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Entretien avec Andrej Mitić, diplômé de philosophie, docteur en sciences juridiques, secrétaire international et conseiller du groupe parlementaire du Mouvement serbe Dveri.

Entretien réalisé par  notre confrère Alvaro Pena (https://elcorreodeespana.com/) et traduit par nos soins.

 

Le Mouvement serbe Dveri compte actuellement 6 députés à l’Assemblée nationale, soit 4% des voix, mais son parti était initialement une organisation chrétienne.

Andrej Mitić : Dveri (le sens même du mot Dveri, très spécifique culturellement et religieusement, étant un mot serbe médiéval, est la « porte » dans l’église orthodoxe serbe qui mène à l’autel) est né à l’aube de l’agression de l’OTAN sur la Serbie en 1999, comme un jeune mouvement conservateur, essayant de restaurer la tradition culturelle nationale serbe et les valeurs orthodoxes-chrétiennes qui ont été supprimées pendant des décennies par le régime communiste.

D’abord versé sur la métapolitique, le leader de Dveri, Bosko Obradovic, a fondé un petit cercle intellectuel à vocation nationale qui a rapidement commencé à gagner en influence sur le public serbe, en étant très prolifique sur le plan culturel : maison d’édition, magazine influent et présentations publiques d’idées très suivies, notamment par les jeunes. En 2012, Dveri a été, à la demande du public, transformé en un parti politique, qui est entré au Parlement en 2016 pour la première fois, et en ce moment pour la deuxième fois, sur la nouvelle plateforme politique nationale-conservatrice, avec un groupe parlementaire très fort et compétent.

 

Dveri se définit comme un parti conservateur national et j’ai vu que vous avez participé à la CPAC (Conservative Political Action Conference) qui s’est tenue en Hongrie en mai de cette année. Quels sont les référents du parti ?

Andrej Mitić : Compte tenu du contexte politique serbe, Dveri est une nouvelle force politique qui n’a jamais été au pouvoir jusqu’à présent. Nous nous opposons aux deux régimes : l’actuel d’Alexandar Vucic et l’ancien qui était radicalement pro-UE. Nous représentons la forme serbe de la troisième voie. Notre idéologie, sur le plan fondamental, est fortement liée à la souveraineté et à l’identité nationale, à la défense des valeurs orthodoxes-chrétiennes et de l’Église orthodoxe serbe, ainsi qu’à un programme pro-famille très fort, par lequel nous sommes très reconnaissables en Serbie comme notre politique emblématique. Mais Dveri est un parti très moderne, très actuel. Nous répondons à tous les défis de la situation actuelle : nous sommes fermement opposés aux LGBT+, à l’immigration et à toutes les formes destructives de transhumanisme ou de surveillance biopolitique. D’autre part, nous sommes le premier parti national-conservateur en Serbie qui a commencé à défendre notre nature et notre écologie, mais pas à la manière de l’agenda européen des Verts, mais sous une forme de traditionalisme et de localisme, reprenant le thème de la défense de la nature des mains des libéraux de gauche qui l’ont détourné. Dans le contexte européen, nous reconnaissons clairement les nouvelles forces conservatrices, qui partagent des vues similaires aux nôtres. Dans ce sens, nous apprécions ce que le parti espagnol « Vox » a accompli. Nous soutenons cette nouvelle configuration idéologique conservatrice paneuropéenne qui est chrétienne, pro-famille ou « illibérale » dans ce nouveau sens du terme.

 

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Vous avez mentionné le mot « illibéral », je comprends donc que Viktor Orbán est une référence pour votre parti. Le gouvernement hongrois entretient des relations étroites avec le gouvernement Vucic et est un fervent partisan de l’adhésion de la Serbie à l’UE.

Andrej Mitić : Oui, Viktor Orbán est l’une de nos références en matière de politiques familiales, dans sa lutte contre l’idéologie du genre et dans son modèle d’État. Sa relation avec le gouvernement serbe est complexe et s’explique par la présence d’une minorité hongroise en Serbie, une minorité dont les pleins droits sont respectés. Cependant, la politique intérieure de Vucic est à l’opposé de celle d’Orbán. Vucic essaie de se présenter comme « l'Orbán » serbe, mais malheureusement ce n’est pas vrai en raison de son programme néolibéral et culturel fort. C’est pourquoi nous essayons de souligner les différences entre les deux : Vucic est un libéral, Orbán est un conservateur.

 

Lundi dernier, plus de 50 000 personnes ont manifesté contre la parade de la Gay Pride à Belgrade. Dans quelle mesure tente-t-on d’appliquer l’idéologie du genre en Serbie et qui la promeut ?

Andrej Mitić : Oui, Dveri est le pionnier de la lutte contre le totalitarisme LGBT+ en Serbie. Dès le début, nous nous sommes opposés à cette structure hégémonique très puissante. En Serbie, elle nous occupe. Dans un geste chargé de symboles, Vucic a nommé une présidente du gouvernement ouvertement lesbienne et ces événements dits de « gay-pride » ont lieu régulièrement depuis que Vucic et son parti sont au pouvoir, depuis 2012. Du 12 au 18 septembre prochain, ils font un pas de plus, ils veulent faire « l'Europride » avec plus de 130 événements dans toute la Serbie pour promouvoir leur agenda homo, trans et que sais-je encore, avec le mariage gay comme revendication politique de l’Europride. Dveri a mené une campagne très difficile contre ce projet, qui s’est terminée par une manifestation populaire dans les rues de Belgrade (les Serbes considèrent Belgrade comme la ville de la « Mère de Dieu »). Plus de 85% des Serbes sont contre. Notre Église est contre. C’est la tyrannie totale d’une minorité extrémiste. Mais je pense que Dveri et le peuple serbe vont gagner et que l’Europride n’aura pas lieu à Belgrade. Comme l’a souligné notre président Obradovic à l’Assemblée nationale : « Personne ne peut être discriminé en raison de son orientation sexuelle, mais vous ne pouvez pas imposer vos valeurs à cette société ».

 

Fin juillet, la situation était très tendue à la frontière avec le Kosovo, en raison de la décision du gouvernement kosovar d’interdire l’utilisation des cartes d’identité et des plaques d’immatriculation serbes. Qu’est-ce qui se cache derrière toute cette affaire ?

Andrej Mitić : Il n’y a pas de « frontière » avec le Kosovo, seulement une ligne administrative imposée par l’UE et l’OTAN. 17 % de la Serbie vit sous occupation étrangère au Kosovo et Metochie (c’est le nom complet de la province méridionale serbe qui est occupée. Metohija signifie « la terre de l’église », qui représente presque la moitié du Kosovo, et c’est pour cette raison qu’ils interdisent ce nom). C’est le cœur de notre identité, notre terre sainte, avec environ 1 300 églises et monastères. Plus de 150 ont été détruits ou endommagés, plus de 10.000 icônes ont été volées ou endommagées, nos tombes, nos monuments. Les Serbes vivent dans l’apartheid sur leur propre terre, en Europe, au 21ème siècle, aux mains d’un groupe islamiste et mafieux extrémiste. C’est pourquoi le peuple serbe et le parti Dveri apprécient de tout cœur que l’Espagne n’ait pas reconnu l’indépendance du « Kosovo » (Kosovo est un mot serbe, soit dit en passant). Cela signifie beaucoup pour nous et permettez-moi de transmettre le message de gratitude du président Obradovic pour le peuple et l’État espagnols.

En ce moment, une forte pression est exercée sur la Serbie pour qu’elle reconnaisse par la force l’indépendance de notre territoire et qu’elle rompe notre Constitution. Les derniers événements ne sont qu’une demande amplifiée, un chantage. Nous devons dire que Vucic a fait beaucoup pour son indépendance, et c’est pourquoi nous nous opposons fortement à lui. Mais nous espérons que le temps du changement est venu, et que la Serbie obtiendra un nouveau consensus national pour défendre notre Kosovo et Metohija.

 

Le gouvernement kosovar a déclaré qu’il reportait la mesure à septembre. Que pourrait-il se passer si elle est mise en œuvre ?

Andrej Mitić : Il y a un risque élevé d’explosion de conflits, même avant le 1er septembre, et après. Les Albanais emmènent leurs forces armées dans le nord du Kosovo, qui est entièrement peuplé par les Serbes, et ils n’ont pas le droit de le faire, ils violent le droit international et la résolution 1244 du Conseil de sécurité de l’ONU. Ils construisent des nids de sniper, des fortifications, etc. Ils veulent occuper la partie nord qu’ils ne contrôlent pas. Malheureusement, la KFOR et l’OTAN ne réagissent pas, et permettent pratiquement ces activités illégales. Si la guerre commence, c’est entièrement leur responsabilité. La Serbie défendra son peuple, nous ne pouvons pas nous permettre plus de meurtres, de viols, de purification ethnique des Serbes et de destruction de nos églises et de notre patrimoine culturel qui existe depuis plus de 1000 ans.

 

Un autre point critique est la situation en Bosnie-Herzégovine. « La Bosnie a échoué » a déclaré Milorad Dodik, leader de la République Srpska. Cet échec pourrait-il déclencher un nouveau conflit dans cette région ?

Andrej Mitić : Comme vous l’avez peut-être remarqué, c’est une pression synchronisée, une agression régionale très complexe, qui veut que la République Srpska soit détruite et que la Bosnie-Herzégovine unitaire soit créée sous domination musulmane. Mais c’était exactement les raisons de la guerre dans les années 90. Pourquoi l’Europe tolère-t-elle et encourage-t-elle l’extrémisme musulman au Kosovo-Metohija et en Bosnie-Herzégovine ? C’est ce que se demandent les Serbes, l’un des plus anciens peuples européens et chrétiens, allié de l’Occident pendant les deux guerres mondiales. Nous sommes trahis par l’Occident. Nous espérons que l’unification de la Bosnie-Herzégovine s’arrêtera. A moins que la République Srpska ne doive être indépendante.

 

Source : Breizh-info.com - 26 août 2022.

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