LES MYSTERES DANS LA GRECE ANTIQUE : Seconde partie
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L'orphisme
L'orphisme, qui fut le principal agent de la décomposition de l'Hellénisme, n'était pas un sacerdoce, mais un thiase, c'est-à-dire une congrégation religieuse qui s'était formée, ou du moins recrutée avec les débris de l'institution pythagorique. Les Orphiques avaient, comme les Pythagoriciens, une discipline ascétique et des formules de purification qui s'alliaient à un système de métempsycose peut-être emprunté aux Égyptiens (ou à l'Inde). De plus, ils composaient des poésies religieuses et sous prétexte de réformer le culte national, ils embrouillaient toutes les légendes et les compliquaient d'une foule de rêveries philosophiques et de superstitions étrangères qui en changeaient le caractère primitif. Ils altérèrent surtout les cultes mystiques, dont ils rattachaient l'origine à leur prétendu initiateur, Orphée, et sur lesquels ils greffaient toujours le culte de leur patron Dionysos.
Il faut remonter assez haut pour saisir le point de départ des idées orphiques. Jusqu'à Onomacrite, par exemple, contemporain de Pisistrate, qui fabriqua sous le nom d'Orphée un poème dionysiaque sur la passion de Zagreus, sa mort et sa résurrection. Quoique ce poème soit perdu, on sait, par de nombreuses indications, quel était le sens général de cette légende qui venait probablement de la Phrygie et qui se retrouve dans la plupart des religions de l'Asie et de l'Égypte.
Toujours le principe actif de la vie est représenté par un jeune dieu qui meurt à l'automne et qui ressuscite au printemps et la nature, par une déesse qui s'afflige de sa mort et se réjouit de son retour. Tel est le sens des mythes de Zagreus déchirée par les Titans, du troisième Cabire tué par ses frères, d'Osiris mutilé par son frère Typhon. La même idée se reproduit dans la fable de la mutilation d'Attys et dans celle de la mort d'Adonis. La seule différence entre tous ces symboles, c'est que la nature est tantôt la mère, tantôt la soeur ou l'épouse du dieu mort et ressuscité.
L'analogie de ces légendes avec celle de Déméter et de Coré est évidente, et on comprend que des emprunts réciproques aient été faciles. Les Orphiques se firent les colporteurs de ces échanges que favorisait d'ailleurs le goût naturel des Grecs pour les importations étrangères. Malheureusement, le caractère chaste et sévère de la religion grecque eut souvent à souffrir de ces emprunts. Les mythes phrygiens et syriens ont presque toujours un caractère obscène. Les processions phalliques, le culte de Priape, viennent de cette source. En confondant toutes les déesses dans la nature, tous les dieux dans un principe créateur, les Orphiques avaient conservé des distinctions de rôles. C'était un dieu sous plusieurs noms, un dieu en plusieurs personnes, qui s'engendrait lui-même en s'incarnant dans le sein de sa mère. De là, dans la forme des mythes, des accouplements monstrueux et bizarres dont l'expression, notamment dans les mystères de Sabazios, peut expliquer les accusations des Pères de l'Église. Il est vrai que ces accusations étaient réciproques, car, dans ce conflit de doctrines qui signale la décadence du vieux monde, on voit poindre les querelles religieuses qui remplissent si tristement l'histoire du monde moderne. Les coups les plus violents ne partent pas toujours des camps opposés. Les gnostiques et les manichéens sont fort maltraités par d'autres sectes chrétiennes. Apulée ne ménage pas davantage les prêtres mendiants de la déesse de Syrie. Il est difficile de prendre parti dans ces querelles, surtout après que les derniers vainqueurs ont étouffé la voix des vaincus. Mais on peut remarquer du moins que la plupart des attaques des chrétiens contre l'immoralité des mystères s'adressent à des dogmes orphiques. Et pourtant, l'orphisme fut le véritable précurseur du christianisme. Il substitua au principe de la pluralité des causes celui de l'unité divine, au culte de la vie le culte de la mort, à la morale active et politique de la Grèce républicaine la morale passive et ascétique de l'Orient.
Les endormeurs de remords
La doctrine de la métempsycose et de la palingénésie tendait à représenter le corps comme une prison de l'âme et la vie terrestre comme l'expiation de quelque crime antérieur. Pour éviter un sort pareil ou pire, encore dans une autre vie, il fallait se purifier de toutes les souillures. Le dieu des mystères était appelé le libérateur, le rédempteur des âmes, le choeur des astres, conduit par Dionysos, représentait dans son évolution circulaire la descente et l'ascension des âmes, tour à tour entraînées vers la Terre par l'ivresse de la vie et ramenées vers le ciel par l'ivresse de l'extase. Le Soleil de nuit, le chorège des étoiles, était le dieu de la mort et de la résurrection, de là tant de représentations de bacchanales sur les sarcophages. Depuis que l'activité politique était morte, l'esprit cherchait un aliment dans la vie religieuse mais la religion républicaine, le culte national des héros protecteurs, avait disparu avec la liberté et la patrie. Dans les âmes repliées sur elles-mêmes, il n'y avait place que pour la religion de la crainte. Chacun songeait à son salut, chacun tremblait à l'idée de la mort prochaine et des expiations à venir, chacun sacrifiait aux dieux de la mort.
On courait chez les endormeurs de remords, on allait des Orphéotélestes aux Métragyrtes, des mystères d'Isis à ceux de Mithra, on demandait le baptême par l'eau ou le baptême par le sang, appelé taurobole ou criobole : le myste descendait dans une fosse au-dessus de laquelle on immolait un taureau ou un bélier, et le sang tombait sur lui goutte à goutte. Dans les mystères de Samothrace, les purifications étant proportionnelles aux fautes, il fallait se confesser au prêtre des Cabires, appelé Koiès. On dit que Lysandre, invité à déclarer quel était son plus grand crime, avait répondu :
« Est-ce toi ou les dieux qui l'exigent? - Ce sont les dieux, dit le prêtre. - Eh bien retire-toi, reprit Lysandre; s'ils m'interrogent, je leur répondrai. »
La même question fut faite à Antalcidas, qui répondit seulement :
« Les dieux le savent. »
Il paraît d'ailleurs qu'il y avait des crimes inexpiables, car on dit que Néron n'osa pas s'approcher d'Athènes à cause des imprécations qui éloignaient les parricides des mystères d'Eleusis. Selon Zosime, Constantin ayant voulu se faire purifier du meurtre de son fils, les prêtres lui diront qu'il n'y avait pas d'expiation pour un pareil crime; ce fut alors qu'il embrassa le christianisme, sur l'assurance qui lui fut donnée que les chrétiens savaient effacer toute espèce de péché. Ces purifications n'étaient pas nouvelles en Grèce, on en voit de nombreux exemples dans les légendes héroïques. A la vérité, Homère n'en parle pas, mais il en est déjà, question dans les Cycliques; on se purifiait pour les meurtres involontaires. Ces cérémonies n'étaient, dans l'origine, que le signe visible du repentir, qui réconcilie l'âme avec les dieux et avec elle-même mais, comme il arrive souvent en pareil cas, on finit, quelquefois par attribuer une vertu expiatoire aux formules elles-mêmes, et par s'imaginer que les eaux lustrales suffisaient pour laver les souillures.
Les cultes mystiques furent la dernière forme de la pensée religieuse de la Grèce. La religion et la philosophie se réconcilièrent dans l'orphisme. On trouve la formule philosophique du panthéisme dans quelques fragments de l'école orphique qui nous sont parvenus; en voici un que Stobée cite sous le nom de Linos :
« L'univers règle toutes choses selon les différences. Tout sort de l'univers et l'univers sort de tout. L'unité est tout, chaque être est une part de l'unité, tout est dans l'unité. Car, de ce qui était un, sont sorties toutes choses et de toutes choses sortira de nouveau l'unité par la loi du temps. Toujours un est multiple, l'illimité se limite sans cesse et persiste sous tous les changements. La mort, immortelle et mortelle à la loi, enveloppe tout l'univers se détruit et meurt, et sous les apparences mobiles et les formes passagères qui voilent à tous les regards ses métamorphoses, il demeure incorruptible dans son éternelle immobilité. »
De ces dogmes devait sortir une résignation austère qui convenait à la fatigue universelle des âmes :
« Ô univers, s'écrie Marc-Aurèle, tout ce qui te convient me convient. Rien n'est prématuré ni tardif pour moi dans tout ce qu'amènent tes heures. Tous tes fruits me sont bons, ô nature! Tout sort de toi, tout est dans toi, tout rentre en toi! »
A mesure que les ombres du soir s'étendaient dans le ciel du vieux monde, la vue des choses divines devenait moins distincte. Tous les types divins semblaient se confondre dans une puissance unique et sans bornes, adorée sous mille noms.
« J'ai entendu tes prières, dit-elle dans Apulée, moi, la Nature, mère des choses, la maîtresse de tous les éléments, née au commencement des siècles, la somme de tous les Dieux, la reine des Mânes, la première des vertus célestes, la face uniforme des dieux et des déesses. J'équilibre par mes mouvements les hauteurs lumineuses du ciel, les souffles salutaires de la mer, le silence lugubre des enfers; divinité unique, qu'adore l'univers entier sous des aspects multiples, par des rites variés, sous des noms divers. Les Phrygiens premiers-nés m'appellent la Mère de Pessinonte, les autochtones de l'Attique, Athéna Cécropienne, les Chypriotes entourés par les flots, Aphrodite de Paphos, les Crétois armés de flèches, Artémis Dictynne, les Siciliens aux trois langages, Perséphone Stygienne, les Éleusiniens, la nourrice Déméter. Les uns me nomment Héra, les autres Enyo, ceux-ci Hécate, ceux-là Rhamnusia. Mais chez les Éthiopiens qu'éclairaient les premiers rayons du dieu Soleil, chez les Aryâs, chez les Égyptiens, instruits des sciences antiques, on m'honore par les rites qui me sont propres et on me donne mon vrai nom, la reine Isis. »
Aux approches de la nuit, le monde tendait les bras vers cette mère antique des choses, qui tire tout de son sein et y fait tout rentrer. Absorbé comme un vieillard dans la pensée de la mort, il essayait de se résigner à ce long sommeil et passait des terreurs superstitieuses aux extases de l'espérance. Et revenant pour mourir dans cette vieille Égypte qui avait été son berceau et qui allait être sa nécropole, il se coucha en silence dans le tombeau du passé, et sa dernière adoration fut pour Sarapis, le dieu de la mort.
Sources : Louis Ménard, Le polythéisme hellénique, 1863
« On aurait dû tout arrêter, c’était une mascarade »
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« On aurait dû tout arrêter, c’était une mascarade »
Ces mots sont d’Agnès Buzyn, l’ex-ministre de la Santé, qui a lâché dans les colonnes du Monde un aveu très lourd : « Quand j’ai quitté le ministère, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous ». Elle avait en effet tous les moyens de connaître parfaitement l’ampleur du désastre en cours. Alors pourquoi n’a-t-elle rien fait, rien dit ? Pour ne pas risquer de déplaire à ses employeurs ? Ses remords tardifs et ses larmes de crocodile ne peuvent l’absoudre. Elle encourt une grave responsabilité devant les Français. Mais elle est aussi visée par un gouvernement ivre de rage de voir cette recrue de choix quitter le navire : elle est donc traitée de « lunaire et pathétique ».
Pierre Vial
A Roubaix, un immigré menace le personnel soignant (vidéo)
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Le maire de Bobigny s'acharne à embaucher la compagne d'un ancien membre du gang des barbares
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Le maire de Bobigny s'acharne à embaucher la compagne d'un ancien membre du gang des barbares
« Violences volontaires avec arme »
Jean-Christophe Lagarde a raison sur un point : une personne ne peut être reconnue coupable des agissements d'un tiers, fût-il le père de ses enfants. En revanche, ce que le président de l'UDI ne dit pas, c'est que la mairie de Bobigny s'acharne à embaucher Lynda Benakouche alors que la préfecture de Seine-Saint-Denis a exercé trois recours devant le tribunal administratif pour faire annuler trois recrutements successifs, car elle considère ses diplômes et son niveau de rémunération comme incohérents par rapport à ses postes. Et ce, alors même que sa proximité avec le gang des barbares et sa condamnation judiciaire à de la prison ferme pour « violences volontaires avec arme » avaient été publiquement révélées.
Le premier recours concernait son premier recrutement après la victoire de l'UDI en qualité d'agent non titulaire pour une durée d'un an à compter du 2 juin 2015. Pour justifier sa demande d'annulation, la préfecture faisait notamment valoir au tribunal administratif de Montreuil que « le recrutement n'a pas été précédé d'une délibération créant l'emploi » et qu'il était entaché « d'une erreur manifeste d'appréciation dans la détermination du niveau de rémunération retenu ». Dans un jugement datant de juin 2017, le tribunal lui a donné raison et a annulé son arrêté de recrutement, considérant que « sa rémunération principale calculée par référence à l'indice brut correspondant au 11e échelon du grade d'attaché territorial » ne correspondait pas à ses diplômes et à son expérience professionnelle.
Par la suite, Lynda Benakouche a été à nouveau embauchée le 25 mai 2018 par le maire de Bobigny. Dans un deuxième recours, la préfecture de la Seine-Saint-Denis a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler le nouveau contrat de renouvellement du recrutement de Mme Benakouche en qualité d'agent contractuel pour assurer les fonctions de chargée d'étude et d'évaluation des politiques sociales d'une durée d'un an. Un poste normalement réservé à un fonctionnaire, mais la loi permet aux communes de recruter des contractuels pour remplacer momentanément un titulaire en cas d'impossibilité de pourvoir le poste. Considérant notamment que la commune n'a pas démontré « l'impossibilité de recruter un fonctionnaire », le tribunal a donc annulé le contrat en 2019.
Acharnement extrêmement rare
Elle a une nouvelle fois été embauchée par la mairie, comme cadre de catégorie A, ce qui correspond à un grade très élevé dans la fonction publique alors que son poste effectif serait stagiaire « en charge de l'animation de l'enfance ». Or, selon une source judiciaire proche du dossier, un troisième déféré pour « nomination sur ordre » datant de novembre 2019 a encore été exercé contre Lynda Benakouche devant le tribunal de Montreuil. À nouveau, le recours viserait une rémunération sans rapport avec le poste proposé, même si en octobre 2014 elle a commencé une formation qui a débouché, en janvier 2016, sur l'obtention d'une licence spécialité « animation socio-éducative ou culturelle ». Le jugement devrait avoir lieu en juin 2020, toujours selon cette source.
"Même en 2008, les mouvements étaient différents" : de Wall Street à Paris, les bourses s'effondrent à nouveau
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KRACH - Les bourses vivent une nouvelle journée noire, enregistrant des chutes records. Le spectre d'une récession affole les marchés, malgré les décisions prises par les banques centrales pour amoindrir l'impact économique du nouveau coronavirus.
Vers un second krach boursier en moins d'une semaine : les places boursières dévissent une à une ce lundi, les marchés accueillant avec scepticisme les décisions prises par les pouvoirs publics aux quatre coins du monde pour essayer d'enrayer l'impact économique de la crise sanitaire.
La panique est telle qu'à la bourse de New York, les échanges ont été suspendus peu après l'ouverture. En cause : la dégringolade du S&P 500, cet indice qui représente les 500 plus grandes entreprises de Wall Street. Au moment de la suspension, le S&P 500 s'effondrait de 8,14%, le Dow Jones de 9,71% et le Nasdaq, à forte coloration technologique, de 6,12%. La cotation a fini par reprendre, dans l'après-midi, sans que cela ne freine la chute du Dow Jones, qui atteignait 11,84% en début d'après-midi.
"Même en 2008 où nous étions proches d'un cataclysme, les mouvements étaient différents"
La bourse de New York n'est pas un cas isolé : la Bourse de Francfort a plongé à 10% en séance, avant de finir la journée à 5,31%. A Paris, c'est un lundi noir qui se dessine : vers 13h35, l'indice CAC 40 s'effondrait de 471,88 points à 3.646,48 points, n'en finissant pas de sombrer après sa chute de 20% la semaine dernière. "Nous n'avons jamais vu une pression à la baisse comme celle-ci. Même en 2008 où nous étions proches d'un cataclysme, les mouvements étaient différents", a concédé à l'AFP Alexandre Hezez, chez Richelieu Gestion. La situation s'est quelque peu amélioré dans la deuxième partie de journée avec une chute à 5,75% pour finir à 3881,46 points.
Les marchés font face à une extrême incertitude depuis le début de la crise du coronavirus, qui s'est encore accentuée la semaine dernière entre la pire chute du Dow Jones depuis 1987 jeudi (-10%), et sa plus importante hausse depuis 2008 vendredi (+9,4%). L'explosion du nombre de cas de contaminations dans le monde et les mesures drastiques de confinement imposées un peu partout affolent les investisseurs, qui redoutent une récession économique mondiale.
Pour freiner l'hémorragie, les banques centrales et les gouvernements emploient les grands moyens. La Réserve fédérale américaine a abaissé brutalement dimanche son taux à 0%-0,25% et annoncé une injection de liquidité de 700 milliards de dollars, en amont de la réunion de politique monétaire qui devait se dérouler mardi et mercredi prochain. Côté UE, une réunion extraordinaire des 27 dirigeants est prévue mardi pour le suivi de la réponse à la pandémie du nouveau coronavirus. Reste à savoir si cela redonnera confiance aux marchés, plus volatiles que jamais à l'heure d'une épidémie mondiale.
https://www.lci.fr 16:03/2020
Envahisseurs : la maire de Calais "approuve" et "soutient" l'action d'Emmanuel Macron
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Natacha Bouchart, maire Les Républicains de Calais et vice-présidente de la région Hauts-de-France, estime que la politique migratoire du président de la République est "plutôt cohérente".
La politique migratoire d'Emmanuel Macron "est une action que j'approuve, que je soutiens, que je partage, avec laquelle je travaille", a déclaré, mardi 26 décembre sur franceinfo, Natacha Bouchart, maire Les Républicains (LR) de Calais et vice-présidente de la région Hauts-de-France.
"Le ministre de l'Intérieur d'aujourd'hui a plus un discours de fermeté, et, à côté on a un président de la République qui a des réponses, aussi, d'humanité, a estimé la maire de Calais. Si on veut avoir un discours d'humanité, il faut avoir des outils judiciaires pour les forces de l'ordre pour permettre de faire en sorte que ceux qui sèment le trouble à l'ordre public en permanence, et je parle de mon territoire, puissent-être interpellés, et, pour certains, renvoyés. Tout cela est plutôt cohérent pour moi."
Les associations "parfois complices d'actes délictueux"
"On a le ministre de l'Intérieur qui fait en sorte d'éviter que les flux migratoires ne reviennent en force, qui fait face aux humanitaires, a-t-elle ajouté. Je ne parle pas de 'on donne à boire, on donne à manger. L'action humanitaire et le rôle que les représentants ont, est plutôt dans l'accompagnement à des troubles à l'ordre public." Pour la vice-présidente de la région Hauts-de-France, les associations humanitaires "créent et sont parfois complices d'actes délictueux très graves" à Calais.
I-Média n°277 – Brexit : les médias se prennent une claque
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L'IDEOLOGIE DE GUERRE SAINTE DANS L'EUROPE MÉDIÉVALE ET L'ORDRE DU TEMPLE
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L'Europe du Moyen Age est l'enjeu d'une guerre culturelle, d'une «guerre des dieux». Elle voit en effet s'affronter deux systèmes de valeurs: L’un, hérité de l'antiquité païenne, se maintient dans l'inconscient collectif des peuples d’Europe et constitue cette culture populaire dont parle Robert Muchembled (1); L’autre, importé par le christianisme qui en fait une culture officielle, est imposé par des clercs qui entendent s'arroger un monopole sur les intelligences et les âmes. D'où les ambiguïtés, les contradictions internes du monde médiéval. Un monde où l'Eglise, pour assurer son emprise sur les esprits, a utilisé différents procédés. Vis-à-vis du peuple, c'est-à-dire des paysans qui composent l'immense majorité de la population, elle développe un culte et une religiosité «de troisième fonction » (2), par lesquels elle essaie de récupérer les thèmes de fécondité, de vitalisme dionysiaque, de liens avec les forces telluriques, qui viennent d'un très ancien substrat religieux, souvent pré-indo-européen. Pour affirmer, par ailleurs, ses prétentions a exercer la souveraineté, au plan religieux, mais aussi, à l’occasion, au plan politique (théocratie), elle met en avant un sacré «de première fonction», de type apollinien, solaire, propre à séduire intellectuels et artistes.
CHEVALERIE ET PAGANISME
Il reste à trouver le moyen d'influencer, mieux, de prendre en main et d'utiliser la deuxième fonction, celle des guerriers, des chevaliers (3). La chevalerie est «une fraternité guerrière initiatique»(4), héritière des compagnonnages guerriers de l'antiquité germanique que décrivait Tacite dans sa Germanie (5). Significativement, L’adoubement (d'un vieux verbe germanique signifiant «frapper»), ce rite par lequel un chevalier éprouvé fait entrer en chevalerie un jeune homme reconnu digne de cet honneur, reprend les gestes de la remise des armes décrite par Tacite et qui consacrait l'intronisation du jeune Germain dans le monde des guerriers. «Entre le rituel germanique et le rituel de la chevalerie, note Bloch, la continuité n’est pas douteuse ». Soucieuse de récupérer à son profit le dynamisme et le sens du service communautaire qui habitaient les chevaliers, l’Eglise a donc voulu christianiser les gestes de l’adoubement pour faire, d’une cérémonie empreinte d’un évident paganisme, « une liturgie de chevalerie », comme l’écrit Etienne Delaruelle(6).
L'homme du Moyen Age est très sensible au geste, au symbole, au signe. Il est donc révélateur que, dans sa volonté d'orienter à son goût le rituel chevaleresque, L’Eglise y introduise des éléments qui semblent suggérer fortement un parallélisme entre rites ecclésiastiques et rites guerriers. C'est ce que l'on constate à la lecture d'un Pontificat romano-germanique, composé à Mayence dans la deuxième moitié du Xème siècle. «Cérémonial de la vie laïque et cérémonial religieux, remarque Delaruelle, s'empruntent mutuellement: on peut se demander si le soufflet de la confirmation n'est pas une imitation de la colée, élément caractéristique de l'adoubement (7); et si, à l'inverse, la consécration du chevalier n'aurait pas été, plus ou moins consciemment, modelée sur l'ordination du clerc».
La christianisation des rites de chevalerie doit, dans l'esprit des ecclésiastiques, permettre à l'Eglise de contrôler le métier des armes: ce n'est certainement pas un hasard si la benedictio vexilli (bénédiction de l'étendard) et la benedictio ensis (bénédiction de l'épée) se trouvent mentionnées, au titre des bénédictions réservées à l'évêque, dans une dizaine de manuscrits s'échelonnant de la fin du Xème à la fin du Xlème siècle, tous d'origine germanique. Ces signes éminents du pouvoir guerrier que sont l'étendard et l'épée doivent recevoir, en somme, » l’habilitation » des clercs.
Par ailleurs, l’encadrement des hommes de guerre s'effectue grâce au mouvement dit « de la paix de Dieu» (8), vaste entreprise menée par l'Eglise pour imposer aux guerriers des limites à leurs activités et, ce faisant, revendiquer pour les clercs l'exercice d'un véritable droit de souveraineté, au moment où en France le pouvoir politique, du fait de la décadence carolingienne, semblait en pleine déliquescence (la relève capétienne n'ayant pas encore eu le temps de faire ses preuves).
UNE ARME POLITIQUE: LA CROISADE
Mais plus encore, sans doute, que la christianisation des rites de chevalerie et les mouvements de paix, la croisade apporte à l'Eglise la possibilité d'utiliser à son profit le dynamisme guerrier des chevaliers européens. Alors que le conflit entre l'Empire et la Papauté a pris, depuis plusieurs dizaines d'années, un tour violent, le déclenchement de la croisade par Urbain ll, à la fin du Xlème siècle est une arme politique de premier choix pour l'Eglise, qui peut exercer, au nom de l'impératif de la délivrance du tombeau du Christ, un véritable chantage sur les souverains d'Europe, contraints moralement de s'aligner sur la politique pontificale. Quant aux chevaliers, voici trouvé un bien utile exutoire (9) pour leurs instincts belliqueux.
La Croisade apparaît, dans la propagande ecclésiastique, comme l'occasion irremplaçable fournie aux guerriers de faire oublier leurs méfaits et turpitudes en plaçant leur épée au service de la seule cause vraiment légitime, celle de la croix. Et c'est dans le cadre de la croisade que nait une institution d'une grande importance idéologique dans l'évolution du christianisme médiéval: I’ ordre du Temple.
L'ordre du Temple, fondé en Terre Sainte pour fournir aux pèlerins une escorte armée sur des routes restées peu sûres dans un pays conquis mais mal contrôlé, a justifié son existence, puis son développement, par sa prétention à incarner le modèle du chevalier chrétien. Ce n'est pas le moindre paradoxe offert par cet ordre, né en 1119-1120 (10), que de vouloir associer l'idéal de l 'orator et celui du bellator, en une synthèse dont l'intérêt est de nous fournir un bon exemple de la politique de récupération et d'intégration du monde chevaleresque que l'Eglise a poursuivie à partir des dernières décennies du Xème siècle.
L'EGLISE ET LA GUERRE
Cette politique a été rendue possible par l'étonnante évolution qu'a suivie, depuis les premiers siècles chrétiens, la théologie de la guerre. La guerre et le guerrier sont condamnés avec force par le christianisme primitif. S'appuyant sur les Ecritures (11) le refus des armes et de la violence est intrinsèque à la conception du monde du christianisme primitif: « Dès les origines, note Jean-Michel Hornus (12), ce refus s'est présenté, non comme une espèce de dogme ou de loi ecclésiastique, mais comme un état d'esprit des chrétiens, une réaction toute spontanée». Tertullien (13) ou Clément d'Alexandrie (14) n'ont pas de mots trop durs pour flétrir ceux qui cèdent à la tentation des armes. Des pénitenciels (15), des conciles (16) frappent, jusqu'en plein Xlème siècle, de sévères sanctions tout homme ayant tué un de ses semblables à la guerre, «même dans une guerre juste, même en se défendant légitimement» (17)
Une évolution sensible se produit cependant avec le compromis constantinien: I’Église doit prendre en compte les nécessités qu'implique une coexistence de plus en plus intime avec l’Etat, et désavouer par conséquence l'incivisme militant que constitue, forcément, un antimilitarisme déclaré. Lorsque, quelques générations plus tard, les invasions germaniques mettent en question de façon de plus en plus flagrante le sort de l'Empire, un Empire devenu officiellement chrétien, I'Eglise se résout à franchir un pas de plus et à formuler, par la bouche de Saint Augustin, une théorie de la guerre juste: «Le soldat qui tue l'ennemi, comme le juge et le bourreau qui exécutent un criminel, je ne crois pas qu'ils pêchent car, en agissant ainsi, ils obéissent à la loi... Le soldat qui tue l'ennemi est simplement le serviteur de la loi. Il lui est donc facile de remplir son service sans passion afin de défendre ses concitoyens et de s'opposer à la force par la force» (18).
Grégoire le Grand dégage, à partir de l'augustinisme politique (19), une conception ministérielle de la royauté (20) et Isidore de Séville affirme sans sourciller que le devoir du prince chrétien est d'imposer «par la terreur de la discipline ce que les prêtres sont impuissants a faire prévaloir par la parole» (21). La guerre est donc juste qui fait passer dans les faits les exigences de la doctrine chrétienne, à l'intérieur du monde soumis à l'influence de l'Eglise. Que vienne une nouvelle forme de guerre, tournée vers l'extérieur de la chrétienté, contre le païen ou l'infidèle: la guerre juste deviendra une guerre sainte.
La période carolingienne est déterminante dans cette évolution. Contre la Saxe païenne, contre l'lslam ibérique, la force guerrière des Francs voit son application sanctifiée par le but à atteindre: étendre le règne de la Croix (22). Sur la mosaïque du Latran, I’étendard confié à Charlemagne par saint Pierre illustre le rapport idéal imaginé par les clercs entre le monde des guerriers et le sacerdoce: celui qui porte l'épée met celle-ci au service du détenteur du pouvoir des clefs (23). Mais bientôt, avec la décadence carolingienne, le pouvoir impérial abdique sa responsabilité de bras armé du Saint-Siège. Face aux menaces de l'lslam, qui viennent battre les côtes d'ltalie, le Souverain Pontife doit prendre l'initiative de la résistance et promettre, comme Léon IV en 848, le proemium caeleste à ceux qui, venant au secours de Rome menacée par les Sarrasins, tomberont «pour la vérité de la foi, le salut de la patrie et la défense des chrétiens» (24).
L'idéologie de croisade, déjà présente aux IXème et Xème siècles, dans la phase défensive de la lutte entre Islam et Chrétienté, prend toute son ampleur lorsque s'ouvre, au Xlème siècle, une phase offensive, avec l'annonce, par le Saint-Siège, d'un objectif nouveau: Jérusalem. Ce nom seul a une résonance affective profonde dans l'inconscient collectif de la chrétienté, comme l'a montré Paul Alphandéry (25). La délivrance des Lieux Saints exige la mise en œuvre d'un potentiel militaire que seule peut fournir la chevalerie, cette chevalerie si rétive aux efforts des clercs qui, dans l'esprit du mouvement grégorien et par le biais des trêves et paix de Dieu, comme nous l'avons vu plus haut, essayent de plier la caste des guerriers au schéma idéal d'une société chrétienne divisée en oratores, bellatores et laboratores. Cette «idéologie des trois fonctions», pour reprendre l'expression de Georges Dumézil, qui constitue une réapparition médiévale de la tripartition fonctionnelle propre aux sociétés de l'antiquité indo-européenne (26), sert à justifier, aux yeux des clercs, I’intégration de l'institution et des valeurs chevaleresques dans une structure sociale dominée et orientée par l'Eglise. Mais, jusqu'à la fin du Xlème siècle, il manque un exutoire d'ampleur suffisante pour canaliser le dynamisme guerrier, la turbulence de la chevalerie. Avec la croisade, la papauté trouve cet exutoire lorsque Urbain l l a «I'idée d'utiliser dans une œuvre chrétienne le bouillant dynamisme des seigneurs occidentaux en leur proposant, à la place des interminables et répréhensibles guerres privées, une expédition glorieuse et bénie dans laquelle ils pourraient, le cas échéant, racheter leurs péchés et sauver leur âme» (27).
MOINES ET CHEVALIERS
En aboutissant à une œuvre de conquête, et donc de création d'Etats chrétiens au Proche-Orient, la croisade suscite un difficile problème militaire: comment assurer la sécurité des personnes et des biens dans les territoires nouvellement conquis avec des effectifs squelettiques, compte tenu du départ de nombre de Croisés qui, leur vœu accompli, reprennent le chemin de l'Occident (28) ? Cette question donne tout son sens à la création de la «milice des pauvres chevaliers du Christ», c'est le nom initial de l'ordre du Temple, qui apparait, dès ses débuts, comme un organisme à vocation à la fois militaire et religieuse, destiné à incarner en permanence, et non plus pour un temps donné, comme c'était le cas des Croisés, I'idéologie de croisade.
Cette vocation de croisade permanente et indéfinie est affirmée avec force dans les privilèges que donne, très tôt, la papauté au nouvel ordre, reconnu officiellement lors du concile de Troyes, en 1128. Le 29 mars 1139, Innocent ll adresse au maître Robert de Craon, premier successeur du fondateur Hugues de Payns, la bulle Omne datum optimum. Venant sanctionner le développement spectaculaire qu'a connu l'ordre du Temple en une décennie, grâce aux nombreuses donations d'une aristocratie qui trouve en cette «milice du Christ» une institution conforme à son éthique guerrière, Omne datum optimum est le premier texte où la papauté indique explicitement quelle est la raison d'être du Temple et en quoi elle approuve cette vocation de croisé permanent, de héraut de la guerre sainte, qui définit le Templier. Ce texte est éloquent:
« La nature vous avait fait fils de la colère et adeptes des voluptés du siècle, mais voici que, par la grâce qui souffle sur vous, vous avez écouté les préceptes de l'Evangile d'une oreille attentive, relégué les pompes mondaines et vos biens personnels, abandonné la vie facile qui mène à la mort et choisi humblement le difficile chemin qui conduit à la vie; pour manifester qu'il faut vous considérer effectivement comme les soldats du Christ, vous portez en permanence sur votre poitrine le signe de la croix, source de vie. A l'instar d'Israël, combattants avertis des divines batailles et enflammés par la vraie charité, vous réalisez par vos œuvres l'Evangile: il n'existe pas de plus grand amour que de donner sa vie pour les âmes. A l'appel du Souverain Pontife, vous ne craignez pas de risquer votre vie pour vos frères, en protégeant ceux-ci des attaques païennes. Vous qui avez choisi le nom de chevaliers du Temple, c’est Dieu lui-même qui vous a constitués défenseurs de l'Eglise et adversaires des ennemis du Christ votre zèle, votre louable ferveur à ce saint ouvrage jaillissent de votre cœur et de votre esprit en un total engagement Mais, nous adressant à vous tous, nous ne vous exhortons pas moins dans le Seigneur, et, attentifs à la rémission de vos péchés, nous vous enjoignons au nom de Dieu et du Bienheureux Pierre, prince des Apôtres, de protéger intrépidement l 'Eglise catholique et d’arracher a I’infamie des ennemis de la croix celle qui gémit sous la tyrannie des infidèles, a l 'invocation du nom du Christ» (29) .
La bulle Omne datum optimum est à la base de l'impressionnant édifice de privilèges que les Templiers surent obtenir de la papauté pendant près de deux siècles (30). Elle a été confirmée à de nombreuses reprises, par Anastase IV, Alexandre lll, Lucius lll, Urbain lll, Clément lll, Célestin lll, Innocent lll, Alexandre IV, Clément IV et Grégoire X.
ARDENTS A MANIER LE GLAIVE
L'idéologie de guerre sainte et sa prise en charge par l'ordre du Temple qu'exprime Omne datum optimum doit beaucoup à Bernard de Clairvaux. Il est révélateur de retrouver dans la bulle de 1139 des expressions tirées du De laude novae militiae (31), ouvrage rédigé par Bernard à la demande du maitre du Temple, comme il le dit dans le prologue et qui définit ce modèle du chevalier chrétien ou, plutôt, christianisé qu'est le Templier. Bernard, qui n'a pas de mots trop durs pour fustiger les actes de violence, néfastes et condamnables, auxquels se livrent les chevaliers « du siècle» encourage, au contraire, la saine ardeur guerrière des Templiers:
« Tuer les païens serait même interdit, si on pouvait empêcher de quelque autre manière leurs irruptions et leur ôter les moyens d'opprimer les fidèles. Mais aujourd'hui il vaut mieux les massacrer, afin que leur épée ne reste pas suspendue sur la tête des justes et afin que les justes ne se laissent pas séduire par l’iniquité (..). Disperser ces gentils qui veulent la guerre, retrancher ces ouvriers d’iniquité qui rêvent d’enlever au peuple chrétien les richesses renfermées dans Jérusalem, de souiller les lieux saints et de posséder en héritage le sanctuaire de Dieu, quelle plus noble mission pour ceux qui ont embrassé la profession des armes ! Allons ! Que les enfants de la foi tirent les deux glaives contre leurs ennemis!» (32).
L'exemple vient de haut:
«lls peuvent combattre les combats du Seigneur, ils le peuvent en toute sécurité, les soldats du Christ. Qu’ils tuent I’ennemi ou meurent eux-mêmes, ils n'ont à concevoir aucune crainte; subir la mort pour le Christ ou la donner, loin d'être criminel, est plutôt glorieux. Le chevalier du Christ tue en conscience et meurt tranquille; en mourant, il travaille pour lui-même; en tuant, il travaille pour le Christ. Ce n’est pas sans raison qu'il porte un glaive; il est le ministre de Dieu pour le châtiment des méchants et l'exaltation des bons. Quand il tue un malfaiteur, il n'est pas homicide mais, si je puis dire, malicide, et il faut voir en lui le vengeur qui est au service du Christ et le défenseur du peuple chrétien. La mort des païens fait sa gloire, parce qu’elle est la gloire du Christ: sa mort est triomphante» (33).
Les Templiers, dont les vertus d'abnégation sont opposées par Bernard en une antithèse haute en couleurs, à l’orgueilleuse légèreté des chevaliers «du siècle», sont la vivante illustration d'une harmonieuse conciliation entre valeurs religieuses et valeurs guerrières restées longtemps antagonistes. Décrivant les Templiers au combat, Bernard s'extasie:
«Ces hommes plus doux que des agneaux deviennent alors plus féroces que des lions, et je ne sais si je dois les appeler des moines ou des chevaliers; peut-être faut-il leur donner les deux noms à la fois: car il est manifeste qu'ils joignent à la douceur du moine le courage du chevalier. Tels sont les servants que Dieu s'est choisi parmi les forts d'Israël pour monter la garde autour du lit du Véritable Salomon, autour du Saint-Sépulcre)) (34).
L'idéologie de guerre sainte incarnée, selon le vœu de Bernard de Clairvaux, par les frères du Temple se retrouve, au long des XIème et XlIème siècles, dans les bulles que le Saint-Siège accorde à l'ordre pour définir et rappeler ses privilèges. Il serait fastidieux d'en faire une énumération exhaustive. Contentons-nous de citer Célestin II, qui rappelle la raison d'être initiale des Templiers: «lls ne craignent pas d'exposer leur âme pour leurs frères et ils défendent contre les incursions des païens les pèlerins se rendant aux lieux saints à l'aller et au retour». Puis Eugène III, qui élargit la mission des Templiers aux dimensions d'une défense globale des positions chrétiennes au Levant, imité par Alexandre III: «Incontestablement, la chrétienté est défendue là-bas principalement par eux et par les frères de l'Hôpital». Enfin Célestin III, exaltant les Templiers «ardents à manier le glaive pour élever la gloire de la croix», voit en eux des hommes qui «ne craignant ni la perte ni les dommages de leur propre corps, luttent virilement contre Pharaon et tendent à conduire, par la lance et le glaive, contre les ennemis du nom chrétien, le peuple régénéré dans le Christ vers la terre de promission».
L'OMBRE DES TEMPLIERS
Ces bulles et toutes les autres qui, au nombre d'une centaine, mentionnent la raison d'être et la fonction du Temple, ont été confirmées à de nombreuses reprises par les papes des Xlème et Xllème siècles. Elles traduisent l'apparent succès de cette intégration de la chevalerie à l'ordre chrétien que souhaitaient les grégoriens et dont l'ordre du Temple semble le prototype. Mais l'idéologie de guerre sainte, qui avait permis cette intégration, pouvait-elle survivre aux revers militaires subis par les occidentaux en Terre Sainte et surtout à l'évolution d'une société où l'idéologie marchande était sur le point de supplanter l'idéologie chevaleresque (35) ? C'est peut-être pour avoir méconnu cette évolution et pour avoir privilégié, tout au moins aux yeux de l'opinion, leur rôle de manieurs d'argent au détriment de leur fonction guerrière que les Templiers ont marché, inconscients, vers leur perte.
La fin tragique de l'ordre du Temple marque, à sa façon, I'échec d'une politique de syncrétisme par laquelle l'Eglise aurait voulu, elle qui prétendait s'arroger la fonction souveraine, ou à tout le moins tenir en tutelle la souveraineté au sein de la société médiévale, plier à ses besoins et à ses volontés la fonction guerrière. Le modèle du moine guerrier n'était sans doute pas viable, car porteur d'irrémédiables contradictions internes: même en s'adaptant aux mentalités européennes, le christianisme ne pouvait complètement oublier ses origines, incompatibles avec l'éthique païenne de la chevalerie primitive. Ce n'est pas un hasard si c'est au moment, la fin du Moyen Age, où meurt l'esprit de chevalerie que le christianisme commence enfin à pénétrer réellement dans les consciences (36) .
Mais il reste la puissance du mythe: au-delà des vicissitudes de l'histoire, I'ombre des Templiers peut évoquer aujourd'hui, pour certains, la figure immémoriale des gardiens du Graal.
Pierre Vial
Notes :
- (1) Robert Muchembled, Culture populaire et culture des élites, Flammarion, 1978.
- (2) Nous utilisons ci la terminologie dumézilienne, dont l'application au monde médiéval parait justifiée. Voir Georges Duby, Les trois ordres ou l'imaginaire du féodalisme, Gallimard, 1978.
- (3) Dans un texte célèbre adressé au roi Robert, Adalbéron de Laon, vers 1027-1031 estime que dans une société harmonieuse, «les uns prient, d'autres combattent, d'autres encore travaillent». Claire affirmation de la tripartition fonctionnelle, qui sera reprise par bien d'autres auteurs médiévaux.
- (4) L'expression est de Marc Bloch, dans La société féodale, Albin Michel, 1939.
- (5) Cette filiation est étudiée dans Otto Hofler, Kultische Geheimbünde der Germanen 1934.
- (6) «Essai sur la formation de l'idée de croisade», in Bulletin de littérature ecclésiastique, 1941, 1944, 1953, 1954.
- (7) La colée est un coup porté par celui qui adoube à I’adoubé, sur la nuque ou la joue; coup qui a valeur de test, le futur chevalier doit montrer qu'il sait « encaisser», mais aussi et surtout valeur initiatique, I'ancien transmet au nouveau cette sorte d'influx particulier qui fait des chevaliers des hommes hors du commun, «consacrés» a une mission chargée de sacré.
- (8) Voir G. Duby, « Les laïcs et la paix de Dieu», in Hommes et structures du Moyen Age, Mouton, 1973.
- (9) Le mot est de Jacques Le Goff in Le Moyen Age (1060-1330), Bordas, 1968.
- (10) Victor Carrière, «Les débuts de l’Ordre du Temple en France», in Le Moyen Age, t. XWII, 1914.
- (11) En particulier Matthieu, 26, 52 et ll Corinthiens, 10, 4.
- (12) Jean Michel Hornus, Evangile et labarum. Etude sur l'attitude du christianisme primitif devant les problèmes de l'Etat, de la guerre et de la violence, Genève, 1960.
- (13) De Idol., 9, A. Reifferscheid et G. Wissowa, CCL .
- (14) Stromate IV 8 61, Cl. Mondésert et M. Caster, SCH, 30, 1951.
- (15) En part le pénitenciel de saint Egbert vers 750, celui de Réginon vers 915.
- (16) Par exemple le concile de Reims en 923 et celui de Winchester en 1076
(17) A. Vanderpol La doctrine scolastique du droit de guerre, Paris, 1925.
(18) La cité de Dieu, / 21 et 26, éd. B. Dombart et A. Kalb, CCL, 47, 2 vol., 1955.
(19) Voir H.X. Arquillière, L'augustinisme politique. Essai sur la formation des théories politiques du Moyen Age, Paris 1934.
(20) Registrum, Ill, 61, édit Ewald et Hartmann dans M.G. Epistol.; lettre a la reine Brunehaut: Registrum, Vlll, 4.
(21) Isidore, Sententiae, lib. Ill, cap. 51, dans P.L., t. LXXXIII, col. 723-724. (22) Etienne Delaruelle, op. cité.
(23) Carl Erdmann, Die Entstehung des Kreuzzugsgedankens, Stuttgart, 1935.
(24) Mansi, Concilia, X/ V, 888.
(25) Paul Alphandéry, La chrétienté et l'idée de croisade, 2 vol., Paris, 1954-1959.
(26) Voir Daniel Dubuisson «L'lrlande et la théorie médiévale des «trois ordres», in Revue de I'Histoire des religions, mars 1975. Dubuisson fait le point des controverses suscitées par cette question et apporte des éléments nouveaux, et à notre sens déterminants, quant à la continuité historique du schéma idéologique trifonctionnel,
(27) Marcel Pacaut et Jacques Rossiaud, L'âge roman, Paris 1969.
(28) Dans notre Etude des privilèges pontificaux concédés à l'ordre du Temple (à paraître) nous estimons que restaient en Terre Sainte, à la fin de l'année 1099, 200 à 300 chevaliers et 1000 à 2000 piétons.
(29) Albon Cartulaire général de l'ordre du Temple (1119?-1150), Paris, 1913, n. V.
(30) Le détail de ces privilèges est examiné dans notre Etude des privilèges pontificaux concédés à l'ordre du Temple.
(31) Par ex., I'expression « Veri Israelitae» est utilisée, dans les deux textes, pour désigner et valoriser les Templiers. La meilleure édition du De laude novae militiae se trouve dans J. Leclercq, Sancti Bernardi opera, vol. Ill, Rome, 1963.
(32) (33) (34) Ibid.
(35) Georges Duby, Guerriers et paysans, Paris, 1973, p. 300.
(36) Voir P. Brader, «Une histoire pas très catholique», in Etudes et Recherches n. 1.
Sources : Etudes et Recherches n°2
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