Le Monde (3 février) fait le portrait flatteur d’un « jeune père prêt à prendre les armes » : « ce libéral de gauche » ( qui affirme croire en la vertu des cocktails Molotov … ) « incarne la contestation ukrainienne ». Agé de 37 ans, « il a toujours le visage poupin, l’allure frêle et douce, mais une flamme nouvelle brille dans ses yeux : celle de la rage de celui qui n’en peut plus d’attendre ». On apprend, incidemment, que cet intéressant garçon est juif. Il confie : « Quand j’habitais en Israël, je votais pour les Verts ». Mais il n’explique pas pourquoi il a quitté Israël…
Lors d’une réunion tenue à Bruxelles le 28 janvier entre, d’un côté, Herman Van Rompuy et José Manuel Barroso, présidents du Conseil et de la Commission de l’Union européenne et, d’autre part, le président russe Vladimir Poutine et son ministre des affaires étrangères Sergueï Lavrov, Poutine a dénoncé vertement « l’ingérence » de l’UE en Ukraine. Cette ingérence se traduit, entre autres, par des « conseils techniques » donnés aux émeutiers par de discrets émissaires américains et par le soutien apporté par l’Allemagne (auxiliaire zélée des USA) à l’organisation-clé de l’agitation entretenue à Kiev, le parti UDAR (Alliance démocratique ukrainienne pour la réforme) dirigé par Viktor Klitschko et financé depuis 2010 par la richissime Fondation Konrad Adenauer, principal think tank de la CDU et liée de très longue date aux services secrets américains. Ceci correspondant aux manœuvres américaines destinées à affaiblir l’influence russe. Car voilà la clé de l’affaire ukrainienne : il faut empêcher la Russie de reconstruire sa puissance impériale et l’Ukraine est, sur l’échiquier eurasiatique, une pièce maîtresse.
La tentative de déstabilisation du président ukrainien Ianoukovitch – qui aime rappeler qu’il a été démocratiquement élu – a commencé le 25 novembre 2013, lorsque le président a refusé de signer un accord de libre-échange avec l’Union européenne. Ce qui a été perçu comme un crime de lèse-majesté à Bruxelles, entravant de manière insupportable la mainmise du libéralisme capitaliste sur l’Europe de l’Est. Il fallait faire payer cela à Ianoukovtich, en organisant sa mise hors jeu – au nom, bien entendu, de l’habituel couplet des droits de l’homme…
Poutine a annoncé clairement la couleur : si une équipe hostile à la Russie arrivait au pouvoir à Kiev, elle devrait rembourser sans délai les 11 milliards d’euros prêtés à l’Ukraine par Moscou et l’étalement du paiement de la (lourde) dette gazière deviendrait impossible… Avec certainement d’autres mauvaises surprises. Alors, à qui de jouer ?
Pierre VIAL