LA POURRITURE
Le poisson pourrit d’abord par la tête, dit un proverbe chinois. Il en est ainsi pour le Système en place, car ce Système ploutocratique cosmopolite (c’est à dire le pouvoir de l’argent mondialiste, contrôlé par une oligarchie), dont nous voulons la mort, pourrit tout ce qu’il touche. La pourriture est donc, dans ce Système, omniprésente. Et d’abord au plus haut niveau.
L’affaire DSK en est une illustration spectaculaire, qui devrait dessiller les yeux des plus naïfs, si nos contemporains n’étaient pas lobotomisés par les media. On a vu en effet, dès que fut annoncée l’arrestation de Strauss-Kahn – et alors qu’on ne savait encore rien des faits qui lui sont reprochés – une orchestration de protestations, dénégations, lamentations. Ils sont venus, ils sont tous là : les Attali, Badinter, Fabius, Jack Lang, Dray, Kouchner, l’inévitable Bernard-Henri Lévy, Jean-François Kahn (le plus ignoble, parlant de « troussage de domestique », bel exemple d’ignominie bourgeoise et de mépris graveleux) et tous les autres membres de la tribu. Ce serait là la manifestation d’une « solidarité de classe » (Jacques Julliard dans Marianne, citant le si démocrate Lévy, disant de DSK : « Ce n’est pas un justiciable comme un autre »), le fait de « connivences élitaires, de la politique et de la presse » (Claude Imbert dans Le Point) de la part de gens qui manifestent « une empathie à sens unique » (Claire Chartier dans L’Express). Quant à Laurent Joffrin, il sermonne la « gauche caviar » : « Quelle faute politique que de laisser accréditer l’idée qu’une solidarité automatique lie les membres d’un parti, d’un milieu ou d’une classe » (Le nouvel Observateur). Jean-Pierre Chevènement, lui, évoque l’affaire Dreyfus… Dreyfus ? Tiens, tiens… C’est finalement Glucksmann qui lâche le morceau, sur RMC, en parlant d’une « solidarité apparemment naturelle et en fait religieuse ». C’est à dire communautaire. Car, toutes affaires cessantes, la communauté juive s’est mobilisée, d’un bloc, pour les siens, Dominique Strauss-Kahn et Anne Sinclair née Rosenberg. La solidarité communautaire, en effet, doit être immédiate et inconditionnelle.
Strauss-Kahn lui-même n’a jamais dit autre chose :« Mon engagement personnel en tant que Juif l’emporte sur toute autre considération » (Tribune juive, 2 mars 1990). Ou encore : « Je considère que tout Juif de la diaspora et de France doit apporter son aide à Israël, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle il est important que les Juifs prennent des responsabilités politiques. En somme, dans mes fonctions et dans ma vie de tous les jours, à travers l’ensemble de mes actions, j’essaie d’apporter ma modeste pierre à la construction d’Israël » (France Inter, 13 mai 2004).
Il est donc bien normal que son avocat à New York, Benjamin Brafman, soit un personnage important de la communauté juive, dont le frère Aaron est un rabbin fondamentaliste et qui a défendu Milton Balkany, rabbin orthodoxe de Brooklyn accusé d’extorsion de fonds, et Sammy Gravano, un des patrons du crime organisé. En France, l’avocat de DSK est Jean Veil, fils de Simone Veil …et avocat de Sarkozy. Car, bien sûr, gauche et droite sensées s’opposer (ça, c’est pour amuser le bon peuple…) copinent totalement au plus haut niveau, dès qu’on passe aux choses sérieuses.
D’où le constat inquiet de Laurent Joffrin dans Le nouvel Observateur , où il analyse lucidement le pouvoir de « la super-classe née de la mondialisation » et les conséquences qui en découlent : « Ses revenus souvent extravagants, son mode de vie, luxueux, ses valeurs, libérales et financières, l’ont changée en une nouvelle aristocratie (…) Un nouveau tiers-état ronge son frein, classes moyennes entraînées par le « descendeur social », classes populaires engluées dans la crise, cadres de second rang tenus hors des murs. Nous sommes en 1788 (…) Le système français n’est plus exactement démocratique. Il est oligarchique. Il est concentré entre les mains de quelques-uns, les happy few (…) une bourgeoisie avide et tape-à-l’œil, issue de l’héritage et du pantouflage, qui pense spontanément que ce qui est bon pour elle est bon pour le pays. Vingt ans de libéralisation et d’adaptation à la mondialisation ont consacré la domination d’une mince couche dirigeante, dont les principes ont été minés par la morale du gain individuel ». Conclusion : « Les puissants, désormais, dînent sur un volcan ».
Disons-nous, depuis tant d’années, autre chose ? A cette différence près que nous attendons le volcan comme signe de la guerre de libération de nos peuples.
Pierre VIAL