Gabriele Adinolfi, essayiste et militant national-révolutionnaire italien, est l’auteur notamment de « Nos belles années de plomb » aux éditions l’Aencre et de « Pensées corsaires » aux éditions du Lore. (http://fr.gabrieleadinolfi.eu/tous-les-livres/)
Nietzsche académie - Quelle importance a Nietzsche pour vous ?
Gabriele Adinolfi - Je ne saurais pas quantifier. Certainement son esprit m'a embrasé dès mon adolescence et son style aussi. Déconstruire pour rebâtir non pas en grammairien mais en poète veut dire parler de l'essence, à l'essence, par l'essence. Et justement cette essence, je dirais à la fois cette âme et cette race, représente la seule opposition existentielle et la seule voie de survie et de régénération pour un homme vivant à cet âge de décadence et de castration.
N.A. - Etre nietzschéen qu'est-ce que cela veut dire ?
G.A. - Je ne sais pas si le terme est exact ni si Nietzche lui-même l'aurait apprécié. Disons que cela signifie être viril, être grec, être germain, être indo-européen dans le grain ancestral duquel surgit toute civilisation réelle, qu'elle soit spartiate, romaine ou viking. C'est le retour au basic, au gène, à l'ADN « sauvage » de l'homme qui ne se laisse pas traîner comme une brebis dans un troupeau, en somme de celui qui n'est pas le « dernier homme » zarathoustrien et ne supporte pas de s'accommoder à son style de vie, mieux : à sa totale absence de style. Il signifie se mettre en face de soi-même soumis à son propre jugement, qui ne doit jamais être indulgent ni moral, mais beaucoup plus fort, plus ancien, plus innovant et plus solide que cela. Ceux qui croient que l'idée « d'être au-delà du bien et du mal » signifie être libres de faire ce que l'on désire se trompent largement. Il faut que chacun qui peut, fasse ce qu'il veut. Mais il ne peut pas vouloir quelque chose qui ne soit pas forte et dans une certaine façon juste en soi, autrement il ne s'agirait plus d'un vouloir mais d'un caprice.
L'anarque, qui est nietzschéen, n'a rien à voir avec l'anarquiste comme l'a si bien souligné Ernst Jünger.
N.A. - Quel livre de Nietzsche recommanderiez-vous?
G.A. - Mon livre de chevet est « Ainsi parlait Zarathoustra »
N.A. - Le nietzschéisme est-il de droite ou de gauche?
G.A. - Evidemment ni l'un ni l'autre. C'est une entreprise bien difficile de définir ce qu'est la droite et ce qu'est la gauche.
Bien sûr, si nous parlons de l'eschatologie gauchiste, si semblable à celui du clergé, Nietzsche s'y trouve aux antipodes. Si on pense plutôt à l'optimisme vitaliste qui se retrouve plus à gauche qu'à droite, bien que de façon mièvre, on peut dire alors que la gauche est plus nietzschéenne que la droite, ou du moins elle le fut dans le passé, je pense notamment à Jack London et à d'autres essors de le marier avec Marx dans un élan révolutionnaire.
Quant à la droite, si nous parlons de l'individualisme qui la caractérise, on ne doit pas se méprendre, ce n'est pas du tout le même que le nietzschéen, ni la prétendue défense des valeurs, qui est un refrain continu de la droite, n’est compatible avec celui qui comprit bien avant les autres qu'il ne faut pas en défendre mais en fonder des nouvelles. Par contre le pessimisme dans l'homme et dans le progrès rapprochent les gens de droite à la pensée nietzschéenne qui, en tout cas, est bien au-delà de ces catégories et plutôt annonce en quelque sorte « l'anarque » jungérien, ce qui n'est pas une figure si lointaine des squadristi et des corps-francs.
N.A. - Quels auteurs sont à vos yeux nietzschéens ?
G.A. - Je ne suis pas en mesure d'en faire une liste. Evidemment, mis à part London, j'ajouterais Mussolini qui fut aussi auteur littéraire mais surtout l'auteur d'un chef d'œuvre de la vie, de la société, de l'histoire et de la pensée.
J'ajoute Jünger qui me paraît une incarnation de Nietzsche et dont certains ouvrages, « Le Travailleur » et « Le traité du rebelle » dessinent un vrai manifeste nietzschéen.
Mais Julius Evola, dans sa critique constructive à Nietzsche qu'il voit privé de transcendance, ce qui à mon avis n'est pas tout à fait vrai, complète à mon égard le cadre en fondant l'anarque et la tradition ancestrale, qu'on ne doit jamais confondre avec les « traditionalismes » bourgeois et religieux qui auraient effaré le Poète.
« Chevaucher le tigre » est d'après moi le manifeste nietzschéen le plus parfait existant jusqu'à aujourd'hui.
N.A. - Pourriez-vous donner une définition du surhomme ?
G.A. - Pas vraiment une définition. Son croquis je le résume dans les « métamorphoses de l'esprit ». Il doit être solide, discipliné, costaud comme le chameau, courageux, solitaire et rugissant comme le lion, innocent, simple et souriant comme l'enfant. Il doit appartenir à la nouvelle noblesse qui sera pauvre mais richissime car elle ne sera aucunement dépendante des nécessités du dernier homme.
N.A. - Votre citation favorite de Nietzsche ?
G.A. – « De tout ce qui est écrit, je n’aime que ce que l’on écrit avec son propre sang. Écris avec du sang et tu apprendras que le sang est esprit. »