Archaeologist Moa Gillberg min 1024x682

 

La découverte d'un cimetière de l'âge du fer en Suède, incluant la tombe d'une femme où un couteau en fer a été retrouvé curieusement planté dans le sol, soulève de nouvelles questions sur les pratiques funéraires des communautés scandinaves de cette époque.

Au XVIIe siècle en Suède, les prêtres ont pour mission de cataloguer les vestiges archéologiques de leur paroisse. Alors en 1667, l'un d'entre eux, nommé Ericus Hemengius, notait ainsi observer depuis sa fenêtre quelques tumulus « pas particulièrement grands ».

Il s'agissait des restes d'un cimetière, que les archéologues connaissaient donc à travers de précieuses sources historiques – parmi lesquelles, celle de l'homme d'Église. Mais ils ne savaient si les tombes, dont l'emplacement se situe désormais dans un quartier de Pryssgården, à environ 169 kilomètres au sud-ouest de Stockholm (sud de la Suède), avaient survécu jusqu'ici.

Les fouilles récemment menées par les spécialistes des musées historiques nationaux de Suède (Statens historiska museer) ont finalement permis d'en identifier plusieurs dizaines, de l'âge du fer préviking en Suède, c'est-à-dire datées entre 500 av. J.-C. et 400 apr. J.-C., annoncent-ils dans un communiqué du 21 octobre 2024.

Plus encore, l'une d'entre elles était inhabituelle : une femme y était enterrée avec un petit couteau pliant en fer, encore enfoncé droit dans le sol.

 

Artefacts et pratiques funéraires de l'âge du fer

Au cours de leurs enquêtes préliminaires au printemps 2024, les scientifiques ont retrouvé plusieurs artefacts (fibules, broches, aiguilles) à l'aide de détecteurs de métaux, ainsi que des fragments humains, les laissant à penser qu'ils étaient sur la bonne piste pour identifier le cimetière évoqué par le prêtre. Les fouilles ont finalement permis de mettre au jour d'anciennes habitations, un entrepôt et un puits, en plus de dizaines de tombes.

La plupart étaient des fosses où des restes brûlés étaient disposés – durant l'âge du fer en Suède, la pratique la plus courante était de crématiser les morts sur un bûcher. D'autres étaient couvertes de petites pierres disposées de manière symétrique, appelées « amas de pierres ».

Deux sépultures situées à proximité l'une de l'autre ont été examinées en même temps par les experts. L'une ne contenait que quelques ossements d'animaux, sans objet funéraire. L'autre cachait une épaisse couche de cendre, une petite aiguille en bronze, ainsi qu'un couteau en fer très bien conservé, inhabituellement enfoncé droit dans le sol, le tranchant vers le bas.

« On a [autrefois] rassemblé tout ce qui venait du bûcher et ensuite, enfoncé le couteau, explique dans le communiqué Moa Gillberg, archéologue aux musées historiques nationaux de Suède. Nous ne savons pas pourquoi, mais il est clair qu'il est destiné à la femme [enterrée-là]. »

 

Enquête dans le cimetière de Pryssgården

À l'époque où la défunte vivait, les couteaux étaient des objets utilitaires : ils servaient à préparer les aliments ou fabriquer des vêtements ; mais ils auraient aussi pu être employés pour la légitime défense. Dans le sud de la Suède, ont été retrouvés d'autres exemples de femmes enterrées avec des couteaux et des aiguilles de ce type, dans des tombes de la fin de l'âge du fer et du début de l'âge viking (793-1066 apr. J.-C.). L'arme blanche ici décelée pourrait tout à fait avoir servi à la préparation du cuir, ajoute Moa Gillberg. Mais c'est sa position étrange dans la tombe qui n'est pas encore bien comprise des archéologues.

L'aiguille semble suggérer que la défunte pourrait avoir joué un rôle important dans son ancienne communauté. La présence des deux objets pourrait ainsi indiquer un rituel funéraire spécifique, une intention de protéger son esprit dans l'au-delà ou encore, un moyen de sceller son lieu de repos éternel. Il ne s'agit néanmoins de d'hypothèses ; rien n'est moins sûr.

Dans le cimetière, certaines fosses ne contenaient par ailleurs presque aucun os. Il pourrait donc s'agir d'autres choses que des tombes. Il y a au moins seize siècles, « on pourrait par exemple avoir crématisé l'individu à un endroit du cimetière, puis déplacé ses restes dans une autre partie ou un autre lieu à proximité », suppose la spécialiste. L'une des fosses s'est avérée être un grand trou de poteau – preuve qu'une sorte de structure en bois se trouvait là. « Parfois, on construisait des monuments sur le lieu du bûcher funéraire, c'était peut-être donc cela ».

Les archéologues estiment qu'il y aurait environ cinquante tombes dans la région. Elles pourraient être plus ou moins nombreuses, plus vieilles ou plus récentes. Des travaux supplémentaires vont se poursuivre sur le site de Pryssgården, afin de lever ces mystères.

Mathilde Ragot - 05/11/2024 - GEO

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