L'Allemagne prive partiellement les étrangers européens (et les non européens) d'aides sociales
Le gouvernement allemand va instaurer une période de carence de cinq ans pendant laquelle les résidents européens qui ne travaillent pas ne pourront prétendre aux aides sociales.
Berlin veut couper court aux abus. Le gouvernement allemand a adopté mercredi un projet de loi restreignant fortement l'accès aux prestations sociales des immigrés en provenance de l'Union européenne, l'Allemagne, premier pays d'accueil de migrants intracommunautaires, voulant éviter de voir son système de protection sociale débordé.
Berlin avait élaboré ce projet de loi en avril, emboîtant le pas au Royaume-Uni, dont l'ex-Premier ministre David Cameron, alors en campagne contre le "Brexit", militait pour réduire les arrivées de travailleurs migrants intra-européens sur le sol britannique et avait obtenu l'accord de Bruxelles sur le sujet.
Rien n'est entré en oeuvre en Grande-Bretagne, car les Britanniques ont voté en juin en faveur d'une sortie de leur pays de l'Union européenne, rendant caduque l'accord avec Bruxelles.
"La règle est claire"
En Allemagne, première économie européenne, les choses ont en revanche suivi leur chemin. Selon le texte adopté mercredi, les ressortissants européens vivant dans le pays sans travailler n'auront plus droit aux aides sociales avant un séjour légal de cinq années dans le pays.
"La règle est claire: celui qui vit ici, travaille et paie des cotisations a aussi droit aux prestations de notre système social", a expliqué la ministre allemande du Travail Andrea Nahles après l'adoption de son projet de loi en conseil des ministres.
Mais pour celui "qui n'a encore jamais travaillé ici et est dépendant de l'aide financière publique pour vivre, un principe prévaut: les prestations de subsistance sont à demander dans le pays d'origine de chacun", a poursuivi la ministre sociale-démocrate. Cette loi doit encore être votée par le Parlement allemand.
L'Allemagne a été longtemps opposée à une telle mesure, jugée par certains discriminatoire au regard du principe européen de libre-circulation. Mais elle avait ensuite changé d'avis, quand le tribunal fédéral des affaires sociales avait statué fin 2015 que tout citoyen de l'UE, même sans travail, avait droit au bout de six mois à bénéficier des aides sociales.
Ce jugement avait suscité des inquiétudes dans les communes, qui financent l'aide sociale, et fait redouter que cela attire des citoyens de l'UE venant de pays au niveau de vie inférieur comme la Roumanie ou la Bulgarie.
Andrea Nahles avait alors proposé de changer la loi pour durcir les conditions d'octroi de ces aides. Il n'y a "pas d'Union sociale en Europe", avait encore noté la chancelière. "Tout citoyen roumain est le bienvenu. Mais s'il s'agit de percevoir des allocations sociales, qui ne reposent pas sur un travail (...) alors je suis d'avis qu'il est acceptable qu'il retourne dans son pays".
Le nombre de migrants en provenance des pays de l'UE a atteint un record l'an passé, avec plus de 685.000 arrivées, avait indiqué début juillet l'Office fédéral de la migration et des réfugiés (BAMF). Mais comme environ 303.000 avaient quitté le pays, le solde migratoire net s'était élevé à 382.000.
Le plus gros des troupes est arrivé des deux pays les plus pauvres de l'UE, Roumanie et Bulgarie, et de Pologne. En Allemagne vivent quelque 4,1 millions de ressortissants de l'Union européenne.