Le chantier de fouille a duré deux mois, mobilisant entre quatre et cinq techniciens sur 400 m2. DR
Alors que se tient ce samedi à Ibos la journée départementale de l’archéologie, gros plan sur les fouilles préventives menées à Castelvielh qui ont révélé des vestiges dans une motte et confirmé l’existence d’un site aristocratique médiéval, autour d’une tour.
Quand le passé ressurgit à la surface. C’est dans le cadre d’une fouille préventive, c’est-à-dire ordonnée par les services de l’État dans le cadre d’un aménagement pour sauvegarder par l’étude ce qui pourrait être détruit par la construction de cette maison individuelle, que les équipes de l’Inrap ont mis à jour le passé aristocratique niché dans une motte à Castelvieilh. « Un premier diagnostic avait déjà révélé la présence de vestiges archéologiques, détaille Gwenaël Merce de l’INRAP Midi-Méditerranée. Mais c’était connu depuis la fin des années 70 et la construction d’un château d’eau dans cette motte. L’excavation avait fait ressurgir de vieux murs, vraisemblablement ceux d’une tour médiévale, qui ont été inventoriés. On savait que cette zone était sensible. »
Le chantier de fouille a duré deux mois, mobilisant entre quatre et cinq techniciens sur 400 m2. DR
Pendant deux mois, entre quatre et cinq archéologues ont inspecté les différentes couches sur près de 400 m2, seulement sur la hauteur impactée par cette maison semi-enterrée (un peu moins de 3 m sur les 7 m de la motte). « Comme le reste ne sera pas touché par le chantier et donc préservé, on n’intervient pas. » Ces fouilles ont mis en lumière un foyer et de petits bâtiments datés entre le XIIe et le XIIIe siècle. « Ça témoigne d’une occupation qui s’appuie sur cette tour médiévale en pierre calcaire. C’est une organisation caractéristique d’un site aristocratique. Les constructions en dur dans ce contexte rural à cette époque, c’étaient des églises ou des châteaux. On ne sait pas depuis quand ces bâtiments étaient là, mais antérieurement au XIIe siècle sans doute. Bien que Castelvieilh n’apparaisse dans les textes qu’au XIIIe siècle. On sait que ce site était la propriété des seigneurs de Barbazan, qui font partie de la haute aristocratie de Bigorre et sont les témoins sur de nombreux actes passés par les comtes de Bigorre. Ce n’était pas leur siège, mais cela fait partie de leurs possessions. »
Aux deux mois sur le terrain succédera un travail d’analyse au moins aussi long. « Sur le chantier, on décrit, on enregistre, on dessine, on photographie, on prélève aussi, décrypte Gwenaël Merce. On a découvert beaucoup d’éléments mobiliers comme de la céramique, des parures, des boucles de ceinture mais aussi des restes osseux de la faune qui était consommée, notamment un os d’ours légèrement carbonisé, un mets plutôt destiné à l’élite. On a également des éléments d’arbalètes, des morceaux de flèches. Tous ces prélèvements sont contextualisés pour définir la chronologie des différentes couches puis analysés par des spécialistes. Certains seront datés au carbone 14. On a également pu modéliser la tour en 3D ainsi que le terrain pour apprécier le relief. On va plus loin en confrontant avec d’autres mottes similaires comme à Sainte-Christie d’Armagnac. Car on est sur quelque chose de plus vaste. »
Car les chantiers de fouilles archéologiques sur ces mottes, rarement aménagées, sont « plutôt rares. D’ailleurs, nombre d’archéologues médiévistes ont témoigné d’un vif intérêt pour ce type de site. On a un tout petit bout d’histoire-là, qui nous invite à aller plus loin. On sait que ce secteur était disputé. C’était bien propriété de la Bigorre mais convoité par le vicomte du Béarn. Le premier enjeu de ces fouilles préventives c’est la sauvegarde de ce patrimoine menacé par les travaux. Ensuite il faut comprendre et essayer de recontextualiser… » L’histoire est en marche et la construction de la maison va pouvoir débuter.
Andy Barréjot - 13/06/2025
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