D’un côté, le pape François ne cesse d’appeler les États à ouvrir leurs portes et à accueillir les migrants. De l’autre, le Vatican, État dont il est le chef, renforce sa lutte contre l’immigration illégale en ayant la politique la plus répressive d’Europe.
La mesure a été adoptée en silence début décembre 2024 et révélée par la presse italienne quelques semaines plus tard : le territoire du Vatican a renforcé sa législation du délit de séjour irrégulier. Le but ? Protéger sa frontière, renforcer les contrôles et empêcher l’intrusion des personnes non désirées.
Renforcement du délit d’entrée illégale
Pour entrer sur le territoire du Vatican, même pour quelques heures, il faut obtenir une autorisation au bureau de la douane. Dans un décret du 19 décembre 2024, le gouvernorat de la cité du Vatican a édicté de nouvelles peines à l’encontre des personnes qui entrent de façon illégale sur le territoire du Vatican. Ce décret vise « quiconque entre sur le territoire de l’État de la Cité du Vatican par violence, menace ou tromperie », c’est-à-dire en évitant ou en se soustrayant aux systèmes de sécurité, rapporte l’agence I média basée à Rome.
Les peines encourues vont de un à quatre ans de prison et de 10 000 à 25 000 € d’amende.
Le promoteur de justice peut citer toute personne prise en flagrant délit à comparaître devant le tribunal dès le lendemain de l’infraction. Les personnes condamnées peuvent en outre voir leur peine assortie d’une interdiction d’entrée sur le territoire du Vatican pour une période de dix ans.
À ces mesures de restriction s’ajoute une limitation de l’accueil : pour pouvoir héberger des personnes extérieures, les résidents de l’État de la Cité du Vatican doivent obtenir une autorisation du gouvernorat. Le cas échéant, ils encourent une amende allant là aussi de 10 000 à 25 000 €.
L’État le plus répressif contre l’immigration illégale
Ce que le Vatican met en place, s’appelle un délit de séjour irrégulier. Celui-ci existait en France mais a été abrogé par François Hollande en 2012.
En 2023, la droite sénatoriale a adopté un texte pour tenter de le rétablir, texte qui n’a jamais vu le jour. La peine encourue, un an d’emprisonnement et 3 750 € d’amende, est bien inférieure aux peines pratiquées au Vatican.
Mais ce décret a été censuré par le Conseil constitutionnel. En effet, ce type de délit est interdit par l’Union européenne, qui privilégie les reconduites à la frontière et s’oppose aux peines d’emprisonnement et aux amendes. Le Saint-Siège n’étant pas membre de l’UE, il peut édicter librement son propre droit.
Le lecteur facétieux pourra faire remarquer que le Vatican a à sa tête le dirigeant le plus pro-migrants d’Europe, qui depuis son élection (2013), ne cesse d’appeler à ouvrir les portes, les murs et les frontières et à accueillir le migrant. Mais, en tant que chef d’État, François est celui qui fait adopter la politique migratoire la plus répressive et qui demande à son gouvernorat de renforcer la sécurité de ses frontières.
Jean-Baptiste Noé - 18 janvier 2025
Source : site revue Conflits