Introduction : Après Bakhmut
Certains considèrent que le conflit en Ukraine est maintenant à mi-parcours. En tout cas, nous commençons à avoir une idée beaucoup plus claire de l’issue possible, qui pourrait se situer dans environ un an. Après la chute de Bakhmout, les forces russes avanceront vers le fleuve Dniepr, reprenant la majeure partie de l’est de l’actuelle Ukraine, et peut-être même une plus grande partie au sud. Avec plus d’un demi-million de soldats russes inutilisés aux frontières de l’ancienne Ukraine, la force d’occupation russe en attente est assez importante. À ce stade, les marionnettes installées par les États-Unis à Kiev tomberont comme les gouvernements fantoches de Saigon et de Kaboul avant eux. Des hélicoptères évacueront les agents de la CIA et de l’OTAN qui n’ont pas encore été tués du toit de l’ambassade américaine à Kiev, ainsi que les hauts responsables de la redoutable police secrète, la SBU. Zelensky sera emmené à Miami. Les mercenaires polonais s’enfuiront vers la frontière polonaise.
Trois gagnants : Local, continental et mondial
a. L’Ukraine
Après la guerre, il y aura trois gagnants. Le premier sera l’Ukraine nouvellement libérée, qui retrouvera ses frontières naturelles après que la Crimée, l’est et peut-être le sud auront été rendus à la Russie. Une Ukraine libre et indépendante, peut-être dirigée par un président ukrainien comme Oleg Tsaryov, sera établie. L’Ukraine, dont les infrastructures ont été ignorées pendant trente ans, alors que les oligarques-voleurs en voie d’exil expatriaient l’argent ukrainien à Tel-Aviv, Londres et New York, sera rénovée. La prospérité viendra de l’achèvement de la nouvelle route de la soie reliant l’Eurasie. L’Ukraine a un grand avenir en tant que plaque tournante des transports et de l’énergie. Progressivement, au cours des cinq prochaines années, les 3 millions de réfugiés ukrainiens en Russie et certains des 8 millions en Europe occidentale, une fois qu’ils auront été soigneusement contrôlés ou dénazifiés par les services de sécurité russes, pourront rentrer chez eux. Le fait est qu’il y a peu de véritables réfugiés ukrainiens en dehors de la Russie. Ceux qui sont partis en Europe occidentale au cours des treize derniers mois sont simplement ceux qui seraient partis si l’Ukraine avait été autorisée à adhérer à l’UE. Sans l’attrait de l’UE (voir ci-dessous), beaucoup rentreront chez eux en temps voulu.
b. La Fédération de Russie
Le deuxième gagnant sera la Fédération de Russie. Alliée au Belarus et à la nouvelle Ukraine, elle sera de loin la plus importante d’une solide troïka de pays, dont la population combinée avoisinera les 200 millions d’habitants. Le Belarus, aliéné par la tentative américaine de révolution colorée en 2021, est désormais un allié loyal de la Russie et a renoncé à flirter avec l’Occident perfide. Quant à la nouvelle Ukraine, après la trahison occidentale de l’ancienne Ukraine, elle ne se fera certainement plus d’illusions sur les promesses vides et absurdes de l’Occident, avec son OTAN et son UE redondantes, qui n’ont apporté que destruction, appauvrissement et asservissement à toute l’Europe de l’Est. Les trois frères de la Slavonie orientale seront réunis comme jamais auparavant, en raison de l’ingérence des États-Unis qui ont tenté de détruire leur unité après la chute de l’URSS. En outre, le prestige international de la Russie sera grand. Sa position diplomatique dans le Sud, en Afrique, en Amérique latine et en Asie, en particulier en Iran et en Syrie, n’aura jamais été aussi élevée.
c. Le Sud global
Par conséquent, le troisième gagnant sera les BRICS +, dont le moteur économique est la République populaire de Chine et le moteur idéologique la Fédération de Russie. BRICS + signifie non seulement BRICS, Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud, mais aussi les nouveaux membres que sont la Turquie, l’Iran, l’Arabie Saoudite, l’Égypte, l’Algérie, le Mexique et l’Argentine. Il s’agira d’une organisation des « Douze », avec un équilibre entre six pays d’Eurasie, trois pays d’Afrique et trois pays d’Amérique latine. Elle devrait recevoir un nouveau nom – nous suggérons depuis longtemps quelque chose comme AS, « L’Alliance souveraine ». Ce n’est qu’une idée. Elle regrouperait environ la moitié de la population mondiale et plus de la moitié de sa production. Un géant. Et qui les suivra ? Évidemment, la Biélorussie et l’Ukraine. Puis peut-être le Nigeria, le Venezuela, le Pakistan – la liste pourrait bien commencer à ressembler à la composition de l’ONU, l’Organisation des Nations unies, une marionnette américaine d’après 1945, désespérément démodée et bientôt défunte. Les BRICS + regrouperont pour l’instant tout le monde à l’exception de l’Occident « exceptionnel », c’est-à-dire l’Amérique du Nord (les États-Unis et le Canada), la péninsule d’Europe occidentale (nous entendons par là l’Europe jusqu’à la Biélorussie et l’Ukraine), l’Océanie et pour l’instant (mais plus pour très longtemps) les quelques vassaux offshore ou côtiers des États-Unis en Asie – le Japon, Taïwan, la Corée du Sud et Israël.
L’avenir de l’Europe occidentale
a. Une Europe sans OTAN et dénazifiée
Après la libération de l’Ukraine, il est clair que l’Europe occidentale prendra le chemin de la libération de l’occupation américaine post-1945. Il est clair que l’OTAN est finie, puisqu’elle n’a jamais été qu’une organisation contre l’URSS, disparue depuis longtemps, et qu’elle sera encore plus vide de sens après les déroutes américaines à Kaboul et à Kiev. Cette libération de l’OTAN se fera à des rythmes différents, selon le principe « dernier entré, premier sorti ». Par conséquent, l’effondrement commencera en Europe de l’Est, passera par l’Allemagne (après la trahison américaine et le sabotage de Nordstream, l’Allemagne voudra se venger), la France (après l’éjection des marionnettes des banquiers américains comme Macron et le retour du gaullisme) et le processus se terminera au Royaume-Uni, qui est occupé par les forces américaines depuis 1942 à l’invitation du demi-américain Churchill. Les généraux qui demanderont alors : « Mais qu’est-ce qui va remplacer l’OTAN ? seront jetés à bas de leur fauteuil ». La question est aussi absurde et anachronique que « Mais qu’est-ce qui va remplacer le Pacte de Varsovie ? »
b. Une Europe occidentale reconnectée
Cependant, la liberté de l’Europe occidentale ne s’arrête pas avec l’effondrement de l’OTAN basée à Bruxelles. Viendra ensuite l’effondrement de l’UE basée à Bruxelles et orchestrée par les États-Unis, les États-Unis d’Europe, l’USE. Dans cette deuxième phase de libération, il est clair que l’Europe de l’Est devra faire ami-ami avec la troïka Fédération de Russie, Ukraine et Biélorussie. Le nouveau Berlin, reconnecté à l’énergie russe après avoir été coupé par les États-Unis et des traîtres comme Scholz, jouera un rôle très important à cet égard. Enfin, de sa tombe, De Gaulle, déchu par les États-Unis, verra une Confédération européenne, non seulement de Vladivostok à Lisbonne, mais aussi à Londres, euh non, jusqu’à Dublin, et à la réflexion, jusqu’à Reykjavik. L’Eurasie du Nord sera souveraine mais coopérera économiquement, de Vladivostok à Reykjavik, du Pacifique au milieu de l’Atlantique. L’attrait d’un tel mouvement eurasien, mené par l’énergie, la nourriture, la technologie spatiale et les armes russes et les biens de consommation chinois sur la nouvelle route de la soie, sera irrésistible. Pour survivre, le Japon devra finalement rejoindre les BRICS +, tout comme la Corée du Nord et la Corée du Sud réunifiées.
c. Une Europe confédérale
À l’est de la péninsule européenne, la Pologne pourrait s’isoler de la Russie pour devenir (à nouveau) une colonie économique allemande, si elle le souhaitait. Elle pourrait aussi faire la paix avec ses voisins slaves à l’est, comme le souhaitent tant de ses habitants. Quoi qu’il en soit, les États baltes devront faire la paix avec la Russie et leurs minorités russes tant persécutées. Une Moldavie autonome ira à la Roumanie, à condition qu’elle soit pro-russe et que son élite fantoche américaine soit écartée. La Hongrie, avec son corridor terrestre vers la Serbie, est déjà un favori de la Russie. Peut-être que la Hongrie, comme la Roumanie, recevra quelques petites terres de l’ancienne Ukraine, où vivent des minorités hongroises et roumaines. Avec l’expulsion des États-Unis des Balkans, nous pouvons voir l’avènement de la justice pour toute la région de la Serbie, de l’Albanie, de la Macédoine, du Monténégro et de la Bosnie-Herzégovine, qui ont été maltraités. En Europe occidentale, les vieux gouvernements russophobes et discrédités des marionnettes américaines seront renversés par le pouvoir populaire – cela a déjà commencé – en France (américanisée par Sarkozy et Macron), en Allemagne (par Scholz), qui est maintenant confrontée aux plus grandes grèves depuis 1992, et au Royaume-Uni (la trinité impie de Johnson, Truss et Sunak ayant été éliminée). Dans une Europe confédérale, il n’y aura aucune raison pour que la Catalogne n’obtienne pas son indépendance de l’Espagne et il n’y aura plus aucune raison pour que l’Irlande soit désunie ou que l’Angleterre, l’Écosse et le Pays de Galles soient liés dans une union pesante. Le Royaume-Uni sera dissous. La justice dans toute l’Europe sera enfin envisageable.
Conclusion : Après la libération
Dans les milieux occidentaux, certains se plaignent que la Russie est tombée dans les bras de la Chine. Outre le racisme profond de cette affirmation, selon laquelle l’Occident génocidaire de la guerre de l’opium est meilleur que la Chine, elle trahit également la profonde ignorance historique de ceux qui font de telles déclarations. Après tout, l’agression occidentale contre la Russie a signifié pendant des siècles que la Russie s’est tournée vers l’Est. Telle est l’histoire de Saint Alexandre Nevski (1221-1263). Et près de sept siècles plus tard, en 1941, Moscou a été sauvée des nazis occidentaux parce que l’Est a refusé d’envahir la Sibérie et que les troupes russes ont pu être transférées de l’Extrême-Orient à Moscou. Le fait que la Russie et la Chine soient aujourd’hui alliées est entièrement le résultat de l’agression occidentale. Par conséquent, la période des États-Unis avec ses films fantastiques hollywoodiens dans lesquels les États-Unis gagnent toujours est révolue, car la réalité est différente. Le monde virtuel de la Maison Blanche des néocons est terminé. Les États-Unis ont été vaincus et expulsés d’Asie, d’Afrique et d’Europe. Les États-Unis vont devoir se retirer sur leur Grande Île et commencer enfin à résoudre leurs propres problèmes critiques, notamment celui de la dédollarisation de l’économie mondiale. Après Bakhmut, nous procéderons progressivement à un changement de régime aux États-Unis.
Batiushka
Recteur orthodoxe russe d’une très grande paroisse en Europe, il a servi dans de nombreux pays d’Europe occidentale et il a vécu en Russie et en Ukraine. Il a également travaillé comme conférencier en histoire et en politique russes et européennes.
Source Global South - Publié le 21/04/ 2023
Traduit par Hervé, relu par Wayan, pour le Saker Francophone