Parution du N° 87 de Terre & Peuple Magazine
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- Catégorie : Terre et Peuple Magazine n°87 - Printemps 2021
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Didier VIAL, PRESENT !
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Fils de Dany et Pierre VIAL, Didier, nous a quittés brutalement à l’âge de 57 ans.
Homme d’action et soldat de fortune pendant plusieurs années,
Didier est parti pour son dernier voyage avec les Oies Sauvages ...
En ce moment douloureux, nos pensées vont à sa famille.
Didier VIAL, Présent !
12 avril 1861 – Fort Sumter arraché aux Yankees
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A Charleston, le soir, après avoir dégusté un mint julep, un margarita, un hurricane (et plus si affinités) dans les bars du French Market, on peut avoir une pensée pour Rhett Butler, le briseur de blocus, et pour Scarlett O’Hara, toujours présente dans nos cœurs. Et puis, alors qu’il ne fait plus « que » 36° (taux d’humidité : 97 %…), aller déambuler le long des quais, près de la statue à la mémoire des défenseurs confédérés de Charleston. Avec, au loin, comme un fantôme émergeant de la mer, Fort Sumter.
Quand la Caroline du Sud décide – seule et la toute première – de faire sécession, Fort Sumter, à l’entrée du port de Charleston, est occupé par les forces unionistes. Les Nordistes ayant refusé d’évacuer le fort, les forces confédérées décident de passer à l’attaque. Le 12 avril 1861, les canons sudistes de Fort Johnson entrent dans la danse.
Après un bombardement de deux jours, le major Robert Anderson et ses 85 hommes se rendent. Leur vainqueur, le légendaire général Beauregard (descendant d’un combattant vendéen), avait été l’élève d’Anderson à West Point. Le 14 avril, le soldat John S. Bird Jr., des Palmetto Guards, fait flotter le drapeau desdits Palmetto Guards sur le fort.
Jusqu’au 17 février 1865, le fort restera aux mains des Sudistes. Et jusqu’à cette date, Fort Sumter sera soumis à l’un des plus longs sièges de l’histoire moderne, résistant aux bombardements massifs de la marine yankee pendant deux ans (quelque 46 000 obus, des milliers de tonnes de métal…).
Aujourd’hui, on peut débarquer pacifiquement à Fort Sumter. En prenant un bateau soit à Liberty Square sur les quais de Charleston, soit à Patriot Point à Mount Pleasant. Choisir plutôt le départ à Patriot Point, ne serait-ce que parce que le bateau qui vous emmène à Fort Sumter est ancré tout près de l’USS Yorktown, ce porte-avions (surnommé Fighting Lady), qui a été de tous les combats du Pacifique pendant la Seconde Guerre mondiale, d’Iwo Jima à Okinawa.
Ce n’est pas sans émotion que l’on met le pied – dans les pas des soldats de Beauregard – sur la petite île où se tient Fort Sumter, même si les bâtiments (après les bombardements yankees, le fort était une ruine) n’ont plus qu’un lointain rapport avec ceux de l’époque. Là, une plaque commémorative installée en 1929 par les United Daughters of the Confederacy à la mémoire des Sudistes qui tinrent le fort de 1861 à 1865. Là, les ruines du quartier des officiers qui avait trois étages. Ailleurs, les canons, des Mountain Howitzer, qui empêchèrent tout débarquement yankee.
C’est ici que tout a commencé. Charleston et la Caroline du Sud ne l’ont pas oublié. Sur des affiches, des autocollants, des T-shirts, des drapeaux, une tranquille constatation : « Standing alone against Northern agression since 1861 » (« Dressée, seule, contre l’agression nordiste depuis 1861 »). Dans le petit magasin de souvenirs de Fort Sumter, on vend des soldats de plomb. Des Nordistes. Et des Sudistes. Les Nordistes partent au compte-gouttes. Les Sudistes se vendent comme des petits pains. Vae victis ? Pas toujours. La preuve !
Alain Sanders
Présent n° du 12.04.2021
Louis-Ferdinand Céline et le « blabla » idéologique de notre temps
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Au temps où la liberté de déplacement était encore autorisée, une odyssée cycliste m'avait conduit à coudoyer la maison d'exil de L.F. Céline au Danemark. Point d'orgue de ce voyage, ma rencontre inopinée avec un témoin direct de l'époque, dont je comprends aujourd'hui la responsabilité face à l'Histoire. Olé Seyffart-Sorensen, huit ans à l'époque des faits, a en effet noué une touchante complicité avec le «Géant» (A l'époque, le gamin accompagnait son père dans la masure, prêtée par l'avocat danois, pour y effectuer de menues réparations de boiserie, cette masure ou Céline et Lucette passèrent bon gré, mal gré, plus de trois années).
Bref, avec le temps, ce voyage semble avoir délivré sa charge heuristique au-delà de l'anecdote. La question est de savoir ce que le mal aimé des Lettres Française dirait des avancées sociétales du XXIème siècle, de cet art contemporain qui s'impose dans nos rues ébahies et autres confinements à répétition. Céline est mort il y a 70 ans (le même jour qu’Ernest Hemingway) mais une grande œuvre peut agir aussi comme une réplique, au sens sismique du terme, du substrat de la civilisation.
Les confinements ont, à leur manière, contribué à donner des messages nouveaux à mon questionnement célinien. Je songe aux truculents entretiens radiophoniques disponibles sur internet, résonnant avec cette époque de basses eaux que nous traversons.
L'entretien de 1957, réalisé pour le compte d'une radio suisse, sonne comme un véritable roman radiophonique. Le fond sonore se compose de bruits divers et chants de menâtes qui donnent à ces propos une hilarité toute particulière que l'on retrouve bien sûr dans ses romans. L'auteur d'Un château l'autre qui se joue des faiblesses du journaliste, déclare notamment :
«Je suis femme du monde, Monsieur, et non pas putain ; j'ai des faiblesses pour qui je veux... Je me sacrifiais pour mes semblables. Je n'ai pas eu d'avantage à me sacrifier ! »...
Quant aux innombrables colloques et recensions qui font flores sur la toile, aussi passionnants fussent-ils, ils ne m'ont pour autant pas fait basculer dans le célinisme confessionnel. C'est même en réaction contre un certain nombre de « poncifs » véhiculés autour de Céline, comme celui de l' « écrivain styliste », que j'ai commis cet article. Je voulais le surligner avec d'autant plus d'audace que ce poncif, répété en chœur par tous les épigones, provient de Céline lui-même. Dans un entretien de 1957, il déclare : « On parle de "messages". Je n'envoie pas des messages au monde. L'Encyclopédie est énorme, c'est rempli de messages. Il n'y a rien de plus vulgaire, il y en a des kilomètres et des tonnes, et des philosophies, des façons de voir le monde... ».
L'auteur du Voyage a martelé à plusieurs reprises qu'il n'était pas un « homme à idées, un homme à messages » mais il s'exprimait après avoir échappé à « la plus grande chasse-à-courre qui ait été organisée dans l'Histoire », au terme de dix-huit mois de réclusion au Danemark et six ans d'exil hors de France avant son retour équivoque.
Après-guerre, l'Histoire était en cours d'être réécrite à la faveur des vainqueur. Et cette histoire fut écrite symétriquement contre le projet européen d'Hitler et la France de Céline. A son retour en France, son image d'écrivain maudit le contraint donc à une semi-clandestinité. A l'étage de la maison de Meudon, Lucette prodigue ses cours de danse ; au rez-de-Chaussée, le médecin Destouches reçoit quelques patients. Il écrira les trois romans fulgurants de la «trilogie allemande» (D'un château l'autre, Nord et Rigodon) mais réserve désormais ses visions politiques aux rares amis fidèles.
Pour cette période meudienienne, deux thèses s'affrontent, celle des Céliniens qui prétendent que sa posture et sa tenue vestimentaire de clochard aristocrate étaient surjouées et factices, et celle du très dévoué rédacteur de la revue célinienne, Marc Laudelout, qui penche au contraire pour un retrait jüngérien de Céline sur le mode «anarque».
Quelle que soit la réalité vécue, Céline fut sans conteste un « lanceur d'alerte » avant l'heure. Grand blessé de 1914, il milita contre la déclaration de guerre d'une France dont il présageait l'issue tragique. Il fustige une déclaration de guerre perdue d'avance. Il sera perçu pour un héros au début du second conflit mondial. A son retour en France, il restera un sage à la mode de Diogène-le-Cynique dans la villa de Meudon.
Sur l'art célinien, l'erreur généralement commise est à mon avis double :
1) Dissocier le style émotif de Céline et son « message » textuel est le premier travers dans lequel tombent nombre de Céliniens. En réalité, cette dichotomie n'est pas plus opératoire que la séparation franche entre la vie et l’œuvre d’un auteur. Ces manœuvres appartiennent au monde proustien relayé par certains universitaires détachés des contacts avec les réalités et les sortilèges de l'écriture, promptes à créer une religion de ces séparations abstraites tout en se gardant bien d'occulter les distinctions lorsqu'elles s'imposent, le pays réel et le pays légal, par exemple.
A mon avis, style et « idées » ne sont tout simplement pas séparables, pas plus que forme et force en peinture aurait dit René Huyghe.
Certes, le travail de restitution de l'émotion du langage parlé dans l'écrit ne fait pas de Céline un théoricien des idées ni un « philosophe » stricto sensu, bien qu'il puisse, à mon avis, être perçu comme un « cynique ». Céline est comme les cyniques grecs, proche des animaux. Il aime la compagnie des chats, des perroquets et des chiens (cynique provient d'ailleurs du latin cynismus pour désigner ce qui concerne le chien). Comme les Cyniques grecs, il aime à exprimer sans ménagement des sentiments, des opinions contraires à la morale reçue.
Les Cyniques ont pris pour modèle le chien car cet animal aime « ronger les os ». Les Cyniques rongeaient les Idées platoniciennes. Céline, lui, est celui qui ronge le « blabla » que ce soit celui des va-en-guerres des années 30 que celui des chantres des évolutions sociétales des années 60. Céline est par exemple, avant Marshall Mac Luhan, un critique de la télévision et la publicité dont il pressent le pouvoir sur les masses dès 1953. Il anticipe la société du spectacle de Guy Debord. Il perçoit la portée idéologique de la « réclame ».
On peut imaginer sans peine ce qu'il écrirait aujourd'hui face au « soft power » néolibéral de la machine macronienne, les avancées de la démocrature mondialiste sous couvert d'hystérie sanitaire. Il tournerait à coup sûr en dérision toute cette grossière mascarade ! Gageons également qu'il aurait été le premier à porter le « gilet jaune » sur les ronds-points du pourtour parisien sur le mode « périféerique pour une autre fois » !
2) En revanche, contrairement à l'idée répandue, le style célinien est moins le retour de la langue populaire (la langue de la rue) que l'art de restituer l'émotion de la langue. Céline cherche à nettoyer la dentelle de la langue des formalismes et du métalangage hérités de la langue diplomatique du XVIIème siècle. Il désenclave la langue, il ne lui fait pas faire le trottoir. Mort à Crédit fourmille de mots d'argot, mais Féerie pour une autre fois, œuvre la moins comprise du corpus, touche la dentelle même de la langue.
Si la langue est marquée, comme toutes réalités, par des mouvements de balancier, la langue romanesque de Céline marque incontestablement un « retour » à la langue pré-scripturale, souterraine, dionysiaque et rabelaisienne. Mais celle-ci ne s'identifie à mon avis pas à la « langue de la rue ». Ceux qui soutiennent cette thèse se rangent sans même le savoir du côté de la critique allemande qualifiant les romans de Céline d'« Asphalt Literatur », critique intéressante mais étrangère à la francophonie.
A mon avis, la langue célinienne a plus à voir avec le mouvement transcendantalisme américain qu'à l'« Asphalt Literatur ». Mais Céline est un Européen, au lieu de faire son miel du passé amérindien, il renoue avec le fond païen celtique, notamment. N'oublions pas que « Céline » est le prénom que Louis-Ferdinand emprunte à sa grand-mère bretonne, celle qui transmis au fils unique Destouches, choyé par ses parents, les légendes bretonnes des « Saints de la main gauche ».
On comprends maintenant mieux pourquoi Céline se disait opposé aux idées: son style est déjà « idéologique », il n'a pas besoin d'exposer des idées pures ou phosphorer sur tels ou tels débats de société. Ce n'est pas un théoricien. A mon sens, on comprend que Céline a agit avec les idées comme il a agit avec la langue française dont il épure les lourdeurs et les formes figées. Il s'agit d'un « rendu émotif » de la langue française et non d'un bilan d'idées.
J'avance par ailleurs l'idée que Céline fut aussi le pionnier des « lanceurs d'alerte » en ouvrant notamment le sillon à Guillaume Faye.
3) Parmi les héritiers de Céline : Se demander quelles « personnalités » pourraient aujourd'hui revendiquer l'héritage de Céline, c'est déjà y répondre. Bien sûr, le nom de Guillaume Faye vient à l'esprit comme une évidence. Le théoricien des années 80, l’« Esprit fusée » de la ND, fut aussi un humoriste sur les ondes de Sky Rock, un « homme total » décrié jusque dans ses propres rangs, comme il se doit pour un Célinien pur sucre. Nous savons que Faye mourut en état de semi-clochardisation à Paris.
Parmi les héritiers, je pense aussi au directeur artistique Joël Labruyère dont certains textes sont céliniens sans chercher à l'être. Dans la chanson Le Dieu Azard, le chansonnier développe une satire des « prêchi-prêcha » de la religion républicaine et scientiste; on ne saurait mieux s'inscrire dans le sillon du Céline pourfendeur des « blablas » pseudo-démocratiques de son temps, d'autant que la scénographie du clip avec des personnages à masques d'animaux n'est pas sans évoquer les réalités augmentées du roman célinien.
https://communaute-rose-epee.fr/2021/03/31/le-studio-des-brigandes-le-dieu-hazar-hasard/
Notons au passage que Céline est l'inventeur du néologisme « blabla » (dans Bagatelle pour un massacre) mais aussi de la ponctuation « émotive », entre autres innovations entrées aujourd'hui dans l'usage. L'héritage célinien est esthétique, il irradie tous les arts, littérature et cinéma notamment car la langue agit par cristallisation des innovations esthétiques.
Les entretiens relatifs à Céline sur internet réservent quelques perles à leurs auditeurs attentifs. Au cours du colloque tenu en 2011 sur le thème de Céline et L'Histoire : http://www.lepetitcelinien.com/2011/02/colloque-louis-ferdinand-celine-paris.html un intervenant prend la parole (à 3:27:00 minutes de l'émission) à propos des « chochottes anglaises », qui n'est autre que Robert Faurisson ! Vous pourrez sans doute reconnaître le truculent professeur au ton de sa voix. L'intervenant reste anonyme mais déclare être « demi-écossais ».
Profitons de ce clin d’œil amusant pour souligner l'apport du professeur en matière d'analyse textuelle, son interprétation étonnante de l'énigmatique poème « Voyelles » de Arthur Rimbaud a fait date. Ne le réduisons donc pas à son révisionnisme héroïque.
Les génies se reconnaissent souvent par leur pluralité, leur côté insaisissable, leur décalage par rapport à leur temps et au « polythéisme des valeurs ». Céline fut à la fois un écrivain de génie, un lanceur d'alertes, et comme Apollinaire en son temps, un visionnaire. Il a notamment annoncé le déclin français, le crépuscule occidental, ainsi que la montée en puissance de la Chine. Il n'est pas exagéré de dire que nous serons tous un jour ou l'autre « céliniens », conscients ou non de cet héritage. Dès le Voyage, Céline annonce avoir renouvelé la littérature pour deux cent ans. Les génies se reconnaissent aussi par les phénomènes de cristallisations mimétiques qu'ils entraînent, malgré eux, après coup. On songe que Céline le reprouvé, le proscrit des commémorations, reste l'un des écrivains français le plus lu dans le monde. Il est l'objet d'un journal bimensuel publié depuis les années 80 regroupant tous les articles et publications à son sujet. Quel autre auteur peut en dire autant ?
4) L'art de Céline est le contraire même de l'art contemporain. La révolution célinienne touche le fond d'air de son temps (comme on pourrait dire : « le fond de l'air est célinien ») à l'instar d'un sismographe qui enregistre les mouvements telluriques d'un sol. Si l'influence de Céline est souterraine, si sa figure irrite autant qu'elle fascine, c'est sans doute parce qu'il travaille en dehors de toute climatisation idéologique (y compris fasciste). Son travail a consisté à décaper les couches de peinture de la langue pour atteindre sa trame émotive, d'où le génie qu'on lui prête. Il lui arrivait de paraphraser Saint Jean : « au début était l'émotion».
En matière d'art, il appréciait les impressionnistes, Vlaminck, etc. Il n'aimait pas la peinture abstraite, par exemple Dubuffet, qui, lui, avait une admiration éperdue pour Céline. Mais ses préférences allaient à Breughel, Bosch, etc. Bref, un choix éclectique.
Les tendances d'une certaine littérature et de l'Art Contemporain (AC) vise au contraire la monoculture. L'idée est d'expulser la trame émotive de l'art pour ne garder que la couche de peinture superficielle, conceptuelle, hors-sol, idéologique. D'où l'impression que les expositions d'AC ne touchent plus l'âme des spectateurs mais seulement l'épiderme et qu'elles s'imposent à l'instar de « slogans ». On peut parler à leur endroit de stratégie d'im-position et non d'ex-position. Tout se passe comme si les artistes subventionnés de l'AC agissaient à rebours de Céline.
Céline épure la langue de ses lourdeurs, le résultat est une langue qui est à la fois populaire et poétique sans chercher à l'être, poétique par « grâce », alors que les homards géants qui s'imposent sur nos places publiques sont tout au contraire des concepts déguisés en œuvre, interdisant de ce fait tout espèce de réminiscence. L'émotion est remplacée par la provocation; le talent par la soumission à un logiciel idéologique et financier indiscutable, minutieusement démontré dans les ouvrages d'Aude de Kerros.
Dans une émission de radio, Aude de Kerros pose par ailleurs une question d'une grande actualité : « Peut-on être dissident dans le système libéral ?». La réponse à cette question est moins simple qu'il n'y paraît. Le libéralisme a transformé l'anti-fascisme (secondairement, l'anti-communisme) en neutralité politique. Dans une discussion entre amis, il faut être antifasciste pour être neutre et commencer à avancer un argument. Toutes vérités entre les lignes (la pensée transversale) sont désormais proscrites. Contemporain de la télévision, Céline disait que l'homme moderne était « lourd et épais ». Mais imaginait-il qu'il puisse atteindre l'obésité actuelle ?
Aujourd'hui, toute critique de l'AC pose un trouble. Si vous critiquez des œuvres où l'âme a été remplacée par le concept, vous êtes automatiquement «suspecté» de dissidence. L'amalgame tombe sur vous comme une avalanche, et pour éviter les descellements des plaques de neige idéologiques, vous vous faites petit et discret.
Si, a contrario, vous critiquez frontalement l'AC ou la boite à munitions idéologiques qu'il contient (théorie du genre, théorie du climat) vous êtes automatiquement suspecté car l'AC cristallise l'astralité du néo-libéralisme. L'homme à qui il correspond est un homme hors-sol, interchangeable et consumériste, un homme sans âme et sans révolte.
Dans le climat idéologique actuel, l'AC reflète donc un enjeu idéologique. A mon sens, la dissidence consiste précisément d'en revenir «aux œuvres», éprouvées et éprouvantes, aux Bergers d'Arcadie, à la Vierge au chancelier Rolin, sans pour autant passer d'une monoculture à une autre. Max Weber parle de « polythéisme des valeurs » ; c'est dans cette direction qu'il faut se diriger. Le Kolumba Museum de Cologne est à mon avis, un exemple de muséographie innovante échappant à la fois au passéisme réactionnaire et au progressisme idéologique.
L'auteur du Voyage a mis en lumière, comme Rabelais en son temps, les «sentiments innommables». Il en ressort un sentiment de provocation, parfois de malaise, mais à rebours de la provocation programmée de l'AC car Céline ne fait pas table rase du passé, il démystifie au contraire tous les « blablas » de notre temps y compris dans la langue elle-même. Dans son chef d'œuvre Féerie pour une autre fois, on trouve la formule suivante. A tout seigneur, tout honneur ; nous voudrions terminer par elle:
« C'est des filigranes, la vie. Ce qui est écrit net, c'est pas grand-chose. Ce qui compte, c'est la transparence. La dentelle du temps, comme on dit. »
PS : Le récit de notre rencontre avec Ole et de mes aventures au Danemark, disponible ici:
https://www.lulu.com/en/en/shop/fr%C3%A9d%C3%A9ric-andreu-v%C3%A9ricel/voyage-au-bout-de-c%C3%A9line/paperback/product-98ynm8.html?page=1HYPERLINK "https://www.lulu.com/en/en/shop/frédéric-andreu-véricel/voyage-au-bout-de-céline/paperback/product-98ynm8.html?page=1&pageSize=4"&HYPERLINK "https://www.lulu.com/en/en/shop/frédéric-andreu-véricel/voyage-au-bout-de-céline/paperback/product-98ynm8.html?page=1&pageSize=4"pageSize=4)
Frédéric Andreu-Véricel : contact :
150 ans de la Commune de Paris: bas les masques!
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Alors que la droite officielle proteste contre la commémoration des 150 ans de la Commune de Paris, une certaine gauche libérale bien-pensante y voit, en glorifiant l’événement, une occasion pour redorer son image de marque « populaire » et de réaffirmer son monopole sur la lutte sociale et l’insurrection parisienne. Au-delà de cet enjeu mémoriel conflictuel et la puissance symbolique de cette événement sujet à de fortes récupérations idéologiques, il convient de voir dans cette parenthèse politique, sociale et économique de 1871 un événement à la fois anticipateur et correcteur.
Deux éléments explicatifs soulignent la signification nationale et populaire de cette insurrection, au-delà des clivages de droite et gauche : les causes profondes de l’insurrection et le contexte historique de l’humiliation nationale consécutive à la défaite française de 1871 face aux Prussiens. Ainsi, même si Paris constituait une véritable poudrière avec une population politisée sous l’influence la gauche radicale, de l’anarchisme et du syndicalisme révolutionnaire sorelien, il ne faut pas oublier que c’est l’extrême pauvreté de la classe ouvrière et la famine, la ghettoïsation des quartiers populaires par les transformations haussmaniennes qui constitueront les ressorts profonds du soulèvement.
L’autre cause immédiate qui jouera le rôle de déclencheur est la capitulation de l’empereur Napoléon III, encerclé par les Prussiens à Sedan, le 2 septembre 1870, perçue par la population parisienne comme une profonde humiliation et un coup de poignard dans le dos des Versaillais. Il ne faut pas oublier que, dès le 4 septembre, à Paris, la République est proclamée et un gouvernement de la Défense nationale est formé, lequel promet de continuer la lutte malgré le siège de l’armée prussienne que subit Paris à compter du 19 septembre. Néanmoins, les Parisiens s’estimeront trompés en apprenant que, depuis des semaines, le gouvernement de la Défense nationale avait engagé des pourparlers avec Otto von Bismarck, le chancelier allemand, pour parvenir à un cessez-le-feu qui sera finalement signé le 28 janvier 1871.
Après des élections hâtives et tronquées, qui portent au pouvoir une Assemblée majoritairement conservatrice et monarchiste, puis l’installation d’Adolphe Thiers à Versailles, le fossé se creuse entre le « pays légal » versaillais réactionnaire, obéissant aux mots d’ordre de la bourgeoisie financière, et le « pays réel » de la Commune. Evénement correcteur à valeur dystopique, la Commune joue un rôle de miroir déformant en rendant compte de la bêtise d’une droite réactionnaire, ralliée au camp de l’« étranger » et de l’ordre bourgeois, et l’abstraction internationaliste d’une gauche aveuglée par les dogmes marxistes.
Mais elle a aussi une dimension anticipatrice et axiologique, puisqu’elle met en exergue les contours de ce que la droite authentique devrait être en tant que modèle, à la fois nationale, révolutionnaire et populaire, et ce vers quoi la gauche nationale et populaire devrait tendre en s’émancipant de son discours internationaliste et droit-de-l’hommiste. C’est en effet dans ce sens que la Commune fut l’incubateur et le point de convergence entre une droite véritablement nationale-populaire et une gauche nationale révolutionnaire, unie dans leur lutte antibourgeoise contre l’« étranger » et pour la justice sociale. C’est, aussi, qu’en ce sens, la Commune transcende le clivage droite-gauche classique et fut un laboratoire d’idées hétérogènes : socialisme, jacobinisme, blanquisme, proudhonisme, jusqu’à l’anarchisme et le nationalisme d’un Édouard Drumont. Mais aussi fédérateur : les expériences communalistes et autogestionnaires pouvant appartenir à une tradition politique de gauche comme de droite.
Cela explique aussi que le contexte historique et social spécifique permet la rencontre atypique entre un Auguste Blanqui, socialiste insurgé pour qui le bourgeois anticommunard constituait « le Prussien de l’intérieur », et un Louis Rossel, jeune officier supérieur, républicain et patriote qui, refusant la défaite face à l’Allemagne en 1870, se rallie à la Commune.
Jure Georges Vujic
Sources : https://www.bvoltaire.fr/
Quand Karl Marx pleurait la mort d’un chantre de la « race aryenne »…
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Le hasard fait bien les choses. La toute récente biographie de Jenny Marx (par Jérôme Fehrenbach, une étude remarquable, aussi érudite qu’agréable à lire) m’a conduit jusqu’à un personnage dont j’ignorais tout, Gustave Flourens. Un ami très proche de Jenny et Karl Marx qui eurent la douleur de le perdre en 1871. Officier communard, Flourens avait conduit une sortie contre les Versaillais qui avait tourné court. Un officier de gendarmerie l’avait abattu sans forme de procès, le 3 avril 1871.
Jenny Marx s’en remis au journal socialiste Volksstaat pour clamer sa douleur : « … nous avons été profondément bouleversés par la mort de Gustave Flourens. Nous avions noué avec lui des relations d’amitié (…) il était à fond, et pleinement une âme noble. Ferme jusqu’à l’abnégation, chevaleresque, humain (…) il avait un esprit riche, il était même lettré… son âme le tournait vers les pauvres, les opprimés (…) son grand cœur intégrait toute nation, toute race… »
Il semble que Madame Marx n’ait connu qu’un volet de la personnalité et des idées de Flourens. Car son amour des races, il le donnait exclusivement à la race « aryenne ». Ou alors, Madame Marx passait outre. Fehrenbach montre que l’antisémitisme était courant dans les milieux révolutionnaires, autour de Marx. Jenny n’hésitait pas à qualifier le grand rival de son mari, Ferdinand Lassalle de… « Nègre juif ».
J’ai voulu en savoir plus sur ce Flourens. Il était le fils d’un médecin et physiologiste de renom, professeur au Museum et au Collège de France, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences. Gustave fit les meilleures études et, à 25 ans, en 1868, on lui confia un enseignement au Collège de France, l’histoire des races humaines. Dès sa leçon inaugurale, Flourens se distingua par ses convictions matérialistes. Il ne cacha pas non plus son hostilité au pouvoir impérial. Au bout d’un an, le ministre Victor Duruy le révoqua.
Flourens décida alors de porter secours aux Crétois, en lutte contre les Ottomans. Mais Athènes préféra l’expulser. Rentré à Paris, il collabora à tout ce qui comptait de presse d’extrême gauche. Avec véhémence, jusqu’au duel avec un adversaire politique, Cassagnac, qui le blessa. Poursuivi par la justice, Flourens se réfugia à Londres où les Marx l’accueillirent.
Survint la guerre contre la Prusse. Il revint en France et fit grand bruit à Paris. Dès les débuts du siège, il prit la tête des cinq bataillons de Belleville avec le titre ronflant de « major des remparts ». La Commune insurrectionnelle en place, Flourens se fit élire et reçut tout de suite le grade de général. Bravache mais incompétent, il mena ses hommes au désastre.
Pourtant, la Commune voulut glorifier son nom. Elle constitua en « Vengeurs de Flourens » un bataillon de gamins (15-17 ans) qui subit la répression versaillaise.
Sanctifié par le couple Marx, Flourens a profité jusqu’à maintenant d’une réputation flatteuse. Le « Maitron », bible du mouvement ouvrier, lui consacre une notice élogieuse. Plusieurs villes ont donné son nom à des rues, Suresnes, Le Mans, Saint-Brieuc, La Rochelle, Marly, Thézan-les-Beziers… A Vierzon, une cité HLM porte son nom.
Le 150ème anniversaire de la Commune a avivé la flamme. Le blog Médiapart l’exalte en passant pudiquement sur les idées de Flourens. Les 27 et 28 avril, l’association « Faisons vivre la Commune » propose une « ballade Gustave Flourens » à Belleville…
Dommage que ce bel hommage aille à un théoricien exalté du « racisme scientifique ».
Florilège :
-Ils s’appelaient les Aryas, les hommes purs et ils méritaient ce nom. C’est d’eux que nous viennent nos idées les plus élevées, nos sentiments les plus nobles (…) ces Grecs, spirituels et intelligents, braves soldats, poètes, orateurs, artistes passionnés ; ces Germains, ces Gaulois (…) étaient les fils des Aryas (…) Et nous aussi, Français, nous sommes Aryas…
– Les Gaulois présentaient le type arya dans toute sa pureté : teint, cheveux blonds, yeux bleus…
– Parmi les Aryas de l’Europe orientale, parmi les Slaves, les Polonais, ils sont restés purs de tout mélange avec les Jaunes, les Mongols. La Russie (…) s’est fortement mongolisée, de là son infériorité en civilisation.
– Jamais les Sémites n’ont connu d’autres mobiles que l’intérêt et le fanatisme.
– Autant le mélange entre peuples de même race est bienfaisant, autant il est funeste entre peuples de races différentes.
N’en jetez plus. En ces temps qui pourchassent le suprémacisme blanc, pourquoi ne pas exiger la disparition dans l’espace public – comme pour Alexis Carrel, eugéniste radical (prix Nobel de médecine en 1912) – du nom de Gustave Flourens ? En la matière, il ne peut y avoir deux poids, deux mesures.
Jean HEURTIN
Notes:
* Jérôme Fehrenbach, Jenny Marx, Passés/composés, 2021.
* Gustave Flourens, Histoire de l’homme, chez Garnier frères, Paris, 1863.
Sources : Breizh-info.com 25/04/2021
Mythologie de la suisse ancienne : Taranis
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- Catégorie : Mythologie Celte
Cette divinité gauloise présente pour la Suisse un intérêt particulier. En effet, elle fut vénérée dans ce pays, l'ancienne ville de Tarnaia (aujourd'hui Massongex, en Valais) lui était consacrée.
Le rapprochement Taranis-Sucellus a déjà été fait à la fin du siècle dernier, mais sans rencontrer beaucoup d'échos. Les études de Cerquand ne sont plus d'actualité et les remarques de Gaidoz, par exemple à propos des marteaux votifs d'Uriage, sont aujourd'hui vieillies [1]. Le rapprochement entre Taranis, Thor et Jupiter semble avoir déjà été fait en 1678 par Scheffer [2].
P. Lambrechts a repris cette étude et, utilisant à fond sa thèse universaliste, assimile Taranis au dieu à la roue, au dieu du soleil, du tonnerre, de la guerre, à Sucellus, Dispater, Hercule et Jupiter. C'est trop; la critique de cette méthode a déjà été faite par G. Dumézil et nous n'y reviendrons pas [3]. Plusieurs de ces assimilations sont toutefois séduisantes, et doivent être examinées.
Par les scholies de Berne à la Pharsale de Lucain [4], nous savons que Taranis, aussi cruel que la Diane des Scythes, était l'équivalent de Dispater et qu'on lui sacrifiait en brûlant des hommes enfermés dans un arbre creux. Taranis est aussi assimilé à Jupiter, maître des guerriers et des dieux; on lui aurait consacré des têtes, coutume gauloise qui paraît bien attestée. Le rapprochement Taranis Jupiter est confirmé par deux inscriptions, provenant l'une de Chester (Angleterre), l'autre de Scardona (Dalmatie) [5].
Si l'on admet l'équation Taranis = Jupiter [6], il faudrait écarter l'identification de Taranis à Sucellus/Silvain. En effet, l'autel de Nîmes est dédié à Jupiter et à Silvain [7], l'équivalent de Sucellus en Narbonnaise. Le devant de ce monument comporte un foudre, commun aux deux divinités, un maillet pour Silvain-Sucellus et une roue pour Jupiter. Les faces latérales explicitent encore cette différence. A droite on a sculpté un foudre et une roue ; à gauche, un maillet, un pot et une serpe [8]. De même à Vernègues [9] sur deux faces d'un autel on voit un arbre stylisé; sur la troisième, une roue à six rais; et sur la quatrième, un maillet. Nous pensons que ces deux monuments sont bien consacrés au dieu de la foudre, ou plutôt au dieu de la foudre diurne et au dieu de la foudre nocturne. Il s'agirait alors de l'équivalent du Volcanus diurne et du Summanus nocturne. Nous savons qu'à Rome la roue était consacrée à Summanus nocturne et à Dius Fidius, de même qu'au Jupiter Sancius ombrien. Mais du fait qu'à Rome la roue était associée à la foudre nocturne, peut-on déduire qu'il en était de même en Gaule et que le dieu à la roue n'est autre que Taranis ? Nous débouchons ici sur un problème ardu, celui de la signification du cercle. Pour J. de Vries, qui assimile le dieu à la roue à Jupiter, la roue est avant tout un symbole solaire [10]. En revanche, Riemschneider, avec des arguments valables, fait de la roue et de l'anneau un symbole du monde infernal [11]. M. Eliade admet la signification chthonienne des monuments circulaires mais reste sur la réserve, ce qui nous paraît, en l'état actuel de la question, la seule attitude possible [12]. Pour Rome, la question est claire. Le cercle correspond à la foudre nocturne et peut-être, par extension, au sexe féminin (yoni) [13]. Il est significatif que le flamen dialis qui, plus que tout autre flamine, soulignait ses rapports avec l'élément igné, portait un anneau creux et interrompu en un endroit, comme les torques gaulois [14].
S'il est clair que Taranis est un dieu du tonnerre (bénéfique ou redoutable, nous l'ignorons), nous ne pouvons l'identifier au dieu à la roue. Ce point est d'ailleurs secondaire dans le cadre de notre étude. En revanche, son assimilation à Dispater est importante [15]. En effet, César affirme que les Gaulois prétendent descendre de cette divinité [16]. Linckenheld conclut son article sur Sucellus et Nantosvelta en affirmant que Sucellus est Dispater, le dieu de la vie et de la mort, le père de la race celtique [17]. Nous nous rallions à la plupart des constatations de cet auteur et notamment à celle-ci. Nous regrettons toutefois qu'il n'ait pas pris position au sujet de Taranis.
Si nous nous reportons à Rome, nous constatons que la notion d’indiges s'applique à plusieurs divinités ou héros: Jupiter, Sol, Enée et Anchise [18]. Or Dispater, ce maître du monde infernal, que Grenier a déjà rapproché de Sucellus et de Silvain [19] est en Gaule ce d’indiges est à Rome. Pourquoi l'épithète de Dispater ne serait-elle pas appliquée en Gaule à plusieurs divinités ? Ne pourrait-on pas aussi concevoir Taranis comme un aspect de Sucellus ? Il serait le dieu de la foudre (diurne ?) et Dispater, alors que Sucellus remplirait des fonctions plus étendues. Les similitudes partielles que présentent en Grèce plusieurs divinités, Zeus et Poséidon, Apollon et Hermès, signifient uniquement que des fonctions identiques ont été attribuées dès la période historique à des entités bien distinctes, mais qui ont pu antérieurement se confondre ou coexister en divers dieux. Les récits mythologiques irlandais illustrent encore mieux ce phénomène. Pour en revenir à Taranis, dont nous ne possédons pas de représentation certaine, et au Sucellus suisse, au sujet duquel les textes sont muets, point n'est besoin de les identifier, même en admettant que l'un et l'autre ont pu être considérés par les Gaulois comme le père de la race. En effet, un des caractères de Taranis ne s'applique pas à Sucellus : son aspect militaire. Taranis ferait penser plutôt à Mars pater qu'à Volcanus.
En conclusion, il faut pour Taranis mettre en évidence sa « fusion » avec Jupiter car tous deux sont des dieux du tonnerre et des « pères de la race ». Quant au caractère cruel de Taranis, aux sacrifices qui lui étaient offerts, à son rôle de dieu des guerriers, rien de cela ne s'applique à ce que nous savons de Sucellus. Pour expliquer Sucellus, Taranis nous est de peu de secours dans l'état actuel du problème.
Raymond Christinger
Notes :
[1] C. F. CERQUAND, Mémoires de l'Académie de Vaucluse 1880 et Taranis et Thor, Revue celtique, t. VI, pp. 417 à 456. H. GAIDOZ, Taranis, Revue celtique, t. VI, pp. 457 à 459.
[2] SCHEFFER, op. cit., pp. 67-68, écrit que le dieu lapon Tiermes est identique au dieu suédois Thor, ou le Tonnerre, au latin Jupiter et à « Tarami ou Tarani ». Ce dieu Tiermes s'appelle aussi Aijke, ce qui signifie « l'aïeul » ou « l'ancêtre ». Citant Samuel Rheen, Scheffer précise que Tarani est scythe et que le dieu Tiermes-Thor des Lapons chasse les démons grâce à des flèches tirées au moyen de l'arc-en-ciel nommé Aijekedauge, c'est-à-dire « l'arc de l'aïeul ». Le dieu possède aussi un marteau, pour fracasser les têtes des démons ; cette arme se nomme Aijekevetchera, « le marteau de l'ancêtre ». Vetchera est le vajra sanscrit, qui a donné en finnois vasara et en mordve vizir. C'est l'arme d'Indra et du Mithra avestique. Cf. G. DUMEZIL, Mitra-Varuna, Paris 1948, p. 138. Aijeke devrait peut-être être rapproché du dieu estonien de Forage, Aike ou Pikker, qui produit le tonnerre en traversant des ponts de fer sur un char aux roues de bronze; KREUTZWALD, chez A. H. KRAPPE, La genèse des mythes, Paris 1938, p. 168. L'appellation « Aijeke » était encore connue, à la fin du Moyen Age, par les Lapons qui désignaient un grand père par agja, et le petit père par adschiegads.
[3] P. LAMBRECHTS, op. cit. ; G. DUMEZIL, Naissance de Rome, op. cit., pp. 28 sq.
[4] Luc., Pharsale I, 446.
[5] CIL. VII, 168 et CIL. III, 2804. On peut éventuellement citer, comme dérivant de Taranis, le dieu dit Tarnaiae, aujourd'hui Massongex, en Valais.
[6] Cf. par exemple P. M. DUVAL, Observations sur les dieux de la Gaule, op. cit., t. CXLV, pp. 11-12.
[7] ESPER. 6849, Iovi et Silvano.
[8] ESPER. 6849.
[9] ESPER. 1691.
[10] J. DE VRIES, op. cit., pp. 34 sq., 63 sq.
[11] M. RIEMSCHNEIDER, op. cit., pp. 46 sq.
[12] M. ELIADE, Traité, op. cit., p. 320. '
[13] A l'apex qui surmontait la coiffe du flamme correspondait la couronne, l'arculum ou le surculus, de la flaminique, fait d'un rameau de grenadier portant du fruit. Le voile de la flaminique rappelait la foudre selon FESTUS s. v. Flammeum.
[14] AUL. GELL. X, 15.
[15] Cf. USENER, M. Annaei Lucani Commenta Bernensia, Leipzig 1869, p. 32.
[16] CES., De bello Gall. VI, 18, 1: « Galli se omnes ab Dite patre prognatos praedicant idque at druidibus proditum dicunt. »
[17] E. LINCKENHELD, op. cit., p. 92.
[18] Références chez C. KOCH, Gestirnverehrung im alten Italien, op. cit., p. 77.
[19] VARRON L. L. V, 66. A. GRENIER, op. cit., pp. 66 et 176. Le culte de Dispater et de Prosperine se célébrait la nuit, sur un autel souterrain, dans un lieu nommé Tarentum ou Terentum.
Sources : Mythologie de la suisse ancienne – Raymond Christinger - Librairie de l’université Georg, Genève, 1965.
- Lu dans Présent et Rivarol
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