La piste terroriste a d'ores et déjà été écartée et celle de l'agression sexuelle est privilégiée. Une femme a été attaquée au couteau, ce dimanche matin, allée de la Plaine à L'Haÿ-les-Roses. Rapidement sur place, les policiers du Kremlin-Bicêtre sont parvenus à neutraliser le suspect.
LES MYSTÈRES DANS LA GRECE ANTIQUE : Première partie
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- Catégorie : Mythologie Grecque
Les Grecs désignaient sous le nom de Mystères, du mot muein; fermer la bouche, resté muet, certaines cérémonies religieuses qui s'accomplissaient dans la nuit, et en silence. Un mystère n'était pas, pour eux un dogme incompréhensible pour la raison et imposé par l'autorité ou accepté par la foi. Cette idée est tout à fait étrangère au polythéisme. C'était seulement un secret qu'on ne devait pas révéler, aporrhton, une chose ineffable. On appelait teleth accomplissement des cérémonies qui composaient les mystères. Ce mot, qui signifie aussi perfectionnement, exprimait à la fois la consécration des signes visibles du mystère et la purification de ceux qui y participaient. C'est ce que nous traduisons par Initiation. Le nom d'Orgie était souvent confondu avec celui de mystères, mais en général, on l'appliquait surtout aux fêtes Dionysiaques, soit parce qu'elles se célébraient dans les champs, en orgasin, soit à cause de leur caractère enthousiaste et extatique, orgh. On finit par donner le nom d'orgies, à toutes les fêtes bruyantes et désordonnées. Le nom de mystères, réservé d'abord aux fêtes des déesses de l'agriculture, fut étendu de bonne heure aux fêtes de Dionysos, par suite de l'association des trois grandes divinités de la production et de la mort. Le culte de Dionysos sert de passage entre l'ancienne religion hellénique et les religions barbares qui l'altérèrent progressivement. Tous les dogmes nouveaux empruntés à la Phrygie, à la Perse, à la Syrie et à l'Égypte, s'introduisirent en Grèce sous la forme de mystères et on finit par chercher hors de la Grèce et surtout en Égypte, l'origine des initiations, comme on y avait cherché celle de toutes les autres formes de la religion grecque.
On peut expliquer le caractère secret des mystères par des raisons théologiques qui tiennent aux rapports intimes du dogme et du culte dans l'Antiquité. Toutes les fois que l'homme cherche à traduire sa pensée, soit par des gestes, soit par des mots, soit par des formes plastiques, il faut que le signe qu'il emploie soit la représentation aussi exacte que possible de la chose signifiée. Au début de toutes les langues on trouve l'harmonie imitative dans les religions, que j'ai souvent comparées à des langues. Les cérémonies extérieures sont toujours l'expression sensible des croyances populaires et comme il faut un mot pour rendre, chaque idée, à chaque symbole religieux correspond une forme particulière du culte. Plus un peuple a d'idées, plus sa langue est riche. Le polythéisme est la synthèse la plus large de toutes les idées religieuses, sa langue religieuse doit donc être la plus riche et la plus variée. Chacune de ses conceptions a une expression propre, une cérémonie spéciale qui en est le signe extérieur.
Les dieux du ciel sont invoqués à ciel ouvert. Leur culte est public parce que leur action est visible au grand jour, leurs temples sont ouverts par en haut et on ne les prend pas à témoin dans un endroit fermé. Le dieu de la lumière et de l'harmonie, le dieu prophète, n'a pas de mystères. Son temple est toujours ouvert et chacun peut l'interroger. Le dieu des transitions et des échanges, le dieu commun à tous, n'a pas de temple mais sa statue est dans tous les carrefours, et son culte est mêlé à celui de tous les autres dieux, comme celui de la vierge Hestia, la pierre du foyer. La déesse politique de la civilisation, la vierge active, au génie pratique, règne sur les acropoles, d'où elle protège les cités. Le dompteur des monstres, le héros divin qui a conquis le ciel par son courage est honoré par les luttes viriles et les jeux sacrés. Mais les déesses souterraines, dont l'action est cachée, ne peuvent être invoquées que dans un endroit fermé, megaron. Elles font germer les plantes et les font rentrer sous terre, elles tiennent les clefs de la vie et de la mort, et comme elles gardent leur secret dans un silence éternel, les cérémonies symboliques qui représentent leur action mystérieuse doivent s'envelopper aussi d'ombre et de silence.
Depuis que Prométhée a ravi le feu du ciel, les dieux ont caché les sources de la vie:
« L'homme est devenu semblable à l'un de nous, disent les Elohim de Chaldée, prenons garde qu'il ne mange de l'arbre de vie et qu'il ne meure point. »
La vie nous est prêtée mais en deçà comme au delà règne la nuit impénétrable. Les passages sont gardés, la naissance et la mort sont le secret des dieux. Il y a certainement quelque chose de sacré dans les contradictions qui planent autour des deux portes de la vie, on se découvre devant un cercueil et on fait le contact d'un cadavre, mélange de respect et de dégoût, représenté par le Styx, redoutable témoin des serments des dieux. Si la mort est enveloppée d'une horreur mystérieuse, l'acte non moins mystérieux de la génération se couvre chez tous les peuples des voiles instinctifs de la pudeur. Pourquoi ces rougeurs involontaires s'il y a là une loi divine? Elle est la base de la famille, le chaîne sainte de la communion des êtres et on n'ose pas en parler. C'est que la pudeur est la couronne des chastes déesses, l'auréole de la vierge mère. Il faut laisser à chaque dieu son empire : la lumière souillerait ce qui appartient à la nuit.
Les mystères semblent s'être développés plus tard que les autres formes de la religion grecque. Déméter et Perséphone sont quelquefois nommées dans l'Iliade et dans l'Odyssée, mais sans qu'il y soit question du caractère secret de leur culte. Le silence d'Hésiode étonne encore davantage, puisqu'un de ses poèmes a pour sujet l'agriculture, et que le pays où il vivait, la Béotie était le séjour de ces populations thraces d'où les légendes font sortir Eumolpe et Orphée. Il est vrai, qu'il y a vers la fin des Travaux un vers où on peut voir unes allusion aux mystères :
« Si tu te trouves au milieu des sacrifices allumés, ne te moque pas des choses secrètes, car le dieu s'offense de cela. »
Mais le sens de ce passage dépend du mot aidhla, dont les scholiastes donnent plusieurs explications différentes. L'allusion est donc fort incertaine. L'hymne à Déméter est le plus ancien monument de la religion d'Eleusis, et quoiqu'il appartienne bien à l'école des Homérides, on s'accorde à le regarder comme une des dernières productions de cette école. On trouve le culte de Déméter sous sa forme probablement la plus ancienne chez les Arcadiens, dont les traditions remontent aux premiers âges de la Grèce. Ils adoraient la Terre sous le nom de Déméter la noire. De son union avec Poséidon naissaient le cheval Arion, qui semble comme Pégase une personnification des sources et une déesse dont Pausanias n'ose pas dire le nom et qu'il appelle seulement Notre-Dame, Despoina. Je suppose que ce devait être une déesse lunaire, Artémis ou Hécate, car on a toujours attribué à la Lune une action sur la végétation, sur la vie et sur la mort et de là ses rapports avec la Terre. Comme elle paraît sortir des flots, on peut lui donner pour père Poséidon. On sait qu'Eschyle avait fait Artémis fille de Déméter et non de Léto. C'est peut-être pour cela qu'il fut accusé d'avoir vidé le secret des mystères. Il paraît qu'il n'était pas initié mais il aimait à ressusciter les traditions pélasgiques. Parmi les temples d'Eleusis, il y en avait un consacré à Artémis qui garde l'entrée, fonction qui la rapproche d'Hécate ou d'Eileithuia et un autre au père Poséidon. Peut être était-ce en souvenir d'une religion antérieure à la colonie thrace des Eumolpides. Mais cette vieille religion eut elle dès l'origine un caractère secret? Il me semble qu'on pourrait, expliquer le silence d'Homère à cet égard, en se rappelant qu'à cette époque, primitive, où il n'y a pas encore de nations, mais seulement des familles, à peine groupées en tribus, où la distinction des cultes privés et des cultes publics n'existe pas encore, les cérémonies sont extrêmement simples et n'attirent pas d'étrangers. On n'a donc pas à recommander le silence. Si dans ces fêtes champêtres la génération des plantes et des fruits est exprimée naïvement par des symboles empruntés à la génération humaine, personne ne songe à s'en offenser, ni à en rire. L'enfant ne sait pas qu'il est nu, son innocence lui tient lieu de pudeur; c'est aux approches de la puberté de la Grèce qu'ont dû commencer les mystères.
Pour conserver au culte de Déméter son caractère chaste et féminin, on n'employa pas partout les mêmes moyens. A Hermione, personne ne pouvait voir ce qu'on gardait dans l'intérieur du sanctuaire de Déméter Chtonia (la terrestre), excepté les quatre vieilles femmes chargées d'offrir les sacrifices à la déesse. Les Athéniens, qui plus que tous les autres Grecs donnaient à la religion un caractère politique et qui adoraient Déméter comme principe du travail civilisateur, sous le nom de Thesmophore (législatrice), réservaient cependant aux femmes seules l'entrée du Thesmophorion. De même à Mégalopolis, il n'était permis qu'aux femmes d'entrer dans le temple et le bois sacré de Déméter. Mais le plus souvent, comme à Éleusis, on admettait des personnes des deux sexes, en imposant seulement le secret aux initiés.
La religion d'Eleusis
J'ai rapporté d'après Pausanias les traditions qui faisait du sacerdoce d'Éleusis une propriété des Eumolpides. Les Athéniens avaient les Thesmophories, qui étaient chez eux une fête nationale, mais les Éleusinies étaient le patrimoine des Éleusiniens, le souvenir de leur ancienne indépendance. Le culte de Déméter était célébré par eux sous une forme spéciale qui en faisait un culte privé, quiconque demandait à assister à leurs cérémonies, était dans la situation d'un étranger admis à une fête de famille, sous la condition toute naturelle de respecter le foyer de ses hôtes et de ne pas divulguer les secrets qu'ils lui confient. Violer ces secrets, c'était attenter à une propriété garantie par les lois et c'était en même temps commettre un parjure, car ceux qui demandaient l'initiation s'engageaient par serment à un silence absolu. Toute profanation était poursuivie par les Eumolpides devant les tribunaux d'Athènes. L'histoire a gardé le souvenir de quelques procès de ce genre. Le plus célèbre est celui d'Alcibiade, accusé, avec Andocide et quelques autres, d'avoir parodié les mystères au milieu d'une orgie, à la suite de laquelle ils auraient en outre mutilé les statues d'Hermès. Les Eumolpides, secouant vers le couchant leurs robes de pourpre, prononcèrent leurs terribles imprécations. Seule, l'hiérophantide Théano, refusa de s'y associer, disant quelle était chargée de faire des voeux pour ses concitoyens, non de les maudire. Les accusations aussi graves ne pouvaient être intentées légèrement. La loi athénienne punissait très sévèrement les dénonciateurs qui n'obtenaient pas le cinquième des suffrages. Mais en donnant des garanties aux accusés, les Athéniens devaient aussi préserver de toute atteinte cette religion des mystères, qui n'était pas seulement une propriété privée, mais qui était devenue, par l'admission des Éleusiniens dans la république d'Athènes, une propriété nationale. L'initiation, considérée comme un privilège des citoyens d'Athènes, avait, pour eux toute l'importance d'un droit politique. Elle devait être entourée d'autant de restrictions que le droit de cité et protégée par autant de garanties. La violation du secret des mystères était donc une sorte de crime d'État, ce qui d'ailleurs est conforme aux habitudes des Grecs, chez qui les institutions religieuses étaient en même temps des institutions nationales.
Ainsi, aux raisons théologiques qui partout enveloppaient de silence et d'ombre le culte des puissances chthoniennes, se joignaient, à Eleusis en particulier, des raisons historiques et politiques plus que suffisantes pour expliquer le secret des mystères, sans qu'il soit besoin d'imaginer une opposition quelconque entre les cultes mystiques et les formes publiques de la religion. Le mystère Eleusinien n'était qu'un des symboles de la religion populaire. Comme tous les autres, il a sa source dans les traditions de l'époque pélasgique et il a reçu sa forme de l'épopée. C'est ce qui résulte des diverses légendes rapportées sur Eumolpe, l'ancêtre vrai ou supposé des Eumolpides. Selon lstros, il était petit-fils de Triptolème. Selon Akésodore, il était chef d'une tribu de Thraces venue au secours des Éleusiniens autochtones dans la guerre contre Erechtheus. Androtion rapporte l'établissement des mystères, non pas à cet ancien Eumolpe, mais à son cinquième descendant, du même nom que lui, et fils de Musée. Les Eumolpides appartenaient à cette famille à la fois poétique et religieuse a laquelle les Grecs rapportaient le culte des Muses et d'où étaient sortis ces aèdes qui avaient civilisé la Grèce par la poésie. Le nom même d'Eumolpide signifie habile chanteur, comme Homéride signifie rassembleur, de chants. Après la réunion des poèmes homérique et hésiodiques, on fit circuler des poésies religieuses sous les noms d'Eumolpe, d'Orphée, de Musée, de Pamphôs. Diodore de Sicile parle d'un poème dionysiaque attribué à Eumolpe. Les hymnes orphiques avaient été composés, selon Pausanias, pour les Lycomèdes, une autre famille sacerdotale d'Eleusis et Pomphôs, d'après le même auteur, aurait fait le premier un hymne en l'honneur de Déméter. Enfin un hymne homérique, retrouvé en Russie vers la fin du XVIIIe siècle, expose en détail toute la légende des grandes déesses d'Eleusis. Il n'y a donc aucune distinction a faire sous le rapport du dogme entre la religion d'Éleusis, et les autres mythes de l'hellénisme; c'est toujours une tradition populaire développée par la poésie.
Les phases de la végétation, confondues dans un même symbole avec la destinée humaine, les alternatives de la vie, de la mort et de la renaissance sont exposées dans l'hymne homérique à Déméter sous les formes vives, précises et colorées qui sont propres à la mythologie grecque. La nature est représentée sous les traits d'une mère, la vie, sous ceux d'une jeune plante, d'une jeune fille. Pendant qu'elle cueillait, le narcisse, la plante narcotique et mortelle, dans les champs de Nysa, au milieu des Océanides, le sol s'entrouvre, et elle est enlevée par le roi des profondeurs souterraines, Hadès. Cependant, Hécate a entendu ses cris et le Soleil, qui voit tout, dénonce à Déméter le ravisseur de Coré. La déesse, irritée contre Zeus qui a donné sa fille pour épouse au roi des morts, s'éloigne de l'assemblée des dieux. Vêtue de noir, cachée sous les traits d'une vieille femme, elle est accueillie à Éleusis par les filles de Céléos, qui la conduisent à leur mère Métanire. Mais rien ne peut distraire sa
douleur, elle refuse toute nourriture jusqu'au moment où une vieille servante, lambé, par ses propos joyeux parvient à la faire sourire. Alors la déesse accepte le hykéon, le breuvage sacré des mystères, dont elle-même enseigne la préparation. Cependant elle ne découvre pas encore sa divinité, car elle est irritée contre les dieux qui ont permis le rapt de sa fille. Elle dit qu'elle s'appelle Dèô, qu'elle vient de Crète et qu'elle a été enlevée par des pirates. Elle demande à élever Démophon, l'enfant de Métanire qui lui a donné l'hospitalité et entre ses mains l'enfant grandit d'une manière merveilleuse. La divine nourrice ne lui donnait pas de nourriture, mais elle le frottait d'ambroisie et pour le rendre immortel, elle le purifiait chaque nuit par le feu. Malheureusement, Métanire qui la surprend, pousse un cri d'épouvante, alors la déesse, troublée dans son opération magique, se fait connaître, ordonne aux Éleusiniens de lui élever un temple et institue les orgies. Cependant les champs étaient toujours frappés de stérilité, la famine allait détruire l'humanité et les dieux ne recevaient plus d'offrandes. Zeus envoie Iris à Déméter. La déesse refuse de se laisser fléchir et redemande sa fille. Hermès va chercher Coré et la ramène à la lumière mais elle a goûté de la grenade, son mariage est consommé, elle doit passer un tiers de l'année auprès de son époux, le reste avec sa mère et les autres immortels. Rhéa vient de la part de Zeus chercher les deux déesses et les ramène dans l'Olympe, les champs se couvrent de nouveau de moissons abondantes et les hommes célèbrent à Éleusis les mystères des grandes déesses.
On voit par cette analyse que l'institution des mystères est directement rattachée à la légende religieuse dont ils devaient perpétuer le souvenir. Le culte, qui n'était là comme ailleurs que l'expression extérieure du dogme, reproduisait toutes les phases de cette légende, dont les personnages divins étaient représentés par des prêtres. L'enlèvement de Coré, le grand deuil de la nature, de la Mère des douleurs, puis l'allégresse du ciel et de la terre à la résurrection du printemps, formaient un véritable drame sacré, avec des alternatives de tristesse et de joie, de terreur et d'espérance. Toute proportion gardée entre les spectacles grossiers d'une époque barbare et les magnificences de l'art athénien, c'était quelque chose d'analogue aux mystères du Moyen âge, qui représentaient aussi la mort et la résurrection d'un dieu.
Il y avait comme dans les drames ordinaires, qui en Grèce se rattachaient aussi à la religion, des hymnes, des chants, des processions symboliques figurant les courses de Déméter et d'Hécate, et des effets de théâtre auxquels la perfection de la scénographie grecque donnait un caractère imposant et grandiose. Des clartés splendides succédant tout à coup aux ténèbres faisaient passer les âmes d'une religieuse horreur aux consolations du réveil. L'idée de la vie éternelle jaillissait spontanément de cet enseignement muet qui pénétrait dans l'âme par les sens et la persuadait bien mieux qu'une démonstration métaphysique.
L'hellénisme enveloppe toujours dans les mêmes symboles l'homme et la nature. L'enlèvement de Coré et son retour, ce n'est pas seulement la graine qu'on jette en terre et qui renaît dans la plante, c'est le réveil de l'âme au delà du tombeau. La destinée humaine n'est qu'une forme particulière de ce dualisme éternel, de cette grande loi d'oscillations et d'alternatives qui fait partout succéder la mort à la vie et la vie à la mort. Au dernier acte de l'initiation, le grand, l'admirable, le plus parfait objet de contemplation mystique était l'épi de blé moissonné en silence, germe sacré de la moisson nouvelle, gage certain des promesses divines, symbole rassurant de renaissance et d'immortalité. Ces rapprochements qui se présentent si naturellement à l'esprit, les Grecs les retrouvaient dans les mots même de leur langue :
« Mourir, dit Plutarque, c'est être initié aux grands mystères, et le rapport existe entre les mots comme entre les choses (Teleuth), l'accomplissement de la vie, la mort, tel est le perfectionnement de la vie, l'initiation. D'abord des circuits, des courses et des fatigues et dans les ténèbres, des marches incertaines et sans issue. Puis, en approchant du terme, le frisson et l'horreur, et la sueur et l'épouvante. Mais après tout cela une merveilleuse lumière, et dans de fraîches prairies la musique et les choeurs de danse, et les discours sacrés et les visions saintes, parfait maintenant et délivré, maître de lui-même et couronné de myrte, l'initié célèbre les orgies en compagnie des saints et des purs et regarde d'en haut la foule non purifiée, non initiée des vivants qui s'agite et se presse dans la fange et le brouillard, attachée à ses maux par le crainte de la mort et l'ignorance du bonheur qui est au delà. »
Ce passage, conservé par Stobée, me semble un de ceux qui peuvent le mieux donner une idée de l'ensemble des mystères. Quant au sens de quelques formules, comme Konx Ompax, à la nature des objets sacrés conservés dans la corbeille mystique et à tout le détail liturgique des cérémonies, il faut nous résigner à l'ignorer. C'était en cela principalement que consistait le secret de l'initiation. Il fallait que ce secret fût bien peu de chose pour avoir été gardé par tant de gens. Les Éleusinies, réservées d'abord aux citoyens d'Athènes, devinrent peu à peu accessibles à tout le monde. Il suffisait d'être présenté par un Athénien. Les esclaves, exclus d'abord comme les bâtards et les étrangers, finiront par y être admis. Dans une comédie de Théophile, un domestique disait en parlant de son maître :
« C'est lui qui m'a fait connaître les lois grecques, qui m'a enseigné les lettres, qui m'a initié aux mystères divins. »
Les initiés ne formaient pas une aristocratie intellectuelle. Rien, absolument rien ne justifie l'opinion qui les représente comme une classe de mandarins lettrés, méprisant les croyances du peuple. S'il y a eu en Grèce des philosophes qui ont méconnu la profondeur et la haute portée morale de la religion de leur patrie, cela tenait à la tournure particulière de leur esprit, à leurs tendances théocratiques et monarchiques et nullement à l'enseignement des mystères. Non seulement cet enseignement n'était pas en opposition avec le reste de la mythologie mais il était lui-même entièrement symbolique, sans aucune espèce de démonstration ni d'explications. Chacun le comprenait à sa manière. Dans les histoires de dieux morts et ressuscités qui faisaient le fond de tous les cultes mystiques, les Evhéméristes croyaient voir une preuve que les dieux n'étaient que des mortels divinisés. Pour d'autres, comme Cicéron, ces symboles empruntés à la vie de la nature semblaient éclairer plutôt la nature des choses que celle des dieux mais la plupart étaient surtout frappés, comme Plutarque, des allusions à la vie morale de l'âme.
« L'opinion d'Aristote, dit Synésios, est que les initiés n'apprennent rien mais qu'ils reçoivent des impressions, qu'ils sont mis dans une certaine disposition à laquelle ils ont été préparés. »
Telle est, en effet, la nature de l'enseignement religieux. Il ne s'adresse pas à la raison comme l'enseignement philosophique, mais à toutes les facultés de l'homme à la fois. Il agit par les sens sur l'imagination, sur le coeur et sur l'intelligence. Les grands mystères de la nature, la lumière, le mouvement, la vie ne se prouvent pas, ils s'affirment. De même les symboles, qui sont l'expression humaine des lois divines, ne se démontrent pas, ils s'exposent et la conviction descend d'elle-même dans les âmes préparées à la recevoir. Ce caractère se retrouve même dans les religions modernes : Jésus-Christ ne parle qu'en paraboles.
Les initiés n'étaient pas seulement spectateurs dans le drame d'Eleusis, ils y jouaient un rôle comme le chœur dans les tragédies. C’est du moins ce que semble indiquer le choeur des mystes dans les Grenouilles d'Aristophane. C'est, ainsi que dans les mystères du Moyen âge, le peuple chantait des psaumes. De même aussi, pendant la messe, les assistants mêlent leurs chants aux cérémonies symboliques du drame de la Passion. Quelques usages qui se conservent dans l'Église grecque, par exemple celui de fermer les portes pendant certains actes du saints sacrifice rappellent le caractère secret des mystères de l'Antiquité. Ce n'est pas sans raison que les Grecs donnent le nom de mystères aux sacrements et en particulier à l'Eucharistie. Le Kykéon, ce pain sacré de la communion primitive, était comme le saint sacrement des chrétiens, un signe sensible destiné à sanctifier l'homme. Les meurtriers et les impies étaient exclus de l'initiation. On s'y préparait par le jeûne, en souvenir du deuil de Déméter, par une continence rigoureuse pendant la neuvaine sacrée, par une sorte de baptême dans la mer et par tout un ensemble de purifications, que figuraient dans la légende ces charbons ardents sur lesquels la déesse plaçait son nourrisson, le fils de Métanire.
Quand les mystes avaient reçu la nourriture divine qui les unissait aux dieux, quand ils avaient traversé toutes les épreuves, tous les degrés de l'initiation, jusqu'à l'Epoptie, c'est-à-dire à la contemplation des saints mystères, leur bonheur était assuré même dans la mort, car ils connaissaient les secrets de la vie éternelle.
« Heureux, dit Pindare, celui qui, après avoir vu ces choses, descend sous la terre! Il connaît la fin de la vie, il connaît la loi divine. »
ll semblait que la sanctification conférée par ce sacrement devait s'étendre jusque sur l'autre vie :
« Le sort des initiés et celui des profanes sont différents même dans la mort », dit l'hymne homérique.
Cette différence supposait implicitement que les mystes avaient rempli les conditions de pureté qui leur étaient imposées, autrement on aurait pu demander, comme Diogène, si un brigand initié serait plus heureux qu'Epaminondas qui ne l'était pas. Les actes extérieurs de piété ne suppléaient pas plus aux bonnes œuvres dans l'Antiquité qu'aujourd'hui. Mais l'influence, morale des mystères n'en était pas moins généralement reconnue. Selon Diodore de Sicile, ceux qui avaient participé aux mystères passaient pour devenir plus pieux, plus justes et meilleurs en toute chose.
« Vous avez été initiés, disait le rhéteur Andocide aux Athéniens et vous avez contemplé les rites sacrés des deux déesses, afin de punir les criminels et de sauver ceux qui sont purs d'injustice. »
Les symboles mystiques se transformèrent comme tous les autres dans le cours des âges. Triptolème, qui est seulement nommé dans l'hymne homérique parmi les rois d'Eleusis, paraît avoir joué plus tard un rôle plus important. On le voit souvent représenté dans les monuments, et surtout sur les vases, assis sur le char ailé de Déméter, traîné par des serpents : les deux déesses sont à ses côtés. Il fut même substitué à Minos, comme juge des morts, au moins dans les légendes athéniennes. Un autre personnage dont l'importance devint encore bien plus considérable, Iacchos, n'est pas nommé dans l'hymne homérique : son association avec les grandes déesses est donc postérieure à la rédaction de ce poème.
C'est probablement à l'époque où le culte d'lacchos s'introduisit dans la religion d'Eleusis que furent établis les petits mystères ou mystères d'Agra, qui correspondaient aux Anthestéries ou fêtes de Dionysos, comme les grands mystères étaient en rapport avec les Thesmophories. Car lacchos, le médiateur, l'initiateur mystique, n'est, comme Zagreus, qu'une forme de Dionysos. Monsieur Alf. Maury le rapproche avec assez de vraisemblance, de lasios ou lasion, personnage associé à Déméter dans les légendes épiques. Rien n'est plus naturel que d'unir dans un même culte les principales divinités de l'agriculture, de la production et de la mort. L'idée du grain de blé qui meurt pour ressusciter en épi se représente sous une autre forme dans la pluie divine tombant sur la terre pour renaître dans la liqueur sacrée des libations. Le vin pouvait être pris comme le pain pour symbole de la communion des êtres. Cependant il est très difficile de savoir exactement quel était le rôle de Dionysos dans les mystères. Remplaçait-il Démophon comme nourrisson de Déméter? Était-il substitué à Hadès comme époux de Perséphone, où était-il le fils d'une des grandes déesses? Dès qu'il est question de Dionysos, toute la mythologie devient obscure et indécise. Les distinctions des types disparaissent et s'effacent, Rhéa est identifiée avec Déméter, Coré (Perséphone), sous le nom de Brimô, avec Hécate, qui elle-même n'est pas distincte d'Artémis. Bientôt Rhéa, Déméter et Coré semblent se confondre et toutes puissances multiples de la nature sont absorbées dans la vague unité du panthéisme. Si on possédait encore les anciens poèmes dionysiaques, on pourrait suivre dans ses transformations ce culte étrange qui sert de passage entre le polythéisme grec et les religions unitaires de l'Orient mais les poésies orphiques que nous possédons appartiennent à une époque où déjà la confusion est complète. Le dieu qui frappe ses ennemis de vertige semble avoir traité de même ses adorateurs. L'orphisme est le délire de l'ivresse et de l'extase. La pensée humaine est entraînée comme la nature entière dans la grande orgie.
Sources : Louis Ménard, Le polythéisme hellénique, 1863
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Val-de-Marne : une femme attaquée au couteau, les policiers tirent sur le suspect
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L’homme a été interpellé à Chevilly-Larue. La victime, qui pourrait avoir été la cible d’une agression sexuelle, serait légèrement blessée.
Les fonctionnaires ont fait usage de leur arme à feu. L'individu aurait en effet tenté de se jeter sur un des policiers, malgré deux premiers coups de pistolet à impulsion électrique (PIE).
Selon nos informations, l'homme a reçu une balle dans le ventre. Il est parvenu à se relever et a tenté de prendre la fuite. Au terme d'une course-poursuite, il a été interpellé un peu plus loin rue, à Chevilly-Larue, rue de Picardie.
« L'individu aurait essayé de l'attirer dans une cave »
Une arrestation difficile. « Les collègues ont utilisé à deux reprises le pistolet à impulsion électrique mais le type se relevait », précise une source policière. Il a finalement été neutralisé à l'aide d'un PIE, dans un hall d'immeuble où il s'était réfugié.
Ce dimanche vers 10 h 30, l'agresseur présumé était pris en charge par les secours. La femme qui a reçu le coup de couteau serait légèrement blessée, au niveau de la main. « L'individu aurait essayé de l'attirer dans une cave, ajoute une autre source. Apparemment ils ne se connaissaient pas. Mais il est encore trop tôt pour être catégorique. »
Le SDPJ 94 est chargé des investigations. L'IGPN a part ailleurs été saisie pour enquêter sur les conditions dans lesquelles les policiers ont fait usage de leur arme.
Conférence sur Auguste Blanqui (en Berry)
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Echoes of the Moon - Presence (Album complet)
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Une date, un événement : 10 mars 1906 La catastrophe de Courrières
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Le gisement du bassin minier du Pas-de-Calais, exploité par la Compagnie des mines de Courrières, fournissait 7 % de la production nationale de houille, grâce à d'importantes veines de charbon gras, le travail d'abattage se faisant à une profondeur de 326 à 340 mètres. Les puits se répartissaient sur quatre fosses.
Le 7 mars 1906, un feu est découvert, dans un vieux tas de bois, au sein de l'une des veines de la fosse de Méricourt. Ingénieurs et porions (contremaîtres) décident de mettre en place des barrages pour étouffer le feu. Ce qui est fait les 7, 8 et 9 mars. Sans résultat décisif. Pierre Simon, délégué-mineur depuis 1891, demande que plus personne ne descende tant que le feu ne sera pas éteint. On ne l'écoute pas. De même qu'on n'a pas écouté des mineurs suspectant la présence de grisou.
Le samedi 10 mars, à six heures du matin, 1 664 mineurs et galibots (âgés de 14 à 15 ans) sont déjà descendus dans quatre fosses. A 6h30 une fumée noire est repérée à la sortie d'un moulinage (débouché au jour des cages de remontée des wagonnets). A 6h34 l'explosion d'une poche de grisou soulève la poussière de charbon, très explosive, qui se met en autocombustion. Ce « coup de poussière » ravage en quelques secondes 110 kilomètres de galeries communes à trois fosses. Puis des gaz méphitiques (toxiques) se répandent. La déflagration a été si forte que des débris et des chevaux ont été projetés à une hauteur de dix mètres sur le carreau de la fosse n° 3.
Cette catastrophe, la plus importante dans l'histoire minière de l'Europe, a fait officiellement 1 099 morts (la plupart asphyxiés ou brûlés par les nuées ardentes ; parmi eux 27,45 % avaient entre 13 et 18 ans). Elle a provoqué un traumatisme collectif de grande ampleur. Au moment de l'explosion, une violente secousse a alerté les quartiers où habitent les familles des mineurs. Une foule de femmes, d'enfants, de vieillards se précipite et butte sur des grilles fermées, vite protégées par de nombreux gendarmes. L'angoisse monte.
Des ingénieurs tentent de descendre dans les puits pour sauver ceux qui peuvent encore l'être. Mais certains puits sont bouchés par des amas de ferraille, les cages sont bloquées, les échelles inutilisables, l'accumulation des gaz empêche toute progression dans le puits n° 2. Malgré tout on arrive à sortir quelques blessés, dont la peau se détache par lambeaux. Des médecins accourus doivent amputer sur place un galibot. Il faut essayer de réanimer les asphyxiés.
Des sauveteurs ont entendu des coups tapés sur des tuyaux. Il y a donc des survivants dans les galeries. Mais pour les atteindre il faut se frayer un chemin au milieu des décombres, en risquant à tout moment l'asphyxie. Le 11 mars, à 22 heures, ordre est donné, par des ingénieurs envoyés par l'Etat, d'arrêter les opérations de sauvetage alors qu'il y avait sans doute encore des hommes à sauver (treize "miraculés" furent récupérés vingt jours après la catastrophe et un quatorzième le 24e jour, grâce aux appareils respiratoires apportés par des secouristes allemands. Cette décision fut très mal vécue par les familles des victimes, accusant, à juste titre, la compagnie minière d'être plus préoccupée par la protection des infrastructures que par le sort des mineurs, tandis que les familles, privées d'informations, virent leurs morts enfouis dans une fosse commune à l'issue d'une cérémonie vite expédiée, si bien que le directeur de la compagnie dut s'enfuir sous les huées.
La colère monte dans le bassin. Les mineurs refusent de redescendre au fond. Le 16 mars, 25 000 ouvriers sont en grève. Georges Clemenceau, alors ministre de l'Intérieur, mobilise 30 000 gendarmes et soldats et ordonne de nombreuses arrestations. Faisant référence à son passé d'extrême gauche, Jacques Bainville écrit de lui : « il était maintenant "de l'autre côté de la barricade". Il protégeait les bases matérielles de la société bourgeoise. » Mais la catastrophe avait suscité un élan de générosité spectaculaire : 6,5 millions de francs-or furent collectés en France et en Europe.
Devant l'ampleur du mouvement social, le patronat dut composer et accorda des augmentations de salaires. Autre conséquence d'importance : l'instauration du repos hebdomadaire et la mise en place de mesures techniques destinées à réduire l'insécurité dans les mines.
Pierre VIAL
Sources : Rivarol du 26/03/2010
Laurent Schang : « Von Rundstedt fut toute sa vie un soldat loyal, le doigt sur la couture du pantalon »
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- Catégorie : HISTOIRE
Si vous cherchez des livres sur la Seconde Guerre mondiale et plus précisément sur les grandes figures militaires de celle-ci, la biographie de Von Rundstedt, maréchal allemand et personnage majeur de l’armée allemande durant ce conflit, vient de paraître.
Une première en français, pour un maréchal qui n’a laissé ni livre, ni gros écrits pour pouvoir reconstituer son parcours. Laurent Schang s’est donc attelé à un travail de fourmi, qui mérite d’être souligné, et distingué.
Von Rundstedt, aristocrate prussien, ancien combattant de la Grande Guerre et doyen des forces armées allemandes, prit part aux principales campagnes européennes du conflit, à la fois comme concepteur et exécutant des plans d’invasion. La Pologne en 1939 c’est lui, la France en 1940, c’est encore lui en grande partie, de même que la Russie en 1941. La suite, c’est celle d’un soldat qui obéit aux dirigeants de son pays, et notamment à Hitler, ni plus, ni moins.
Nous avons interrogé Laurent Schang au sujet de son ouvrage, en espérant que cette interview vous donne envie de vous procurer cet ouvrage, passionnant et instructif.
Breizh-info.com : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Laurent Schang : 45 ans, né et vivant en Lorraine. Mon nom peut prêter à confusion mais il vient du Platt, le dialecte germanique local. J’ai à mon actif, outre ce Von Rundstedt, le maréchal oublié, une biographie du Fondateur de l’aïkido, Morihei Ueshiba, et quatre recueils de récits : Constat d’Occident ; Kriegspiel 2014 ; France-Garde royale prussienne 0-1 et Le bras droit du monde libre, suivi de Biggles chez les Rhodésiens. Quand je ne suis pas à mon travail, j’anime les Éditions Le Polémarque, une microstructure spécialisée dans la tactique et la stratégie. Je suis également membre du comité de rédaction du magazine Éléments, un magazine d’idées vendu en kiosque, dans lequel je traite des questions militaires.
Breizh-info.com : Qu’est-ce qui vous a amené à vous intéresser à Von Rundstedt ?
Laurent Schang : Rendons à Dieu ce qui est à Dieu, et à Yannis Kadari ce qui est à Yannis Kadari. C’est lui qui m’a proposé, il y a près de six ans maintenant, d’écrire pour la collection « Maîtres de guerre » qu’édite la maison Perrin. Le directeur de la publication de Caraktère (Ligne de Front, TNT, Batailles & Blindés…) avait plusieurs noms à me suggérer et parmi eux j’ai choisi celui de Rundstedt sans l’ombre d’une hésitation. Au fil du temps, le projet a pris de l’ampleur et d’une monographie, on est passé à une biographie en bonne et due forme. Ce qui explique que le livre paraisse aujourd’hui hors collection. Pourquoi Rundstedt ? Comme tous les passionnés de la Deuxième Guerre mondiale, son nom ne m’était bien sûr pas inconnu : sa contribution contrastée à la campagne de France, son action (ou son inaction) lors du débarquement de Normandie, l’offensive des Ardennes à laquelle son nom est souvent associée – au grand dam de l’intéressé. Mais, sorti de ces généralités, il faut bien avouer que le lectorat français ne sait presque rien de Rundstedt. Son pedigree, son cursus, ses états de service en 14-18 ou sous la république de Weimar ne sont pas plus connus du grand public que son rôle exact dans l’établissement et l’exécution des plans « blanc » (contre la Pologne) et « jaune » (contre la France), sa participation à « Barbarossa » ou les trois années au cours desquelles il occupa le poste de commandant en chef des troupes d’occupation en France.
Pour résumer, son nom apparaît dans tous les livres ayant trait à la Deuxième Guerre mondiale en Europe, sans jamais que les projecteurs soient braqués sur lui. Cela alors que Rundstedt a fait l’objet en Angleterre, dès 1974, d’une monographie signée John Keegan, s’il vous plaît, suivie en 1992 d’une biographie de Charles Messenger, certes très factuelle – à l’anglo-saxonne – mais bourrée d’erreurs et d’approximations. Sans parler de l’hagiographie que lui consacra son ancien chef d’état-major, le général Blumentritt, en 1952, toujours en anglais et sur laquelle je reviens en détail dans mon livre. Autant de raisons de me pencher plus attentivement sur le cas Rundstedt.
Breizh-info.com : Quels ont été ses principaux faits d’armes ? Peut-on dire que ce fut un grand soldat ?
Laurent Schang : Son premier fait d’armes authentifié, Rundstedt l’accomplit en 1914, durant la bataille de la Marne, lorsqu’il remplace au pied levé son supérieur direct, le général von Gronau, dans les combats de Monthyon, sur l’Ourcq. Là, le jeune officier subalterne qu’il est encore fait la démonstration de ses qualités d’officier breveté d’état-major en prenant le commandement de la 22e Division de réserve (1re Armée du général von Kluck), alors en grande difficulté. Après, pour un général comme Rundstedt, placé à la tête de groupes d’armées dès la campagne de Pologne, je ne sais si l’on peut parler de fait d’armes à la manière d’un Rommel ou d’un Manstein. C’est une des particularités de la carrière de Rundstedt : sa position hiérarchique a fait qu’il n’a jamais été un « général de l’avant », même s’il n’a pas craint de s’exposer physiquement à diverses reprises, notamment au cours de la campagne de France.
Un rôle ingrat en quelque sorte, si une « belle guerre » se définit par les exploits qu’on y réalise. Rundstedt est tout de même, assisté de ses adjoints Blumentritt et Manstein, à l’origine du plan « blanc », qui permit à l’Allemagne de vaincre la Pologne en 18 jours – une campagne qui ne fut pas une promenade de santé, en dépit de la disproportion des forces en présence. Il est pour beaucoup aussi dans la conception du plan « jaune », toujours avec l’assistance du duo Blumentritt-Manstein, même si je suis de ceux qui considèrent, documents d’époque à l’appui, que Manstein a grandement exagéré son propre rôle dans la mise au point de ce plan (le fameux « coup de faucille »).
Les prises de position de Rundstedt durant la campagne de France, alors qu’il commandait le groupe d’armées « A », autrement dit le fer de lance de l’offensive allemande, méritent elles aussi d’être réévaluées, ce que je me suis efforcé de faire dans le livre. S’il a eu très tôt tendance à vouloir freiner ses subordonnés, on ne peut lui imputer l’entière responsabilité de l’opération « Dynamo » de rembarquement des Alliés à Dunkerque, comme on le lit trop souvent. Au contraire, sa façon de commander, laissant le plus d’initiatives possibles à ses généraux malgré ses appréhensions, ce qu’on appelle dans le jargon l’Auftragstaktik, a beaucoup contribué au succès de la campagne. Lors de l’opération « Barbarossa », Rundstedt est, à la tête du groupe d’armées « Sud », celui qui engrange le plus de résultats. Paradoxalement, il me semble que son principal fait d’armes sur ce théâtre n’est pas tant la prise de Kiev ou la victoire d’Ouman que sa claire conscience des efforts inhumains demandés à ses armées par le haut commandement et donc, sa décision de stopper l’offensive de son propre chef, au mois de novembre 1941.
Une décision qui lui valut d’être une première fois limogé par Hitler, même si celui-ci reconnut après coup que Rundstedt avait eu raison sur le moment. Il y a bien encore sa résistance efficace à Arnhem et surtout à Aix-la-Chapelle à l’automne 1944, mais à cette date, la cause était déjà entendue. Ses faits d’armes s’arrêtent là.
Un grand soldat, par les postes qu’il occupa, oui, assurément. Un grand soldat comme on dit d’untel qu’il fut un grand chef de guerre, c’est plus douteux.
Breizh-info.com : Quelles relations ce général entretint-il avec le régime nazi, idéologiquement ?
Laurent Schang : Les relations on ne peut plus typiques d’un général ayant fait ses classes sous l’empire wilhelmien, doublé d’un fils de la plus ancienne noblesse prussienne – une noblesse désargentée et dépourvue de domaine –, avec un régime plébéien, « païen » et dirigé par un despote sorti du ruisseau. On peut affirmer sans risquer de se tromper que Rundstedt était sur le plan idéologique un conservateur de stricte obédience. Monarchiste et patriote cela va de soi, protestant bon teint, bismarckien en matière de politique extérieure (d’où sa réticence à attaquer la Russie), et pour qui les intérêts de l’Allemagne se confondaient avec ceux de son armée. Antisémite, rien ne l’atteste, sauf à admettre que Rundstedt partageait l’antisémitisme traditionnel, « culturel » (sans connotation raciale particulière), du corps des officiers. Par excellence l’homme de sa caste, Rundstedt en imposait, tous les témoignages se recoupent sur ce point, par sa raideur physique, sa parfaite correction et son attitude réservée.
Une apparence de statue du commandeur qui explique la rare déférence avec laquelle Hitler le traita toujours. Rundstedt, de son côté, ne ressentait que mépris et aversion pour Hitler et ses suivants, y compris et surtout ceux issus comme lui de l’armée impériale : les Keitel, Jodl, Reichenau. Le Troisième Reich ne pouvait constituer à ses yeux qu’un pis-aller pour l’Allemagne, faute d’obtenir le retour de l’empereur, et comme beaucoup de généraux, il crut dans un premier temps qu’Hitler servirait utilement la cause de l’armée. Son programme de réarmement, ses ambitions diplomatiques n’étaient certes pas pour déplaire à Rundstedt après les années de vache maigre (la Reichswehr de 100 000 hommes) de la république de Weimar. Qu’aurait-on fait de lui ensuite, les généraux n’en savaient sans doute rien eux-mêmes. Cette confondante erreur d’appréciation – ne pas avoir vu que Hitler allait les instrumentaliser et non l’inverse – fut aggravée par le fait que la majorité des généraux n’avaient nullement l’intention de se salir les mains, à commencer par Rundstedt.
Dans le livre, je raconte comment, toutes les fois que Rundstedt eut l’occasion d’infléchir le cours des événements, il se réfugia derrière son uniforme pour ne pas avoir à se mêler de politique. Des trois armes, l’armée de terre fut encore la moins imprégnée par l’idéologie nationale-socialiste, bien qu’il faille relativiser la chose au fil des ans et du renouvellement des cadres. Il n’empêche que les généraux s’accommodèrent assez vite du régime dans leur ensemble, Rundstedt y compris, dès lors que les couches populaires étaient tenues en laisse et que l’armée reprenait des couleurs.
Non, ce qui frappe quand on étudie cette période, c’est de voir combien, jusqu’à l’été 1940, la plupart des généraux, et notamment ceux de la vieille école comme Rundstedt, au lieu de soutenir Hitler dans ses projets, rentrèrent la tête dans leurs épaules ou cherchèrent à le dissuader d’aller plus loin. C’est dire si la finalité du régime nazi leur avait échappé.
Breizh-info.com : Finalement, ne peut-on pas dire que von Rundstedt a été un général contre son temps ? Qu’est-ce qui a causé sa perte ?
Laurent Schang : Rundstedt ne fut pas du tout un général contre son temps s’il s’agit d’apprécier son attitude de 1933 à 1945. Il fut toute sa vie un soldat loyal, le doigt sur la couture du pantalon. Tout au plus peut-on évoquer l’ordre qu’il envoya à Kleist de se replier à l’ouest de Rostov-sur-le-Don et son offre de démission, qu’il mit dans la balance pour obtenir gain de cause. On connaît aussi sa réponse cinglante à Keitel à la fin du mois de juin 1944, d’ailleurs contestée par Blumentritt : « Qu’allons-nous faire ? Faites la paix, bande d’idiots ! ». Réponse qui lui aurait coûté son deuxième limogeage. À part ces deux sursauts, on ne trouve pas dans sa biographie la moindre opposition frontale à Hitler. Rundstedt était résigné et comme il le dira lui-même, il n’y avait pas dans son esprit de débat possible : en temps de guerre, servir l’Allemagne et servir le régime ne faisaient aucune différence, à partir du moment où Hitler était le chef suprême des armées.
Du reste, quand celui-ci le rappela fin août 1944, Rundstedt obéit sans discuter. « Zucht und Ordnung » : « Discipline et Ordre », si deux mots le caractérisent, ce sont bien ceux-là. Du point de vue du mode de commandement, Rundstedt fut là aussi en parfaite adéquation avec son temps : un Generalfeldmarschall qui donne les grandes orientations et qui laisse ses adjoints régler les détails. S’il fut contre son temps en quelque chose, c’est dans l’emploi des chars, et encore, puisqu’il admit tout de même assez tôt – avant la guerre – leur utilisation en masse et en pointe. Officier à l’ancienne, Rundstedt était tout simplement sceptique face à cette innovation doctrinale majeure, et il était loin d’être le seul parmi les généraux. Quant à la controverse qui l’opposa à Rommel, début 1944, au sujet du positionnement des Panzerdivisionen en prévision du débarquement, on est plus dans le registre de la divergence tactico-opérationnelle que dans le rejet pur et dur des blindés, ce qui aurait été une ineptie après six années de guerre et l’expérience acquise par Rundstedt depuis la Pologne. Je développe la question dans le livre.
Peut-on parler de sa perte ? Son troisième et dernier limogeage, au mois de mars 1945, doit peu à son commandement et beaucoup à la situation désespérée du Troisième Reich. Rundstedt ne fut ni mis aux arrêts, ni conduit au suicide, ni exécuté sommairement. Déjà familier des sanatoriums à cause de ses problèmes de santé récurrents, il se contenta de partir en convalescence à Bad Tölz, où il avait ses habitudes, en attendant que les Alliés vinssent l’y cueillir, le 1er mai 1945. Sa fin fut triste, je la raconte, mais dans le fond, elle fut assez conforme à ce qu’avait été sa vie.
Breizh-info.com : Comment est-il perçu aujourd’hui en Allemagne dans les mémoires, dans un pays où la repentance est particulièrement exacerbée, y compris aujourd’hui ?
Laurent Schang : Il me semble assez significatif que le nom de Rundstedt n’ait jamais été utilisé pour baptiser une caserne de la Bundeswehr, contrairement à d’autres généraux de la Wehrmacht. Ici encore, sa position hiérarchique – travaillant en relation directe avec Hitler sans être un proche – l’a sans doute desservi. Il s’en est fallu de peu qu’il soit jugé à Nuremberg, en tant que chef de guerre mais aussi en tant que chef des troupes d’occupation, et son nom reste entaché par les crimes commis sous son commandement, sinon sous ses ordres, aussi bien à l’Est (Pologne, URSS) qu’à l’Ouest (France, Pays-Bas).
Seule sa qualité de doyen de la Wehrmacht (70 ans en 1946) lui a épargné un procès. Par ailleurs, le fait qu’il ait toujours refusé de discuter avec les cercles militaires hostiles au régime nazi, que ce soit en 1938 ou en 1944, ne plaide pas en sa faveur, même s’il est facile de juger la conduite d’un homme, qui plus est d’un homme d’ordre, a posteriori. Quand on aborde une telle figure, immergée dans une telle période, il ne saurait s’agir de séparer le bon grain de l’ivraie. Pour faire simple, ni son acceptation tacite des crimes de masse commis à l’Est dès juillet 1941, ni son rôle de président de la cour d’honneur, qui consistait à expulser de l’armée les officiers impliqués dans l’attentat du 20 juillet 1944, les conduisant à une mort certaine – rôle qu’il aurait pu refuser – ne permettaient aux soldats de la RFA d’ériger Rundstedt en modèle. Que sa biographie, pourtant écrite par Blumentritt, n’ait jamais été publiée en allemand, est un autre signe de l’oubli dans lequel Rundstedt est tombé dans son propre pays.
Étant donné ce que nous savons de son caractère modeste et ironique, je suis tenté de penser que cette situation lui aurait convenu. Cela aura au moins permis d’éviter que sa pierre tombale soit vandalisée, contrairement à celle du Maréchal Model. Jusqu’à présent en tous les cas.
Breizh-info.com : Auriez-vous des livres, des films, que vous conseilleriez sur la période ?
Laurent Schang : La littérature ne manque pas sur la période qui court, disons, de 1892, année de l’entrée de Rundstedt dans l’armée allemande, à 1945. Pour les chercheurs, les locuteurs de l’allemand et de l’anglais sont clairement favorisés, mais l’amateur trouvera, je pense, son compte avec les quelques titres que je vous propose, tous faciles à se procurer dans le commerce. Sur le plan théorique, La pensée militaire allemande d’Eugène Carrias reste une bonne base de travail, bien que le livre soit un peu daté aujourd’hui. On y ajoutera avec un énorme profit La pensée militaire prussienne de Jean-Jacques Langendorf, qui fait pratiquement le tour de la question, de Frédéric II à Schlieffen. Concernant le développement de l’arme blindée au sein de l’armée allemande, les deux livres de Heinz Guderian, Achtung-Panzer ! et Panzer Leader, sont des indéboulonnables, à condition de parler anglais. Ceux qui ne le pratiquent pas se consoleront sans regret en lisant ses mémoires : À la tête des Panzer, Souvenirs d’un soldat, un gros volume récemment réédité. Pour l’entre-deux-guerres et l’évolution des rapports entre les militaires et les politiques en Allemagne, je conseille de lire Le Drame de l’armée allemande de John W. Wheeler-Bennett. Le livre peut paraître daté (1955) mais c’est une mine d’informations toujours valables aujourd’hui. La remarque vaut aussi pour les deux tomes de la monumentale Histoire de l’armée allemande de Jacques Benoist-Méchin.
En complément, dans un registre plus littéraire, je recommande le magnifique Hammerstein ou l’intransigeance. Une histoire allemande de Hans Magnus Enzensberger. Sur la guerre elle-même, impossible de faire l’impasse sur Le Mythe de la guerre-éclair. La campagne de l’Ouest de 1940 de Karl-Heinz Frieser, si l’on aime la technique et la tactique. Moins exigeants, les souvenirs de guerre d’August von Kageneck (Lieutenant de Panzer, Examen de conscience, La France occupée) méritent qu’on s’y attarde. Les lecteurs intéressés par le front de l’Est auront tout intérêt, pour leur part, à se plonger dans Barbarossa 1941. La guerre absolue de Jean Lopez et Lasha Otkhmezuri. « La » somme sur le sujet. Dans un autre genre, les reportages de guerre hallucinés du grand écrivain italien Curzio Malaparte, réunis sous le titre L’Europe naît sur la Volga, se doivent d’être lus. Le bel album La Wehrmacht : La fin d’un mythe, de l’équipe du magazine Guerres & Histoire, sous la direction de Jean Lopez, satisfera tous ceux qui souhaitent avoir une vue d’ensemble sur le sujet. Enfin, trois stratégistes et biographes sont à suivre à mon avis : Benoît Rondeau, Daniel Feldmann, Benoît Lemay. Au-delà, et j’en ai déjà dit beaucoup, j’aime autant renvoyer le lecteur à la bibliographie qui conclut mon livre.
S’agissant du cinéma, je vais vous décevoir mais peu de films trouvent grâce à mes yeux. Les « classiques » américains (Le Jour le plus long, Paris brûle-t-il ?, La Bataille des Ardennes) ont tous très mal vieilli à mon goût, pas tant du fait de leurs moyens que de leurs scenarii, et leurs angles d’approche, souvent réducteurs, ne sauraient satisfaire l’historien le plus compréhensif. Je ferai peut-être une exception pour le Patton de Franklin J. Schaffner et une autre pour Un pont trop loin de Richard Attenborough, film dans lequel Rundstedt fait une brève apparition sous les traits de Wolfgang Preiss. Les Allemands sont toujours présentés d’une façon si caricaturale ! Même Il faut sauver le soldat Ryan n’y échappe pas – un film dont je ne garde que les 30 premières minutes, époustouflantes pour le coup. Je leur préfère encore des films moins chers mais plus sincères – et plus réalistes –, comme La Bataille de Westerplatte, film polonais sur la résistance de la garnison de la forteresse du même nom aux assauts de la Wehrmacht en septembre 1939, Invasion Day, film danois sur l’invasion du Danemark, qui n’aura pris qu’un jour aux Allemands, le 9 avril 1940, ou Les Nôtres, film russe sur les premières semaines de l’opération Barbarossa.
À choisir, puisque vous me le demandez, Le Tambour de Volker Schlöndorff, d’après le roman de Günter Grass, ou Requiem pour un massacre du réalisateur soviétique Elemi Klimov, dont certaines scènes sont à la limite du supportable, nous en disent plus sur ce que fut la Deuxième Guerre mondiale que bien des films estampillés films de guerre. Je retiendrai tout de même La Chute, d’Oliver Hirschbiegel, auquel il n’y a pas grand-chose à reprocher, et Fury, de David Ayer, très fort et plutôt sérieux côté reconstitution, malgré ses travers typiquement hollywoodiens (une poignée de GI’s héroïques contre une marée de soldats allemands qui attaquent sans réfléchir). Voyez aussi le trop méconnu La bataille de France de Jean Aurel, à base d’images d’archives. Le commentaire est de Cécil Saint-Laurent, alias Jacques Laurent, un gage absolu de qualité. Sinon, la série Band of Brothers, prenante et documentée, est encore ce qui s’est fait de mieux depuis les vingt dernières années.
Propos recueillis par YV, le 07/03/2020
Von Rundstedt – Laurent Schang – Editions Perrin – 24 €
Sources : Breizh-info.com, 2020
Municipales : la proposition grotesque d'Hidalgo, qui fait même rire ses soutiens (vidéo)
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Mdr oh non je pleure pic.twitter.com/acRycl71Hc
— Jean Louis Groseille (@GroseilleJlouis) February 26, 2020
Mesure de l'intelligence et différences raciales
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Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Richard Lynn à Breizh Infos et consacré à la question du lien entre quotient intellectuel (QI) et races. Chercheur et professeur de psychologie dans plusieurs universités anglo-saxonnes, Richard Lynn a publié de nombreux travaux sur l'intelligence et la personnalité.
Richard Lynn : « Mes travaux sur les différences raciales de QI pourraient nuire à certaines minorités »
Breizh-info.com : Quand avez-vous commencé à vous intéresser aux notions d’intelligence et de différences entre ethnies ?
Richard Lynn : C’est en 1977 lorsque j’ai découvert que l’intelligence des Japonais était supérieure de 3 points de QI à celle des Américains blancs. Jusqu’alors, pratiquement toutes les discussions sur les différences raciales en matière de renseignement avaient porté sur le problème de savoir pourquoi les Américains blancs et les Britanniques avaient un QI plus élevé que les autres peuples, et cela était généralement attribué au fait que les tests étaient biaisés en leur faveur. Cette découverte m’a amené à me demander si les autres peuples d’Asie du Nord-Est (Chinois et Coréens) avaient un QI plus élevé que celui des Européens. J’ai commencé à rassembler des études sur ce sujet et j’ai découvert que c’était le cas.
Quelles sont vos conclusions en matière de QI et pourquoi sont-elles contestées par d’autres scientifiques ?
Ma découverte la plus importante est ce que j’ai appelé « la théorie des hivers froids » pour expliquer l’évolution des différences raciales en matière d’intelligence. Cette théorie explique la relation entre les QI des races et la froideur des hivers. Ainsi, les Asiatiques du Nord-Est ont dû survivre aux hivers les plus froids et ont développé les QI les plus élevés (105), suivis par les Européens (100), les Nord-africains et les Sud-Asiatiques (84) et les Africains subsahariens (70). J’ai proposé cette solution pour la première fois en 1991 et elle a été largement acceptée.
Les conclusions ne sont pas contestées par d’autres scientifiques qui ont des connaissances sur ce sujet du QI. Il a d’ailleurs été récemment démontré par le professeur Heiner Rinderman que 83 % des scientifiques qui ont des connaissances sur ce sujet sont bien convaincus que le faible QI moyen en Afrique subsaharienne s’explique en partie par des bases génétiques.
Dans vos études sur le QI, vous avez tiré quelques conclusions selon la géographie. Mais qu’en est-il, par exemple, des Asiatiques vivants aux États-Unis ? Ou des Noirs vivant en Europe ? Ou des Blancs en Afrique du Sud ? Les tests de QI sont-ils vraiment adaptés pour l’Asie, pour l’Afrique ou dans d’autres pays que les pays blancs qui les ont fabriqués ?
Je donne les QI de tous ces groupes dans mon livre Race Differences in Intelligence, publié en 2015. Ces tests sont parfaitement adaptés pour toutes les autres races.
Vous avez également travaillé sur les différences entre les sexes en matière d’intelligence. Comment avez-vous procédé ?
Dans tous les domaines d’études et de recherches scientifiques, il est souvent question de croyance. Si tous les anciens étudiants sont d’accord sur quelque chose, nous le tenons pour acquis. Tous les experts au lendemain de la Première Guerre mondiale avaient déclaré qu’il n’y avait pas de différence entre les sexes en matière d’intelligence. Dans les années qui ont suivi, de nombreux universitaires que je respectais ont répété cela en boucle.
Par exemple, Herrnstein et Murray ont écrit dans The Bell Curve que « L’histoire constante a été que les hommes et les femmes ont des QI presque identiques ».
Je n’avais aucune raison de douter de ce consensus, mais en 1992, mes certitudes se sont ébranlées lorsque Dave Ankney et Phil Rushton, indépendamment, ont publié des articles montrant que les hommes ont un cerveau plus gros que les femmes, même lorsque celles-ci sont contrôlées en fonction de leur taille et de leur poids. Il était évident que ces résultats posaient un problème. Il est bien établi que la taille du cerveau est positivement liée à l’intelligence via une corrélation d’environ 0,4. Comme les hommes ont un cerveau plus gros que celui des femmes, les hommes devraient avoir un QI moyen plus élevé que celui des femmes. Pourtant, tous les experts ont convenu que les hommes et les femmes avaient les mêmes QI
J’ai été confronté à ce problème pendant environ six mois. J’ai étudié la question. Puis, j’ai enfin trouvé la solution. Lorsque j’ai examiné les études relatives à l’âge des échantillons testés, j’ai constaté que les hommes et les femmes avaient la même intelligence jusqu’à l’âge de 15 ans, comme ce qui était déclaré. Puis j’ai découvert qu’à partir de l’âge de 16 ans, les hommes commencent à présenter des QI plus élevés que les femmes et qu’à l’âge adulte, la différence atteint environ 5 points de QI, ce qui est tout à fait cohérent avec la taille moyenne des cerveaux. J’ai publié ces conclusions dans mon livre appelé The Ankney-Rushton anomaly en 1994.
Vous ne cachez pas votre inquiétude face à ce que vous appelez dysgenic immigration (que l’on pourrait traduire par Immigration désavantageuse) et au grand remplacement auquel les blancs seraient confrontés en Occident. Dans l’état actuel des choses, quelle est l’ampleur de ce que vous estimez être une menace, notamment pour nos QI ?
En 2016, Rindermann et Thompson ont démontré par calcul que l’intelligence des immigrés dans tous les pays européens était inférieure de 6 points de QI en moyenne à celle des populations autochtones. D’autres données confirmant cette conclusion pour un certain nombre de pays économiquement développés ont été rapportées par Woodley of Menie, Peñnaherrera-Aguire, Fernandes & Figueredo en 2017.
On peut cependant prévoir que dans les décennies à venir, les migrants d’Afrique subsaharienne continueront à essayer d’entrer en Europe. La population de l’Afrique subsaharienne a connu une énorme augmentation, passant d’environ 230 millions en 1960 à environ un milliard en 2018, et elle continuera probablement à augmenter. Les taux élevés de chômage et de pauvreté dans toute l’Afrique subsaharienne devraient se poursuivre et, inévitablement, un grand nombre de personnes chercheront à améliorer leur vie en Europe et beaucoup y parviendront.
Stephen Smith a prédit dans son livre de 2018 que dans 35 ans, il y aura probablement entre 150 et 200 millions d’Africains subsahariens en Europe, soit environ un tiers de la population. Il se peut que l’Espagne s’oppose de plus en plus à cette immigration, mais même si elle fermait ses frontières aux migrants, ceux-ci trouveraient d’autres moyens d’entrer en Europe. Beaucoup d’entre eux seront acceptés comme demandeurs d’asile et la plupart de ceux dont la demande d’asile est rejetée resteront, car il sera impossible de les expulser. En Grande-Bretagne, seuls 40 % des personnes dont la demande d’asile a été rejetée depuis 2004 ont été expulsées.
Il est inévitable que dans toute l’Europe occidentale, le nombre de non-Européens augmente en raison de l’immigration et de leur plus grande fécondité, de l’arrivée continue de demandeurs d’asile, des entrées illégales et des mariages avec des Européens. En Grande-Bretagne, la croissance de la proportion de non-Européens dans la population a été calculée en 2010 par le démographe David Coleman qui estime que les peuples autochtones passeront de 87 % de la population en 2006 à 56 % en 2056, et deviendront une minorité vers 2066. Des projections similaires concernant la croissance du nombre de non-Européens en Autriche, en Belgique, en Grèce, en Allemagne, en Italie et en Espagne, conduisant à ce qu’ils deviennent majoritaires dans la deuxième moitié du XXIe siècle, ont été faites par Ediev, Coleman et Sherbokov en 2013. En Allemagne de l’Ouest, 42 % des enfants de moins de six ans étaient issus de l’immigration en 2018. En Grande-Bretagne, Kauffman a calculé en 2018, que la population autochtone tomberait à 32 % de la population en 2120 (NDLR : À ce sujet voir cet article du DailyMail)
L’immigration aura également un effet dysgénique aux États-Unis où la plupart des immigrants sont hispaniques et environ deux tiers d’entre eux viennent du Mexique, où environ 9 % de la population est blanche, environ 60 % sont métis et environ 30 % sont des Amérindiens. Une méta-analyse de 39 études sur les Hispaniques adultes aux États-Unis, réalisées par Roth, Bevier, Bobko, Switzer & Tyler en 2001, a conclu qu’ils ont un QI moyen de 89. La faiblesse du QI moyen des Hispaniques est compensée dans une certaine mesure par le QI élevé des Asiatiques du Nord-Est (Chinois, Japonais et Coréens), mais Rindermann a calculé en 2018 que l’intelligence moyenne des immigrants aux États-Unis est inférieure d’environ 7 points de QI à celle de la population et réduit donc l’intelligence nationale. Cette tendance devrait se poursuivre, car la population hispanique devrait atteindre environ 60 millions de personnes en 2018 et devrait dépasser les 100 millions d’ici 2050.
Il y a également eu une immigration dysgénique au Canada. En 2006, M. Bélanger a montré dans une analyse du recensement de 2001 que l’indice synthétique de fécondité se situait autour de 1,5 enfant par femme depuis un certain nombre d’années et que les femmes ayant immigré au cours des dix années précédentes avaient 19 % de chances de plus que les autres femmes d’avoir eu un enfant au cours de l’année. Les Noirs, les Philippins et les Arabes présentaient le taux de fécondité le plus élevé, avec respectivement 60 %, 28 % et 22 %, plus de chances que les Blancs d’avoir un enfant de moins d’un an. Les Chinoises, les Coréennes, les Japonaises et les femmes d’Asie occidentale étaient les moins fécondes. Dans un autre article publié en 2007, Bélanger donne le nombre d’immigrants comme suit : 1,1 million en 1981, 1,6 million en 1986, 2,5 millions en 1991, 3,2 millions en 1996 et 4,1 millions (13,4 % de la population) en 2001. En tenant compte de l’immigration et de la fécondité futures probables, il estime qu’en 2031, le nombre sera de 10 600 millions (27,4 % de la population). Il estime que, jusqu’en 2031, le nombre d’immigrants augmentera à un taux moyen de 32 pour mille par an, tandis que le reste de la population augmentera à un taux d’environ 2 pour mille par an.
L’immigration dysgénique a été moins problématique en Australie et en Nouvelle-Zélande. L’Australie a interdit aux navires transportant des migrants de débarquer et les a détournés vers des camps en Papouasie–Nouvelle-Guinée. Les immigrants non européens ont été principalement des Chinois et des Indiens qui, lors du recensement de 2006, représentaient 6 % de la population. Ces immigrants ont pour la plupart bien réussi en Australie, ils ne sont donc pas un problème dysgénique. Le problème dysgénique en Australie est la forte fécondité des Aborigènes, qui a entraîné une augmentation de leur nombre de 106 000 lors du recensement de 1961 à 517 000 en 2006. Le QI moyen de ces derniers est de 62.
En Nouvelle-Zélande, la proportion d’Européens a diminué de 1956 à 2001, passant de 94 % à 74 %, et la proportion d’Asiatiques a augmenté de 0 % à 6 %, comme l’a indiqué en 2010 l’Office statistique de Nouvelle-Zélande. En 2001, 56 % des Asiatiques étaient des Chinois, des Japonais et des Coréens, 26 % provenaient du sous-continent indien et les 18 % restants du reste de l’Asie. Il ne s’agit pas d’un problème dysgénique grave. Le principal problème dysgénique est l’augmentation de la proportion de Maoris de 6 % en 1956 à 16 % en 2001, en raison de leur forte fécondité, et des habitants des îles du Pacifique de zéro en 1956 à 10 % en 2001, en raison de l’immigration. Le QI moyen de ces derniers est de 90.
Comment voyez-vous l’avenir proche de notre monde ?
Dans mon dernier livre, coécrit avec mon jeune collaborateur David Becker et intitulé The Intelligence of Nations, nous envisageons cinq scénarios sur l’avenir probable des nations et des QI nationaux.
Premièrement, dans les pays économiquement développés, la baisse des QI nationaux qui a été signalée dans un certain nombre d’entre eux se poursuivra en raison de la fertilité dysgénique et de l’immigration. Le principal problème est le grand nombre de femmes de carrière au QI élevé et très instruites qui restent sans enfant. Il est probablement impossible d’introduire des politiques visant à augmenter la fécondité de ces femmes qui ont presque été éduquées pour ne pas avoir d’enfants. Il est également probablement impossible d’introduire des politiques visant à réduire la fécondité de celles qui ont un faible niveau d’intelligence.
En Europe occidentale, aux États-Unis et au Canada, l’intelligence diminuera également en raison de l’immigration dysgénique consistant en l’installation continue d’immigrés ayant une intelligence plus faible et une fécondité plus élevée que celle des populations d’accueil. Les mesures destinées à empêcher cela, comme la construction d’un mur le long de la frontière américano-mexicaine ou la tentative de restreindre l’immigration en Europe occidentale, seront inefficaces. Le déclin de l’intelligence réduira la puissance économique, technologique, scientifique et militaire de ces pays.
Deuxièmement, les QI nationaux continueront à décliner en Europe de l’Est, au Japon, à Taiwan, en Corée du Sud, en Australie et en Nouvelle-Zélande en raison de la faible fécondité des femmes de carrière à QI élevé, mais le déclin ne sera pas aussi important qu’en Europe occidentale, aux États-Unis et au Canada, car dans ces pays, il y a peu d’immigration dysgénique.
Troisièmement, alors que l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont connu une faible immigration dysgénique, leurs populations indigènes à faible QI continueront à croître en raison de leur forte fécondité. Il ne sera pas possible de réduire ce phénomène et cela aura un effet négatif sur leur QI national.
Quatrièmement, les QI nationaux continueront à augmenter dans les pays en développement économique. Il se peut qu’une certaine fécondité dysgénique entraîne une baisse de l’intelligence génotypique, mais celle-ci sera plus que compensée par les améliorations en matière de nutrition, de santé et d’éducation, comme ce fut le cas dans les pays économiquement développés pendant la majeure partie du XXe siècle. Les différences d’intelligence entre les nations économiquement développées et celles en développement seront donc réduites, bien qu’elles ne soient pas éliminées, car les populations des nations économiquement développées conserveront un avantage génétique, comme le montre la taille moyenne plus importante de leur cerveau.
Cinquièmement, la Chine a connu une fécondité dysgénique au cours du dernier demi-siècle. Malgré cela, il y a eu une forte augmentation de 15 points de QI dans l’intelligence des enfants chinois de 1988 à 2006, grâce à des améliorations dans les domaines de la nutrition, de la santé et de l’éducation, et le QI britanniques des enfants chinois en 2006 sont estimés à 109,8. En 2016, le Conseil national des sciences a indiqué que la Chine avait dépassé les États-Unis pour le nombre d’articles publiés dans le domaine des sciences et des technologies.
Il est probable que cette avance s’accroîtra à mesure que l’intelligence en Chine continuera à augmenter, comme elle l’a fait dans d’autres pays en développement économique, grâce à de nouvelles améliorations de l’environnement. Il est également probable que l’intelligence en Chine augmentera avec la réduction de la pollution de l’air qui, à l’heure actuelle, nuit à l’intelligence dans de nombreuses villes. Ainsi, alors que l’intelligence continue à se développer en Chine et à décliner en Europe et aux États-Unis, la Chine va probablement devenir la superpuissance mondiale dans la seconde moitié du XXIe siècle.
Pouvez-vous nous parler de la difficulté de faire votre travail et vos recherches, avec la pression des scientifiques minoritaires et idéologiques ? Vous avez perdu votre titre de professeur émérite à l’Université d’Ulster, pour quelles raisons ?
Parce que mes travaux sur les différences raciales de QI pourraient nuire à certaines minorités, tout simplement… Je n’ai aucune difficulté à faire mon travail, je reçois simplement des critiques auxquelles je réponds. Le professeur Heiner Rindermann a par ailleurs récemment apporté une contribution à cette question du QI et des différences dans son livre de 2018 intitulé Cognitive Capitalism : Human Capital and the Wellbeing of Nations. Il donne des QI nationaux actualisés, qu’il préfère appeler capacités cognitives (CA), pour l’ensemble des 200 nations de toutes tailles dans le monde.
Richard Lynn, propos recueillis par Yann Vallerie (Breizh Info, 24 février 2020)
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