Free, le géant français des télécommunications détenu majoritairement par le milliardaire Xavier Niel, ne fait pas assez pour lutter contre les images d’abus pédosexuels sur ses serveurs, selon le Centre canadien de protection de l’enfance. L’association à but non lucratif a ainsi découvert après une enquête de plus de deux ans, que près de la moitié du matériel pédopornographique mondial était «hébergé physiquement» et téléchargé à l’aide des services de télécommunications de Free.
https://protectchildren.ca/pdfs/C3P_ProjectArachnidReport_fr.pdf
Le rapport de recherche, publié mercredi, a examiné la disponibilité de matériel pédopornographique et le rôle des fournisseurs de services électroniques dans sa diffusion, en révélant que Free était utilisé par ceux qui «hébergeaient et partageaient» environ 1,1 million d’images ou de fichiers vidéo pédopornographiques.
Dans le rapport intitulé «Project Arachnid», le Centre canadien de protection de l’enfance démontre l’utilisation massive du service d’hébergement de Free pour stocker anonymement des médias pédopornographiques en ligne, puis diffuser les liens de téléchargement direct sur des forums en ligne.
Rien n’indique pour le moment que Free ou le propriétaire majoritaire Xavier Niel, qui détient plus de 70% du groupe-mère Iliad, étaient au courant du problème. Xavier Niel et Iliad n’ont pas encore réagi publiquement à ce rapport.
Le project Arachnid ne prétend pas avoir pu faire une recherche exhaustive des fichiers pédocriminels sur internet. La recherche a utilisé des bots de repérage pour accéder aux contenus criminels sur le web et le darknet. Au cours de ces deux dernières années, le système de recherche et de détection a trouvé plus de 5,4 millions d’images. Reste encore 32,5 millions de médias suspects qui n’ont pas encore été évalués.
Le rapport désigne Free comme l’unique fournisseur d’accès internet responsable d’«un volume très important» d’images d’abus d’enfants et ne faisant pas assez pour s’attaquer au problème. Le rapport ajoute que 48% de tous les supports d’images d’abus d’enfants trouvés au cours des deux années d’enquête (images et vidéos) sont à la fois «liés» et physiquement hébergés sur le service d’hébergement de fichiers de Free.
Plus précisément, le rapport a révélé qu’en utilisant des forums de discussion basés sur Tor et des téléchargements directs plutôt que des pages web traditionnelles, «un nombre inconnu d’utilisateurs anonymes peuvent afficher les liens de téléchargement direct et les mots de passe requis pour déverrouiller et accéder au contenu». La disponibilité totale connue d’images ou de vidéos nuisibles et abusives accessibles via le service d’hébergement de Free a déclenché plus de 2,7 millions d’alertes selon le rapport.
Dans ses résultats du premier trimestre 2021, Free a indiqué que 3 millions de foyers français sont actuellement abonnés à son haut débit fibre Free. En mars de cette année, Iliad a affiché des revenus consolidés pour 2020 en hausse de 10,1% à 5,871 milliards d’euros.
Selon l’ONG canadienne, Free a une «responsabilité légale et morale» de s’assurer que ses services ne sont pas utilisés à mauvais escient, alors que les données du rapport montrent que «le service de Free est massivement utilisé pour le partage d’images et de fichiers pédocriminels».
La Commission européenne a introduit le règlement provisoire de e-Privacy en septembre 2020 obligeant les entreprises en ligne à détecter et à supprimer activement les abus sexuels sur des enfants en ligne.
Source : Le Monde Moderne - 10 juin 2021