EUROPE NOTRE GRANDE PATRIE

 

Beaucoup n’en sont pas encore vraiment conscients, mais la vie quotidienne des Français va être, dans les prochains mois, profondément marquée par l'arrivée de l'euro. C'est un fait, objectif, et tempêter contre cet événement n'a pas grand sens, dans la mesure où toutes les tartarinades de ceux qui, à coups de tirades tricolores, prétendent "refuser l'euro", n'empêcheront pas celui-ci de s'installer. Être responsable, lorsqu'on prétend avoir un rôle public, c'est d'abord avoir le sens des réalités.

 

Bien sûr, l'arrivée de l'euro va créer beaucoup d'inconvénients : difficulté à s'adapter à une nouvelle évaluation de la valeur marchande des produits, augmentation des prix (sous le pieux prétexte de les arrondir au plus près d'un montant simple en euros, sans décimales ou le moins possible - voir l'augmentation du prix du quotidien gouvernemental officieux qu'est le journal Le Monde), difficulté à se représenter immédiatement la valeur libératoire d'un billet ou d'une pièce... Beaucoup vont s'y perdre - et pas seulement des personnes âgées, dont certaines, soit dit en passant, s'affolent moins qu'on ne veut bien le dire au sujet de cette affaire...

 

Mais, au-delà de ces vicissitudes de la vie quotidienne, les adversaires de l'euro mettent en avant une argumentation politique : à les en croire, l'euro signe la perte de souveraineté et donc d'indépendance des nations. Cette accusation fait, légitimement, vibrer une corde sensible, sentimentale : la France serait-elle donc menacée de disparaître?

 

Au-delà d'une exploitation démagogique, car électoraliste, il faut s'entendre sur le sens des mots. Les souverainistes affectent de croire que la France est aujourd'hui, encore, un pays souverain. Il n'en est rien (je laisse de côté, pour la commodité de l'exposé, la seule vraie question : de quelle France parle-t-on ? Celle qui est incarnée par une équipe de foot multicolore ?). Quand la politique militaire, par OTAN interposée, est décidée au Pentagone, quand la politique économique dépend des décisions de Wall Street, quand la politique d'immigration est soumise aux groupes de pression mondialistes, personne de sérieux ne peut soutenir que la France est souveraine, c'est-à-dire libre de décider de son destin. Tous les cocoricos n'y changeront rien.

 

La clé de la liberté, donc de la souveraineté, c'est la puissance. Or la France n'a pas, n'a plus - et depuis longtemps - la puissance. La puissance authentique celle qui permet de dire non et de choisir sa voie envers et contre tout - ne peut exister aujourd'hui qu'à l'échelle continentale.

 

Je ne fais pas de gaieté de cœur le constat de l'impuissance nationale. Mais la lucidité est la condition première du vrai courage. Pourquoi, pour des raisons politiciennes, cacher la vérité - une vérité qui frappe la France comme les autres pays d'Europe?

 

Mais alors, comme disait l'autre, que faire?

 

D'abord affirmer clairement notre conviction - disons même notre foi - européenne. L'euro est une monnaie mise en place par des gens que nous combattons ? C'est vrai. Ce sera la monnaie d'une Europe qui n'existe que sur le papier ? C'est encore vrai. D'une caricature d'Europe, donc, et qui trahit l'idéal européen ? C'est toujours vrai. Mais l'euro sert, à sa façon, le mythe européen. Le mythe au sens sorélien du terme : l'idée-force, la vision collective qui mobilise les enthousiasmes et les entraîne à l'action. Les apprentis-sorciers qui mettent en place l'euro sont peut-être bien dans le rôle du diable qui porte pierre : grâce à eux, l'idée d'Europe va prendre un peu plus de consistance pour tous ceux qui, ayant en main des euros, verront qu'il y a là, désormais, un point commun, très concret, à ceux qui vivent de Berlin à Lisbonne. Il ne s'agit pas, bien sûr, de s'illusionner sur la portée d'une telle situation. Elle n'a qu'un intérêt relatif. Mais cela va dans le bon sens : la nécessaire prise de conscience d'une identité européenne.

 

Pas d'ambiguïté, à cet égard. Rappelons donc, une fois de plus, notre conviction, alors que nombre de pays européens sont désormais confrontés à la marée de l'immigration extra-européenne :

1) La question de fond, pour tout individu, est celle de son appartenance, de son identité.

2) Or ce qui fonde mon identité ce n'est pas l'argent - ou la carte d'identité - que j'ai dans ma poche mais le sang que j'ai dans mes veines.

 
 
 

C'est dans cette optique que nous nous positionnons au sujet de l'euro. Ce qui nous importe, ce n'est certainement pas d'entrer dans le jeu du système marchand et exploiteur, productiviste et utilitariste que nous combattons de toutes nos forces et que nous continuerons à combattre, quoi qu'il arrive. Ce qui nous importe, c'est d’œuvrer à ce qu'un jour, proche ou lointain, vive, dans les cerveaux, les cœurs et les âmes notre grande patrie l'Europe. Qu'un jour les Européens aient la volonté de prendre leur destin en main. Ce jour-là tout deviendra possible.

Cette édition a été écrite avant le Il septembre. Par rapport aux événements de cette journée : gui sème le vent, récolte la tempête... Quant au danger islamiste, nous y reviendrons dans notre prochaine livraison.

 

Pierre VIAL

FaLang translation system by Faboba
 e
 
 
3 fonctions