25 juillet 2017
Voici ce qu’a dit le spécialiste financier Marc Friedrich à Sputnik Deutschland : La montée du débat en Italie sur les mérites de l’« Italexit », reflète les difficultés insolubles qu’affronte l’eurozone.
Tandis que les politiciens cherchent à trouver le moyen d’affronter le dérapage de la dette publique de l’Italie, qui a atteint 132,6 pour cent du PIB en 2016, la sortie éventuelle de l’eurozone a été soulevée au Parlement italien.
Début juillet, pour discuter de la situation économique en Italie, les parlementaires du Mouvement cinq étoiles ont organisé un séminaire à la Chambre des députés. Ils ont aussi bien parlé du mécanisme par défaut de l’eurozone, des stratégies de restructuration de la dette souveraine, des systèmes de paiement parallèles, que de la possibilité de sortir de l’eurozone.
Ce débat signifie que le Parlement italien a parlé pour la première fois de l’option « Italexit », un sujet tabou jusqu’à récemment, a rapporté la presse italienne.
L’expert financier Marc Friedrich a dit à Sputnik Deutschland, que le retour à la lire profiterait à l’Italie, qui se débat comme jamais auparavant avec des taux records de dette et de chômage. Voici ce que Friedrich a dit :
Les pays du sud de l’Europe se porteraient bien mieux avec une monnaie souveraine qu’avec l’euro.
Tant que ces pays resteront dans l’eurozone, avec les limitations des taux d’intérêt fixés par la Banque centrale européenne (BCE), ils ne verront jamais le début de la croissance permettant de se rétablir. Nous avons écrit cela dès 2012, dans notre premier livre intitulé « Der groesste Raubzug der Geschichte » [Le plus grand pillage de l’Histoire]. Nous voyons que l’euro ne marche pas. C’est pourquoi je ne puis que souligner qu’Alberto Bagnai de l’université de Pescara a raison.
En mars, soutenant que l’euro tombera, quelle que soit la somme de capital politique investie, le professeur d’économie Alberto Bagnai a dit la nécessité de quitter l’euro de manière maîtrisée. sur son blog Goofynomics, Bagnai a écrit :
La cause la plus probable sera l’effondrement du système bancaire italien, qui entraînera le système allemand avec lui. Il est dans l’intérêt de tout pouvoir politique, certainement des dirigeants européens déclinants, et probablement aussi des USA, de gérer cet événement au lieu de l’attendre passivement.
Comme Bagnai, Friedrich appelle en faveur de la fin de l’euro pour « minimiser les dommages ». Friedrich avertit :
Nous ne faisons en ce moment que retarder la faillite, et nous aggravons la situation de la plupart des simples citoyens. En fait, nous maximisons les dégâts au moment où nous devrions les minimiser.
Plus l’Italie et les autres pays du sud de l’Europe sont tenus par la BCE et emprisonnés par l’euro, plus sont grands les dommages collatéraux à leur prospérité, à la coexistence sociale et, bien entendu, à la démocratie, car les partis extrêmes deviennent de plus en plus forts.
Selon l’économiste, l’Italie étant la troisième plus grande économie de l’eurozone, un « Italexit » non contrôlé aurait un effet dévastateur sur l’économie européenne. Cela amènerait les autres pays à sortir dans son sillage. Si l’Italie doit rester dans l’UE, alors l’économie la plus forte du bloc, l’Allemagne, doit assumer le fardeau d’accorder des subventions à l’Italie et aux autres États membres du sud.
Selon Friedrich, cette situation contredit les règles de la monnaie unique, et le programme d’achat d’actifs de la BCE, qui injecte actuellement 60 milliards d’euros (70 milliards de dollars) par mois dans le système de l’eurozone, ne fait que cacher les fissures. Et Friedrich prévient :
Quand l’euro a été créé, il a été dit qu’aucun pays ne devrait payer pour un autre. Toutes ces règles ont été et sont en train d’être rompues par le sommet, et personne n’est puni pour cela. L’euro est condamné, c’est une monnaie empruntée sur le temps. En fait, l’euro est de la fausse monnaie. L’euro fera faillite, la seule question étant à quel moment. La BCE essaie seulement de le faire durer aussi longtemps que possible.
Il va s’effondrer et nous ne pouvons qu’espérer que les politiciens responsables essaieront à ce moment-là de minimiser les dégâts et de classer l’euro de manière maîtrisée. De toutes les façons, cela coûtera cher. Si nous n’avons pas de chance, il y aura une énorme catastrophe avec beaucoup de dégâts collatéraux et beaucoup de gens perdront de l’argent.
Les doutes de Friedrich concernant l’euro sont partagés par le professeur Paul De Grauwe de LSE qui, plus tôt ce mois-ci, a déclaré au journal autrichien Der Standard, que la monnaie unique ne peut marcher sans être accompagnée d’une union politique et budgétaire. Selon Friedrich :
L’Allemagne et l’Italie sont chacune un problème à leur manière pour l’eurozone. J’arrive juste d’Italie, et il y a là-bas immensément de pessimisme. C’est le seul pays de l’union monétaire qui soit plus pauvre aujourd’hui qu’au moment de l’introduction de l’euro, en 1999. La croissance est nulle ou négative, les gens ne peuvent pas trouver d’emploi. Ils sont bloqués dans la fatalité. Ils ont la grande tentation de se mettre derrière un dirigeant qui leur dise que ce sera mieux sans l’euro.
Le système italien ne marche pas bien dans l’eurozone. Il a connu un long cycle d’inflation, de fortes augmentations de salaire, puis une crise et la dépréciation. Ce n’est plus possible, l’Italie ne s’est pas adaptée à l’euro.