Qu’il s’agisse de la Russie, de l’Irak ou de la Libye, les sanctions occidentales, au cours de ces dernières décennies, se sont avérées inutiles, contre-productives, et n’ont quasiment jamais conduit au résultat escompté, le ‘changement de régime’. Mais ce n’est pas tout. Des universitaires de Hambourg et de Trêves ont prouvé, suite à une étude de grande ampleur, que les sanctions amènent des flux migratoires en Europe, ce qui équivaut à se tirer une balle dans le pied.
A l’heure actuelle, l’UE boycotte 3861 personnes et 1088 organisations et institutions étatiques dans le monde. Les pays visés sont pour l’essentiel la Russie, l’Iran et l’Afghanistan, ainsi que diverses ‘organisations terroristes’ ; dans les faits, les sanctions visent, la plupart du temps, des pays et des organisations qui entravent les buts géostratégiques de l’Occident. Les arguments avancés habituellement, tels les entorses aux droits de l’homme et aux ‘principes démocratiques’, sont spécieux.
Mais voilà que l’étude publiée par le professeur Jerg Gutmann de Hambourg et par ses collègues prouve qu’il y a un lien patent entre les sanctions occidentales et l’augmentation significative des flux migratoires en provenance des pays sanctionnés. En règle générale, les sanctions ne frappent pas les gouvernements mais les populations qui, par définition, souffrent déjà, de toute façon, d’une évidente précarité économique. Pour beaucoup, la situation résultant des mesures de boycott occidentales s’avèrent si catastrophique que la seule option est d’émigrer en direction de l’Europe.
L’étude estime l’effet des sanctions de l’UE et des Etats-Unis à une augmentation moyenne de 20% par année de l’émigration en provenance des pays sanctionnés. Les données utilisées pour étayer cette étude couvrent les mouvements migratoires et les régimes de sanctions entre 1961 et 2018 et se basent sur des statistiques internationales globales établies par l’OCDE. En tout et pour tout, les chercheurs allemands ont étudié les migrations en provenance de 157 pays vers 32 nations industrialisées.
Les chercheurs ne veulent pas que les résultats de leur vaste enquête puissent mettre fondamentalement en doute l’instrument politique que sont les sanctions. Ils veulent en revanche que les ‘conséquences (de ces migrations), lesquelles sont négatives sur bien des plans, soient davantage prises en compte’. Quand on prend des décisions en matière de politique migratoire, il faudrait davantage tenir compte des effets des sanctions, pense Jerg Gutmann : « J’ai l’impression que les instances décisionnaires ne se penchent pas suffisamment sur ces faits et sur leur ampleur ».
Source : Zue rst, octobre 2024