Au milieu, le Massif.
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- Catégorie : Régions d'Europe
En étudiant la topographie de la France, les géographes remarquent que son relief s’ordonne autour d’une diagonale inclinée du Nord-Ouest vers le Sud-Est. Au-delà de cette ligne s’étend un ensemble de régions basses marquées par les Bassins aquitain et parisien ainsi que par la plaine du Nord qui se prolonge à travers toute l’Europe septentrionale jusqu’à l’Oural. En-deçà se dressent des montagnes plus ou moins élevées. Au milieu de cette diagonale géophysique s’impose le Massif Central.
D’une superficie de 80.000 km², ce vaste donjon hydrographique complexe au relief compact et contrasté est, avec le Puy de Sancy à 1885 m d’altitude, le plus élevé et le plus étendu des massifs anciens d’Europe occidentale. Vaste plan incliné vers le Couchant, fortement redressé à l’Est, anciennement marqué par un volcanisme désormais en sommeil, le Massif Central domine de plus de mille mètres le Sillon rhodanien et la plaine du Languedoc et s’abaisse vers le Nord-Ouest vers les plateaux du Limousin dont le plus célèbre reste en Corrèze celui des Millevaches, c’est-à-dire des mille sources d’eau. Son centre correspond à plusieurs systèmes volcaniques enchevêtrés. Le plus étendu correspond au département du Cantal. Son contour administratif évoque l’insigne de l’Ordre de la Toison d’Or. Par les effets du volcanisme, certains paysages frappent par leurs similitudes avec les hautes-terres de Mongolie : le Cézallier, la Margeride et l’Aubrac (où on trouve un nombre considérable de menhirs ou de pierres levées, preuves indéniables d’un habitat préhistorique).
Terres d’enracinement
Dans ces espaces de moyennes montagnes courent bien des récits ancestraux à la fois folkloriques et symboliques. Ce n’est pas un hasard si Alexandre Vialatte (1901 – 1971), chroniqueur au quotidien La Montagne et traducteur de Nietzsche, de Thomas Mann ou de Gottfried Benn, vante L’Auvergne absolue. François Mitterrand aimait à chaque Pentecôte gravir avec ses fidèles la roche de Solutré, un autre site à l’habitat fort ancien. Le président ex-Cagoulard de la République de 1981 à 1995 tenait le massif septentrional du Morvan, en particulier le Mont Beuvray, pour un haut-lieu de l’imaginaire gaulois. Le « pape des escargots » d’Henri Vincenot (1912 – 1985) rapporte bien des souvenirs celtiques tandis qu’un autre Bourguignon, Johannès Thomasset (1895 – 1973) exalte l’héritage burgonde, revient sur le « Grand Duché d’Occident » à la fin du Moyen Âge et prône l’alliance franco-allemande pour sauver l’Europe. Ce n’est pas un hasard si au début des années 1970, Jean-Claude Valla et Pierre Vial ont animé un éphémère bulletin intitulé Grande Bourgogne…
Une démocratie mal entendue, la ruine du peuple (Ernest Renan)
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- Catégorie : POLITIQUE
Dans cette vidéo, nous nous intéressons à un auteur fameux, plus souvent cité que lu de nos jours : Ernest Renan et son livre fondamental, "la Réforme intellectuelle et morale".
Ce livre, capital, fut écrit à la suite de la défaite française de 1870 et l'auteur s'interroge sur les causes de la faiblesse de la France. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, ce texte, loin d'être dépassé, est plus actuel que jamais : les mêmes causes engendrent les mêmes effets.
Le vicomte de Bonald et le catastrophique modèle britannique
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- Catégorie : HISTOIRE
Nous sommes dominés par le monde anglo-américain depuis deux siècles, et sommes à la veille de la troisième guerre mondiale voulue par ses élites folles. L’Angleterre veut nous précipiter dans une guerre avec la Russie tout en montrant l’exemple sur le plan orwellien, vaccinal et bien sûr malthusien. Victor Hugo a décrit l’horreur féodale britannique dans l’Homme qui rit (j’y reviendrai). Mais le premier penseur français à avoir radicalement déconstruit la crapulerie britannique fut le vicomte de Bonald.
J’ai glané ces citations (voyez archive.org), dans les dix-sept volumes de Bonald (1754-1838), cet unique défenseur de la Tradition (j’allais écrire bon guénonien : hyperboréenne) française. Je les distribue à mes lecteurs au petit bonheur.
A l’époque de Macron et de l’oligarchie mondialiste, ce rappel :
« Ceci nous ramène à la constitution de l'Angleterre, où il n'y a pas de corps de noblesse destinée à servir le pouvoir, mais un patriciat destiné à l'exercer. »
J’ai souvent cité ce surprenant passage des Mémoires d’Outre-tombe de Chateaubriand (3 L32 Chapitre 2) :
« Ainsi ces Anglais qui vivent à l'abri dans leur île, vont porter les révolutions chez les autres ; vous les trouvez mêlés dans les quatre parties du monde à des querelles qui ne les regardent pas : pour vendre une pièce de calicot, peu leur importe de plonger une nation dans toutes les calamités. »
On comprend enfin que le commerce américain ne prépare pas la paix mais la guerre. Bonald se montre ici d’accord avec les marxistes (comme souvent) en rappelant que l’Angleterre est toujours en guerre :
« L'Angleterre est en système habituel, je dirais presque naturel de guerre, ou du moins d'opposition, avec tous les peuples du monde, et le repos ne peut être pour elle qu'un état forcé et accidentel. Cet état d'opposition est totalement indépendant des dispositions personnelles et du caractère particulier de ceux qui la gouvernent : il tient à sa position insulaire, à sa constitution populaire, qui donne à sa politique un caractère inquiet et agresseur, et qui la place constamment dans le système d'accroissement, et jamais dans celui de repos et de stabilité; en sorte que, comme elle est continuellement agitée au dedans, on peut dire qu'elle entretient au dehors et dans le monde politique le mouvement perpétuel. »
Sur le même inquiétant sujet Bonald ajoute, non sans quelque réminiscence de Thucydide (voyez livre premier, CXL et suivantes):
« Cette disposition à toujours s'étendre, et cette facilité à attaquer partout, ont, dans tous les temps, donné aux peuples dominateurs des mers, comme l'observe Montesquieu, un tour particulier d'esprit impérieux et arrogant, dont les Anglais ne sont pas exempts; en sorte que le caractère particulier de l'Anglais est la soif démesurée d'acquérir et la fureur de la cupidité, parce que le système politique de l'Angleterre est une tendance sans mesure à l'accroissement. »
Sanctions économiques et commerciales ? L’Angleterre les applique déjà :
« L'Angleterre n'attaque pas le territoire de tous les peuples; mais elle en attaque le commerce ou par la force ou par la ruse…
Au reste, les peuples commerçants ont tous plus ou moins de cet esprit envahisseur, comme tous les hommes qui font le commerce ont tous le désir de s'enrichir les uns aux dépens des autres. »
Bonald offre une belle comparaison psychologique entre les peuples agricoles qui ont disparu et les commerçants :
« Et il est peut-être vrai de dire que le commerce, qui peuple les cités, rapproche les hommes sans les réunir, et que l'agriculture, qui les isole dans les campagnes, les réunit sans les rapprocher. »
Et de conclure cruellement sur le destin colonial anglo-saxon :
« Ainsi le vol et l'intempérance, vices particuliers aux sauvages, sont très-communs chez les Anglais. Le peuple y est féroce jusque dans ses jeux; les voyageurs l'accusent d'un penchant extrême à la superstition, autres caractères des peuples sauvages… »
Si « le credo a été remplacé par le crédit » (Marx toujours), la superstition aujourd’hui c’est le fanatisme médiatique (voyez Macluhan encore et la galaxie Gutenberg). Ces peuples soi-disant libres sont toujours les plus conditionnés par la presse et leurs médias. « L’ineptie qui se fait respecter partout, il n’est plus permis d’en rire », écrit un Guy Debord toujours hautement inspiré.
L’Angleterre, rappelle Bonald est aussi philosophe (« quelle race peu philosophique que ces Anglais », écrira Nietzsche dans Jenseits, §252), et sa philosophie a créé le bourgeois moderne, « le dernier homme », comme l’a bien vu Fukuyama (The end of history, chapter XVII) :
« On pourrait, avec plus de raison, représenter l'Angleterre exportant dans les autres États le philosophisme, dissolvant universel qu'elle nous a envoyé un peu brut à la vérité, mais que nous avons raffiné en France avec un si déplorable succès. »
Hélas, l’Angleterre est une puissance mimétique, disait René Girard, et Bonald avant lui :
« Les autres nations, et particulièrement la France, n'ont pas fait assez d'attention à cet engouement général que les Anglais ont eu l'art d'inspirer pour leurs mœurs, leurs usages, leur littérature, leur constitution. »
Bonald voit poindre le continent américain, qui sauvera les miséreux de Dickens d’une organisation sociale scandaleuse (combien de famines, de pendaisons, de déportations ?) :
« Dans l’état où se trouvent aujourd'hui les deux mondes, il en faudrait un troisième où pussent se réfugier tous les malheureux et tous les mécontents. L'Amérique, dans l'autre siècle, sauva peut-être l'Angleterre d'un bouleversement total. »
Bonald explique même l’excentricité britannique :
« Après les changements religieux et politiques arrivés en Angleterre sous Henri VIII, on remarqua dans cette île une prodigieuse quantité de fous, et il y a encore plus d'hommes singuliers que partout ailleurs. »
Les individus et même le pays peuvent rester sympathiques (William Morris, Chesterton, Tolkien, mes témoins de mariage…) :
« Heureusement pour l'Angleterre, elle a conservé de vieux sentiments, avec ou plutôt malgré ses institutions. »
Surtout, l’Angleterre ne défend que l’argent :
« Dans ce gouvernement, il est, dans les temps ordinaires, plus aisé au particulier de constituer en prison son débiteur, qu'au roi de faire arrêter un séditieux, et il est moins dangereux pour sa liberté personnelle d'ourdir une conspiration que d'endosser une lettre de change; c'est ce qu'on appelle la liberté publique. »
Il faut dire que le roi là-bas n’est pas un monarque.
Le modèle social (Bonald écrit avant Dickens, il est contemporain du grand penseur incompris Godwin) reste ignominieux et humainement destructeur :
« Les fabriques et les manufactures qui entassent dans des lieux chauds et humides des enfants des deux sexes, altèrent les formes du corps et dépravent les âmes. La famille y gagne de l'argent, des infirmités et des vices ; et l'État une population qui vit dans les cabarets et meurt dans les hôpitaux. »
Le commerce n’enrichit pas forcément les nations, rappelle notre grand esprit :
« Le commerce fait la prospérité des États; on le dit : mais avant tout il veut la sienne; et toutes les usurpations y trouvent des fournisseurs, la contrebande des assureurs, et les finances des agioteurs, qui font hausser ou baisser les fonds publics dans leur intérêt, et jamais dans celui de l'État. »
La dépravation sociale, morale, mentale, y est totale (relisez Defoe, l’affreux de Quincey ou découvrez Hogarth sous un autre angle –le rake’s progress) :
« Dans les petites villes, les spectacles et les cafés, prodigieusement multipliés, et les cabarets dans les campagnes, dépravent et ruinent toutes les classes de la société, et troublent la paix et le bonheur des familles. Les tavernes et les liqueurs fortes sont, en Angleterre, une cause féconde de mendicité. »
Déficit commercial ? Perversion de modèle économique ? Dépendance aux importations ? Lisez Bonald sur l’Angleterre :
« Telle nation qu'on regarde comme la plus riche, l'Angleterre, par exemple, est, comme nation, réellement plus pauvre que bien d'autres, parce qu'elle est, comme nation, moins indépendante, et qu'elle a, plus que les nations continentales, besoin des autres peuples et du commerce qu'elle fait avec eux, sur eux, ou contre eux, pour subsister telle qu'elle est. »
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Pourquoi les Migrants (sic) ne vont-ils pas dans les pays arabes riches ?
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- Catégorie : IMMIGRATION
Il y a quelques jours, Ahmed Aboul Gheit, le président de la très officielle Ligue arabe (1), était interviewé sur la chaîne chinoise Tian Wei. La journaliste posant au diplomate la question iconoclaste qui suit : « Pourquoi les pays arabes n’accueillent-il pas ces migrants ? ». Réponses pour le moins bluffantes. N’est-il pas plus que temps de réactiver la bonne règle de réciprocité qui (normalement) prévaut dans les relations internationales, dont la Ligue arabe & le Conseil de coopération des États arabes du Golfe (CCEAG) (2).
Tian Wei. Pourquoi ces migrants ne vont-ils pas chez vous ?
S.E Ahmed Aboul Gheit. Parce que nous ne sommes pas une destination pour les migrants (destination country). Mais nous sommes ouverts.
Tian Wei. Alors expliquez-nous, je vous prie, pourquoi ils ne veulent pas aller dans vos pays, tous ces migrants & réfugiés ?
S.E Ahmed Aboul Gheit. C’est très simple : nous ne faisons pas d’exceptions avec ces gens. Lorsqu’ils franchissent nos frontières et demandent l’asile, la prochaine étape est qu’ils signent un document qui les oblige à respecter tous les droits et règles de nos pays, et qui précise qu’en cas de violation de cet accord, ils seront condamnés, avec une procédure accélérée, aux mêmes peines que la population locale (ce qui peut aller dans les cas graves jusqu’à la peine capitale) et seront renvoyés dans leur pays de provenance aussitôt leur peine terminée.
Nous leur faisons signer également un accord stipulant que l’aide financière qu’ils touchent pour leur intégration dans nos pays doit être intégralement remboursée dans les deux ans, faute de quoi nous saisissons tous leurs biens et ils seront expulsés définitivement de nos pays.
Si quelqu’un ne sait pas lire et écrire, il apposera au document son empreinte digitale. Il n’y a aucune excuse du genre : « je ne connaissais pas la culture locale », ce qui serait d’ailleurs peu crédible dans le cas des personnes arabes, et ce genre d’excuse n’est pas pris en compte.
Tous ces arguments que je viens vous citer sont arrivés aux oreilles de chaque migrant (sic), c’est pourquoi ils ne veulent pas demander d’asile dans les pays arabes.
Tian Wei. Ne trouvez-vous pas radicale cette façon de procéder avec eux, M. Gheit ? L’Europe occidentale est bien plus souple avec eux !
S.E Ahmed Aboul Gheit. Absolument pas ! Parce que si je devais chercher refuge et demander de l’aide un jour dans un autre pays, je trouverais un devoir absolu d’obéir à la lettre aux lois de ce pays, et que sinon je sois expulsable par n’importe quel moyen.
L’Europe de l’Ouest finira par se réveiller et regarder la situation telle qu’elle est. Il faudrait que les dirigeants de l’Europe de l’Ouest soient envoyés à Doha au Qatar ou encore en Arabie Séoudite pour demander l’asile dans ces pays pour qu’ils expérimentent « sur leur propre peau » ce que je viens de dire. Là, ils se réveilleraient !
Jacques Borde (2018)
Notes :
(1) Ou plutôt la Jāmiʻah ad-Duwal al-ʻArabīyah (Ligue des États arabes).
(2) Il regroupe six pétromonarchies du Golfe Persique : Arabie Séoudite, Bahreïn, Émirats arabes unis (ÉAU), Koweït, Oman et Qatar.
© Tian Wei. Traduction Cenator pour LesObservateurs.ch./Via Voxnr-les lansquenets.
Entretien avec Gabriele Adinolfi (janvier 2021)
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- Catégorie : POLITIQUE
Pour notre premier entretien, nous avons eu le plaisir de rencontrer Gabriele Adinolfi, bien connu des militants Français conscients, c'est un militant nationaliste-révolutionnaire qui a une vision singulière sur les événements actuels et une pensée qui, pour nous, est salutaire sur bien des points.
Dans cet entretien, nous avons parlé de la situation actuelle aux Etats-Unis, mais aussi de la question de l'UE et de l'Europe, de l'actualité ou non de la figure de l'Anarque, chère à Ernst Jünger, mais aussi de son concept « d'évoléninisme » et bien plus encore...
Nous tenons encore à remercier Gabriele Adinolfi pour sa disponibilité et sa sympathie.
Un Iran plus souverain va favoriser son rapprochement avec la Russie et la Chine
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- Catégorie : GEOPOLITIQUE
Lors de sa première conférence de presse en tant que président élu avec 62% des voix, Ebrahim Raeisi, face à une forêt de microphones, a sorti le grand jeu et n’a laissé aucune place à l’imagination.
Sur le JCPOA, ou accord sur le nucléaire iranien, le dossier qui obsède complètement l’Occident, Raeisi a été clair :
- les États-Unis doivent immédiatement revenir au JCPOA que Washington a unilatéralement violé, et lever toutes les sanctions.
- Les négociations autour du JCPOA à Vienne vont se poursuivre, mais l’avenir de l’Iran ne sera pas conditionné par leur résultat.
- Le programme iranien de missiles balistiques n’est absolument pas négociable dans le cadre du JCPOA et ne sera pas freiné.
À la question d’un journaliste russe qui lui demandait s’il rencontrerait le président Biden si un accord était conclu à Vienne et si toutes les sanctions étaient levées – un « si » majeur -, M. Raeisi a répondu par un « non » catégorique.
Il est essentiel de souligner que Raeisi est en principe favorable au rétablissement du JCPOA tel qu’il a été signé en 2015, conformément aux directives de l’Ayatollah Khamenei. Mais si la mascarade de Vienne se poursuit indéfiniment et que les Américains continuent à insister pour réécrire l’accord en voulant y inclure d’autres domaines de la sécurité nationale iranienne, il s’agit d’une ligne rouge définitive.
Raeisi a reconnu les immenses défis internes auxquels il est confronté, à savoir remettre l’économie iranienne sur les rails, se débarrasser de la dynamique néolibérale de l’équipe sortante et lutter contre la corruption généralisée. Le fait que le taux de participation aux élections n’ait été que de 48,7 %, contre une moyenne de 70 % lors des trois précédentes élections présidentielles, montre que la tâche sera difficile.
Mohammad Marandi.
Pourtant, en matière de politique étrangère, la voie que suivra l’Iran est sans équivoque : elle est centrée sur la stratégie du « regard vers l’Est », qui implique une coopération plus étroite avec la Chine et la Russie, l’Iran devenant un carrefour essentiel de l’intégration eurasienne ou, selon la vision russe, du partenariat de la Grande Eurasie.
Comme me l’a expliqué le professeur Mohammad Marandi de l’université de Téhéran, « il y aura une orientation vers l’est et vers le Sud. L’Iran améliorera ses relations avec la Chine et la Russie, également en raison de la pression et des sanctions américaines. Le président élu Raeisi sera mieux placé pour renforcer ces liens que l’administration sortante. »
Marandi a ajouté : « L’Iran ne portera pas intentionnellement atteinte à l’accord nucléaire si les Américains – et les Européens – s’orientent vers leur complète mise en œuvre. Les Iraniens rendront la pareille. Les voisins et les pays de la région seront également une priorité. L’Iran n’attendra plus l’Occident ».
Marandi a également fait une distinction assez nuancée en indiquant que la situation actuelle était due à « une erreur majeure » de l’équipe Rouhani, mais « pas la faute du Dr Zarif ou du ministère des affaires étrangères, mais du gouvernement dans son ensemble. » Cela implique que l’administration Rouhani a placé tous ses paris sur le JCPOA et n’était absolument pas préparée à l’offensive de « pression maximale » de Trump, qui a de facto décimé la classe moyenne iranienne aux idées réformistes.
En un mot : à l’ère Raeisi, exit la « patience stratégique » face aux États-Unis. Place à la « dissuasion active ».
Un carrefour essentiel de la BRI et de l’EAEU
Ceux qui contrôlent le récit de la « communauté internationale » ont répondu à Raeisi par des épithètes proverbialement dérisoires et/ou diaboliques : fidèle à la « machine répressive » de la République islamique, « partisan de la ligne dure », violeur des droits de l’homme, bourreau de masse, fanatique anti-occidental, ou simplement « tueur ». Amnesty International a même demandé qu’il fasse l’objet d’une enquête en tant qu’auteur de crimes contre l’humanité.
Les faits sont plus prosaïques. Raeisi, né à Mashhad, est titulaire d’un doctorat en jurisprudence et en principes fondamentaux de la loi islamique, ainsi que d’un autre diplôme de jurisprudence obtenu au séminaire de Qom. Il a notamment été membre de l’Assemblée des experts et dirigeant de la branche judiciaire.
Il n’a peut-être pas été exposé au mode de vie occidental, mais il n’est pas « anti-occidental », car il estime que l’Iran doit interagir avec toutes les nations. Pourtant, la politique étrangère doit suivre les directives de Khamenei, qui sont très claires. Si l’on ne comprend pas la vision du monde de Khamenei, toute analyse des complexités iraniennes est un sport inutile. Pour connaître le contexte essentiel, veuillez vous reporter à mon livre électronique Persian Miniatures publié par Asia Times.
Tout commence avec le concept fondateur d’une République islamique fondée par l’Ayatollah Khomeini, qui a été influencé par la République de Platon ainsi que par la Cité vertueuse du philosophe politique musulman al-Farabi (également influencé par Platon).
À l’occasion du 40e anniversaire de la révolution islamique, Khamenei a actualisé sa conception de la politique étrangère, dans le cadre d’une carte claire pour l’avenir. Il faut absolument lire cet ouvrage pour comprendre ce qu’est l’Iran. Une excellente analyse de Mansoureh Tajik souligne la manière dont le système s’efforce d’atteindre l’équilibre et la justice. Khamenei ne pouvait pas être plus direct lorsqu’il écrit,
« Aujourd’hui, le défi pour les Etats-Unis est la présence de l’Iran aux frontières qui entourent le régime sioniste et le démantèlement de l’influence et de la présence illégitime de l’Amérique en Asie occidentale, la défense par la République islamique des combattants palestiniens au cœur des territoires occupés, et la défense du drapeau sacré du Hezbollah et de la Résistance dans toute la région. Si à l’époque, le problème de l’Occident était d’empêcher l’Iran d’acheter des armes, même les plus primitives, pour sa défense, aujourd’hui, son défi est d’empêcher les armes, les équipements militaires et les drones iraniens d’atteindre le Hezbollah et la Résistance partout dans la région. Si, à l’époque, l’Amérique s’imaginait pouvoir vaincre le système islamique et la nation iranienne avec l’aide de quelques traîtres iraniens vendus, aujourd’hui, elle se retrouve à avoir besoin d’une large coalition de dizaines de gouvernements hostiles, mais impuissants, pour combattre l’Iran. Et elle échoue. »
En termes de politique des grandes puissances, la politique iranienne de « regard vers l’Est » a été conçue par Khamenei – qui a pleinement approuvé le partenariat stratégique global Iran-Chine, d’une valeur de 400 milliards de dollars, qui est directement lié à l’initiative « Route de la soie », et qui soutient également l’adhésion de l’Iran à l’Union économique eurasiatique (UEEA) dirigée par la Russie.
C’est donc l’Iran, en tant que plaque tournante de la connectivité eurasienne, qui va façonner elle-même son avenir géopolitique et géoéconomique. Et non l’Occident, comme l’a souligné Marandi.
La Chine investira dans le secteur bancaire iranien, les télécommunications, les ports, les chemins de fer, la santé publique et les technologies de l’information, sans oublier de conclure des accords bilatéraux en matière de développement d’armes et de partage de renseignements.
Sur le front russe, l’impulsion viendra du développement du corridor international de transport Nord-Sud (INSTC), qui entre directement en concurrence avec un corridor terrestre Est-Ouest qui peut être frappé à tout moment par des sanctions américaines extraterritoriales.
L’Iran a déjà conclu un accord de libre-échange provisoire avec l’UEEA, actif depuis octobre 2019. Un accord complet – avec l’Iran comme membre à part entière – pourrait être conclu dans les premiers mois de l’ère Raeisi, avec des conséquences importantes pour le commerce du Caucase du Sud à l’Asie du Sud-Ouest au sens large, voire à l’Asie du Sud-Est : Le Viêt Nam et Singapour disposent déjà de zones de libre-échange avec l’EAEU.
La rhétorique américaine sur l’« isolement » de l’Iran ne trompe personne en Asie du Sud-Ouest – comme l’atteste le développement de l’interaction avec la Chine et la Russie. Ajoutez à cela la perception de Moscou que « l’humeur est à approfondir le dialogue et à développer les contacts dans le domaine de la défense ».
Voilà donc à quoi mène l’ère Raeisi : une union plus solide entre le chiisme iranien, le socialisme aux caractéristiques chinoises et le partenariat de la Grande Eurasie. Et ce n’est pas un mal que la technologie militaire russe de pointe surveille tranquillement l’évolution de cet échiquier.
Gaston Pardo
Traduit par Wayan, relu par Hervé pour le Saker Francophone
Les Chemins Ne Mènent Plus À Rome I Zone Libre
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- Catégorie : HISTOIRE
Nous vivons une rupture civilisationnelle qui arrache l'Europe de ses racines gréco-romaines.
Robert Steuckers, intellectuel européen polyglotte, décrit cette rupture et ses causes, pour défendre la tradition impériale européenne qu'incarnèrent au fil des siècles, Charlemagne, Charles Quint et Napoléon.
Nudge et coronavirus : la manipulation préférée de Macron ?
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- Catégorie : Manipulation mentale
Nudge un joli mot pour décrire une manipulation perverse.
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