En juin 2017, l'agence de presse du régime, Chine Nouvelle, présentait fièrement le système de reconnaissance faciale mis en place dans plusieurs grandes villespour traquer les piétons qui ne traversent pas dans les clous. Au Xinjiang, province de l'ouest du pays, de tels systèmes ont également été mis en place, mais pour des raisons moins avouables.
Du pain et des Jeux...
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Exposition de peinture sur textile : les Vikings, le peuple de la mer
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Chine : big brother 2.0. La technologie totalitaire est prête
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Chine : le Xinjiang, province sous vidéo-surveillance
Pékin a discrètement développé un système de reconnaissance faciale dans cette région peuplée par des séparatistes ouïghours, peuple musulman et turcophone.
Il faut dire qu'au Xinjiang, la priorité des autorités chinoises n'est pas la prévention routière. Cette vaste région limitrophe du Pakistan et du Kazakhstan est le fief des ouïghours, un peuple musulman et turcophone dont une frange séparatiste lutte contre le pouvoir central pour obtenir son indépendance.
La police alertée en temps réel
Selon des révélations de l'agence de presse américaine Bloomberg, les autorités chinoises ont discrètement mis à profit l'important réseau de caméras dans les villes et villages peuplés par les ouïghours pour surveiller les faits et gestes de potentiels suspects.
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Le désarroi des larbins
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Le sommet du Groupe des Sept qui s’est déroulé les 8 et 9 juin 2018 au Manoir de Richelieu à La Malbaie dans la région de Charlevoix au Québec (les sommets du G7 se déroulent toujours dans le pays qui en assume la présidence annuelle et cette année c’était le Canada représenté par son Premier Ministre Justin Trudeau) s’est terminé en « eau de boudin » par la grâce de l’inénarrable Donald Trump, bien « chauffé » en la circonstance par le falot Justin Trudeau. Au-delà de l’anecdote, cet échec et ses conséquences possibles doivent être replacés dans un contexte plus large.
D’abord, qu’est-ce que ce G7 ? Ce n’est pas une organisation internationale officielle et reconnue, comme peuvent l’être les organisations dépendant du système de l’Organisation des Nations Unies, mais un directoire autoproclamé rassemblant les principales puissances du camp occidental. Il a été créé en 1975, à l’initiative du président français Valéry Giscard d’Estaing, pour déterminer les occidentaux à des positions économiques communes suite au premier choc pétrolier. Il s’est réuni pour la première fois à Rambouillet en 1975 sous la forme d’un Groupe des Six (États-Unis, Grande Bretagne, France, Japon, République Fédérale d’Allemagne, Italie). En 1976, le Canada y a été intégré et on a parlé désormais de G7. Dès 1977, la Commission Européenne est présente aux réunions par l’intermédiaire de son président, puis un peu plus tard, le président du Conseil Européen sera aussi invité permanent. En 1994, la Russie commence à être invitée pour la journée consacrée aux dossiers politiques. Il s’agit de la « récompenser » pour avoir lâché l’ex-Yougoslavie dans les conflits des Balkans. C’est aussi un pari sur l’avenir car, à l’époque, l’Occident est persuadé de pouvoir mettre la main à brève échéance sur la nouvelle Russie issue du démembrement de l’Union Soviétique. En effet, la Russie de Boris Eltsine semble s’aligner de plus en plus sur les options économiques, financières, politiques et sociétales des occidentaux. En 1997, la Russie rejoint formellement le Groupe, donnant naissance au G8. Ce qui durera jusqu’aux sanctions occidentales faisant suite à la crise ukrainienne de 2014 quand les occidentaux refuseront de se rendre à la réunion prévue à Sotchi (ville des Jeux Olympiques d’hiver) organisée par la Russie de Vladimir Poutine qui assurait la présidence annuelle du Groupe. La Russie a donc été exclue du G8 qui est donc depuis redevenu de facto, le G7.
À l’époque où le G7 a été constitué, ses membres représentaient bien les principales puissances économiques et politiques mondiales. L’URSS allait bientôt entrer en crise et nul ne pouvait imaginer ce que donnerait rapidement une Chine délivrée du maoïsme. Le G7 s’est donc autorisé à prendre des options économiques d’abord, politiques ensuite dont il était certain qu’elles s’appliqueraient à l’ensemble du monde, même s’il les décidait en son sein, de manière informelle sans l’appareil des traités internationaux. Mais le monde a considérablement changé en 40 ans. Ce qui apparaissait hier comme un groupe de puissances dominantes capable de faire régner sa loi sur le monde, apparaît aujourd’hui comme un syndicat de puissances en déclin arcbouté sur des positions politiques, juridiques et économiques qui s’effritent inexorablement sous la pression du poids croissant de l’Asie et de l’Eurasie dans le jeu économique et politique mondial. L’ensemble est encore très solide mais le colosse vacille. En première analyse, on peut souligner que c’est dans ce genre de période, quand les intérêts internes à un groupe de puissances alliées deviennent un jeu à somme nulle, que les divergences prennent le pas sur les facteurs de cohérence.
Mais cette analyse est insuffisante, elle doit être croisée avec l’examen d’un conflit interne à l’oligarchie occidentale, principalement américaine car les États-Unis restent l’hégémon du monde occidental.
Les mutations technologiques et celles de l’ingénierie financière ont non seulement permis le passage à une mondialisation réelle mais ont entrainé en quarante ans un rebrassage des cartes de la puissance oligarchique à l’échelle planétaire et rendu obsolètes certaines bases sur lesquelles s’était construite la domination occidentale. Cette nouvelle répartition de la puissance oligarchique entraine depuis quelques années des conflits majeurs qui menacent l’ordre occidental dans son ensemble.
Pour bien se faire comprendre, on va passer par le détour d’une analogie historique qui présente des points communs structurels avec la situation actuelle.
À la grande époque du communisme triomphant, un conflit violent a opposé les partisans du déclenchement d’une révolution mondiale simultanée dans tous les pays en profitant de la moindre opportunité et les partisans de la construction et de l’affermissement du communisme dans un seul pays, l’Union Soviétique. Le conflit s’est à l’époque incarné dans les figures de Trotski et Staline. Les deux tendances voulaient établir le communisme dans le monde entier, mais par des voies différentes. La première en accroissant un chaos révolutionnaire universel et permanent jusqu’à la bascule finale, l’autre en établissant fermement une base à partir de laquelle s’étendre progressivement. Dans un cas on embrassait le monde globalement à partir d’une révolution systémique, dans l’autre on s’en emparait par les méthodes d’un impérialisme classique repeint aux couleurs révolutionnaires. Dans un cas la puissance de l’Union Soviétique était secondaire, dans l’autre, elle était fondamentale. Si on nous passe cette comparaison osée, on dira que nous avons affaire aujourd’hui au conflit entre un capitalisme oligarchique de type trotskiste et un capitalisme oligarchique de type stalinien.
Du XIXème siècle à la fin du XXème siècle, l’oligarchie capitaliste anglo-saxonne a construit sa puissance à partir d’une base territoriale étatique de type impérial (époque de la Grande Bretagne) ou hégémonique (époque des États-Unis). À partir de cette base, on faisait rayonner puissance et influence pour conquérir et/ou agréger, aux intérêts et à la vision du monde de l’oligarchie, un cercle de plus en plus étendu de pays tiers. Dans cette perspective, la puissance globale du centre est essentielle, aussi bien en termes de hard power, de soft power que de smart power. C’est en gros la logique qui a prévalu jusqu’à la fin de la Guerre Froide et qui s’articulait aux États-Unis sur la liaison organique de la puissance militaire, de la puissance technologique, de la puissance industrielle, de la puissance agricole, de la puissance culturelle, de la puissance financière à travers des forces capitalistes centrées sur les États-Unis. Mais depuis les années 1970, une révolution technologique, financière et réglementaire est venue fragiliser les bases territoriales de la puissance américaine tout en assurant l’émergence d’un nouveau réseau de forces capitalistes qu’on pourrait appeler le capitalisme 2.0 tant il est lié aux nouvelles technologies de l’information et de la communication : déréglementation, dématérialisation, délocalisation, économie d’archipel, flux, réseaux, informatisation, robotisation, intelligence artificielle en sont les maître-mots. Ce capitalisme 2.0 embrasse d’un coup le monde, épouse complètement l’idéologie libérale-libertaire et considère le centre américain comme secondaire, voire même comme un boulet. La nouvelle oligarchie, symbolisée par Zuckerberg et les autres oligarques de la Silicon Valley, a le sentiment qu’elle peut façonner le monde en passant directement par ses réseaux et ses technologies, par des points d’appui répartis dans le monde entier, en faisant l’économie d’avoir à supporter un pays avec ses pesanteurs géopolitiques et une population devenue largement inutile dans le monde de la nouvelle économie. En face d’elle, on a la vieille oligarchie industrielle, socle du complexe militaro-industriel, mis en cause par Eisenhower à la veille de quitter la Maison Blanche. Son point d’appui indispensable, socle de sa puissance et base de ses projections planétaire, est les États-Unis mêmes. Sans eux, cette oligarchie n’est plus rien.
Entre les deux, on trouve l’oligarchie financière de Wall Street partagée entre son ancienne liaison avec la vieille oligarchie, avec des intérêts croisés importants, une monnaie nationale, le dollar, avec laquelle elle a bâti une influence mondiale et sa proximité idéologique avec le capitalisme 2.0. En effet, les deux partagent la même vision d’un monde liquide, dématérialisé et déterritorialisé. La plus grande réussite du monde globalisé, la « planète finance » et ses flux incessants, est d’ailleurs née de l’alliance des technologies financières et des technologies informatiques et numériques.
La communication médiatique et peopolisée autour de la dernière élection présidentielle américaine ne doit pas masquer le fait que ce fut un affrontement entre la vieille oligarchie du complexe industriel et militaire qui, faute de mieux, a choisi Donald Trump et les deux autres qui avaient investi sur Hillary Clinton. L’oligarchie 2.0 , celle des GAFAM et de la Silicon Valley, est entrée immédiatement en guerre contre le nouveau président dont elle a bien perçu qu’il allait à la fois la contrarier dans sa vision planétarienne en voulant recentrer la puissance américaine sur le territoire et qu’il allait tenter de la replacer sous contrôle. L’oligarchie financière semble temporiser, hésiter entre soutenir Trump et le combattre. Cette hésitation est sans doute en grande partie, outre sa proximité traditionnelle avec la vieille oligarchie, le résultat de la politique résolument pro-israélienne de Trump qui s’est aligné sur les objectifs géopolitiques maximalistes de l’État d’Israël. La sensibilité ancienne de Wall Street au sionisme est par ailleurs bien connue.
Quels rapports tout cela peut-il bien avoir avec les résultats de ce G7 ?
Donald Trump a été mandaté pour refonder la puissance américaine, non pas à travers le soutien à la planétarisation des GAFAM, mais à travers le recentrage sur la base territoriale des États-Unis. Or, si le slogan de Trump, « America first » a eu un tel succès populaire c’est que les américains de base vont très mal dans un pays qui se délite. Il est parfaitement exact de dire que la globalisation économique, qui a profité au capitalisme 2.0 et au capitalisme de Wall Street, s’est faite au détriment de la population laborieuse et des petites classes moyennes américaines. Il ne faut pas se laisser abuser par les statistiques qui nous présentent une économie prospère connaissant presque le plein emploi. Or, selon les analystes des statistiques du BLS américain (Bureau Of Labour Statitic) entre un quart et un tiers des américains en âge de travailler ne sont pas comptabilisés parce qu’ils ont été découragés dans leur recherche d’emploi (ce qui ne signifie pas que ce sont des fainéants !). Environ 15% de la population ne survit que par des bons alimentaires. Si le président Trump envisage un grand plan de rénovation des infrastructures du pays, c’est qu’une bonne partie d’entre elles donnent au pays des allures de tiers-monde. L’endettement des étudiants non fortunés est faramineux. Une bonne partie de la population n’a pas accès à des soins médicaux de qualité ou dépend de la charité ou de la solidarité communautaire. Une bonne partie des petites classes moyennes voit son niveau de vie fondre comme neige au soleil. Pour Trump, non seulement pour des raisons électorales (élections de mi-mandat et projet de réélection) mais tout simplement parce que le pays menace réellement de s’effondrer sur lui-même (en dehors des métropoles reliées aux courants dynamiques de la mondialisation). Et c’est urgent pour éviter l’enclenchement d’une spirale de déclin irréversible. Voilà pourquoi, le libre-échange qui était jusqu’à présent la ligne directrice de la politique commerciale internationale des États-Unis est remise brutalement en cause. Voilà pourquoi, Trump se retourne contre l’ALENA (l’Accord de Libre-Échange Nord-Américain), contre le partenariat avec la Chine et contre les Européens ou le Japon et la Corée du Sud.
Les Européens, en particulier, sont à la fois décontenancés et dépités. Plus précisément, les classes dirigeantes européennes ont investi depuis longtemps dans une quadruple soumission économique, stratégique, culturelle et politique à l’ordre occidentalo-atlantiste. L’Union Européenne elle-même est fondée sur un canevas atlantiste et libéral-mondialiste. Elle complète sur le plan politique et économique l’OTAN dont elle est la version civile. Il faut ajouter à cela tout un réseau de think tank, d’instituts de formation, d’ONG, de groupes de pression et de structures de sociabilité qui sélectionne, forme et contrôle les élites européennes qu’elles soient intellectuelles, économiques, financières ou politiques. Rien ne prédispose les classes dirigeantes européennes à s’émanciper de la matrice occidentalo-atlantiste. D’ailleurs, jusqu’à ces dernières années tout fonctionnait bien sur la base d’intérêts et de valeurs partagés. Les classes dirigeantes européennes pouvaient avoir l’illusion qu’elles étaient les alliées des États-Unis et non leurs vassales. Le brutal resserrement de la laisse par Donald Trump vient de faire tomber les illusions. Les dirigeants européens croyaient qu’ils étaient passagers de première classe dans un wagon du train d’une mondialisation multiculturelle, droitsdelhommiste, profitable et heureuse. Ils viennent de se rendre compte qu’ils étaient en réalité des larbins taillables et corvéables à merci.
À notre sens, ce n’est pas de gaîté de cœur que Trump a tombé le masque, même si, pour qui connaît l’histoire américaine, la brutalité est une constante de l’Amérique « exceptionnelle ». Mais il estime ne pas avoir le choix. Les États-Unis sont un géant aux pieds d’argile qui est en train de perdre le statut d’hégémon mondial au profit de l’Eurasie. Ils sont contraints de « piller » rapidement les ressources de leurs « alliés » pour se renforcer. En d’autres termes, ils doivent les contraindre à s’appauvrir et à renflouer l’économie américaine.
Désormais, les dirigeants européens sont coincés entre leurs valeurs qui les soumettent à un modèle dans et pour lequel ils ont été dressés et leurs intérêts économiques propres. Ils sont coincés entre les chaines qu’ils ont accepté de porter et leurs velléités de retrouver des marges de manœuvre pour ne pas se faire plumer. On peut comprendre leur panique car soit ils s’opposent à l’hégémon, ce qui les contraindra nécessairement à « brûler ce qu’ils ont adoré » en inversant toutes leurs options géopolitiques et géoéconomiques, soit ils se soumettent, mais le prix à payer sera tellement lourd pour les peuples européens que ça peut très bien finir en troubles qui les verront pendus à des crocs de boucher. D’autant que le pillage économique de l’U.E. se surajoutera aux lourds nuages de l’endettement, de l’in-soutenabilité de la monnaie unique et des troubles liés à l’invasion migratoire. Pour l’instant, les dirigeant européens tergiversent (selon leur habitude), font semblant de bomber le torse en réagissant par des hausses de droits de douanes sur certains produits américains, mais l’heure des vrais choix approche… Trump a à peine tiré sur la laisse et cela fait déjà mal et il a à sa disposition beaucoup plus de moyens d’action et de pression que ses « alliés »…
Facebook espionne vos smartphones
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Facebook a partagé vos données avec plus de 60 fabricants de smartphones
Facebook est à nouveau dans l’œil du cyclone. Le réseau social a partagé les données personnelles de ses utilisateurs avec une soixantaine de fabricants de smartphones - dont Apple et Samsung - ainsi qu'avec des groupes chinois tels que Huawei.
Nouveau scandale en vue pour Mark Zuckerberg et Facebook, le réseau social est accusé d’avoir partagé les données de ses utilisateurs avec des entreprises. Publiée ce week-end par le New York Times, l’enquête révèle que le célèbre réseau social a noué des partenariats avec une soixantaine de fabricants de smartphones ou d’appareils électroniques – dont Apple, Amazon, BlackBerry, Microsoft et Samsung – et permis à ces derniers d’accéder aux données de ses utilisateurs, ainsi qu’à celles de leurs amis sans leur consentement explicite. Selon le journal américain, certains constructeurs pouvaient même récupérer les informations personnelles des utilisateurs qui avaient pourtant interdit le partage de données avec des applications tierces.
Jean Mabire - À la rencontre des dieux maudits
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La mythologie nordique a toujours occupé une place prépondérante dans l’œuvre de Jean Mabire. L’un de ses derniers livres, « Thulé », évoquait la quête de ceux qui, depuis l’Antiquité, ont été fascinés par le blanc soleil des Hyperboréens. Jean Mabire explique ici les raisons qui l’ont poussé à écrire « Les dieux maudits » (Copernic) et à se faire le chroniqueur fidèle des dieux et des héros du nord de l’Europe.
Pourquoi ne pas l’avouer ? Je me suis résolu à écrire ce petit livre parce que j’avais grande envie de le lire. Il n’existait rien de tel en langue française : une sorte de Que sais-je de la mythologie nordique. Guère plus de deux cents pages et un peu d’ordre dans ces récits décousus et parfois contradictoires. Cet ouvrage a donc été d’abord composé comme mon propre « pense- dieux ». Je voulais en faire une sorte d’aide-mémoire élé- mentaire pour éclairer tant de ténèbres.
Ténèbres au milieu desquelles j’ai longuement vagabondé, la torche à la main, telles héros de Jules Verne dans les méandres souterrains de la lointaine Islande, bien certain de découvrir comme eux le secret des runes au terme de ce Voyage au centre de la foi... Dissiper les nuages qui obscurcissent le ciel, c’est parfois s'enfoncer dans les entrailles de la terre et de l’Histoire. Interroger la mémoire la plus longue.
Que l’on se rassure : je ne suis point spécialiste et encore moins universitaire. Pour évoquer nos dieux, je n’ai d'autres titres, que l’espérance et la fidélité - poussées au point de devenir hantises et vertus théologales d’un paganisme enfin naturel.
S’il est un livre que je me devais d’écrire, c’est bien celui- ci. Normand d’origine et de passion, fondateur de la revue Viking, collaborateur de Heimdal ou de Haro qui en ont repris le flambeau, auteur d’une histoire des Normands et d’une épopée des Vikings, chroniqueur des explorations polaires, familier des Sagas du moins celles traduites en français - pélerin fervent du soleil hyperboréen de l’ultima Thulé, navigateur dont le compas sentimental s’obstine depuis quelques décennies à toujours marquer le Nord, il me fallait rendre aux dieux d’Asgard la vie qu’ils m’avaient naguère offerte. Je rêvais depuis longtemps de restituer leurs périples, afin de les rendre familiers et populaires, comme il sied à des dieux de notre clan.
Dans cette entreprise, toute érudition me semble inutile. Ce qui importe, ce sont les couleurs et les gestes. Donner à voir importe plus que donner à croire. Je ne vais pas jouer au savant que je ne suis pas. Le Futhark runique ne me sert pas d’alphabet clandestin. Je ne veux être qu’un amateur. Mais passionné et fureteur, inlassable comme ce Ratatosk, qui ne cesse de courir des branches aux racines d’Ygdrasil, pour attiser l’éternel combat de l’aigle et du serpent.
C’est un fait. La mythologie nordique s’enveloppe de cette brume tenace et glacée, que les marins appellent la crasse, et qui évoque tout de suite les vaisseaux éventrés. Il existe d’innombrables ouvrages popularisant les grands thèmes de la mythologie des Grecs et des Romains. Familiarisés dès l'école avec les dieux et les déesses de l’Olympe, nous retrouvons leurs traits figés dans le marbre des musées. Ils restent des symboles évidents, à défaut d'être encore des divinités tutélaires. Mais cette lumière, dont resplendit la tradition « classique », n’en rend que plus ténébreuse l’ombre qui entoure le légendaire « barbare ». Cette opposition, soigneusement entretenue par des cuistres, n’a pas peu contribué à défigurer un héritage qui reste à la fois méconnu et rejeté. Maudits, nos dieux l’ont été tout autant par les missionnaires de l’évangélisation que par les pédagogues de la latinité, séduits par le mythe de l’Ex oriente lux dont se réclament les libres-penseurs épris de progrès tout autant que les bigots les plus traditionalistes.
Certains ecclésiastiques pourtant, au début du siècle, ne se montraient guère effrayés par le paganisme maurrassien. Derrière les hauts murs des collèges catholiques, la mythologie gréco-latine semblait appri- voisée et affadie. Elle n’était plus jugée dangereuse et les adolescents se voyaient autorisés à taquiner les muses. Le tonnerre de Zeus devenait anodin. La légende dorée des dieux et des héros de l’ancienne Hellade ou de la Rome antique se trouvait ainsi récupérée, véritablement aseptisée, débarrassée de tous les miasmes septentrionaux, qui constituaient pour les clercs une sorte de mal absolu. L’Antéchrist venait du froid...
Les dieux maudits, ignorés, perdus dans les brumes du Nord devaient fatalement m’apparaître séduisants, dans la mesure ou ils restaient interdits. Réflexe élémentaire de tout adolescent : la révolte contre l'ordre établi et surtout enseigné. Il se trouve toujours des collégiens pour trouver que pieux et pions ont la même étymologie.
A la religion des autels et des livres, comment ne pas préférer la croyance aux bois et aux sources ? Le Nord, pour moi, c’était d'abord la Nature. La terre contre l’au-delà, si l’on veut. Et la poésie contre le décalogue.
Je ne voyais guère cependant, l’intérêt de remplacer le bon Dieu ou Jupiter par Odin, si ce n’est par goût de l’irrespect, donc de la sagesse. Il me parut bien vite évident qu’il ne fallait pas décalquer l’une sur l’autre les religions antagonistes. Échanger la croix du Christ contre le marteau de Thor n’est qu’un geste rituel. C’est la nature même de la foi qui doit devenir différente. D’un côté, la nuée, et de l’autre, le réel. D’où la nécessité de ne pas lire l’Edda comme une Bible, de ne pas chercher dans la mythologie nordique autre chose que des images et des symboles, des maximes et des récits. Il n’est pas inutiles de le rappeler au seuil de ce petit livre.
L’essentiel de la conception de vie des anciens Nordiques n'est pas codifié, mais suggéré. Leur mythologie doit se traduire et non se subir. Être fidèle à ces dieux maudits, c’est d'abord comprendre, c’est-à- dire, bien souvent, écouter une voix intérieure.
Une fois libéré de l’idée d'un Dieu unique, donc totalitaire, et de ses commandements numérotés et absolus, on découvre vite que le sacré peut être multiple, c’est-à-dire vivant. Alors s’estompe la rigoureuse frontière entre les dieux, les héros et les humains. La religion n’est plus extérieure mais intérieure. Le divin se retrouve au coeur de chacun. Démarche essentielle du paganisme. Les dieux du Nord peuvent se montrer souvent terribles et parfois burlesques, ils restent avant tout familiers. Aucun des neuf univers de la mythologie scandinave n’est insensé. Les voyageurs passent sans cesse de l’un à l’autre. Il n’existe pas d’arrière-monde d’une nature différente.
Le paganisme nordique a finalement mieux résisté aux assauts étrangers que le paganisme méridional. Sans doute, parce qu’il a été vaincu plus tard. Le fait est là, dans son altérité sentimentale. Étudier la mythologie « classique » ne conduit pas retrouver la foi, au sens exact du terme; cela ne dépasse guère l’émotion intellectuelle.
L'évocation des sources antiques, si chères aux poètes et aux peintres du Parnasse, à la fin du siècle dernier, n’est pas un mouvement religieux, mais seulement littéraire et artistique. Sauf, peut-être, pour un personnage aussi singulier que Louis Ménard, dont les Rêveries d’un païen mystique demeurent un fort curieux témoignage.
Par contre, pour aborder la mythologie « barbare », j’oserai dire qu’il faut déjà posséder la foi. Non la croyance en un dogme et encore moins la soumission à une chapelle, mais un élan de l’âme vers un ailleurs que les anciens situaient dans cette ultima Thulé aux limites septentrionales du monde connu. Aborder l’univers spirituel nordique, dont la mythologie n’est qu’un aspect, ne saurait être un passe-temps ou une curiosité, mais une découverte et une quête, que certains ont naguère comparé à la recherche du Graal. Mais sans la mystique, le Graal n’est qu'un gobelet.
Dans cette optique, le retour à la foi nordique peut fort bien se passer de Thor, d’Odin ou de Frey, qui apparaissent bien davantage comme des figures que comme des idoles.
Il ne faudrait pas trop abuser de l’opposition Nord- Sud, même si ce réductionnisme simplificateur a de quoi séduire les naïfs. Pendant très longtemps, des préjugés méridionaux ont cherché à rendre encore plus obscures les légendes septentrionales. Répondre par d’autres mépris serait d’autant plus stupide qu’il existe une indé- niable similitude religieuse entre le monde scandinave et le monde hellénique, entre l’univers germain et l’univers romain. Les recherches de Georges Dumézil sur la tripar- tition ont lumineusement démontré la parenté des peuples indo-européens.
Opposer en un affrontement absolu le Sud et le Nord aboutit à gravement mutiler un héritage commun. Il est bon de le rappeler au seuil d’un livre qui veut justement mettre en lumière des dieux maudits, ce qui ne veut pas dire rejeter dans l’obscurité des dieux plus aimables et plus aimés.
Tout familier de la mythologie méditerranéenne ne trouvera pas dans la mythologie scandinave un climat sensiblement différent. Passé le premier moment de surprise provoqué surtout par la consonance de noms inhabituels a qui n’est pas familiers des langues germaniques, tout s’éclaire. Les comparaisons sautent aux yeux, tellement évidentes qu’il n’est pas nécessaire ici d’y insister bien longtemps. Apollon et Balder ne sont pas des ennemis mais des frères, au moins des cousins.
Pour les sectaires de la culture classique, les dieux hyperboréens se confondent plus ou moins avec les divinités lapones. Il serait tout aussi stupide d’identifier les dieux hellènes avec les démiurges levantins. Et il faudra bien réconcilier un jour les dieux celtes et les dieux slaves, écartelés dans la fragile mémoire de nos peuples d’Europe.
Que l’on ne s’y méprenne pas. J’ai voulu rendre la vie aux dieux maudits d’Asgard non pas parce qu’ils seraient « supérieurs », mais surtout parce qu’ils restaient « mau- dits », c’est-à-dire, par un singulier paradoxe, à la fois méprisés et ignorés. Depuis un millier d’années, il y a eu « déicide » au nord de notre continent. Et en ce domaine, l’Université a longtemps pris la relève de l’Église.
Il ne s’agit donc pas ici de vengeance, mais de justice. Au dieu unique, qui les a naguère vaincus, répondent enfin les dieux différents. Ceux-ci ont longtemps été mal- traités par l’histoire, sans doute parce qu’ils étaient les plus purs, comme figés dans la glace d’une lointaine patrie.
De la mythologie scandinave, la plupart des Français ne connaissent guère que la chevauchée des Valkyries, qu’ils imaginent d’ailleurs à travers la transposition lyrique et déjà « méridionale » (ou si l’on veut « classique ») des opéras de Richard Wagner. C’est tout juste s’ils font le rapprochement Wotan-Odin, à l’instar de la comparaison Zeus-Jupiter rabâchée sur les bancs du lycée. Le crépuscule des dieux - que les Nordiques nomment Ragnarok – n’est pour eux qu’un roulement de timbales qui fait frissonner les nuages de toile peinte. Hors cela, tout n’est qu’obscurité. Il y a plus grave que la niaiserie et c’est la trahison.
On a posé la question tout en fournissant déjà la réponse : cette mythologie nordique ne serait-elle pas néfaste, puisqu’on a vu s’abreuver a sa source les apôtres d’un pangermanisme qu’il convient aujourd’hui de remiser au magasin des accessoires du théâtre européen ? Une telle calomnie prouve une méconnaissance totale de l’univers mental ou s’est épanouie la littérature nordique primitive. Dans cette Islande de la haute époque médiévale, sur la terre des glaciers et des volcans, va naître le premier parlement du monde !
Cet Althing, qui réunit tous les hommes libres, impose le respect de la loi commune, c’est-à-dire l’ordre, sans lequel il ne saurait y avoir de liberté. De ces païens islandais, les voyageurs étrangers ont pu dire, stupéfaits : « Ils n’ont pas de roi, seulement une loi ». Aucune nation n’a été plus rebelle au totalitarisme politique ou religieux que ce peuple de l’Atlantique nord, longtemps fidèle au souvenir de ceux des leurs qui avaient fui la dictature des premiers monarques norvégiens.
Sur cette Islande - que l’on peut sans démesure nommer Île sacrée du Nord – va surgir, comme floraison a la fonte des neiges, une prodigieuse littérature héroïque et mystique, dont la puissance, l’originalité et la grandeur séduisent tous ceux qui la découvrent.
Les récits, plus ou moins contemporains de l’âge viking, que l’on nomme sagas et ou s’entremêlent les travaux champêtres, les batailles sanglantes et les navigations hasardeuses, sont désormais de mieux en mieux connus hors du monde scandinave. Il s’en dégage un certain nombre de figures héroïques devenues aujourd’hui assez familières à défaut d'être encore exemplaires.
Le monde des dieux est moins connu que celui des héros. Il apparaît plus abrupt et les textes qui l’évoquent se dressent comme de hautes falaises au-dessus de rivages désolés. Il est difficile d’y aborder et bien davantage encore de les gravir.
Ces textes sont essentiellement constitués par les Eddas et par un ensemble de poèmes, dont on peut supposer qu’ils ne représentent que les fragments d’une immense littérature engloutie, un peu comme le sommet de ces icebergs qui émergent de l’océan et dont les trois quarts disparaissent sous les flots glacés.
On a coutume, en l’opposant aux sagas, de parler de l'Edda. En réalité ce mot désigne deux réalités assez différentes. D’une part, l’Edda de Snorri Sturluson, rédigée vers 1230, et qui comprend entre autres, sous le nom de Gylfaginning, ce que Régis Boyer nomme très justement « un véritable manuel d’initiation à la mythologie nordique destiné aux jeunes poètes ».
Quant à l’Edda anonyme, dite aussi Edda poétique ou Edda ancienne, elle restitue une très ancienne tradition orale qui fut, elle aussi, recueillie au début du XIIIème siècle, mais contient de très nombreux passages archaïques, assez bien préservés de toute influence chrétienne.
Il faut rappeler quand même, pour dater toute cette aventure spirituelle, que l’Islande s’est convertie à la religion du Christ lors de l’Althing de l’an Mil, non par une décision autoritaire d’un souverain mais par un vote, dont le résultat dégagea une majorité longtemps tolérante pour la minorité restée fidèle aux anciens dieux païens.
Des deux Eddas, il n’existe pas de traduction intégrale en langue française. De même, un grand nombre de poèmes d’inspiration mythologique nous sont encore inconnus. Il convenait donc d’en réaliser une sorte de synthèse et surtout de la rendre accessible à un très large public.
Malgré l’habileté technique des versificateurs, malgré les interdits des missionnaires, malgré l’enchevêtrement parfois inextricable des personnages, des symboles et des péripéties, cette mythologie scandinave primitive a été populaire. Elle a inspiré d'innombrables récits de veillée, elle a longtemps attisé les rires et les craintes, les peines et les joies, les rites et les peurs d’hommes simples. Paysans et marins, ils vivaient tous dans l’intimité de ces dieux d’Asgard. Guerriers, ils croyaient mériter un jour le palais étincelant du Valhalla. Ces récits formaient la trame même de leur vie et les aidaient à accueillir sans crainte la mort.
Aujourd'hui, ces dieux maudits ne doivent pas nous apparaître comme des dieux étrangers, ni surtout comme des dieux mystérieux et inaccessibles. Ce livre a pour première ambition de « populariser » leurs aventures...
Ces récits vont apparaître, à l’image même de la vie, fort divers. On y passe tour à tour du merveilleux au grotesque, de l’épouvante à la farce, de la tragédie la plus grave à la comédie la plus folle : cela ne va pas sans horreur ni sans trivialité. Les dieux naviguent allégrement du champ de bataille à la salle de banquet. Ils ripaillent et s’insultent. Nous voici en pleine truculence. Loki lance son fait à chacun. Il traite Freya de putain et Thor de cocu. Odin lui-même n’est pas épargné et devient une ganache de la pire espèce.
On peut trouver choquant ce mélange. Mais c’est celui de toute une vieille tradition européenne, telle qu’elle va se perpétuer pendant tout le Moyen Age et éclater dans l’œuvre écrite d’un Rabelais ou dans l’œuvre peinte d’un Breughel.
Une des grandes leçons de cette mythologie, par ailleurs si incohérente, est peut-être le refus de briser l’unité profonde de la vie. Il apparaît tout aussi naturel, pour les vieux Nordiques, d’assumer son destin en se faisant tuer joyeusement que de ripailler entre deux combats. Il est aussi noble pour eux de brandir une épée que de vider une corne à boire. Ce qui est ignoble, c’est la lâcheté, le mensonge et le parjure.
L’unité de ces récits vient du fait que l’on y retrouve les mêmes personnages – mais dans des situations souvent fort diverses. Elle vient aussi du cadre immuable : les neufs mondes et surtout Asaheim et Jotunheim, car les géants servent de perpétuels « faire-valoir » aux dieux. Les hommes sont presque toujours absents de ces aventures, encore plus effacés que les nains besogneux et les elfes évanescents. Mais ces dieux sont humains, trop humains parfois.
Jean MABIRE
Source : Eléments N°27 – Hiver 1978
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