La Révolution française : un modèle pour la nôtre ?

 

Mon propos n’est pas d’apporter du nouveau sur les origines de la Révolution française : il y faudrait des recherches portant sur des sources inexplorées, et d’abord la compétence d’un historien. Je me propose seulement de rappeler, à partir de l’état actuel de nos connaissances, dans quelle mesure elle a été « préparée », par qui elle l’a été, et surtout de voir s’il est possible d’en tirer des enseignements pour la révolution en vue de laquelle nous combattons : la révolution socialiste identitaire, anticapitaliste et antimondialiste. Pris en lui-même, le terme de « révolution » est neutre ; on ne peut se prononcer pour ou contre la révolution en général, mais pour ou contre telle révolution : la Révolution d’octobre des bolcheviques russes et la Révolution nationale de l’Etat français n’ont généralement pas les mêmes admirateurs. Une révolution peut même tendre à la restauration de la royauté.

 

I La chute de l’Ancien régime : effondrement spontané ou subversion ?

L’idée que la Révolution française n’était pas spontanée, mais préparée, remonte aux Mémoires pour servir à l’histoire du jacobinisme (4 volumes, Londres, 1797-1798) du P. Augustin Barruel, jésuite, qui en attribue la préparation à une conjuration des « philosophes », qu’il nomme « sophistes », et des francs- maçons. Elle a été acceptée à la fois par la majorité des contre-révolutionnaires, mais aussi des francs-maçons, quand la Franc-maçonnerie est devenue l’Eglise de la République triomphante. Elle a été en revanche rejetée par les marxistes qui voient dans la Révolution la traduction sociale et politique des changements économiques qui devaient conduire la bourgeoisie au pouvoir. Contre l’hypothèse de Barruel, on a fait valoir que les Lumières et la Franc-maçonnerie se sont répandues sur la majeure partie de l’Europe sans y produire les mêmes effets qu’en France. On a aussi fait valoir que des francs-maçons de premier plan comme le duc d’Orléans, grand-maître de l’Ordre, ont été guillotinés, et qu’un contre-révolutionnaire particulièrement lucide comme Edmund Burke était franc-maçon.

La première objection est sans valeur. La Révolution française n’a pas été antichrétienne, comme on le dit souvent, mais anticatholique. Les sans-culottes considéraient volontiers Jésus comme un devancier, ce qui n’était pas absurde en considération de l’égalitarisme proclamé dans certains passages subversifs du Nouveau Testament (« Les premiers seront les derniers »). Les protestants n’ont jamais été inquiétés, car, en tant que tels, ils ne lui étaient pas hostiles, tant s’en faut : ils se sont montrés particulièrement actifs dans le génocide vendéen. Solé (1988 : 320) en cite un autre exemple : «Daniel Encontre, calviniste et sympathisant du Réveil, mais rallié à la Restauration, où il fut doyen de la faculté de théologie de Montauban avec une réputation justifiée d’orthodoxe et de traditionnaliste, avait été, au printemps 1794, un partisan sincère de Robespierre, de sa vertu et de ses lumières. » L’Eglise constitutionnelle peut être considérée comme une Eglise nationale analogue à l’Eglise anglicane. En revanche, c’est l’Eglise catholique que vise la célèbre formule de Voltaire, « écrasons l’infâme ! » et c’est avec elle que la Franc-maçonnerie avait un contentieux : le pape Clément XII l’avait condamnée en 1738 ; l’Église avait un mauvais souvenir des fraternités initiatiques masculines, qu’il s’agisse des Männerbünde germaniques, qu’elle avait réussi à canaliser dans la Chevalerie, ou de la communauté de Mithra qu’elle avait exterminée. Cette condamnation ne discréditait pas la Franc-maçonnerie aux yeux de tous les catholiques : les relations entre le roi de France et la papauté n’étaient pas toujours cordiales, et le clergé français se partageait entre ultramontains alignés sur Rome et gallicans contestataires. La présence d’ecclésiastiques dans les loges ne surprend donc pas.

La seconde objection semble en partie valable : la mort sur la guillotine du duc d’Orléans, devenu « Philippe Egalité », montre que les comploteurs n’avaient pas tout prévu : de tout temps, certains se sont plu à scier la branche sur laquelle ils étaient assis ; l’Université soixante-huitarde en est un bon exemple. On sait que la Révolution française a été principalement urbaine, et d’abord parisienne. Or c’est le duc d’Orléans qui, de son Palais-Royal, tenait Paris par ses agents et par la canaille qu’il soudoyait grâce à son immense fortune. Cette fortune explique aussi son engagement imprudent : il devinait que la démocratie parlementaire est un leurre qui masque la ploutocratie, et il espérait devenir le roi d’une République ploutocratique.

Une autre donnée essentielle est le noyautage d’une partie de l’armée pas la Franc-maçonnerie. Le 16 juillet 1789, le maréchal de Broglie fait savoir à Louis XVI qu’il ne pouvait pas compter sur elle : l’armée n’obéissait plus au roi, ni au maréchal, mais au duc d’Orléans, dont les fidèles tenaient les régiments parisiens.

L’idée de la fatalité de la Révolution considérée dans son ensemble est insoutenable. Le pays était puissant et prospère, et la crise financière n’était pas insoluble ; elle nécessitait seulement une réorganisation des finances publiques. Même après les désordres et les reculades des années 1789-1791, le cours des événements se serait probablement inversé si la fuite du roi avait réussi, et si le roi était revenu à Paris à la tête des régiments fidèles. Solé (1988 : 140) rappelle que six mille officiers ont déserté après l’échec de la tentative. La plupart des autres, francs-maçons compris, auraient probablement volé au secours de la victoire. Nous avons connu des exemples de tels retournements.

Une défaite dans la guerre contre l’Autriche pouvait elle aussi sauver la royauté, comme elle a réussi à ceux qui, cent cinquante ans plus tard, ont fait le même calcul en Allemagne ; aujourd’hui, leurs héritiers sont au pouvoir.

 

II De l’Ancien régime à la Révolution : continuités et ruptures

Plusieurs auteurs, parmi lesquels des contre-révolutionnaires comme Alexis de Tocqueville, ont insisté sur les continuités entre l’Ancien régime et la Révolution.

Mais avant d’opter entre continuité et rupture, il convient de rappeler en quoi la Révolution a consisté pour l’essentiel.

Au plan institutionnel, on relève cinq changements principaux :

1-      L’abolition des privilèges, c’est-à-dire des différents statuts particuliers, et d’abord de la répartition de la société en trois ordres, clergé, noblesse, tiers-état : 4 août 1789 ; la constitution civile du clergé en est une conséquence directe.

2-      La déclaration des droits de l’homme et du citoyen abolit d’autres privilèges, dont le droit d’aînesse : 26 août 1789.

3-       La réorganisation administrative du territoire ; suppression des provinces, création des départements : 22 décembre 1789.

4-      L’abolition des associations ouvrières et paysannes par la loi Le Chapelier : 14 juin 1791.

5-      L’abolition de la royauté : 21 septembre 1792.

On retiendra également trois effets majeurs :

1-      Une « épuration ethnique » par les massacres, les exécutions, l’émigration.

2-      Le génocide vendéen.

3-      Une suite de guerres : commencée en avril 1792, les guerres se prolongeront, avec de brèves interruptions, jusqu’en 1815.

Si la déclaration de guerre à l’Autriche, prolongeant l’une des constantes de la politique étrangère de la France, qui l’a même poussé à prendre le parti des Turcs, résultait, on l’a vu, de motivations opposées, les deux autres effets illustrent la complexité de la notion d’une « préparation » de la Révolution.

Il est certain que le génocide vendéen qui a été conçu et planifié par ses auteurs comme l’ont démontré les travaux de Reynald Secher, et notamment sa thèse (1986), n’était pas prévisible. Bien au contraire, une étude des cahiers de doléances de la Sarthe que cite Furet (1983 : 133) a montré que l’ouest du département qui se ralliera à la chouannerie était bien plus protestataire et revendicatif que le sud-est qui sera fidèle à la République. Solé (1988 : 108) cite un auteur qui généralise ce revirement : « Yves-Marie Bercé, historien des soulèvements des croquants au XVIIe siècle, a reconnu dans les paysans de 1789, malgré les changements intervenus dans leurs relations avec le seigneur ou l’Etat, les successeurs des troubles communautaires d’autrefois. Et il a noté les suites de cette violence anticitadine continue dans l’insurrection par laquelle les campagnes de l’Ouest, après avoir contribué à la chute de l’Ancien Régime, se dressèrent, en 1793, face à la Révolution. »

En revanche, ce que j’ai nommé « épuration ethnique » était un projet formulé explicitement par le chanoine Sieyès dès 1789 en réponse à ce qu’on a nommé la « réaction nobiliaire » et aux conceptions exposées antérieurement par le comte de Boulainvilliers (Furet 1983 : 14-15) : « Le Tiers ne doit jamais craindre de remonter dans les temps passés (…) Pourquoi ne renverrait-il pas dans les forêts de Franconie toutes ces familles qui conservent la folle prétention d’être issues de la race des conquérants et d’avoir succédé à leurs droits ? La nation, alors épurée, pourra se consoler, je pense, d’être réduite à ne plus se composer que des descendants des Gaulois et des Romains. » (Qu’est-ce que le Tiers-Etat ?, Paris, 1888, p. 32). Georges Lefebvre, que cite Solé (1988 : 75), estimait que Sieyès n’aurait jamais été révolutionnaire s’il avait obtenu un évêché. Son projet se fonde en partie sur l’envie, l’un des ressorts de la Révolution, de l’égalitarisme, et de la démocratie. Mais il reflète une idée typiquement française, celle des deux peuples. Alors que pour les Allemands il n’y a jamais eu qu’un seul peuple en Allemagne, les Français entretiennent le souvenir d’une succession bien réelle d’invasions qui ont conduit à une situation connue chez certains peuples africains, où des « gens de la terre » indigènes sont soumis à des chefferies immigrées. L’exemple le plus célèbre est celui du Rwanda, mais il en est aussi des exemples en Afrique occidentale. La France a eu ses Hutus et ses Tutsis, et cette conception, qui a survécu à la réalité sociologique, a pesé lourd dans les causes de la Révolution : l’impôt pesait uniquement sur le peuple vaincu qui le versait à ses vainqueurs sous la forme de droits féodaux et de plus en plus au cours des siècles au roi. Il en résultait à la fois un manque à gagner considérable pour le trésor public, puisque une partie des plus riches échappaient à l’impôt comme clercs ou comme nobles, mais aussi le sentiment d’une injustice et d’une vexation chez le contribuable. Or on sait que la cause première du processus révolutionnaire est la réunion des Etats Généraux causée elle-même par le déficit des finances royales. D’origine la noblesse est germanique, non seulement franque, mais burgonde, wisigothe et scandinave. De même, antérieurement, une couche dirigeante « gallo-romaine » s’était imposée en Gaule à la suite de la conquête romaine et du ralliement d’une part de l’élite. Les Gaulois, arrivée en vagues successives au cours du premier millénaire avant notre ère, étaient eux aussi une aristocratie conquérante au témoignage de César, La guerre des Gaules, VI, 13 « Dans l’ensemble de la Gaule, il y a deux classes d’hommes [druides et nobles] qui comptent et sont honorés ; les plébéiens sont considérés à peu près comme des esclaves. ». Et chez eux régnait déjà la discorde partisane, qui est elle aussi une constante nationale, ibid. 11,  « En Gaule, il y a des partis entre lesquels se divisent non seulement les tribus, les cantons et les villages, mais jusqu’aux familles. »

On en vient à se demander pourquoi la Révolution est venue si tard. En fait, ces clivages anciens se sont effacés progressivement à la fois par l’anoblissement et les mésalliances : selon la jolie formule reprise par la marquise de Sévigné, « il faut bien fumer ses terres ». Mais l’idée de la division en deux peuples a persisté. Elle a sûrement joué un rôle dans la chasse aux aristocrates et dans la hantise d’un « complot aristocratique ».

Considérée dans la longue durée, la royauté française représente une innovation venue avec les Germains. Aucune des trois composantes antérieures n’en est à l’origine. Rome et la plupart des peuples gaulois l’avaient abolie, et l’on ne sait si elle a existé chez les populations qui les ont précédés. Mais cette royauté germanique de type tribal, où le roi n’était que le premier entre égaux parmi les compagnons qui l’avaient élu au sein du clan royal, est devenue au cours du temps une monarchie administrative et absolue sur le modèle de l’Empire romain et de ceux du Moyen-Orient dont il s’est inspiré. Elle s’est constituée contre la noblesse féodale dont le dernier sursaut a été la Fronde. A ce titre, comme l’a soutenu Tocqueville, l’œuvre institutionnelle de la Révolution et de l’Empire prolonge celle de la monarchie absolue, administrative et centralisatrice.

La royauté germanique était aussi une royauté sacrale, et les lignées royales se rattachaient à l’un des grands dieux, en particulier à Wodan (Allard, à paraître). Aujourd’hui encore, la généalogie officielle de la reine d’Angleterre commence par Woden ; ce qui ne l’empêche pas d’être à la tête de l’Eglise anglicane, ni de faire circoncire le prince héritier par le grand rabbin (Faits & Documents 366, p. 8). Il devait en aller de même chez les Francs, mais on leur a prêté un ancêtre Francus descendant du Troyen Enée pour le rattacher aux Romains censés en descendre eux aussi. Certains ont prolongé l’ascendance de Francus jusqu’au roi David de la Bible pour l’apparenter à Jésus ; ce qui fait de nos rois des Juifs allemands.

Les trois ordres sont issus d’un bricolage analogue : la structure sociale germanique comportant trois classes, une noblesse à la fois guerrière et détentrice du savoir traditionnel, des paysans soldats et des serviteurs, était incompatible avec celle de la chrétienté qui se répartissait en clercs réguliers, clercs séculiers et laïcs. Comme le modèle ternaire leur était commun, une structure nouvelle a été imaginée à partir du modèle celtique comportant une classe sacerdotale, les druides, des nobles et des paysans.

On serait en peine de trouver une logique interne à ce système qui a néanmoins fonctionné pendant un millénaire grâce à ce que Charles Maurras a nommé l’empirisme organisateur de nos rois qui, selon une autre de ses formules, « en mille ans ont fait la France ». Les trois ordres qui, au départ, reposaient sur un compromis entre trois systèmes hétérogènes, s’étaient divisés au cours du temps : le haut clergé était issu de la noblesse, le bas clergé de la paysannerie ; la noblesse comptait un petit nombre de familles remontant aux croisades, mais la plupart étaient issues de l’anoblissement. A plan de la mentalité, Furet (1983 : 150) distingue parmi elles trois catégories : « La disparition de Louis XIV laisse face à face trois noblesses qui correspondent à trois attitudes en face de la modernisation de l’Etat : une noblesse « à la polonaise », c’est-à-dire hostile à l’Etat, nostalgique de son ancienne prédominance locale, prête à la reconquête d’un passé qu’elle idéalise. Une noblesse « à la prussienne », qui souhaite au contraire confisquer à son profit la modernisation de l’Etat, monopoliser les emplois et notamment les grades militaires, faire du service sa nouvelle raison d’être. Une noblesse « à l’anglaise » enfin, animatrice d’une monarchie constitutionnelle, aristocratie parlementaire des temps nouveaux. » Le Tiers-Etat était encore plus divers, puisqu’il regroupait les hommes de loi, ce que nous nommons la bourgeoisie, elle-même très diverse, et les couches inférieures de la population, essentiellement rurale, mais avec une composante urbaine. En marge de la société, il y avait un monde dont l’importance ne cessait de croître à la veille de la Révolution, celui des vagabonds et des brigands. Jointe à la famine de 1788, l’insécurité qu’ils causaient a contribué à déstabiliser le pouvoir royal. Une autre cause est la multiplication des libelles dénonçant des scandales réels ou imaginaires comme l’affaire du collier de la reine. En revanche, l’influence des Lumières a été limitée pour la simple raison que les livres des « philosophes » ont eu assez peu de lecteurs, et surtout des nobles.

 

III Conclusions

La préparation de la Révolution française, dans la mesure où elle a existé, ne constitue à aucun titre un exemple pour notre action et ce pour deux raisons principales :

Les initiateurs et les diffuseurs des idées nouvelles, « philosophes » et francs-maçons, opéraient sous anesthésie ; ce n’est pas notre cas. Ils n’étaient pas identifiés comme des ennemis du système en place, et, de fait, la plupart d’entre eux ne l’étaient pas, même s’ils souhaitaient le faire évoluer : leurs modèles étaient deux monarchies, l’Angleterre et la Prusse. De plus, ils allaient dans le sens du vent, et suivaient la pente ; ce qui n’est pas notre cas non plus.

Si la France était alors forte et prospère – nous en sommes loin – l’Ancien Régime était un système politique déliquescent : il se fondait sur une division de la population en trois ordres qui ne correspondaient plus à la réalité, sur l’absolutisme royal, contesté jusque dans les plus hautes sphères de la société et sur la religion catholique, attaquée par les « philosophes » et les francs-maçons. Doutant de lui-même, le pouvoir s’ouvrait largement aux idées nouvelles. Tel n’est plus le cas : la République gouverne mal, mais se défend bien, disait Maurras ; c’est encore plus vrai de la « République universelle » qui se met en place. Le pouvoir, aujourd’hui mondial, est « sûr de lui et dominateur ». Il tient l’opinion par les media, les media par l’argent : la sphère culturelle dans laquelle se mouvaient librement les « philosophes » est aujourd’hui verrouillée, au profit de la « pensée unique ». Il s’appuie sur la première armée du monde, celle des Etats-Unis, et ses troupes auxiliaires, dont l’armée française, qu’il serait vain de tenter d’infiltrer. Il n’a plus de concurrent : le socialisme mondialiste s’est effondré de lui-même ; le socialisme national est diabolisé après avoir été écrasé militairement, ce qui interdit de s’en réclamer, sous peine de tomber sous le coup d’un arsenal de lois liberticides. Des libelles dénonçant, via Face book et autres, les turpitudes de nos gouvernants ne sont pas d’une grande utilité, car nombre de ceux qui les lisent ne valent pas mieux qu’eux, et regrettent seulement de ne pas pouvoir en faire autant.

Mais à terme ce pouvoir est vulnérable comme l’a montré mon regretté collègue Hervé Coutau-Begarie dans son récent ouvrage sur la mondialisation, qui, en conclusion (2008 : 133), établit un parallèle « entre les premières années du XXIe siècle et les dernières années de l’Ancien Régime » : « En 1789, jamais la France n’avait été (et ne sera) aussi prospère, aussi puissante. Son commerce extérieur, sa marine même faisaient jeu égal avec leurs concurrents anglais, la population s’enrichissait et n’avait objectivement pas à se plaindre d’un pouvoir débonnaire, même sur le plan fiscal, la crise financière était sérieuse, mais pas insurmontable. Les facteurs d’une révolution étaient donc loin d’être réunis, malgré l’influence contestatrice des Lumières. Il a suffi de l’indécision et des ambitions de quelques acteurs, de l’enchaînement des événements pour que la tourmente révolutionnaire emporte en quelques mois la plus ancienne et la plus illustre monarchie européenne. Aujourd’hui, en 2008, nous sommes, comme en 1788, à la veille de bouleversements gigantesques (…) tôt ou tard, il faudra affronter la réalité. Quand ? L’erreur commune des prospectivistes est d’annoncer trop vite des « années décisives ». Ce n’est pas parce que tous les facteurs sont réunis que la crise doit nécessairement se produire à court terme. Le système est certes fragile, toujours à la merci d’un accident, mais, en même temps, il manifeste une étonnante capacité à encaisser les chocs : pétrolier, financier, terroriste … c’est ce que les spécialistes appellent aujourd’hui la résilience. Sa complexité accroît les risques de contagion mais, simultanément, engendre une redondance qui permet de pallier, au moins provisoirement, la défaillance d’un élément. L’hypothèse ici retenue est que cette résilience a toutes les chances de se manifester encore dans les deux décennies qui viennent. Mais ce ne sera qu’un sursis, avant une remise en cause radicale dont il est impossible, aujourd’hui, de dessiner les contours. »

Alors, que faire ? Ne pas chercher à séduire ni à infiltrer, comme l’ont fait « philosophes » et francs-maçons, ni briguer des mandats électifs : à supposer que nous gagnions les élections, elles seraient annulées « pour sauver la démocratie » comme elles l’ont été en Algérie et récemment en Egypte. Mais élaborer un modèle qui se révélera applicable quand le système mondialiste sera ébranlé ; former les cadres du futur mouvement révolutionnaire ; constituer une communauté qui en sera la base. En 1789, le chanoine Sieyès dénonçait la présence sur le sol français d’une population étrangère, non intégrée et jouissant d’avantages indus. Mythique alors, la situation est devenue réelle aujourd’hui : le livre récent de Michèle Tribalat dénonce l’échec du « modèle français » d’intégration. Il est probable qu’elle servira un jour de détonateur à notre révolution.

 

Jean Haudry

 

Bibliographie

 

 

ALLARD Jean-Paul, à paraître : La royauté wodanique des Germains, Nouvelle Ecole, 2013.

COUTAU-BEGARIE Hervé, 2008 : 2030, la fin de la mondialisation ? Perpignan : Tempora.

FURET François, 1983 : Penser la Révolution française, Paris : Gallimard.

SECHER Reynald, 1986 : Le géniocide franco-français : la Vendée-Vengé, thèse Paris IV, 1985, Paris : PUF.

SOLÉ Jacques, 1988 : La Révolution en questions, Paris : Seuil.

TRIBALAT Michèle, 2013 : Assimilation : la fin du modèle français, Paris : Editions du Toucan.

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