Le PS ne veut plus s’embarrasser de cette vieille lune qu’est l’idéal socialiste venu du XIXe siècle, fondé sur l’exigence de justice sociale et de défense des travailleurs, juste bon à faire rêver quelques naïfs. C’est en tout cas la conviction du ministre de l’économie Emmanuel Macron, soucieux de se parer d’une image dynamique et volontariste. Présenté par Valls au vice-chancelier allemand Sigmar Gabriel comme « la star de son gouvernement » (rien que ça !), il veut réorienter en profondeur la politique économique et sociale de ce qui est censé être le gouvernement de la France en s’attaquant à ce qu’il appelle les « maladies » de notre pays. Il affuble ces « maladies » d’étiquettes bien péjoratives (« « la défiance, la complexité et le corporatisme »). Et veut illustrer l’affirmation que claironne l’Elysée, dans le style méthode du docteur Coué : « Nous sommes en mouvement » (Le Monde, 16 octobre). Le « mouvement » ? Fort bien. Mais vers quoi ? La réponse est claire : vers toujours plus de libéralisme, en donnant au patronat ce qu’il demande, c'est-à-dire la possibilité d’exploiter toujours plus les gens qui travaillent. Au nom de la « liberté », bien sûr, on veut accorder aux salariés la chance de travailler le dimanche et la nuit. Les veinards… Pourquoi jeter ainsi aux orties le principe de la protection sociale et l’encadrement de l’économie par le pouvoir politique ? La réponse est dans l’aveu d’un secrétaire d’Etat voulant bien sûr rester anonyme : « Hollande, Jouyet et Macron sont là pour rassurer Bruxelles. Du matin au soir » (Jouyet est le secrétaire général de l’Elysée … et ancien secrétaire d’Etat aux affaires européennes de Sarkozy… Bonnet blanc et blanc bonnet).
La conversion au libéralisme est inscrite depuis longtemps dans l’évolution idéologique du PS et Hollande-Valls n’ont fait qu’accélérer le mouvement. Mais cela suscite, quand même, quelques vagues et les Hamon, Aubry et quelques autres rêvent de s’appuyer sur les « frondeurs » pour incarner un courant de gauche susceptible de servir leurs ambitions, tandis que Montebourg est en embuscade au coin du bois. Ce qui oblige Hollande-Valls à marcher sur des œufs, dans le style deux pas en avant, un pas en arrière. Un ministre résume : « On ne veut pas dire qu’on va le faire, tout en espérant qu’on le fasse, puis on dit qu’on va peut-être le faire… J’essaye de comprendre et je n’y comprends rien ».
Affaire à suivre. Cela risque d’être croustillant. Mais ce qui est moins drôle, dans l’affaire, c’est que les Français (les vrais) vont continuer à trinquer.