d'ambigu, de déséquilibré, parfois de simiesque et de protéiforme, qui le rend capable de tout et de rien », « acrobate, acteur, bourreau », protagoniste de « toute activité illicite ou sinistre », attitudes qui le font également ressembler à certains saints, mais seulement « par analogie inverse, bien sûr. » (3)
Ce qui est en haut se reflète dans ce qui est en bas, comme un reflet plausible mais déformé qui ne laisse entrevoir, et de surcroît de manière négative, que la réalité authentique du modèle à suivre.
(extrait de La società da liquidare, cap. II ; republié sur heliodromos.it)
Renzo Giorgetti
NOTES
1 R. Guénon, La crisi del mondo moderno, Mediterranee, Rome, 1972, p.110.
2 Inferno, XXXIV 111.
3 F. Schuon, Castes et Races, Edizioni all'insegna del Veltro, Parme, 1979, p.13.
Source: https://www.azionetradizionale.com/2021/07/05/perche-in-democrazia-governano-sempre-i-peggiori/
Réflexions ethnodifférencialistes [L’Agora]
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- Catégorie : ETHNOPOLITIQUE
Connaissez-vous le point commun entre les dirigeants de l’Apartheid en Afrique-du-Sud et nos bobos urbains actuels ?
Ils procèdent du même modèle économique Eh oui ! En effet dans les années 70, certaines franges du nationalisme afrikaner considérèrent que la cause de l’Apartheid menait à une impasse. Car ce mode de gouvernement était basé sur un principe économique très simple : une ultra-minorité blanche profitait de la main d’oeuvre bon-marché d’une majorité noire. A terme, les partisans du « volkstaad » (l’Etat ethnique afrikaner) prophétisèrent que, sous la pression internationale et démographique, le gouvernement noir était inéluctable et que de toute façon, moralement, cette exploitation du lupen-prolétariat noir par une bourgeoisie afrikaner dégagée des tâches les plus ingrates était moralement contraire aux idéaux des pères fondateurs boers (paysans). Cette fraction du nationalisme afrikaner prônait donc l’établissement d’un « Volkstaat » ethniquement homogène (où les afrikaners seraient donc obligé d’effectuer eux-mêmes leurs basses tâches) et sa sécession de la future Afrique-du-Sud noire. La ville autonome d’Orania a été fondée sur ce principe par Carel Boshoff qui était l’un des principaux théoriciens du Bureau Sud-Africain des Affaires Raciales (SABRA).
Les bobos occidentaux procèdent de la même politique économique : ils deviennent progressivement une minorité dans les centres urbains où ils sont implantés, tiennent des positions socio-économiques avantageuses et profitent des « services » d’un lupen-prolétariat immigré. Ces derniers servant leurs maîtres « cools » en tant que livreurs de sushis, nounous d’enfants, domestiques ou agent d’entretien. « Salut Momo, ça va » lançe quotidiennement « FX » à son « pote » Mohammed, l’esclave chargé du ménage dans l’immeuble ultra-sécurisé des Buttes Chaumont que FX partage avec Chloë, graphiste comme lui.
Momo ayant quatre enfants et FX/Chloë aucun, puisque le boulot est prioritaire et que les enfants blancs « ça fait mal à la planète », l’inversion démographique est donc inéluctable. Et la politique d’apartheid mise en place par FX et les siens en pratiquant l’évitement social par la flambée de l’immobilier se terminera tragiquement comme l’Apartheid. Le couple de bobos finira comme une famille de fermiers blancs sud-africains, à moins qu’il n’est choisi la bonne idée d’investir dans une petite longère normande et de profiter du télé-travail, après s’être fait agressé quatre fois par des racisé-e-s qui n’avaient pas compris que leurs victimes étaient abonné aux Inrocks.
Cette expérience sud-africaine doit nous faire réfléchir, nous européens : devant la submersion migratoire, faut-il persister dans le rêve d’une société apaisée ? Dans l’avènement du gouvernement énergique en la matière ? Ou alors faut-il compter sur une hypothétique remigration ?
Ou bien faut-il d’ores et déjà penser à la séparation. Abandonner les villes aux immigrés et aux bobos. Les uns servant d’esclaves aux autres, avant de s’entretuer façon balkans. Les classes laborieuses blanches libérées des villes construisant des fiefs ethniquement homogènes à l’image (inversée) de la… Seine Saint-Denis ! Et pourquoi pas ? Le territoire hexagonal regorge de régions délaissées. La fuite des villes a commencé avec le COVID (Paris perd 10 000 habitants par an), elle ne fera que s’amplifier. Des communautés ont déjà commencé à se mettre en place. Certaines sont basées sur des affinités politiques, d’autres basées sur la langue (deux communautés bretonnantes en Finistère par exemple), mais on est encore loin d’un volkstaat.
Bien entendu, ces « communautés » n’ont rien à voir avec les communautés babacools post-68ardes où tout était partagé, nourriture, femmes et argent dans un joyeux merdier. Les communautés modernes sont plus des communes où chacun est chez soit mais où un esprit commun et une homogénéité ethnique constitue la base du « vivre ensemble » au sens noble du terme.
En Bretagne, nous avons encore la possibilité de nous implanter dans certaines régions, notamment du Centre-Bretagne et d’y développer un modèle alternatif et identitaire. A partir des langues de Bretagne par exemple. Quoi de plus « triant » qu’une langue dite régionale ? Acheter une part une les maisons d’un village déserté pour l’ériger en village brittophone ou gallophone sur des bases ethnico-identitaires, cela ne tente personne ? Des expériences sont en cours, il suffit de s’en inspirer…
Anne-Sophie Collin
Précision : les points de vue exposés n’engagent que l’auteur de ce texte et nullement notre rédaction. Média alternatif, Breizh-info.com est avant tout attaché à la liberté d’expression. Ce qui implique tout naturellement que des opinions diverses, voire opposées, puissent y trouver leur place.
source: BREIZH-INFO.com 08/08/2021
La Catalogne du Nord comme affirmation territoriale Par FRANCK BULEUX
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- Catégorie : Régions d'Europe
Il y a quelques années, je publiais un essai, L’Europe des peuples face à l’Union européenne (L’Æncre éditeur, 2017), sur l’émergence et la pérennité des mouvements régionalistes en Europe, c’est-à-dire des groupes dont la revendication s’inscrit dans un territoire distinct, sans lui être forcément opposé, de celui des contours de l’État-nation dont il fait partie.
Sans reprendre le contenu (disponible auprès de l’auteur ou de l’éditeur) de cet essai, j’indiquais qu’il existait, en Europe, des peuples divisés au sein de plusieurs États-nations. Ainsi, les Normands sont partagés depuis 1214 entre le Royaume-Uni (les îles Anglo-Normandes) et la France (les cinq départements constitutifs de la région normande, réunie depuis 2016), les Basques et les Catalans, entre France et Espagne ou d’autres, ce triple exemple n’ayant pas la prétention de l’exhaustivité.
Concernant les Catalans, ils sont divisés entre la Catalogne du Sud, le territoire le plus important avec la capitale régionale Barcelone, qui constitue une « généralité » au sein de l’Espagne, région qui a défrayé la chronique ces dernières années avec l’exil forcé fin 2017 du président d’alors de la généralité, Carles Puigdemont, et la Catalogne du Nord, qui désigne la partie du département français des Pyrénées-Orientales, de langue et culture catalanes, par opposition aux Fenouillèdes occitanes.
Llorenç Perrié Albanell a publié, en 2020, un opuscule consacré aux Mouvements et partis politiques nord-catalans, ouvrage sous-titré par un constat, même si un point d’interrogation subsiste : Un marasme ? (édité par le Cercle Català del Rosselló en août 2020).
L’auteur, fervent partisan et défenseur de l’identité catalane, nous entraîne dans les méandres du « catalanisme » politique en nous présentant ses tendances plurielles, récoltant des scores électoraux résiduels depuis le début des années 1970. Regrettant cette situation qui réduit le « catalanisme » à une minorité politique sans avenir, l’auteur-militant rejette l’identification du combat identitaire catalan (ou nord-catalan, sachant que chaque partie du territoire devrait développer son identité avant de se réunir dans une conception d’autonomie politique) aux dérives d’ultra-gauche ou écologiques « de type pastèque » (vert à l’extérieur mais rouge à l’intérieur). Les mouvements les plus représentatifs, même s’ils demeurent électoralement très faibles, privilégient, en effet, les alliances avec les partis de gauche (parfois dès le premier tour, évitant d’onéreuses dépenses et la visibilité d’un faible score), voire avec La République en marche (LREM), notamment lors des municipales de 2020 à Perpignan (dont le maire est Louis Aliot, membre du Rassemblement national, qui a battu le maire sortant de droite avec 53 % des suffrages exprimés, offrant au RN une commune de plus de 100 000 habitants).
L’échec politique du « catalanisme » laisse l‘auteur dubitatif. En effet, la version culturelle de l’identité catalane ne laisse indifférent aucun habitant, ni même aucun visiteur, pour qui la passion catalane est une permanence de la représentation régionale. Mais, selon l’avis d’Albanell, cet aspect, pour valorisant qu’il soit, est insuffisant ; seule une institution politique serait à même de garantir la défense du pays nord-catalan. Ce que préconise Albanell, c’est de ne pas se contenter de la nostalgie, mais de vivre le « catalanisme » comme une histoire en marche, avec un passé, un présent et un futur. La langue catalane en est l’expression vivante, y compris sur l’ensemble des panneaux de signalisation routière (comme en Bretagne, par exemple). Le mode de vie différencié, comme l’appelle l’auteur, doit être préservé, voire accentué par des écoles dites immersives.
Le lien entre les deux Catalogne est parfois d’une gestion difficile car nombre de Catalans du Nord attendent les orientations de ceux du Sud, plus puissants, et deviennent inféodés à des mouvements politiques hors de l’espace hexagonal, rendant difficile leur action régionale au sein de la France.
L’auteur indique avec justesse qu’il ne peut y avoir un seul « parti catalan » car chaque peuple, pour identitaire qu’il soit, comprend différentes sensibilités. Pour aller dans ce sens de la pluralité démocratique, il suffit de voir l’exemple corse : un mouvement autonomiste dirige l’exécutif insulaire depuis 2016 mais d’autres partis, plus indépendantistes qu’autonomistes, concourent aussi aux élections : tous « corses » mais aux aspirations différentes et cela n’empêche pas la liste Fà Populu Inseme de Gilles Siméoni, dirigeant de l’exécutif régional, d’atteindre 41 % au second tour tandis que deux autres listes « corses » raflaient 27 % des suffrages laissant à la droite régionaliste insulaire à peine un tiers des électeurs.
L’auteur insiste sur ce point. Le « catalanisme » politique est nécessaire mais il se doit d’être indépendant, au moins dans un premier temps, des mouvements du Sud et surtout, il se doit d’être représentatif du peuple, sans exclusive.
Albanell s’insurge à juste titre lorsque les Catalans les plus extrémistes lancent des slogans inquisiteurs et sectaires comme « un électeur du RN n’est pas un Catalan » (sic). Pourquoi le vote catalan n’aurait-il pas une « aile droite », une aile conservatrice ? En 1978, la Catalogne du Sud voyait la naissance du mouvement CIU – Convergence et union (en catalan : Convergència i Unió, abrégé en CiU) : une fédération de deux partis politiques catalans centristes et catalanistes, qui a constitué le pivot de la vie politique catalane jusqu’en 2015. Albanell n’aurait rien contre la fondation d’un tel parti « à la française » ou, plus exactement, « à la nord-catalane ».
L’auteur termine sur l’essentiel : un mouvement identitaire doit s’appuyer sur un trépied : le culturel, le politique et l’économique. La vie économique doit montrer l’exemple, celui de la possibilité d’un localisme viable. Être Catalan comme être Normand, c’est aussi tirer de la terre et de la force de la population qui la constitue, l’ensemble des ressources qui sont susceptibles de faire vivre un ensemble, un « pays ».
La question politique, celle de l’autonomie fédérative (celle qui reste du domaine du possible avec le système des « eurorégions » reconnues par l’Union européenne), de l’indépendance, de l’union nationale interétatique, n’est pas la seule. Elle viendra, c’est du moins ce que souhaite l’auteur mais elle ne doit pas être, nécessairement, la priorité. La mentalité politique vient après le culturel, c’est ce que l’auteur retient du communiste italien Gramsci.
Une culture catalane affirmée et une économie de proximité avec une relocalisation des productions sont des axes essentiels avant d’aborder le projet politique catalan binational.
Il y a quelques années, en touriste, j’étais monté dans « Le Train jaune » dans les Pyrénées catalanes. Et, en parcourant les 63 kilomètres de voie ferrée, comment ne pas penser à l’identité de ce pays, loin de tout jacobinisme, français ou… catalan d’Espagne ! Entre Paris et Barcelone, la voie de la Catalogne du Nord reste encore à écrire mais les femmes et les hommes de ce territoire, eux, l’ont compris… l’histoire s’écrit chaque jour.
Je vous recommande de lire cet ouvrage. Même si son titre est un peu pessimiste (« Un marasme ? »), le point d’interrogation maintenu par l’auteur nous laisse espérer que la voie politique n’est pas qu’une impasse.
Mouvements et partis politiques nord-catalans, un marasme ?, Llorenç Perrié Albanell, cercle Catala del rossello, 114 pages, 8 € (+3,20 par correspondance pour la France).
JEANNE INCONNUE par Louis ROSSEL
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- Catégorie : LES EVEILLEURS DE PEUPLES
Le 28 mai 1871, la Commune de Paris est écrasée. Les Versaillais entrent dans la ville. Ils épurent avec férocité. Le parti du coffre-fort contre le parti de la Nation. Quelques jours après l'effondrement, le colonel Louis Rossel, polytechnicien, chef d'Etat-Major de la Commune, est arrêté.
Il sait qu'il va mourir. Il doit transmettre ce qu'il porte en lui. Il couche sur le papier quelques réflexions sur Jeanne. Les réflexions d'un frère d'armes. Louis Rossel envie le destin du jeune chef de guerre qui communiqua sa foi au peuple, s'imposa aux capitaines, emporta les batailles. De Jeanne, il connait la volonté embrasée et le martyre. Le 28 novembre 1871, Louis Rossel, notre camarade, est fusillé dans les fossés du fort de Satory. II a 27 ans.
C'est pourquoi, sans doute, rien d'aussi dense, d'aussi direct n'a été écrit sur Jeanne. La voici débarrassée d'un demi-siècle de morale bien pensante. La voici restituée à elle-même.
Jeanne d'Arc est un grand général, toutes les fois qu'elle décide seule et librement soit d'un mouvement, soit d'une action, elle agit avec une sagesse qui n'appartient qu'au génie. Son idée est non seulement conforme aux règles de la guerre, mais supérieure à ces règles, comme sont parfois les conceptions des grands capitaines. Allant délivrer Orléans, elle délibère de marcher par la Beauce, mais ses lieutenants, abusant de son ignorance des localités, la conduisent par la Sologne, ce qui était de tout point une faute. Dans sa marche sur Reims, elle ne s'amuse pas à assiéger les grosses villes, comme auraient fait les conseillers du roi : elle pénètre d'autorité dans le Conseil, fait prévaloir son opinion, puis, profitant de l'hésitation des villes, elles les intimide par les préparatifs d'une attaque de vive force, et les enlève. Tout général médiocre se serait arrêté.
Cette marche même sur Reims, sous le prétexte du sacre du roi, est une remarquable conception stratégique. Cette marche portait en effet l'armée du roi entre la France anglaise et la Bourgogne, interceptant ainsi les communications entre Paris et les principaux Etats du Bourguignon. C'était un moyen assuré d'inquiéter et d'affaiblir le moins acharné de nos adversaires, de lui rendre la guerre plus difficile et moins fructueuse. Ainsi le roi devenait maître d'une grande route qui coupe transversalement le bassin de la Seine ; il n'est pas douteux que ce résultat n'ait eu, à la longue, une influence décisive sur le retour du duc de Bourgogne au parti français.
De Reims, l'armée royale menaçait également, d'une part les Etats de Bourgogne et de l'autre les possessions des Anglais. Jeanne choisit la marche qui devait procurer les résultats les plus décisifs : elle se porte sur Paris et l'attaque du côté du nord, de manière à se trouver entre Paris et les principales places d'armes des Anglais, Rouen et Calais. Ainsi, sa première opération offensive la porte sur la ligne de communication des Bourguignons, qu'elle intercepte, et sa seconde opération, sur la ligne de communication des Anglais. Là finit la partie la plus importante de la carrière de Jeanne ; d'autres conseils avaient définitivement prévalu sur l'esprit du roi, qui empêcha positivement le succès après l'avoir vingt fois compromis par sa paresse et son indécision. Jeanne ne fut plus, après cela, qu'un chef de bande comme les autres capitaines qui combattaient pour la France, mais ses préoccupations restèrent dirigées vers le même plan, et lorsqu’elle fut prise, elle défendait ces villes situées à l'est de Paris et dont la perte aurait entraîné leur rattachement aux Etats de nos adversaires.
Il y a une révolution dans le commandement des armées entre Duguesclin et Jeanne d'Arc : avant elle, la première qualité d'un chef de guerre en France était la prouesse, la force physique ; Jeanne d'Arc, au contraire, quoique ayant pris soin de s'instruire dans l'escrime et l'équitation, ne versait jamais le sang. Elle était au plus fort du danger et s'occupait seulement de donner des ordres et d'encourager les soldats. Il ne paraît pas que son sang-froid se soit jamais démenti : blessée, elle s'asseyait et continuait à donner des ordres, ou revenait après s'être fait panser.
Elle possédait certainement cet ensemble de hautes facultés intellectuelles et morales qui constituent le génie. Ses réponses aux juges de Rouen témoignent d'une hauteur d'intelligence qui ne faiblit point à travers toutes les complications du procès ; seulement la pauvre fille était vraiment martyrisée dans sa prison. On ne songe pas sans douleur à l'amertume de cette captivité et aux outrages dont était abreuvée une fille simple, douce, sage, et qui avait fait preuve pendant son séjour aux armées d'une véritable délicatesse de mœurs et de sentiments. Je ne sais pas jusqu'à quel point n'a pas été poussée la brutalité de ses gardiens et de leurs chefs.
Le génie de Jeanne d'Arc était précisément celui qui convient à l'homme de guerre. Elle avait l'audace, la décision, l'à-propos. On ne s'étonne pas de trouver ces qualités dans Condé à vingt-deux ans ; il n'est pas plus étonnant de les trouver dans Jeanne.
Reste le merveilleux de ses connaissances militaires, de sa vocation, de ses inspirations mystiques.
En ce qui concerne ses connaissances militaires, il faut considérer d'abord que l'enclave champenoise où se trouve Domrémy était, par sa situation géographique autant que par sa condition politique, un pays fréquenté par les troupes de passage des différents partis, et où la connaissance des événements militaires, de l'importance des villes de guerre, de leurs distances, était plus répandue que dans les autres pays. Encore aujourd'hui, il n'y a pas d'invasion où le pays de Neufchâteau ne soit inondé de troupes. Le patriotisme est plus-fort dans une province frontière que dans l'intérieur d'un empire ; à plus forte raison devait-il être exalté dans un canton enclavé au milieu de possessions ennemies.
On sait aussi que Jeanne, dès son enfance, avait coutume d'écou-ter les longs récits d'un vieux soldat retiré à Domrémy, et se plaisait à entendre ce qu'il lui contait de la guerre. Sans doute il y a peu de vieux soldats dont la conversation soit propre à former des généraux ; cependant, je suis tenté de croire que celui-là était un homme sage, connaissant son métier, sachant raisonner sur les événements dont il avait été témoin et sur ceux que lui apprenait la renommée, aimant son pays et souffrant de l'état d'abjection où il le voyait réduit. Nul doute que son influence ait contribué à la vocation de Jeanne d'Arc.
Ainsi je suppose que Jeanne était une enfant intelligente et sensible, pieuse, cela va sans dire, et qui s'exaltait en même temps qu'elle s'instruisait, en écoutant le récit de nos guerres malheureuses. Lorsqu'elle arriva peu à peu à critiquer sainement, à juger, à prévoir avec justesse le résultat des opérations qui s'exécutaient, elle ne put attribuer qu'à une intervention miraculeuse cette faculté acquise par la méditation et une préoccupation constante. Elle ne distingua pas non plus cette faculté de sa mise en œuvre, et ne put pas songer que ce don merveilleux dont son esprit était obsédé pût demeurer stérile ; de là sa vocation.
Un berger peut devenir astronome, calculateur, géomètre ; il y a aussi des bergers qui sont devenus capitaines et fondateurs d'empires. Moïse gardait les troupeaux dans le désert lorsqu'il reçut la vocation de délivrer le peuple hébreu. David, Romulus, étaient bergers. A la vérité, il est moins ordinaire de voir une bergère devenir une héroïne, mais Jeanne, avec toutes les vertus et les délicatesses de la femme, n'en avait ni les séductions ni les infirmités. Quoique belle et bien faite, à ce qu'il paraît, elle inspirait la confiance, le respect, l'enthousiasme, elle n'inspirait pas l'amour. Les poètes qui ont fait Jeanne amoureuse ne l'ont pas comprise. Dans ce cœur, tout grand qu'il était, il n'y avait pas de place pour un sentiment personnel.
Quand aux apparitions des saintes patronnes de Jeanne, à ses voix, comme elle disait, je ne puis pas non plus y voir un miracle, ni aucune illusion surnaturelle. Après le démon de Socrate, je suis disposé à admettre sans conteste et sans étonnement toute sorte d'esprit familier... chez les autres. C'est un fait, voilà tout, c'est un fait inexpliqué, mais dûment constaté et assez fréquent. On peut dire qu'il y a hallucination, on peut même dire qu'il y a folie, s'il peut y avoir folie sans que les aptitudes intellectuelles soient lésées et sans que leur application soit pervertie. Il y a une aberration qui consiste à attribuer à un agent extérieur certaines des opérations de notre esprit ; c'est une perversion de la notion de causalité. On sait qu'il y a au contraire des fous, de vrais fous qu'une aberration contraire conduit à se croire la cause de toutes choses.
A propos des visions de Jeanne d'Arc, je ferai seulement deux remarques : l'une, c'est que chez les personnes d'une imagination vive, la méditation intime tend à prendre la forme dialoguée. Cela fait comprendre comment un esprit sage et connaissant la faiblesse de nos moyens d'investigation peut être prédisposé, lorsque le sens intime lui révèle quelque vérité éclatante et féconde, à attribuer cette révélation à une cause étrangère.
L'autre remarque est celle-ci : on trouve parfois chez les esprits les plus élevés une tendance particulière à la superstition ; non pas tant chez les esprits spéculatifs qui ont tout loisir de ressasser la vérité, que chez les hommes d'action qui se trouvent obligés de prendre à un certain moment une décision irrévocable, et de se conduire, à partir de ce moment, comme si leur décision était la sagesse et la vérité mêmes. Ils ont besoin de prêter à leurs déterminations l'appui de la nécessité. De là vient que certains esprits profondément pratiques revêtent une apparence soit fataliste, soit mystique, que le vulgaire ne s'explique pas et qui est chez eux l'expression de cette belle et sereine confiance qui ne les abandonne jamais. César parle de sa fortune ; Napoléon de son étoile ; il prétend même qu'il la voit.
Au fond, Jeanne d'Arc n'est rien moins que mystique ; ses interrogatoires montrent un esprit profondément pratique, ferme, inébranlable. On cite encore d'elle telles paroles qui prouvent qu'elle n'avait aucune prétention aux dons surnaturels : les juges de Poitiers lui demandaient des miracles. « Je ne suis pas venue pour faire des miracles, répondait-elle, mais bâillez-moi une armée et je délivrerai Orléans ». Plus tard, comme, dans une église, on lui présentait des enfants à toucher. « Touchez-les, dit-elle aux femmes dont elle avait soin de se faire toujours accompagner, touchez-les, cela fera le même effet ».
Louis Rossel
LA VERTU D'INSOLENCE
« Dans un temps qui est un temps d'acceptation générale et de soumission, Jeanne nous propose, avec le sourire, la magnifique vertu d'insolence. Une jeune insolence. Il n'est pas de vertu dont nous ayons plus besoin aujourd'hui. Elle est un bien précieux qu'il ne faut pas laisser perdre : le faux respect des fausses vénérations est le pire mal. Par un détour en apparence étrange, Jeanne nous apprend que l'insolence, est à la base de toute reconstitution ». |
Robert Brasillach
Préface au « Procès de Jeanne d'Arc », écrite à 21 ans.
Source : Europe Action – mai 1965
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